COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 50D
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 02 JUILLET 2015
R.G. N° 15/02064
AFFAIRE :
[N] [E]
C/
[D] [M]
Requête aux fins d'inscription de faux
Appel d'un jugement rendu le 19 Mai 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° Chambre : 2
N° RG : 13/09314
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES
Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-
ROUSSEL-DE CARFORT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DEUX JUILLET DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [N] [E]
né le [Date naissance 1] 1972
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1453917
Représentant : Me Riadh GAFSI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0293 substituant Me Yannick NORMAND de la SCP CJ ALAIN BOT YANNICK NORMAND ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0024
DEMANDEUR A LA REQUETE AUX FINS D'INSCRIPTION DE FAUX
APPELANT
****************
Monsieur [D] [M]
né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 1] (92)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 32114
Représentant : Me Henri JEANNIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0480
DEFENDEUR A LA REQUETE
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mai 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller, et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,
La procédure a été régulièrement communiquée au ministère public le 18 mai 2015
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 3 juillet 2008, [D] [M] a acquis de [N] [E] un bateau au prix de 180.000 euros.
Le 14 novembre 2013, il a fait assigner [N] [E] devant le tribunal de grande instance de Versailles à l'effet d'obtenir à titre principal la résolution de la vente aux torts exclusifs de ce dernier.
Par jugement réputé contradictoire du 19 mai 2014, le tribunal a fait droit à cette demande, a condamné [N] [E] à payer à [D] [M] la somme de 180.000 euros, outre celles de 24.558,88 euros correspondant à des travaux effectués sur le bateau, de 9.884,39 euros au titre du remboursement des aménagements de sécurité, 9.750 euros représentant le montant total d'une indemnité mensuelle due pour l'occupation du domaine public fluvial et celle de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement précité a été signifié le 12 juin 2014 à [N] [E] en l'étude de l'huissier de justice.
[N] [E] a interjeté appel le 19 novembre 2014.
Par conclusions signifiées le 3 février 2015, [D] [M] a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à ce que cet appel soit déclaré irrecevable pour avoir été formé hors des délais légaux.
[N] [E] ayant déposé une requête en inscription de faux le 13 mars 2015, par ordonnance du 13 avril 2015, le conseiller de la mise en état a sursis à statuer sur l'incident formé par [D] [M] dans l'attente de la décision de la cour saisie de cette inscription de faux incidente.
Aux termes de conclusions du 15 avril 2015, [N] [E] demande à la cour de :
déclarer nul et nul effet le procès-verbal et l'assignation du 14 novembre 2013 et le procès-verbal de signification du jugement du tribunal de grande instance de Versailles date du 12 juin 2014,
condamner Monsieur [M] à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Par conclusions du 6 mai 2015, [D] [M] prie la cour de :
déclarer Monsieur [E] mal fondé en sa requête en inscription de faux, l'en débouter,
condamner Monsieur [E] à payer la somme de 3.000 euros à titre d'amende civile en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,
condamner Monsieur [E] à lui payer la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure dilatoire et la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
le condamner aux dépens avec recouvrement direct.
La procédure a été visée par le procureur général près cette cour le 18 mai 2015.
Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
Aux termes de l'article 656 alinéa 1er du code de procédure civile, applicable aux significations délivrées par les huissiers de justice, si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile, et, en vertu de l'article 693, ce qui est prescrit par ce texte est observé à peine de nullité.
Les énonciations relatant des circonstances que l'huissier a pour fonction de certifier font foi jusqu'à inscription de faux, tandis que les mentions relatives aux déclarations des tiers font foi jusqu'à preuve contraire.
Ainsi, font foi jusqu'à inscription de faux, notamment, les mentions d'un acte d'huissier concernant les diligences accomplies pour signifier valablement l'acte.
Dans l'acte de la SCP Louvion Plumel de signification de l'assignation devant le tribunal de grande instance en date du 14 novembre 2013, délivré en l'étude, il est mentionné que le domicile de [N] [E] a été confirmé par le 'locataire au 1er' et la présence de son nom sur la boîte aux lettres et sur l'interphone.
Dans le second acte argué de faux, à savoir l'acte de signification du jugement du tribunal de grande instance de Versailles délivré le 12 juin 2014, l'huissier indique avoir vérifié la certitude du domicile du destinataire caractérisé par les éléments suivants : présence du nom du destinataire sur la boîte aux lettres et sur l'interphone, 'confirmation du domicile par le voisinage'.
[N] [E] soutient que ces deux actes d'huissier sont des faux, l'huissier de justice n'ayant pas pu procéder aux vérifications citées dans les procès-verbaux puisqu'il ne résidait plus à cette adresse depuis l'été 2009.
Pour en justifier, il produit les pièces suivantes :
la copie d'un courrier daté du 14 mai 2009, adressé par [N] [E] et Mlle [S], '[Adresse 3]' au cabinet EGM afin de résilier leur contrat de location à compter du 14 août suivant, pièce dépourvue de force probante s'agissant d'une lettre simple, non accompagnée de son avis de réception, et donc susceptible d'avoir été rédigée pour les besoins de la cause, le bail en cause n'étant même pas produit, pas plus que l'état des lieux de sortie,
la copie d'un contrat de location d'un appartement situé [Adresse 4] par [N] [E] et Mlle [S] prenant effet au 15 juin 2012, et la taxe d'habitation reçue par les intéressés à cette même adresse à payer avant le 17 novembre 2014,
une attestation écrite par [N] [E] et signée de Mme [X], gardienne de l'immeuble situé [Adresse 3], aux termes de laquelle elle indique que [N] [E] et Melle [S] ont quitté l'appartement qu'ils occupaient aux alentours du mois de juillet 2009, qu'ils ont immédiatement été remplacés par d'autres locataires, et qu'elle a remplacé leurs noms sur la boîte aux lettres et sur le digicode par ceux des nouveaux occupants,
la sommation interpellative délivrée à Mme [X] à l'initiative de [D] [M] le 11 mars 2015 aux termes de laquelle celle-ci confirme qu'elle a signé l'attestation précitée, préalablement rédigée par [N] [E], que celui-ci a quitté l'appartement du [Adresse 3] en juillet 2009, et que M.[G] et Mme [I] ont occupé ce logement juste après le départ de [N] [E] et jusqu'en décembre 2014,
une attestation écrite par [N] [E] comportant les mentions suivantes : Je soussignés Monsieur et Madame [I]/[G] déclarent par les présentes être locataires de l'appartement situé au 3ème étage gauche bâtiment [Adresse 5]) depuis la date du 01/08/2009. J'atteste que suite à notre emménagement, la boîte aux lettres ainsi que le digicode, ont été établis à notre nom, et que le nom des anciens locataires a été retiré.
Fait à [Localité 2], le 28/11/2014.
Cette pièce, écrite par [N] [E] ne comporte pas la signature de ses prétendus auteurs, de sorte qu'elle est dépourvue de toute valeur probante.
Il résulte de l'examen de ces pièces que l'attestation de Mme [X] n'est pas recevable en ce qu'elle ne respecte pas une prescription essentielle de l'article 202 du code de procédure civile selon laquelle l'attestation doit être écrite de la main de son auteur. Il ne peut donc être tenu compte que des déclarations faites par l'intéressée dans le cadre de la sommation interpellative, étant observé que dans ce cadre, elle n'a pas confirmé qu'elle avait bien retiré le nom de [N] [E] de la boîte aux lettres et du digicode.
Si [N] [E] justifie avoir conclu un contrat de bail le 7 février 2012, avec Mlle [S] et avoir reçu une taxe d'habitation à l'automne 2014, ce seul élément ne suffit pas à établir que les constatations de la SCP Louvion Plumel s'agissant de la présence, au [Adresse 3], de son nom sur la boîte aux lettres et le digicode, et de la confirmation par le voisinage de l'exactitude de ce domicile comme étant le sien.
En effet, les dires de [N] [E] selon lesquels il aurait définitivement quitté ce logement depuis juillet 2009 sont démentis par ses propres écrits puisqu'il a écrit le 1er juin 2011 à l'expert judiciaire, les 4 novembre 2011 et 18 janvier 2012 au magistrat chargé du contrôle de l'expertise, en se domiciliant précisément au [Adresse 3] et qu'il ne fournit pas la moindre explication sur l'utilisation de cette adresse dans des courriers importants, plus de deux ans après qu'il est supposé avoir définitivement quitté cette adresse.
En conséquence, [N] [E] sera débouté de sa demande en inscription de faux.
[D] [M] sera débouté de sa demande fondée sur l'article 32-1 du code de procédure civile, l'amende civile étant à la seule appréciation de la juridiction saisie.
Il ne justifie pas que la présente procédure lui ait causé un préjudice autre que l'obligation dans laquelle il s'est trouvé d'assurer sa défense. Il sera donc également débouté de sa demande de dommages-intérêts pour procédure dilatoire.
Succombant en sa requête, [N] [E] sera condamné aux dépens de l'instance et au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Déboute [N] [E] de sa demande en inscription de faux,
Déboute [D] [M] de sa demande sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et de sa demande de dommages-intérêts,
Condamne [N] [E] aux dépens, lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne [N] [E] à payer à [D] [M] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,