COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
(RND)
5ème Chambre
ARRET N°
contradictoire
DU 16 MARS 2017
R.G. N° 16/01651
AFFAIRE :
EPIC OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE NANTERRE
C/
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES IDF
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE
N° RG : 13-00979/N
Copies exécutoires délivrées à :
SCP SEBAN ET ASSOCIES
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES IDF
Copies certifiées conformes délivrées à :
EPIC OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE NANTERRE
le :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE SEIZE MARS DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
EPIC OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE NANTERRE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me My-Kim YANG PAYA de la SCP SEBAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0498 - N° du dossier 1209070
APPELANTE
****************
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES IDF
Division des Recours amiables et judiciaires
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par M. [M] [X] (Inspecteur contentieux) en vertu d'un pouvoir général
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Olivier FOURMY, Président,
Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,
Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Mohamed EL GOUZI,
FAITS ET PROCÉDURE :
L'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de l'Ile de France (ci-après l'Urssaf) a procédé à la vérification de l'application de la législation sociale par l'EPIC (établissement public industriel et commercial) Office public de l'Habitat de Nanterre (ci-après l'Office), pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011.
Le 30 juillet 2012, l'Urssaf a adressé à l'Office une lettre d'observations, indiquant plusieurs chefs de redressement au titre des cotisations et contributions de sécurité sociale, pour un montant total de 438 361 euros pour les années 2009, 2010 et 2011, au titre de :
- l'avantage en nature-véhicule
- l'assiette des cotisations dues au régime général du statut du fonctionnaire territorial
- la contribution FNAL supplémentaire
- l'avantage en nature'cadeaux en nature offerts par l'employeur
- des fonctionnaires en situation de détachement
- des réductions dites Fillon.
Par courrier du 10 septembre 2012, l'Office a indiqué à l'Urssaf qu'elle contestait l'essentiel des remarques contenues dans la lettre d'observations et que ses conseils adresseraient ultérieurement une réponse détaillée, ce qu'il n'a pas fait.
Le 18 septembre 2012, l'Urssaf a répondu qu'elle maintenait intégralement les différents chefs de redressement, en particulier celui relatif aux réductions Fillon, pour absence de négociation annuelle obligatoire.
Par mise en demeure du 18 octobre 2012, l'Urssaf a réclamé à l'Office la somme de 438 361 euros augmentée de 43 707 de majorations de retard provisoires soit un total de 482 068 euros.
Les 16 octobre et 15 novembre 2012, l'Office a formé un recours après de la commission de recours amiable de l'Urssaf, laquelle a rendu une décision implicite de rejet et une décision explicite de rejet le 7 mars 2013.
L'Office a saisi le tribunal des affaires sociales des Hauts de Seine (ci-après le TASS) d'un recours à l'encontre de la décision implicite puis explicite de rejet de la commission de recours amiable.
La cour précise que, le 16 mai 2014, l'Urssaf a notifié à l'Office une mise en demeure de payer des majorations de retard complémentaires pour les années 2009 et 2010 d'un montant total de 6 191 euros.
Par jugement date du 14 mars 2016, le TASS a confirmé la décision de la commission de recours amiable, considérant que l'absence de négociation annuelle obligatoire par l'Office Public de l'Habitat de Nanterre justifiait la minoration de 10% de la réduction Fillon au titre des années 2009, 2010 et l'annulation de la réduction pour l'année 2011. Le tribunal, avait au préalable, retenu que la mise en demeure satisfaisait aux critères légaux.
Par ses conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, l'EPIC Office Public de l'Habitat de Nanterre demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris
- dire que l'Office Municipal d'HLM de Nanterre n'était pas tenu de conclure une négociation annuelle obligatoire au titre des années 2009, 2010 et 2011 et que les allégements de cotisations Fillon ne peuvent dès lors être réduits et annulés
- constater la nullité de la mise en demeure datée du 16 mai 2014
- dire que le redressement opéré n'a pas lieu d'être maintenu
- condamner l'Urssaf au paiement de la somme de 3 000 euros au tire de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf demande à la cour de :
- dire l'Office public de l'Habitat de Nanterre irrecevable en sa contestation de la mise en demeure du 16 mai 2014
- débouter l'Office de ses demandes
- confirmer le jugement entrepris
- condamner l'Office au paiement des cotisations redressées et des majorations de retard provisoires subséquentes, soit 438 361 euros au titre des cotisations impayés et 43 707 euros au titre des majorations de retard provisoires
- condamner l'Office au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'aux explications orales complémentaires et aux pièces déposées par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A l'appui de son appel, l'Office excipe de la nullité de la mise en demeure du 16 mai 2014 au motif que sa formulation ne lui permet pas de connaître la cause et la nature de l'ensemble des sommes réclamées.
L'Office soutient, au fond, qu'en tant qu'EPIC, il bénéficie à ce titre de la réduction générale de cotisations instituée par la loi du 17 janvier 2003, dite Fillon, mais qu'au regard des dispositions de la loi du 3 décembre 2008, la condition relative à l'obligation de négociation annuelle permettant de bénéficier de l'allégement des cotisations ne concerne que les entreprises soumises à cette exigence.
L'Office plaide qu'il était dans l'impossibilité légale et matérielle de procéder à une négociation annuelle obligatoire :
- jusqu'au 1er février 2007, il n'employait que des agents de droit public et n'était donc soumis à aucune obligation de négociation annuelle ;
- au regard des dispositions du décret du 27 octobre 2008, les Offices publics de l'Habitat, devenus des EPIC, avaient un délai d'une année à compter de la publication du décret pour procéder à la classification des emplois de l'ensemble de leur personnel ;
- en l'absence de tout accord de classification des emplois au sein de l'Office public de l'Habitat, celui-ci ne pouvait pas aborder l'ensemble des thèmes visées aux articles L. 2242-5 et suivants, dans le cadre d'une négociation annuelle obligatoire avant l'année 2011.
L'Urssaf soulève l'irrecevabilité de la demande en nullité de la mise en demeure du 16 mai 2014 faute d'avoir été soumise préalablement à la commission de recours amiable.
L'URSSAF soutient que la carence de l'Office public de l'Habitat de Nanterre, en matière d'accord de classification des emplois, ne peut l'exonérer de son obligation de négocier annuellement.
Sur la demande de nullité de la mise en demeure du 16 mai 2014
C'est à bon droit que l'Urssaf excipe de l'irrecevabilité de la demande de nullité de la mise en demeure du 16 mai 2014 formulée par l'Office public de l'Habitat en citant plusieurs décisions de la Cour de cassation jugeant que : " le tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut être saisi d'une réclamation contre une décision d'un organisme de sécurité sociale qu'après que celle-ci a été soumise à la commission de recours amiable ".
La cour constate que si l'Office avait saisi la commission de recours amiable d'une contestation de la mise en demeure du 18 octobre 2012, il ne l'a pas fait s'agissant de la mise en demeure du 16 mai 2014, de sorte que sa demande de nullité de ladite mise en demeure sera déclarée irrecevable.
Le jugement, qui avait considéré que la mise en demeure était valide, ne se réfère qu'à celle du 18 octobre 2012, de sorte qu'il devra être complété de ce chef.
Sur la réduction Fillon
Par des motifs pertinents en droit et en fait que la cour fait siens le premier juge a débouté l'Office de son recours à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable rejetant sa contestation du redressement relatif à la réduction Fillon.
Le tribunal a parfaitement rappelé le droit applicable en la matière :
- la loi du 17 janvier 2003 qui a institué, à compter du 1er juillet de la même année, une réduction générale de cotisations sociales patronales sur les bas salaires, dite réduction Fillon, qui s'applique aux cotisations patronales d'assurances sociales ;
- la possibilité pour l'Office public de l'Habitat de Nanterre de bénéficier de ces allégements de cotisation lorsqu'il a été transformé d'ancien office municipal habitation à loyer modéré, en un établissement public industriel et commercial, par l'effet de l'ordonnance du 1er février 2007 ;
- l'article 26 de la loi du 3 décembre 2008, entré en vigueur au 1er janvier 2009, qui prévoit que la sanction en cas de non respect de l'obligation de négocier sur les salaires consiste en une diminution de 10% du montant de certains allégements généraux de cotisations dont la réduction Fillon et, qu'au bout de la troisième année consécutive, le montant des allègements est totalement supprimé ;
- les conditions dans lesquelles doivent être engagées la négociation annuelle obligatoire prévue par l'article L. 2242-8 du code du travail.
La cour constate, avec le TASS, que l'Office n'a pas ouvert de négociation sur les salaires au titre des années 2009, 2010 et 2011.
L'Urssaf souligne, à bon escient, que le premier juge avait relevé que l'Office tenait d'un décret 2008-1093 du 27 octobre 2008 une classification de base des emplois qui lui permettait de procéder à cette négociation annuelle sans attendre un accord collectif national.
La cour considère que l'Office s'est ainsi soustrait à une obligation légale qui conditionnait le bénéfice de la réduction Fillon et que l'Urssaf a valablement procédé au redressement litigieux.
Dans ces conditions, la cour confirmera le jugement de ce chef.
Il paraît conforme à l'équité que l'Office, qui succombe en son appel, soit condamné à verser à l'Urssaf, la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant par mise à disposition au greffe, et par décision contradictoire,
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant :
Dit que la demande en nullité de la mise en demeure du 16 mai 2014 formulée par l'Office public de l'Habitat de Nanterre est irrecevable ;
Condamne l'Office public de l'Habitat de Nanterre à payer à l'URSSAF, la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute l'Office public de l'Habitat de Nanterre de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que la procédure est exempte de dépens.
- Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Mélissa Fabre, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,