COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 23 FEVRIER 2017
R.G. N° 15/01133
AFFAIRE :
[R] [I] [L]
...
C/
SA CREDIT FONCIER DE FRANCE ...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Janvier 2015 par le Juge de l'exécution du TGI de NANTERRE
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 13/14157
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SELARL MAYET & PERRAULT, avocat au barreau de VERSAILLES,
SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT TROIS FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [R] [I] [L]
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (ISRAEL) (99)
de nationalité Française
[Adresse 1]
Représentant : Me François PERRAULT de la SELARL MAYET & PERRAULT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 393
Madame [P] [B] épouse [L]
née le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 2]
de nationalité Française
[Adresse 1]
Représentant : Me François PERRAULT de la SELARL MAYET & PERRAULT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 393
APPELANTS
****************
SA CREDIT FONCIER DE FRANCE SA au capital de 1 331 400 718,80 € immatriculée au RCS de Paris sous le n° 542 029 848 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 542 .02 9.8 48
[Adresse 2]
- Représentant : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20150090
Représentant : Me Jean-michel HOCQUARD de la SCP HOCQUARD ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0087
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Janvier 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Odette-Luce BOUVIER, Président,
Madame Marie- Christine MASSUET,Conseiller,
Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Catherine CHARPENTIER,
FAITS ET PROCEDURE,
Selon acte notarié dressé le 26 janvier 2004 par maître [C], la société anonyme Crédit Foncier de France a consenti à M. [R] [L] et Mme [P] [L] née [B] un prêt immobilier pour un montant de 492.500 euros, au taux effectif global de 5,66 %, remboursable par 300 échéances de 2.850,48 euros chacune, et garanti par un privilège de prêteur de deniers ainsi qu'une hypothèque conventionnelle.
Déclarant agir en vertu de cet acte, la SA Crédit Foncier de France -le CFF- a fait délivrer à M. et Mme [L], par acte du 7 août 2013, un commandement de payer aux fins de saisie vente pour une somme totale de 548.454,39 euros en principal.
Par acte en date du 14 août 2013, M. et Mme [L] ont sollicité devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nanterre, l'octroi de délais de paiement sur 24 mois avec réduction des intérêts au taux légal.
M. et Mme [L] ont conclu le 27 novembre 2014 à la prescription de l'action du CFF et à l'annulation en conséquence du commandement de payer à fins de saisie vente.
Par jugement contradictoire en date du 16 janvier 2015, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nanterre, retenant que le délai de prescription a été suspendu entre la décision de recevabilité du dossier de surendettement par la commission de surendettement et le recours contre cette décision, a :
- ordonné la jonction des dossiers enrôlés sous les numéros 13/14157 et 14/03587,
- rejeté la demande de M. et Mme [L] tendant à voir annuler le commandement de payer aux fins de saisie vente en date du 7 août 2013,
- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné M. et Mme [L] aux dépens,
- rappelé que les décisions du juge de l'exécution bénéficient de l'exécution provisoire de droit.
Le 12 février 2015, M. et Mme [L] ont formé appel de la décision.
Dans leurs conclusions transmises le 7 novembre 2016, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. et Mme [L], appelants, demandent à la cour de :
-les dire et juger recevables et bien fondés en leur appel,
- infirmer le jugement dont appel,
- prononcer la prescription de toute action de la SA Crédit Foncier de France en vertu de l'acte notarié de prêt en date du 26 janvier 2004 dressé par Me [C] notaire à Paris,
- déclarer la SA Crédit Foncier de France irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions,
-dire et juger nul le commandement afin de saisie en date du 7 août 2013 et ordonner la mainlevée de la saisie vente en date du 9 septembre 2013 aux frais de la SA Crédit Foncier de France,
-condamner la SA Crédit Foncier de France au paiement de la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Dans ses conclusions transmises le 2 décembre 2016, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA Crédit Foncier de France, intimée, demande à la cour de :
-confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
-condamner in solidum M. et Mme [L] à lui payer la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-les condamner in solidum aux entiers dépens ;
La clôture de l'instruction a été prononcée le 10 janvier 2017.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 18 janvier 2017 et le délibéré au 23 février suivant.
SUR CE, LA COUR
Considérant que M. et Mme [L] soutiennent que l'action du CFF est prescrite,
Que le point de départ de la prescription est le 6 février 2009 date du premier impayé,
Que le délai biennal a été interrompu le 24 novembre 2010 par un commandement à fin de saisie immobilière de sorte que la prescription courait jusqu'au 25 novembre 2012,
Que le fait de procéder à la saisine de la commission de surendettement le 12 mai 2011 n'a pas entraîné la suspension du délai pour prescrire,
Qu'ainsi la délivrance du commandement de payer à fin de saisie vente du 7 août 2013 l'a été après expiration du délai de prescription,
Considérant que le CFF s'oppose à cette analyse,
Qu'il affirme que la saisine de la commission entraîne suspension du délai pour prescrire car le créancier était alors dans l'impossibilité d'agir,
Que cette suspension couvre le délai entre la saisine de la commission et la décision du juge saisi d'une contestation sur la recevabilité,
Qu'il en résulte que le délai interrompu le 24 novembre 2010 courait alors jusqu'au 4 septembre 2013,
Qu'en conséquence, le CFF n'était prescrit en son action lors de la délivrance du commandement à fins de saisie vente du 7 août 2013,
****
Considérant qu'aux termes de l'ancien article L137-2 du code de la consommation, applicable à l'espèce «'l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans'»,
Qu'il est de jurisprudence constante que les crédits immobiliers consentis à des particuliers constituaient des services financiers de sorte que la prescription biennale s'appliquait aux relations emprunteurs et organisme de prêt.
Considérant que les parties s'accordent à reconnaître que le point de départ de la prescription biennale est, au cas présent, la date du 6 février 2009,
Qu'il s'ensuit que sauf à être interrompue ou suspendue la prescription de toute action à l'encontre de M. et Mme [R] [L] était acquise au 6 février 2011,
Considérant que par acte du 24 novembre 2010, le CFF a délivré à M. et Mme [L] un commandement à fins de saisie immobilière,
Qu'aux termes de l'article 2244 du code civil «'le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution ou un acte d'exécution forcée'»,
Qu'il découle de ce texte que le commandement à fins de saisie immobilière a interrompu le délai pour prescrire,
Que ce point n'est d'ailleurs pas contesté par les parties au litige,
Considérant, en revanche, que les parties s'opposent sur les effets attachés à la saisine de la commission de surendettement et au temps qui s'écoule entre cette saisine et la décision du juge devant lequel un recours est exercé à l'encontre de la décision prise,
Que M. et Mme [L] invoque un arrêt de la Cour de cassation en date du 17 mars 2016 aux termes duquel la saisine de la commission de surendettement n'entraîne pas suspension du délai pour prescrire,
Qu'il convient d'observer que cette jurisprudence n'est pas applicable à la présente instance, la Cour de cassation étant saisie d'un litige portant sur une décision de recevabilité de la demande de débiteurs surendettés rendue le 8 avril 2008 par la commission de surendettement alors qu'à cette date, les textes relatifs au traitement des situations de surendettement ne prévoyaient pas expressément la suspension et l'interdiction des procédures d'exécution,
Que ce n'est qu'ultérieurement, par la loi du 1er juillet 2010, modifiée le 22 octobre 2010, qu'est introduit dans le code de la consommation l'ancien article L 331-3-1, applicable à l'espèce, selon lequel la décision déclarant la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution'diligentées à l'encontre des biens du débiteur,
Considérant qu'aux termes de l'article 2234 du code civil «'la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure'»,
Qu'en conséquence et en application des textes sus visés, le CFF a été dans l'impossibilité d'agir à l'encontre de M. et Mme [L] entre la saisine de la commission de surendettement -12 mai 2011- jusqu'au jugement par lequel le juge d'instance a prononcé l'irrecevabilité des demandes de M. et Mme [L] relatifs au bénéfice du traitement de leur situation de surendettement -23 février 2012-,
Que le délai biennal interrompu par le commandement du 24 novembre 2010 -jusqu'au 25 novembre 2012- a été suspendu par la saisine de la commission de surendettement pour 9 mois et 11 jours,
Qu'en conséquence, la prescription se trouvait acquise au 4 septembre 2013,
Que, le commandement à fins de saisie vente ayant été délivré le 7 août 2013, c'est à bon droit que le premier juge a dit non prescrite l'action introduite par le CFF,
Qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté en conséquence la demande de M. et Mme [L] tendant à l'annulation du commandement de payer aux fins de saisie vente du 7 août 2013 et, y ajoutant, de débouter les appelants de leur demande de mainlevée de la saisie vente.
Considérant qu'il est équitable de condamner M. et Mme [L] in solidum à payer au Crédit Foncier de France la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles non inclus dans les dépens.
Que M. Mme [L], qui succombent en leurs prétentions, sont tenus des dépens de la procédure en cause d'appel,
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du 16 janvier 2015,
Y ajoutant,
Déboute M. [R] [L] et Mme [P] [B] épouse [L] de l'ensemble de leurs demandes,
Condamne in solidum M. [R] [L] et Mme [P] [B] épouse [L] à payer au Crédit Foncier de France la somme de 2.000 euros -deux mille euros- au titre des frais irrépétibles non inclus dans les dépens,
Condamne in solidum M. [R] [L] et Mme [P] [B] épouse [L] aux dépens de la procédure d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au bénéfice de la SELARL MIMAULT.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Odette-Luce BOUVIER, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,