COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4IE
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 30 MARS 2017
R.G. N° 16/02789
AFFAIRE :
[S] [I]
...
C/
Sté.coopérative Banque Pop. BRED BANQUE POPULAIRE prise en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Mars 2016 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° chambre : 03
N° Section :
N° RG : 11/03459
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 30.03.17
à :
Me Alexandre OPSOMER,
Me Pauline REY,
TGI PONTOISE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TRENTE MARS DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
- Maître [S] [I]
[Adresse 1]
- SCP BTSG
[Adresse 2]
Représenté(e) par Maître Alexandre OPSOMER de la SCP GUEILHERS & ASSOCIES, avocat postulantau barreau de VERSAILLES, vestiaire : 269 - N° du dossier 93/16 et par Maître G.PODEUR, avocat plaidant au barreau de PARIS
- Maître [E] [A]
[Adresse 3]
- SELARL [V] [W] [A]
[Adresse 4]
Représenté(e) par Maître Alexandre OPSOMER de la SCP GUEILHERS & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 269 - N° du dossier 93/16 et par Maître J-P.FABRE, avocat plaidant au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
Sté.coopérative Banque Pop. BRED BANQUE POPULAIRE prise en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 552 09 1 7 955
[Adresse 5]
Représenté(e) par Maître Pauline REY, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 555 et par Maître F. de LA SELLE , avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Février 2017, Madame Aude RACHOU, présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Aude RACHOU, Présidente,
Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Valérie BOST
La société IGF industrie (la société IGF) était une société spécialisée dans la conception et la construction de wagons de marchandises et de conteneurs-citernes.
Le 28 janvier 2009, elle a procédé à une déclaration de cessation des paiements.
Le 10 février 2009, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société IGF avec une période d'observation de quatre mois. Me [A] a été désigné administrateur judiciaire avec une mission d'assistance, la société BTSG en la personne de Me [I], a été désignée mandataire judiciaire et Me [N] a été désigné commissaire-priseur chargé de l'inventaire et de la prisée.
Le 6 juin 2009, le tribunal de commerce de Paris, par jugement, a prorogé la période d'observation pour une durée de 6 mois, soit jusqu'au 16 décembre 2009.
Pendant cette période d'observation, la société IGF assistée de Me [A] ès qualités a sollicité de la société BRED Banque Populaire (la société BRED) un concours bancaire de 3 millions d'euros afin de financer la période d'exploitation. Ce découvert a été consenti le 10 août 2009 et autorisé par le juge commissaire le 12 septembre 2009. Le découvert devait faire l'objet d'un remboursement in fine à l'issue de la période d'observation, soit mi-décembre 2009.
Le 25 septembre 2009, la société IGF, en garantie du remboursement de ce découvert autorisé, a consenti un gage de stocks de produits finis présents ou futurs d'un montant de 6 millions d'euros estimés à la date du dernier inventaire conformément aux articles L527-1 à L527-11 du code de commerce par contrat signé par le gérant de la société IGF assisté de Me [A] ès qualités et un représentant de la société BRED.
Cette convention précisait que la part des stocks gagés diminuait à proportion du désintéressement du créancier, que pendant toute la durée du gage, les stocks resteraient en possession du débiteur dans les locaux de l'entreprise à [Localité 1], que le débiteur était responsable de la conservation des stocks en qualité et quantité dans les conditions prévues à l'article 1137 du code civil et s'engageait à ne pas faire diminuer de son fait la valeur des stocks gagés.
Le 25 septembre 2009, un représentant de la société BRED a conclu en présence de la société IGF et de Me [A] ès qualités une convention de contrôle de gage de stocks avec la société Eurogage. Cette société était chargée de contrôler la valeur des biens gagés et d'alerter la société BRED si le solde des biens gagés devait atteindre le seuil d'alerte fixé par les parties à 6 millions d'euros.
Le 29 septembre 2009, la société Eurogage a évalué le stock à la somme de 7 682 422 euros.
Le 7 octobre 2009, le gage a fait l'objet d'une publication au greffe du tribunal de commerce de Paris.
Le 27 novembre 2009, la BRED a renouvelé le concours bancaire à hauteur de 2 500 000 euros , sans pour autant qu'il s'agisse d'un nouveau crédit augmentant la dette de la
société mais du renouvellement de la facilité de caisse pour un montant moindre.
A cette date, la société Eurogage a évalué le stock à la somme de 9 384 809 euros.
Le 3 décembre 2009, la société Eurogage a évalué le stock à la somme de 8 042 835 euros.
Le 15 décembre 2009, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de redressement par continuation sur une durée de 10 ans de la sociétéIGF, la SELARL [V] [W] [A] en la personne de Me [A] étant maintenue en qualité d'administrateur judiciaire avec la mission prévue à l'article L. 631-22 du code commerce pendant six mois et désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en la personne de Me [I] étant maintenue avec la mission prévue à l'article 210 du décret du 28 décembre 2005 jusqu'à la fin de la procédure de vérification des créances et le compte rendu de fin de mission.
Le 15 avril 2010, Me [I] ès qualités et Me [A] ès qualités ont informé le tribunal de commerce de Paris de l'inexécution du plan.
Le 5 mai 2010, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la résolution du plan de continuation de la société IGF et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, avec poursuite d'activité jusqu'au 15 juin 2010 afin de permettre aux repreneurs potentiels de présenter leurs offres de reprise, et a mis fin à la mission de la SELARL [V] [W] [A] en la personne de Me [A] commissaire à l'exécution du plan, la SELARL étant maintenue en ses fonctions d'administrateur judiciaire jusqu'à l'issue de la poursuite de l'activité, et la société BTSG en la personne de Me [I] étant nommée liquidateur.
Dès le 6 mai 2010, la société BRED a envoyé un courrier recommandé à Me [I] en sa qualité de liquidateur pour l'informer qu'elle s'opposait à toutes sorties de stocks gagés, sauf paiement entre ses mains conformément à l'article L. 641-3 du code de commerce.
Par courrier du 2 juin 2010, la société BRED a déclaré une créance privilégiée de 1 878 804, 46 euros auprès du liquidateur correspondant au solde débiteur du compte bancaire de la société IGF et aux frais de contrôle de la société Eurogage.
Le 7 juillet 2010, un plan de cession a été homologué au profit de la société Titagahr pour un prix de 1 920 000 euros dont 500 000 euros de stock.
Un inventaire du stock a été alors réalisé par la société Eurogage en octobre 2010 qui a révélé que les usines étaient vides et les stocks inexistants.
La société BRED estimant que Me [A] et Me [I] ont commis des fautes dans l'exercice de leur mission (négligence de l'assiette du gage au bénéfice de la banque et défaut d'information des repreneurs quant à la garantie de la banque sur le stock avec un droit de rétention), les a assignés ainsi que la société [V] [W] [A] et la société BTSG les 30 mars et 22 avril 2011 devant le tribunal de grande instance de Pontoise.
Dans l'attente d'une décision définitive sur la nature privilégiée ou chirographaire de la créance du demandeur, le sursis à statuer a été prononcé à deux reprises dans cette procédure les 6 juin 2013 et 15 mai 2014.
La Cour de cassation dans un arrêt du 2 décembre 2014, a rejeté le pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel reconnaissant la nature privilégiée de la créance de la société BRED.
Le 11 mars 2016, par jugement, le tribunal de grande instance de Pontoise a :
- condamné in solidum Me [I], Me [A], la société [V] [W] [A] et la société BTSG à payer à la société BRED les sommes de 1 753 804, 43 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des fautes civiles commises et la sommes de 9 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté tout autre demande,
- condamné in solidum Me [I], Me [A], la société [V] [W] [A] et la société BTSG aux entiers dépens,
- dit que Me [G] pourra recouvrer directement contre Me [I], Me [A], la société [V] [W] [A] et la société BTSG les dépens dont elle aura fait l'avance sans avoir reçu provision.
Le 14 avril 2016, M. [I], M.[A], la SCP BTSG et la SELARL [V] [W] [A] ont interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 13 janvier 2017, M.[A] et la SELARL Ajassociés, nouvelle dénomination de la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan, soulèvent l'irrecevabilité de l'action introduite par la société BRED et subsidiairement de sa demande.
A titre encore plus subsidiaire, ils concluent au débouté de la demande et reconventionnellement à la condamnation de la BRED à leur payer à chacun 5 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et professionnel causé par cette procédure abusive, outre 5 000 euros à chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 4 novembre 2016, M. [I] et la SCP BTSG soulèvent l'irrecevabilité de la BRED en ses demandes.
Subsidiairement, ils concluent à son débouté et à sa condamnation à leur payer 60 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 septembre 2016, la société BRED banque populaire demande à la cour de :
- dire et juger la société BRED recevable et bien fondée en ses prétentions et en son appel incident,
- dire et juger que Me [A] a sollicité le concours de la société BRED afin de financer le cycle d'exploitation de la société IGF en cours de période d'observation,
- dire et juger que Me [A] et Me [I] ont engagé leur responsabilité civile professionnelle pour avoir méconnu le droit de rétention de la société la BRED dans le plan de cession présenté au tribunal,
- dire et juger que Me [A] et Me [I] ont engagé leur responsabilité professionnelle en s'étant abstenus de procéder au maintien de l'assiette du gage constitué au bénéfice de la société BRED,
- dire et juger que le préjudice subi par la société BRED tiré du défaut du règlement de sa créance, résulte directement des fautes conjointes commises par Me [A] et Me [I],
en conséquence,
- débouter la société BTSG, Me [I], la société Ajassociés et Me [A] de leurs entières demandes,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise du 11 mars 2016 en ce qu'il a reconnu la responsabilité de la société BTSG, Me [I], la société Ajassociés et Me [A],
Statuant à nouveau,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise du 11 mars 2016 en ce qu'il a condamné in solidum la société BTSG, Me [I], la société Ajassociés et Me [A] à payer la somme de 1 753 804, 43 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamner in solidum la société BTSG, Me [I], la société Ajassociés et Me [A] à payer à la société BRED la somme de 1 878 804, 46 euros à titre de dommages et intérêts, montant à parfaire sous déduction des éventuelles sommes susceptibles d'être versée à la société BRED dans le cadre de l'exécution du plan de cession homologué par le tribunal de commerce de Paris selon jugement du 7 juillet 2010,
- condamner in solidum la société BTSG, Me [I], la société Ajassociés et Me [A] au paiement d'une indemnité d'un montant de 15 000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum la société BTSG, Me [I], la société Ajassociés et Me [A] en tous les dépens dont distraction au profit de Me Rey, avocat au Barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 19 janvier 2017 ;
Sur ce :
Considérant que la société BTSG et M. [S] [I], mandataire judiciaire soutiennent essentiellement que :
- les demandes de la société BRED sont irrecevables ; qu'en effet, n'invoquant pas un préjudice personnel distinct du non-règlement de sa créance, seuls le mandataire judiciaire et l'administrateur judiciaire ont qualité pour agir dans l'intérêt collectif des créanciers ;
- le nouveau grief invoqué par la société BRED (les organes de la procédure collective aurait proposé à cette dernière une garantie inefficace) est irrecevable au regard du délai de prescription applicable à savoir 5 ans (article 2224 du code civil); que plus de 5 ans s'est écoulé entre l'acte de gage du 25 septembre 2009 et le plan de cession du 7 juillet 2009 (date de la connaissance des faits) ; que M..[I] n'était pas partie aux discussions concernant le prêt consenti par la société BRED à la société IDF et qu'il n'était signataire d'aucun document
- qu'il n'existe pas de faute tenant à un défaut d'information des repreneurs sur l'existence d'un droit de rétention du fait du gage sur stock ;
- qu'il n'existe pas de préjudice subi par la société BRED pendant la procédure collective, le jugement arrêtant le plan de cession ayant réservé la somme de 125 000 euros au profit de la banque ce qui correspond à l'évaluation maximale des stocks qui auraient pu être gagés à son profit ;
Considérant que la société Ajassociés (anciennement la société [V] [W] [A]) et M. [E] [A], administrateur judiciaire soutiennent essentiellement que:
- l'action de la société BRED est irrecevable, la société BRED ne rapportant pas la preuve d'un préjudice personnel distinct du non règlement de sa créance ;
- la société BRED ne donne aucune information sur une potentielle procédure en cours entre elle et le cessionnaire alors qu'elle lui a notifié qu'elle n'accepterait pas la main levée de son droit de rétention et que le cessionnaire s'est opposé à cette réclamation ;
- chacun devant répondre de ses propres fautes, la société BRED ne peut donc être fondée à solliciter la condamnation in solidum de la société Ajassociés et de M. [A] avec la société BTSG et M. [I].
- l'administrateur judiciaire n'a pas commis de fautes, la simple créance impayée ne suffisant pas à caractériser une faute susceptible d'engager la responsabilité de ce dernier;
- à compter de la procédure de redressement judiciaire M.[A] n'avait qu'une mission d'assistance et ne pouvait être tenu aux mêmes obligations que la débitrice qu'il représentait ;
- qu'après le jugement homologuant le plan de redressement, la société IGF est redevenue in bonis, M.[A] étant alors commissaire à l'exécution du plan et disposant uniquement d'un pouvoir de surveillance et d'alerte quant à la bonne exécution du plan ; que le débiteur redevenu in bonis administre l'entreprise sous sa propre responsabilité ;
- qu'après le jugement prononçant la liquidation judiciaire, M. [A] avait qualité de mandataire judiciaire ; qu'il a parfaitement informé le tribunal sur les potentielles difficultés relatives au gage sur stock au profit de la BRED ; que le plan de cession a fait l'objet de débats devant le tribunal de commerce de Paris mais que la société BRED n'a pas sollicité l'attribution judiciaire de ce gage
- qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le comportement de M.[A] et le prétendu préjudice de la société BRED ;
- que la société BRED n'a pas subi de préjudice ;
Considérant que la société BRED soutient essentiellement que :
- son action est recevable, le préjudice étant bien distinct de celui éventuellement subi collectivement par les autres créanciers de la procédure, dès lors qu'elle entend faire valoir la méconnaissance d'une garantie qui lui était propre par les organes de la procédure ; que son préjudice est clairement personnel ;
- que M. [A] est responsable des actes qu'il a signés en tant que mandataire judiciaire ; qu'en effet, sa mission d'assistance l'a amené à solliciter un concours et à accorder des garanties, sous sa propre responsabilité ;
- que M. [A] et M. [I] n'ont pas informé les repreneurs potentiels et le tribunal quant à la nature de la garantie bénéficiant à la société BRED.
- M. [A] aurait induit en erreur le tribunal en ne l'informant pas de l'existence du droit de rétention bénéficiant à la société BRED ;que la société cessionnaire n'aurait également pas été informée par le mandataire judiciaire de l'existence d'un tel droit de rétention ; qu'il en est de même pour M. [I].
- qu'il est reproché à M. [A] non pas de ne pas pas avoir mentionné dans le plan de cession l'existence du droit de rétention mais de l'avoir fait et de ne pas en avoir tenu compte en proposant l'affectation d'une quote-part du prix de cession à la banque alors que le droit de rétention fait obstacle à ce mécanisme ;
- qu'elle a invoqué ce droit de rétention, notamment dans le courrier du 6 mai 2010 dans lequel elle indiquait expressément exercer son droit de rétention ;
que M. [A] a su tenir compte de ce droit de rétention lorsqu'il s'est agi de solliciter son accord pour pouvoir livrer des wagons au client [O] et que la société cessionnaire a tenté d'obtenir la radiation de diverses inscriptions dont le nantissement de la société BRED ce à quoi elle s'est opposée et a formé un recours contre cette demande ;
- que l'assiette du gage lui bénéficiant a disparu ; que les différents inventaires effectués par la société Eurogage ont permis les valorisations suivantes des stocks :
- au 20 octobre 2009 : 7 656 927 euros
- au 27 novembre 2009 : 9 384 809 euros
- au 9 décembre 2009 : 8 042 835 euros
- au 26 février 2010 : 7 523 727 euros
que le 6 mai 2010, elle a envoyé une lettre recommandée avec accusé de réception à M. [I] dans lequel elle indiquait exercer son droit de rétention ; que dans le cadre du plan de cession, la société cessionnaire a arrêté la valorisation des stocks à un montant global de 500 000 euros dont 250 000 euros à partager entre elle même et l'URSSAF au titre de leur gage ;
que lors du recollement d'inventaire du 18 octobre 2010, la presque totalité du stock de la société IGF avait disparu ;
que M. [I] et M. [A] sont responsables de cette disparition de l'assiette du gage pour ne pas avoir procédé au maintien de l'assiette du gage malgré les diligences de la société BRED
alors que M.[I] étant chargé de l'administration et de la disposition des biens du débiteur était responsable des stocks conformément aux articles L527-6 du code de commerce et 1137 du code civil et que M.[A], chargé de la préparation du plan de cession, se devait de respecter le droit de rétention attachée au gage sur stock et expressément invoqué aux terme de la lettre du 6 mai 2010 de la société BRED ;
que l'argument tiré de l'absence de définition claire et précise du stock se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 4 juillet 2013 (matériels parfaitement identifiables et contrôlés par la société Eurogage) ;
- que son préjudice résulte de l'impossibilité aujourd'hui et dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire de la société IGF à se voir rembourser le montant de sa créance (1 878 804, 46 euros) et est en relation avec la carence fautive de M. [I] et M. [A], étant observé que la somme de 125 000 euros correspondant à la fraction du prix de cession devant lui revenir, ne lui a toujours pas été versée ;
Sur la recevabilité de l'action :
Considérant que l'article L. 622-20 du code de commerce dispose que le
mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers ;
que le créancier peut exercer une action en responsabilité s'il établit un préjudice personnel distinct des autres créanciers et indépendant d'un préjudice inhérent à la procédure collective ;
Considérant qu'en l'espèce, 10 février 2009, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société IGF avec une période d'observation de quatre mois, Me [A] étantdésigné administrateur judiciaire avec une mission d'assistance et la société BTSG en la personne de Me [I], désignée mandataire judiciaire ;
Considérant que par jugement du 5 mai 2010, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société IGF industrie, après résolution du plan de continuation de la dite société, et désigné la société BTSG en la personne de Me [I] en qualité de liquidateur ;
Considérant que par jugement du 7 juillet 2010, le tribunal a arrêté le plan de cession de la société IGF industrie, a fixé à la somme de 1 920 000 euros le montant du prix de cession dont 350 000 euros pour les éléments incorporels, 1 070 000 euros pour les éléments corporels et 500 000 euros pour les stocks ;
que conformément à l'article L. 642-12 du code de commerce, il a fixé à 250 000 euros la quote part du prix de cession affectée aux stocks gagés à partager entre les deux' gageurs ' ;
qu'il est constant que les deux ' gageurs ' désignés sont d'une part la BRED et de l'autre l'URSSAF ;
Considérant que par note en délibéré non demandée par le tribunal, la BRED, s'interrogeant sur les modalités d'évaluation des stocks et sur les modalités de répartition de ceux ci entre l'URSSAF et elle même, sollicitait une mesure contradictoire d'inventaire de l'ensemble des stocks permettant ainsi une répartition de la quote part du prix relevant de l'évaluation des stocks conformément aux dispositions de l'article L. 642-12 du code de commerce ;
Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société BRED est malvenue à soutenir, à l'appui de la recevabilité de son action, subir un préjudice personnel distinct du préjudice collectif des créanciers, d'une part la sûreté dont elle bénéficiait n'ayant pas été méconnue et d'autre part n'étant pas le seul créancier à bénéficier d'un gage ;
qu'en outre la disparition du stock préjudicie à l'ensemble des créanciers et nécessairement à leur intérêt collectif ;
qu'elle n'établit donc pas l'existence d'un préjudice personnel distinct du non règlement de sa créance, concluant elle même que son préjudice résulte de l'impossibilité aujourd'hui et dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire de la société IGF à se voir rembourser le montant de sa créance ;
Considérant que la décision déférée sera infirmée et l'action de la société BRED déclarée irrecevable, lui appartenant le cas échéant de faire désigner un mandataire ad 'hoc qui agira dans l'intérêt collectif des créanciers ;
Considérant que M. [A] et la SELARL Ajassociés, nouvelle dénomination de la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan, ne rapportent pas la preuve d'un préjudice moral et professionnel causé par la dite procédure en l'absence de démonstration de l'abus du droit d'ester en justice qu'aurait commis la société BRED ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [A] et de la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan d'une part et de M. [I] et de la SCP BTSG 2, nouvelle dénomination de la SCP BTSG, les frais irrépétibles engagés ;
qu'il convient d' allouer la somme de 5 000 euros à M. [A] et 5 000 euros à la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan ainsi que 10 000 euros à M. [I] et à la SCP BTSG 2 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par Ces Motifs
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire
Infirme la décision déférée
Et statuant à nouveau,
Dit irrecevable l'action de la société BRED Banque populaire dirigée à l'encontre de M. [A] et de la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan d'une part et de M. [I] et de la SCP BTSG 2 nouvelle dénomination de la SCP BTSG de l'autre
Déboute M. [A] et la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive
Condamne la société BRED Banque populaire à payer à M. [A] et à la SELARL [V] [W] [A] Deshayes Bidan 5 000 euros à chacun et à M. [I] et à la SCP BTSG 2, nouvelle dénomination de la SCP BTSG 10 000 euros
Condamne la société BRED Banque populaire aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Aude RACHOU, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,