COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
FL
Code nac : 59B
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 02 FEVRIER 2016
R.G. N° 14/01623
AFFAIRE :
SA CM-CIC FACTOR anciennement dénommée FACTOCIC
C/
SCP [Q] [V] es qualité de liquidateur judiciaire de la société MANUFACTURES DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE -MPDC
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 15 Janvier 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 01
N° Section :
N° RG : 2012F04195
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
-Me Anne laure DUMEAU
-Me Martine DUPUIS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DEUX FEVRIER DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SA CM-CIC FACTOR anciennement dénommée FACTOCIC
N° SIRET : 380 307 413
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Adresse 4]
Représentant : Me Anne laure DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - N° du dossier 41120
Représentant : Me Michel ROULOT de la SELARL ROULOT, DROUOT.ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0535 - substitué par Me DROUOT
APPELANTE
****************
SCP [Q] [V] es qualité de liquidateur judiciaire de la société MANUFACTURES DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE -MPDC
[Adresse 3]
[Adresse 2]
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1453052
Représentant : Me Marie-Paule CHAMBOULIVE, Plaidant, avocat au barreau de BOURGES
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Décembre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François LEPLAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Dominique ROSENTHAL, Président,
Monsieur François LEPLAT, Conseiller,
Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,
Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte signé le 2 avril 1996, la société à responsabilité limitée MPDC (MANUFACTURE DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE) a conclu un contrat d'affacturage avec la société anonyme FACTOCIC, aujourd'hui dénommée CM-CIC FACTOR.
La société anonyme ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE, cliente de la société MPDC, a été dissoute et le liquidateur amiable en a informé tous les créanciers par lettre du 5 août 2003.
La société MPDC a pris une inscription d'hypothèque provisoire le 11 décembre 2003 sur un immeuble appartenant à la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE, sur la base des lettres de changes qu'elle détenait pour la somme de 145.949 euros, et fait assigner au fond cette société devant le tribunal de commerce de Bourges en paiement des lettres de change sus-mentionnées.
Dans le même temps, la société MPDC a demandé à la société FACTOCIC de faire le point sur les factures de la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE qui lui avaient été cédées et qui demeuraient impayées et de prendre toutes mesures de sûreté à l'effet de garantir le recouvrement de sa créance.
D'après la société MPDC, ces demandes sont restées sans effet et de plus, la société FACTOCIC a passé, dès le mois d'août 2003, le montant des créances cédées et impayées (213.716,80 euros) au débit du compte de la société MPDC.
Par jugement du 19 décembre 2003, le tribunal de commerce de Bourges a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société MPDC.
Le contrat d'affacturage a été résilié le 29 décembre 2003.
Le 24 février 2004, la société MPDC a fait assigner la société FACTOCIC en intervention forcée dans la procédure l'opposant à la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE.
L'importance du passif de cette dernière a conduit le tribunal de commerce de Pontoise par jugement du 1er mars 2004 à ouvrir à son encontre une procédure de liquidation judiciaire en désignant Maître [H] [K] comme liquidateur judiciaire.
Par jugement du 25 janvier 2005 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Bourges du 14 novembre 2005, le tribunal de commerce de Bourges a constaté que la société MPDC détenait:
- une créance privilégiée et hypothécaire au passif de TOPIOL pour un montant de 145.949,81 euros au titre des effets de commerce,
- une créance chirographaire d'un montant de 213.716,80 euros correspondant aux factures initialement cédées à FACTOCIC et 38.662 euros correspondant à une traite acceptée par TOPIOL, escomptée par la Banque Hervet mais contrepassée par celle-ci.
La liquidation judiciaire de la société MPDC a été prononcée le 10 février 2006 par jugement du tribunal de commerce de Bourges.
La SCP [Q] [V] ès qualités de liquidateur de la société MPDC affirme que cette procédure n'a trouvé sa source qu'à raison de l'impayé de la société TOPIOL et des manquements de la société FACTOCIC à prendre les mesures de garantie qui s'imposaient ou à restituer à la société MPDC les effets de paiements en sa possession qui lui auraient permis de prendre elle-même les dites mesures.
C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier du 6 novembre 2012, délivré à personne, la SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur de la société MPDC, a fait assigner la société FACTOCIC devant le tribunal de commerce de Nanterre, lui demandant de ;
- Constater que la société FACTOCIC a commis une faute dans la mesure où informée du risque pesant sur le recouvrement des créances détenues sur la société TOPIOL, elle n'a pas fait diligence pour prendre les mesures conservatoires permettant le recouvrement effectif de la créance, ou fournir à MPDC les moyens de prendre lesdites mesures ;
- Constater que le préjudice s'établit au montant des sommes que la société FACTOCIC aurait pu recouvrer si elle avait pris une inscription d'hypothèque, ou si elle avait restitué les effets de commerce détenus à la société MPDC pour lui permettre d'agir en ses lieux et place ;
- Constater que le préjudice de la société MPDC s'élève à la somme de 213.716,80 euros ;
En conséquence,
- condamner la société FACTOCIC à payer à la SCP [Q] [V] ès qualités la somme de 213.716,80 euros à titre de dommages et intérêts ;
- La condamner au paiement de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- La condamner aux entiers dépens ;
- Ordonner l'exécution provisoire.
Par jugement entrepris du 15 janvier 2014 le tribunal de commerce de Nanterre a :
Condamné la société CM-CIC FACTOR (anciennement dénommée FACTOCIC) à payer à la SCP [Q] [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MANUFACTURE DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE - MPDC la somme de 137.716,80 euros à titre de dommages et intérêts, déboutant du surplus ;
Débouté la société CM-CIC FACTOR de sa demande reconventionnelle ;
Condamné la société CM-CIC FACTOR à payer à la SCP [Q] [V] es-qualités de liquidateur de SARL MANUFACTURES DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE - MPDC la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ordonné l'exécution provisoire de ce jugement sans constitution de garantie ;
Condamné la société CM-CIC FACTOR aux entiers dépens.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 28 février 2014 par la société CM-CIC FACTOR ;
Vu les dernières écritures en date du 27 août 2014 par lesquelles la société CM-CIC FACTOR demande à la cour de :
A titre principal :
Vu l'ordonnance d'admission définitive de la créance de la Société CM-CIC FACTOR (anciennement dénommée FACTOCIC) au passif de la Société MPDC en date du 18 janvier 2005,
Accueillir la fin de non-recevoir de la Société CM-CIC FACTOR (anciennement dénommée FACTOCIC) à l'égard de l'ensemble des demandes formulées par la SCP [Q] [V], Es-qualités, à son encontre.
Déclarer irrecevables les demandes formulées par la SCP [Q] [V], Es-qualités, à rencontre de la Société CM-CIC FACTOR (anciennement dénommée FACTOCIC).
Infirmer en conséquence le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Débouter la SCP [Q] [V], Es-qualités, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, notamment de son appel incident.
A titre subsidiaire :
Dire et juger que CM-CIC FACTOR ne s'est pas montrée défaillante (dans) la gestion de la créance litigieuse.
Infirmer en conséquence le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Débouter la SCP [Q] [V], Es-qualités, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
A titre très subsidiaire :
Limiter la condamnation de CM-CIC FACTOR à la somme de 13.295,73 euros.
Infirmer en conséquence le jugement entrepris pour le surplus des condamnations prononcées.
Débouter la SCP [Q] [V], Es-qualités, du surplus de ses demandes, fins et conclusions.
Infirmant et déboutant la SCP [Q] [V], Es-qualités, pour le surplus.
Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Dire qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la Société CM-CIC FACTOR (anciennement dénommée FACTOCIC) les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager afin d'assurer la défense de ses intérêts.
En conséquence, condamner la SCP [Q] [V] à payer à la Société CM-CIC FACTOR (anciennement dénommée FACTOCIC) la somme de 7.000 euros, outre tous dépens, avec faculté de recouvrement au profit de Maître Anne-Laure DUMEAU, Avocat, en application des dispositions de Particle 699 du Code de Procédure Civile.
Vu les dernières écritures en date du 1er juillet 2014 au terme desquelles la SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MPDC, demande à la cour de :
Rejeter l'appel formé par CM CIC FACTOR
Constater que la société CM CIC FACTOR a commis une faute dans la mesure où informée du risque pesant sur le recouvrement des créances détenues sur la Société TOPIOL, elle n'a pas fait diligence pour prendre les mesures conservatoires permettant le recouvrement effectif de la créance, ou fournir à MPDC les moyens de prendre les dites mesures.
Constater que le préjudice s'établit au montant des sommes que la société CM CIC FACTOR aurait pu recouvrer si elle avait pris une inscription d'hypothèque, ou si elle avait restitué les effets de commerce détenus à la Société MPDC pour lui permettre d'agir en ses lieux et place.
Constater que le préjudice de la Société MPDC s'élève à la somme de 213 716.80 euros.
Recevant le concluant son appel incident
Condamner la société CM CIC FACTOR à payer à la SCP [Q] [V] es qualité la somme de 213.716.80 euros à titre de dommages et intérêts.
La condamner au paiement de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure Civile.
La condamner aux entiers dépens.
Dire que les dépens pourront être directement recouvrés par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la fin de non-recevoir opposée par la société CM-CIC FACTOR :
La société CM-CIC FACTOR oppose à la SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur de la société MPDC, une fin de non-recevoir tirée de la chose jugée qui serait attachée à l'ordonnance du juge commissaire du 18 janvier 2005.
En effet, pour les créances des clients de la société MPDC qui ont fait l'objet du contrat d'affacturage avec elle, notamment celle de la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE pour un montant cumulé de 213.716,80 euros, elle estime qu'elles ont été validées par le juge commissaire dans cette ordonnance, ce qui ne permet plus aujourd'hui à la SCP [Q] [V], ès qualités, de la remettre en cause.
A cet égard, l'article 1351 du code civil édicte que : L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
La SCP [Q] [V] rétorque à bon droit à la société CM-CIC FACTOR que l'instance qui les a opposées devant le juge commissaire ne portait que sur l'admission de la créance au passif de la société MPDC et non sur sa responsabilité civile de factor et qu'une des conditions d'application de l'article 1351 du code civil précité n'est donc pas remplie.
Par substitution de motifs, la cour confirmera donc le jugement sur ce point.
Sur la responsabilité de la société CM-CIC FACTOR :
La SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MPDC, tient la société CM-CIC FACTOR pour responsable de ne pas avoir été diligente pour recouvrer les créances qu'elle détenait par subrogation sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE, alors qu'elle-même a agi pour que soient prises des mesures conservatoires à l'encontre de cette société pour les créances qu'elle ne lui avait pas confiées.
Elle estime que la société CM-CIC FACTOR a été avisée, dès le 5 août 2003 par maître [B] [N], mandataire ad'hoc de la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE des risques pesant sur le recouvrement des créances subrogées de ce client, qu'elle n'a pris aucune mesure conservatoire et que bien plus, elle a refusé de restituer à la société MPDC les titres qu'elle détenait sur ce même client, l'empêchant ainsi d'agir directement dans ce sens.
La société CM-CIC FACTOR indique, pour sa part, que sa prétendue faute ne doit pas s'apprécier à l'aune de la réussite inhabituelle du recouvrement de la créance détenue directement par la société MPDC sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE grâce à l'inscription d'une hypothèque dans les semaines ayant précédé la déclaration de cessation de paiement, dont une fixation à une date antérieure aurait entraîné la nullité, par application de l'article L.632-1 du code de commerce, mais des mesures qu'elles a été amenée à prendre.
Elle mentionne, à cet égard un courrier du 21 août 2003 par lequel la société MPDC l'a informée d'un problème de qualité apparu, nécessitant un retraitement de marchandises, courrier dans lequel elle lui demandait expressément de bien vouloir proroger les traites de la société TOPIOL FRÈRES ET CIE, avant de l'informer, dans une volte-face, le 23 septembre 2003, que les retards de paiements de la société TOPIOL [étaient] dus uniquement à la mauvaise foi de Mr TOPIOL qui a prétexté une mauvaise qualité des marchandises.
La société CM-CIC FACTOR expose que, dans ce contexte, elle a mandaté la société de recouvrement EULER-SFAC, qui, par courrier du 14 novembre 2003, lui a transmis la proposition de règlement amiable de Maître [B] [N], liquidateur amiable de la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE à hauteur de 50% de la dette, la société MPDC n'ayant toujours pas pris position sur cette proposition au 18 décembre 2013.
Elle ajoute avoir fait assigner la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE, en référé, le 12 février 2004, soit six jours avant la déclaration de cessation de paiement, intervenue le 18 février 2004, ramenée au 4 février 2004 par le tribunal de commerce, puis déclaré sa créance à la liquidation judiciaire de cette société, le 30 mars 2014, consécutivement à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 1er mars 2004.
Estimant qu'il est parfaitement inhabituel d'inscrire une hypothèque dans un tel contexte, la société CM-CIC FACTOR dit ne pas avoir failli à ses obligations professionnelles, avoir agi avec diligence et prudence et être ainsi exempte de tout reproche.
La cour relève toutefois que dès le 5 août 2003, Maître [B] [N], mandataire ad'hoc de la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE, dans un courrier qu'elle ne conteste pas avoir reçu à titre de créancier, l'informait des importantes difficultés de trésorerie à laquelle l'entreprise était confrontée, de sa liquidation amiable envisagée et la priait de ne pas engager de poursuites pour pratiquer des saisies visant au recouvrement de [sa] créance, car celles-ci compromettraient le fragile équilibre de trésorerie et la poursuite de l'activité.
Dans ces conditions, ce professionnel du recouvrement de créances ne peut utilement invoquer les échanges qu'il a eus avec la société MPDC pour justifier de son retard à agir, à tout le moins à titre conservatoire, comme sa cliente l'a elle-même fait pour les créances qu'elle ne lui avait pas subrogées ou bien évoquer le caractère inhabituel d'une inscription hypothécaire à l'approche d'une procédure collective, alors que son coût, de 1.500 euros est à mettre au regard du montant de la créance non recouvrée de 213.716,80 euros et alors qu'elle a elle-même déclaré sa créance à la liquidation judiciaire de la société MPDC, le 26 janvier 2004, avant d'actionner la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE en paiement, le mois suivant.
Le jugement qui a retenu la responsabilité de la société CM-CIC FACTOR pour son manque fautif de diligences sera donc confirmé sur ce point.
Sur le préjudice :
La SCP [Q] [V] soutient que le préjudice de la société MPDC est égal au montant de la créance pour laquelle le factor n'a pris aucune garantie, soit la somme de 213.716,80 euros.
Elle fait valoir que sa propre créance directe sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE a été admise à concurrence de 145.949,81 euros à titre hypothécaire et privilégiée au passif de cette société et recouvrée intégralement grâce à cette inscription hypothécaire, alors que l'autre créance de 213.716,80 euros n'a été admise qu'à titre chirographaire, la société CM-CIC FACTOR ne lui ayant pas permis de recouvrer cette autre créance en ayant refusé de lui restituer les effets qu'elle détenait sur cette société, étant observé que la vente de l'immeuble sur lequel a été inscrit l'hypothèque à été réalisée à hauteur de 2.350.000 euros, laissant une somme de 546,471 euros disponible pour le règlement des créanciers hypothécaires.
La SCP [Q] [V] ajoute que c'est à tort que le tribunal a déduit de cette somme celle de 76.000 euros au titre du fonds de garantie, dont elle indique que l'article 8 du contrat d'affacturage lui assurait le reversement en fin de contrat.
Mais la société CM-CIC FACTOR lui rappelle exactement les stipulations de l'article 7 du contrat d'affacturage, selon lesquelles : les sommes que nous vous paierons en vertu du présent contrat et celles que vous nous devrez entreront en compte courant de sorte que nos dettes et créances réciproques, connexes et indivisibles, se traduiront en articles de débit et de crédit, et, de convention expresse, se compenseront entre elles.
La cour relève ainsi que, d'une part, c'est bien une créance en compte courant de 124.421,07 euros au profit de la société CM-CIC FACTOR qui a été admise au passif de la société MPDC par le juge commissaire dans son ordonnance du 18 janvier 2005, et non la créance de 213.716,80 euros sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE en tant que telle et que, d'autre part, cette admission n'a fait l'objet d'aucune contestation de la part de la SCP [Q] [V] en application de l'article R.624-7 du code de commerce.
Par ailleurs, la SCP [Q] [V] ne peut sérieusement prétendre que le fonds de garantie devait nécessairement lui revenir en fin de contrat, puisque son objet même était de compenser le solde débiteur éventuel du compte courant. En tout état de cause la société CM-CIC FACTOR fait valoir que ce n'est pas à ce titre que la somme de 76.000 euros a été déduite de cette créance de 213.716,80 euros sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE, mais à celui de la garantie dont elle bénéficiait sur ce débiteur cédé.
La cour relève en outre que même si cela n'est pas une circonstance exonératoire de la responsabilité de la société CM-CIC FACTOR, le courrier sus-évoqué du 21 août 2003 dans lequel la société MPDC lui demande de proroger les traites de la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE en constitue néanmoins une atténuation.
De même doit-il être relevé la tardiveté de l'inscription hypothécaire que la société MPDC elle-même n'a sollicité pour ses propres créances sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE que le 18 décembre 2013,alors qu'elle était aussi informée depuis août 2013 des difficultés de trésorerie de cette société et du projet de sa liquidation amiable. Au surplus, il n'est justifié d'aucune demande de restitution par la société MPDC à la société CM-CIC FACTOR des effets qu'elle détenait sur la société ÉTABLISSEMENTS TOPIOL FRÈRES ET COMPAGNIE antérieurement à lettre de résiliation du contrat d'affacturage du 2 décembre 2003.
En tout état de cause le préjudice dont la SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MPDC peut se prévaloir de la faute de la société CM-CIC FACTOR ne saurait être que celui d'une perte de chance qui se résoudra justement par l'allocation d'une somme de 50.000 euros, le jugement étant réformé en ce sens.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement entrepris du tribunal de commerce de Nanterre du 15 janvier 2014, sauf en ce qu'il a condamné la société anonyme CM-CIC FACTOR, anciennement dénommée FACTOTIC, à payer à la SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MANUFACTURE DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE - MPDC la somme de 137.716,80 euros de dommages et intérêts,
Et statuant à nouveau,
CONDAMNE la société anonyme CM-CIC FACTOR à payer à la SCP [Q] [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MANUFACTURE DE PLUMES ET DE DUVET DU CENTRE - MPDC la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts,
REJETTE toutes autres demandes,
Et y ajoutant,
REJETTE toutes autres demandes,
CONDAMNE la société anonyme CM-CIC FACTOR aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct, par application de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,