COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
FS
Code nac : 30B
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 SEPTEMBRE 2016
R.G. N° 15/00123
AFFAIRE :
[A] [O] [V] [Y] [L]
...
C/
SCI SOVI
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 11 Décembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° Chambre : 08
N° Section :
N° RG : 12/06179
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Jean-marie PINARD
Me Isabel PLO-FAROUZ
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L]
de nationalité Marocaine
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentant : Me Jean-marie PINARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 130 - N° du dossier 8698
Représentant : Me Agesilas MYLONAKIS de la SELEURL AGESILAS MYLONAKIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1197 - substitué par Me CHAUSSIN-POUJARDIEU
Monsieur [B] [L] venant aux droits de son père Mr [A] [L]
né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 2] (MAROC)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentant : Me Jean-marie PINARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 130 - N° du dossier 8698
Représentant : Me Agesilas MYLONAKIS de la SELEURL AGESILAS MYLONAKIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1197
- substitué par Me CHAUSSIN-POUJARDIEU
Monsieur [Q] [O] [N] [H]
de nationalité Marocaine
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentant : Me Jean-marie PINARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 130 - N° du dossier 8698
Représentant : Me Agesilas MYLONAKIS de la SELEURL AGESILAS MYLONAKIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1197
- substitué par Me CHAUSSIN-POUJARDIEU
Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de son père Monsieur [A] [K] décédé le [Date décès 1]2003
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 2] (MAROC)
de nationalité Marocaine
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3] MAROC
Représentant : Me Jean-marie PINARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 130 - N° du dossier 8698
Représentant : Me Agesilas MYLONAKIS de la SELEURL AGESILAS MYLONAKIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1197 - substitué par Me CHAUSSIN-POUJARDIEU
Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [J] [M]
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 2] MAROC
de nationalité Marocaine
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3] MAROC
Représentant : Me Jean-marie PINARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 130 - N° du dossier 8698
Représentant : Me Agesilas MYLONAKIS de la SELEURL AGESILAS MYLONAKIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1197 - substitué par Me CHAUSSIN-POUJARDIEU
Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [X] [K]
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 2] MAROC
de nationalité Marocaine
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3] MAROC
Représentant : Me Jean-marie PINARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 130 - N° du dossier 8698
Représentant : Me Agesilas MYLONAKIS de la SELEURL AGESILAS MYLONAKIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1197 - substitué par Me CHAUSSIN-POUJARDIEU
APPELANTS
****************
SCI SOVI
N° SIRET : 481 587 194
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabel PLO-FAROUZ, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 225
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Mai 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Dominique ROSENTHAL, Président,
Monsieur François LEPLAT, Conseiller,
Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,
Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,
Par contrat en date du 29 septembre 1992, Monsieur [A] a renouvelé à compter du 1er juillet 1992 le bail des locaux à usage d'hôtel meublé situés [Adresse 1] au profit de Monsieur [A] [K], Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L] et Monsieur [Q] [O] [N] [H].
Suite au congé avec offre de renouvellement notifié le 22 mars 2000 par Monsieur [A] aux preneurs, la cour d'appel a dans un arrêt du 11 janvier 2007 fixé le montant du loyer renouvelé à compter du 1er juillet 2001 à la somme annuelle de 19.587,42€.
Un avenant de révision a été ensuite conclu entre la SCI SOVI, ayant acquis les locaux le 25 septembre 2007, et Monsieur [M] [G] [K], Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L] et Monsieur [Q] [O] [N] [H] en date du 29 juillet 2008 fixant le loyer annuel à compter du 30 janvier 2008 à la somme de 22.720€ HT/HC.
Par actes d'huissier des 17 et 19 novembre 2009, la SCI SOVI a donné congé pour le 30 juin 2010 sans offre de renouvellement et avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction, à Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], à Monsieur [Q] [O] [N] [H] et à Madame [J] [M], Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K], tous trois venant, suivant acte d'hérédité du 26 janvier 2006, aux droits de Monsieur [A] [K], décédé le [Date décès 2] 2003.
Sur demande de la SCI SOVI, le juge des référés de Nanterre a ordonné le 7 avril 2010 une mesure d'expertise aux fins de déterminer le montant de l'indemnité d'éviction et de l'indemnité d'occupation. Le rapport d'expertise de Monsieur [Q] a été déposé le 15 décembre 2011.
La SCI SOVI a alors fait assigner par actes d'huissier du 29 mai 2012 Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H] et Madame [J] [M], Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K] devant le tribunal de grande instance de Nanterre en fixation de l'indemnité d'éviction et de l'indemnité d'occupation
Elle a ensuite fait délivrer le 17 février 2014 par acte d'huissier visant la clause résolutoire commandement à Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L] et à Monsieur [Q] [O] [N] [H] d'avoir à justifier d'une assurance dans le délai d'un mois.
Monsieur [B] [L] est intervenu, comme venant aux droits de son père, Monsieur [A] [L] selon donation entre vifs du 10 décembre 1999, à la procédure devant le tribunal par conclusions en date du 6 février 2013.
Par jugement en date du 11 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Nanterre:
- Déboute la SCI SOVI de sa demande afin de se voir réserver le droit de résilier le bail sans versement d'une indemnité d'éviction en l'absence de production de l'assurance de l'immeuble et s'il est établi que celui-ci ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état,
- Déboute Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Madame [J] [M], Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K] de leurs demandes de délais pour assurer l'immeuble et de suspension des effet de la clause résolutoire visée dans le commandement du 17 février 2014,
Vu les articles L. 145-14 et L.145-28 du code de commerce,
- Condamne la SCI SOVI à verser à Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Madame [J] [M], Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K] au titre de l'indemnité d'éviction la somme de 262.684€,
- Condamne solidairement Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Madame [J] [M]. Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K] à verser à la SCI SOVI au titre de l'indemnité d'occupation due à compter du 1er juillet 2010 et jusqu'à libération des lieux la somme de 23.625€ hors taxes et hors charges par an, soit 1.968,75€par mois,
- Déboute Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L] Monsieur [B] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Madame [J] [M], Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K] de leurs autres demandes,
- Condamne la SCI SOVI à verser à Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L] Monsieur [Q] [O] [N] [H], Madame [J] [M], Madame [X] [K] et Monsieur [M] [G] [K] la somme de 4.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- Ordonne l'exécution provisoire du jugement dans toutes ses dispositions,
- Condamne la SCI SOVI aux dépens qui comprendront les frais d'expertise et qui seront recouvrés par la SELARL AGESILAS MYKOLANIS, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le 6 janvier 2015, Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L] venant aux droits de son père, Monsieur [A] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de son père Monsieur [A] [K], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [J] [M], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [X] [K] ont interjeté appel de la décision.
Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 6 avril 2016, Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L] venant aux droits de son père, Monsieur [A] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de son père Monsieur [A] [K], décédé le [Date décès 2] 2003 et venant aux droits de Madame [J] [M] et de Madame [X] [K] demandent à la cour, vu les conclusions valant opposition au commandement notifié par le bailleur en date du 17 février 2014, vu les articles L.145-41 du code de commerce et 1244-1 du code civil, de:
- Confirmer le jugement entrepris qui a débouté la SCI SOVI de sa demande de réserve,
Subsidiairement:
- Constater que cette demande est devenue sans objet,
Vu l'article L.145-14 du code de commerce,
Vu le rapport d'expertise de Monsieur [K] [Q],
- Débouter la SCI SOVl de toutes demandes fins et conclusions et,
- Fixer les indemnités revenant aux consorts [K] - [H] comme suit:
* indemnité principale: 363.051€,
* indemnité de remploi: 36.305€,
* trouble commercial; 16.880€,
* indemnité de licenciements sur justificatifs,
* frais sociaux et déménagement: 14.000€,
* travaux de mise en conformité: 69.537,89€,
soit un total de 499.773,89€,
- Condamner la SCI SOVl à payer la somme qui précède à l'indivision [K] - [H],
- Fixer l'indemnité d'occupation à 23.625€ avant abattement de 20 % pour précarité et déduction de l'impôt foncier,
- Condamner la SCI SOVl à payer aux consorts [K] - [H] la somme de 15.000€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais d'expertise et qui seront recouvrés par Maître Jean- Marie PINARD, Avocat au Barreau de Versailles, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 17 mai 2015, la SCI SOVI prie la cour de:
- Infirmer la décision rendue par le tribunal de grande instance de Nanterre le 11 décembre 2014,
Statuant à nouveau
A titre préliminaire:
Vu le contrat de bail
Vu l'article L.145-17 du code du commerce
L'article 7 G de la Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 modifié par LOI n° 2010-788 du 12 juillet
2010 - art. 10
- Dire que la SCI SOVI se réserve le droit de résilier le bail sans règlement d'une indemnité
d'éviction :
* en l'absence de production de l'assurance de l'immeuble
* s'il est établi que l'immeuble ne peut plus être occupé sans danger en raison de son
état,
Sur l'indemnité d'éviction :
A titre principal:
- Débouter Monsieur [L] [A] [O] [V] [Y], Monsieur [L] [B], Monsieur [H] [Q] [O] [N], Madame [M] [J], Madame [K] [X], Monsieur [K] [M] [G] de leur demande au titre de l'indemnité principale et subsidiairement fixer celle-ci à la somme de 47.250 € ;
- Débouter Monsieur [L] [A] [O] [V] [Y], Monsieur [L] [B] , Monsieur [H] [Q] [O] [N], Madame [M] [J], Madame [K] [X], Monsieur [K] [M] [G] de toutes leurs demandes au titre des indemnités accessoires,
A titre subsidiaire:
- Dire que l'indemnité d'éviction ne saurait être supérieure à la somme de 47.250 €,
- Désigner tel séquestre répartiteur qu'il lui plaira, avec pour mission de procéder à la
répartition des sommes, compte tenu des oppositions pratiquées et des inscriptions grevant le
fonds,
Sur l'indemnité d'occupation :
- Fixer l'indemnité d'occupation due à compter du 1er juillet 2010 à la somme annuelle de
23.625 € hors taxes et hors charges ;
- Condamner solidairement Monsieur [L] [A] [O] [V] [Y], Monsieur [L] [B], Monsieur [H] [Q] [O] [N], Madame [M] [J], Madame [K] [X], Monsieur [K] [M] [G] au paiement de la somme de 45.281,25 € hors taxes et hors charges au titre de l'indemnité d'occupation pour la période du
1er juillet 2010 au 31 mai 2012 ;
- Condamner les mêmes solidairement au paiement de la somme de 1.968,75 € hors taxes et
hors charges par mois à compter du 1er juin 2012 et jusqu'à libération effective,
- Les condamner solidairement au paiement de la somme de 10.000 € sur le fondement de
l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions des parties et au jugement déféré conformément à l'article 455 du du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 avril 2016 et l'affaire a été plaidée à l'audience du 10 mai 2016.
MOTIFS
Sur la demande préliminaire de la SCI SOVI:
La SCI SOVI fait valoir l'absence par les preneurs de justificatifs de l'assurance des locaux loués ainsi que l'état de vétusté de l'immeuble du fait de l'absence totale d'entretien par les locataires pour que soit réservé son droit de résilier le bail sans aucune indemnité d'éviction sur ces deux fondements.
Les appelants s'opposent à la demande, expliquant avoir justifié de l'attestation d'assurance des locaux pour les années 2014, 2015 jusqu'au 1er mars 2016, et faisant valoir que l'ordonnance de référé rendue le 31 octobre 2012 indique qu'aucune disposition légale ou conventionnelle ne met à la charge du preneur l'obligation de mise aux normes des installation.
Si certes la SCI SOVI a délivré le 17 février 2014 par acte d'huissier commandement visant la clause résolutoire à Monsieur [A] [K], décédé, Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L] et à Monsieur [Q] [O] [N] [H] d'avoir à justifier d'une assurance contre les risques locatifs dans le délai d'un mois, la cour constate qu'elle n'en a cependant tiré aucune conséquence, n'introduisant aucune procédure en acquisition de la clause résolutoire de ce chef. De même si la SCI SOVI soutient que les preneurs n'ont pas satisfait à leurs obligations de réparations et d'entretien locatives et produit des pièces à cet effet, elle n'a diligenté aucune procédure en résiliation du bail sur le fondement de l'état de vétusté des locaux du fait de l'absence totale d'entretien.
En tout état de cause, la demande de réserve telle que formulée par la SCI SOVI n'est pas susceptible de conférer un droit à la partie qui la sollicite, et c'est dès lors à juste titre que le tribunal a rejeté sa demande.
Sur l'indemnité d'éviction:
L'article L 145-14 du Code de Commerce mentionne que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement. Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.
* l'indemnité principale:
Les appelants sollicitent l'infirmation du jugement sur le montant de l'indemnité principale, et demandent la somme de 363.051€ en expliquant que la valorisation de leur fonds de commerce doit prendre en compte l'application d'un coefficient de 4,5 sur la moyenne du chiffre d'affaires des trois dernières années.
La SCI SOVI s'oppose à toute demande en paiement de l'indemnité principale, faisant valoir que les preneurs n'ont pas produit les documents fiscaux indispensables à l'évaluation du fonds de commerce, que l'attestation de l'expert comptable qui fait état d'une société de fait est insuffisante, que le fait de se prétendre sous le régime micro BIC ne les dispense pas de tenir une comptabilité. Elle estime que seule la valeur locative ne souffre pas de discussion et sollicite subsidiairement la fixation de l'indemnité principale à deux annuités de la valeur locative.
L'indemnité principale est soit une indemnité de remplacement si l'éviction fait perdre au locataire son activité soit une indemnité de déplacement ou de transfert si le locataire peut transférer son activité sans perdre de clientèle.
L'indemnité de remplacement est en principe égale à la valeur marchande du fonds de commerce déterminée suivant les usages de la profession souvent selon le chiffre d'affaires moyen au cours des trois dernières années et avec ou sans TVA suivant les usages et affecté d'un coefficient d'usage selon la profession.
L'expert expose que l'immeuble en cause est situé au [Adresse 1] dans un secteur animé entre la [Adresse 4] et le marché journalier sur le [Adresse 5], que l'emplacement et la situation locale sont favorables pour un hôtel, non homologué tourisme. Après avoir indiqué que l'hôtel à l'enseigne [Localité 5] HÔTEL a une capacité de 25 chambres, que l'immeuble de cinq étages comprend cinq chambres par étage, que l'état de l'immeuble, correct sur la rue, est vétuste sur la cour, que les chambres, dont trois ne sont plus utilisées à la location car jugées administrativement impropres à cet usage, ont un état global compris entre passable et vétusté, l'expert relève que son classement n'est pas vérifiable tout en notant que cela n'a pas d'incidence sur la valeur marchande du fonds et qu'il n' y a pas de personnel. Constatant qu'il n'y a pas de possibilité de transfert du fonds dans un immeuble offrant des caractéristiques similaires à proximité, l'expert en déduit que l'indemnité principale sera basée sur la valeur marchande du fonds. À défaut d'élément contraire produit par les parties, la cour retiendra que l'indemnité principale sera une indemnité de remplacement du fonds.
L'expert déclare s'être fondé sur l'attestation de Monsieur [U], expert comptable et commissaire aux comptes qui a indiqué les chiffres d'affaires communiqués par un des preneurs pour ses déclarations fiscales, pour retenir un chiffre d'affaires médian de 77.107€ et un coefficient de 3% qui a pris en compte les caractéristiques de l'exploitation et les nouvelles normes en matière d'hôtellerie ( pages 19 et 20).
Les deux parties contestent ce montant. Les appelants, qui n'ont produit en cours d'expertise que l'attestation de Monsieur [U] sans produire les données comptables de l'exploitation à l'expert malgré les demandes de celui-ci, demandent de retenir un chiffre d'affaires moyen sur les trois dernières années de 80.678€ HT auquel ils appliquent un coefficient de 4,5. Ils ne produisent cependant pas d'élément pour étayer le chiffre d'affaire moyen allégué, qui vient infirmer les données chiffrées retenues par leur expert comptable pour la déclaration fiscale d'un des preneurs, et ils ne justifient pas plus de l'application d'un coefficient de 4,5 qui est exorbitant au regard tant de l'état de l'immeuble que des nouvelles normes en matière d'hôtellerie qui s'imposent pour tout hôtel meublé et qui ne sont pas en l'état appliquées.
De même, la SCI SOVI n'apporte pas d'élément probant permettant de remettre en cause les données de l'expert comptable, Monsieur [U], l'absence de justificatifs des preneurs sur leur situation juridique et comptable étant insuffisante à cet égard et la prise en compte de la valeur locative comme sollicitée par la bailleresse inopérante pour calculer la valeur de remplacement du fonds. Il n'y a pas lieu non plus de retenir un coefficient de 2% argué par la SCI SOVI, alors qu'il n'est pas démontré que l'hôtel est inhabitable.
Il s'ensuit de ces éléments que la décision du tribunal qui a fixé l'indemnité principale à la somme de 77.107€ x3 soit 231.324€ arrondi à 231.000€ sera confirmée.
* les indemnités accessoires:
** l'indemnité de remploi:
A ce titre, les appelants réclament la somme de 36.305€ tandis que la SCI SOVI oppose le fait qu'il n'y a pas de réinstallation.
L'indemnité de remploi vise à payer les frais engagés pour trouver un local équivalent. Elle est destinée à couvrir les frais et droits de mutation, de négociation et de recherches pour un fonds de même valeur et doit être estimée à un montant de 10% de l'indemnité principale.
A partir du moment où la SCI SOVI ne justifie pas que les preneurs ne vont pas se réinstaller, elle est due. Cette indemnité de remploi est donc de 23.100€.
** l'indemnisation du trouble commercial:
Les appelants demandent à ce titre la somme de 16.880€ en prenant en compte deux mois de chiffre d'affaires vu l'ancienneté de l'exploitation qui dure depuis 20 ans, tandis que la SCI SOVI s'oppose à la demande en faisant valoir l'incapacité des preneurs de justifier de leur chiffre d'affaires.
Cette indemnité a pour objet de réparer le préjudice causé par la perturbation dans l'exploitation du fonds due au non renouvellement du bail, du fait de la gestion de l'éviction et de la recherche d'un nouveau local. Ce préjudice est apprécié au cas par cas en se référant le plus souvent à l'excédent brut d'exploitation moyen des trois dernières années.
En l'espèce, l'expert a retenu un mois du dernier chiffre d'affaires HT de 2010 qui est attesté par Monsieur [U]. Les parties ne justifiant pas d'élément contraire, il conviendra de retenir la somme de 6.584€.
** l'indemnisation pour frais de déménagement:
Les appelants demandent la somme de 10.000€ à ce titre. La SCI SOVI conteste cette demande.
L'expert indique que le locataire ne lui a pas transmis de devis de déménagement et retient une somme forfaitaire de 1.000€.
Certes les appelants ne produisent pas de devis de déménagement. Cependant les frais de déménagement du mobilier et du matériel s'induisent de l'éviction même et sont donc dus. La cour retiendra le montant de 1.000€, à défaut d'autre élément probant.
** l'indemnité pour frais administratifs:
Les appelants sollicitent sur ce point la somme de 4.000€, ce à quoi s'oppose la SCI SOVI.
L'expert a estimé forfaitairement le montant de ces frais à la somme de 1.000€. Il convient de retenir cette somme qui parait justifié eu égard aux démarches nécessaires à accomplir du fait du changement d'adresse.
** l'indemnité pour frais de licenciement:
Les appelants indiquent que cette indemnité pourrait éventuellement concerner une femme de ménage sur justificatif.
L'expert a relevé l'absence de personnel dans l'hôtel et les appelants ne justifient pas de l'emploi d'une femme de ménage. Ils seront donc déboutés de leur demande sur ce fondement.
Sur l'indemnité d'occupation:
Les appelants demandent l'application d'un coefficient de 20% au montant retenu par l'expert pour tenir compte de la précarité et de l'impôt foncier. La SCI SOVI déclare ne pas contester l'évaluation de l'expert.
L'article L 145-28 du Code de Commerce dispose qu'aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue. Jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation.
En application de cet article, l'indemnité d'occupation doit correspondre à la valeur locative et non au dernier état du loyer.
L'expert considère que l'indemnité d'occupation peut être estimée du 1er juillet 2010 jusqu'à la libération effective des lieux à la somme annuelle en principal de 23.625€. Les appelants n'ont pas produit à l'expert des éléments sur l'impôt foncier et ils ne font pas plus devant la cour. Il convient par contre de tenir compte de la précarité des locataires évincés tenant à la longueur du délai de préavis.
Aucun élément particulier n'étant produit pour caractériser un abattement particulier de 20%, il convient donc d'affecter à la somme annuelle retenue par l'expert et non contestée par les parties, un coefficient de 10%. Par conséquent, les preneurs seront redevables de la somme de 23.625€ x 0,90 = 21.262,50€ arrondi à 21.262€ par an HT et HC.
Sur la demande en paiement des travaux de conformité:
Les appelants demandent le remboursement des travaux de mise en conformité à hauteur de la somme de 69.537,89€. La SCI SOVI, qui indique que dans leurs conclusions devant le tribunal les preneurs avaient sollicité la somme globale 471.142,03€ comprenant des travaux de mise en conformité pour un montant de 41.188,03€, conteste cette demande.
L'expert n'a pas été missionné sur ce point, il a seulement constaté la vétusté de l'immeuble sur cour, des chambres et réserves à l'arrière de l'immeuble dans la cour cimentée et de leur non utilisation tout en indiquant également que la façade sur rue était correcte, que l'état des chambres était de passable à vétuste. Aucun élément n'est produit dans le cadre de l'expertise sur l'état des installations et leur mise en conformité.
Le contrat de bail du 29 septembre 1992 indique que les preneurs prendront les locaux dans l'état où ils se trouveront lors de leur entrée en jouissance et les rendront en fin de bail en bon état de réparations locatives, et mentionne dans son article 5 que les preneurs 'paieront toutes réparations aux compteurs, au tuyautage, et aux fils conducteurs et à l'entretien de toutes canalisations même celles d'égout, leur renouvellement s'il devenait nécessaire fusse pour cause de gelée ou de vétusté. Ils entretiendront en parfait état de fonctionnement les appareils et tuyauteries de chauffage central'.
Alors que l'ordonnance de référé du 31 octobre 2012 a rejeté la demande des preneurs de faire réaliser par la bailleresse des travaux de mise en conformité électrique à défaut de toute injonction administrative, qu'aucune explication complémentaire n'a été apportée devant le tribunal, ces derniers ne justifient pas plus devant la cour, au vu de l'état de vétusté des locaux loués qui n'ont pas été entretenus, ce qui a été mis en évidence par le rapport d'architecte établi le 26 juin 2012, que les travaux qu'ils ont effectués ressortent principalement des obligations de la SCI SOVI, que d'ailleurs le procès-verbal de la commission communale pour la sécurité contre les risques d'incendie du 8 décembre 2014 fait suite à l'avis défavorable rendu précédemment à leur encontre sur l'exploitation des locaux au vu des anomalies relevées en matière d'hygiène. Dans ces conditions, il convient de débouter les preneurs de leur demande à ce titre.
Sur les demandes annexes:
En l'état des créances de chaque partie, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de séquestre de la SCI SOVI.
Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.
En cause d'appel, la SCI SOVI sera condamnée à verser à Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L] venant aux droits de son père, Monsieur [A] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de son père Monsieur [A] [K], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [J] [M], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [X] [K] la somme globale de 6.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens d'appel seront à la charge de la SCI SOVI.
PAR CES MOTIFS
Statuant par décision contradictoire
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité d'occupation,
Statuant à nouveau:
Condamne solidairement Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L] venant aux droits de son père, Monsieur [A] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de son père Monsieur [A] [K], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [J] [M], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [X] [K] à verser à la SCI SOVI au titre de l'indemnité d'occupation due à compter du 1er juillet 2010 et jusqu'à libération des lieux la somme de 21.262€ hors taxes et hors charges par an,
Y ajoutant,
Condamne la SCI SOVI à verser à Monsieur [A] [O] [V] [Y] [L], Monsieur [B] [L] venant aux droits de son père, Monsieur [A] [L], Monsieur [Q] [O] [N] [H], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de son père Monsieur [A] [K], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [J] [M], Monsieur [M] [G] [K] venant aux droits de Madame [X] [K] la somme globale de 6.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes les autres demandes des parties
Condamne la SCI SOVI aux dépens d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,