COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53B
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 MAI 2017
R.G. N° 15/05531
AFFAIRE :
[L], [N], [Q] [V]
...
C/
SA SOCIETE GENERALE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 04 Juin 2015 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 02
N° Section :
N° RG : 2012F01772
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 18.05.2017
à :
Me Michel SOLANET
Me Frédérique LEPOUTRE
TC NANTERRE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT MAI DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
- Mademoiselle [L], [N], [Q] [V]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
- Monsieur [Z], [J], [D] [V]
né le [Date naissance 1] 1941 à [Localité 1]- de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Maître Michel SOLANET, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 190 et par Maître Bruno LANDON, avocat plaidant au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
SA SOCIETE GENERALE
N° SIRET : B55 212 022 2
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Maître Frédérique LEPOUTRE de la SCP B.L.S.T., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 709 - N° du dossier 122078
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mars 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aude RACHOU, Présidente,
Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,
FAITS ET PROCEDURE,
Le 3 octobre 2008, la Société générale a consenti un prêt d'un montant de 630.000 € à la société Albert en vue de l'acquisition de parts sociales de la société Izard & cie et, en garantie de ce prêt, Mme [L] [V], présidente et associée à hauteur de 40 % de la société Albert, et M. [V], directeur général et associé à hauteur de 60 %, se sont portés cautions solidaires à hauteur respectivement de 204.750 € et de 614.500 €.
Par lettre du 5 décembre 2011, la Société générale a prononcé l'exigibilité anticipée du prêt et par lettre du 9 décembre 2011 elle a mis en demeure la société Albert et les cautions d'avoir à régler la somme de 467.585,25 €.
La Société générale a été autorisée à procéder à une saisie conservatoire des sommes détenues par elle sur le compte de la société Albert, soit un montant de 14.883,52 €. Le 11 avril 2012 elle a assigné en paiement la société Albert, Mme [V] et M. [V] devant le tribunal de commerce de Nanterre.
La société Albert a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 3 octobre 2012, Me [L] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire. La Société générale a déclaré sa créance le 12 octobre 2012 pour un montant de 487.018,55 €.
Par jugement du 4 juin 2015 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Nanterre a :
- constaté l'exigibilité anticipée des sommes dues par la société Albert au titre du prêt du 3 octobre 2008 ;
- fixé la créance privilégiée de la Société générale au passif de la société Albert à la somme de 385.069,39 € avec intérêts au taux Eonia + 3 points à compter de la date du jugement ;
- débouté Mme [V] et M. [V] de leur demande en nullité des cautionnements pour vices du consentement ;
- débouté Mme [V] et M. [V] de leur demande de constat du caractère disproportionné des cautions ;
- condamné Mme [V] et M. [V], en leur qualité de caution solidaire et solidaires entre elles, à payer à la Société générale au titre du prêt du 3 octobre 2008 la somme de 385.069,39 € couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, à compter du présent jugement, jusqu'au paiement définitif, et ce, dans la limite d'une somme maximum de 614.500 € pour M. [V] augmentée des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2011, et dans la limite d'une somme maximum de 204.750 € pour Mme [V] augmentée des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2011 ;
- débouté Mme [V] et M. [V] de leur demande de réparation pour préjudice moral ;
- ordonné la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
- condamné solidairement Mme [V] et M. [V] à payer à la Société générale la somme de 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Le 23 juillet 2015, Mme [V] et M. [V] ont fait appel du jugement en intimant la Société générale et Me [L] ès qualités.
Le 18 octobre 2015, ils ont déposé au greffe et notifié par RPVA des conclusions à la Société générale, ces conclusions comprenant leur désistement à l'encontre de Me [L] ès qualités.
Le 11 décembre 2015, la Société générale a conclu dans le sens de la confirmation des dispositions du jugement concernant Mme [V] et M. [V] et de la réformation de celles concernant la société Albert. Le 14 décembre 2015, elle a assigné en 'appel provoqué' Me [L] ès qualités et lui a signifié ses conclusions.
Par ordonnance du 7 janvier 2016, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d'appel à l'encontre de Me [L] ès qualités faute de signification de conclusions d'appelants dans le délai prévu par l'article 908 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 21 février 2017, Mme [V] et M. [V] demandent à la cour :
- de leur donner acte de ce qu'ils se désistent de leur déclaration d'appel à l'encontre de Me [L] ès qualités ;
- de juger que le cautionnement de Mme [V] est manifestement disproportionné à son patrimoine et à ses revenus et en conséquence de juger que la Société générale ne peut se prévaloir de son cautionnement ;
- de juger que la Société générale, en manquant aux obligations de l'article L. 341-4 du code de la consommation, a commis une faute en faisant perdre le recours subrogatoire de M. [V] sur Mme [V] cofidéjusseur, et, en conséquence, de condamner la Société générale à payer à M. [V] des dommages intérêts d'un montant équivalent à 25 % de la condamnation qui sera prononcée à l'encontre de M. [V] ;
- d'ordonner la compensation entre les créances réciproques de la Société générale et de M. [V] ;
- d'arrêter à la somme de 59.956,13 €, sauf à parfaire des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 9 décembre 2011, la créance de la Société générale sur les cofidéjusseurs ;
- de condamner la Société générale au paiement de la somme de 6.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 22 février 2017, la Société générale demande à la cour :
- de la déclarer recevable en son appel incident ;
- de réformer le jugement en ce qu'il a constaté et fixé sa créance au passif de la société Albert à la somme de 385.069,39 €, augmentée des intérêts au taux Eonia + 3 points à compter du 4 juin 2015 au lieu du 15 octobre 2012 correspondant à la date du redressement judiciaire ;
- de confirmer le jugement en ses dispositions concernant Mme [V] et M. [V] ;
- de déclarer Mme [V] et M. [V] mal fondés en leur appel ;
- de condamner solidairement Mme [V] et M. [V] à lui payer la somme de 385.069,39 € augmentée des intérêts au taux Eonia + 3 points l'an à compter du 15 octobre 2012 jusqu'à parfait paiement dans la limite de la somme de 204.250 € en ce qui concerne Mme [V] et de 614.250 € en ce qui concerne M. [V] ;
- d'ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article '1153" du code civil ;
- de condamner solidairement Mme [V] et M. [V] à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
- de condamner Mme [V] et M. [V] aux dépens d'instance et d'appel avec droit de recouvrement direct.
A l'audience, la cour a soulevé d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'appel formé par la Société générale à l'encontre de Me [L] ès qualités à raison de la caducité partielle de l'appel principal dirigé contre ce dernier. Elle a autorisé la banque à produire une note en délibéré sur ce moyen. La Société générale a déposé une note le 10 avril 2017.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE :
Considérant à titre liminaire que la caducité de la déclaration d'appel de M. et Mme [V] à l'encontre de Me [L] ès qualités ayant été prononcée la cour n'est pas saisie du désistement de M. et Mme [V] à l'égard de ce dernier ;
Sur la recevabilité de l'appel formé par la Société générale à l'encontre de Me [L] ès qualités :
Considérant que la Société générale soutient que son appel formé à l'encontre de Me [L] ès qualités est recevable faisant valoir en premier lieu qu'en l'état du désistement parfait des appelants à l'égard d'un co-intimé défaillant l'appel provoqué s'analyse comme étant des conclusions avec appel incident formé dans le délai de deux mois de sorte que la caducité partielle est sans incidence sur la recevabilité de son appel à l'égard de Me [L] ès qualités et en second lieu que, s'il est considéré que le désistement n'est pas parfait, la caducité partielle ne retire pas la qualité d'intimé de Me [L] ès qualités et que l'appel provoqué s'analyse en appel incident valablement notifié dans les deux mois des conclusions des appelants.
Considérant qu'aux termes de l'article 909 du code de procédure civile l'intimé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification des premières conclusions de l'appelant pour conclure et former appel incident ;
Considérant que Me [L] ès qualités a été intimé par M. et Mme [V] ; qu'il est demeuré partie intimée à l'égard de la Société générale en dépit de la décision de caducité partielle de la déclaration d'appel de M. et Mme [V] ; que la banque a formé appel, improprement qualifié de provoqué, à l'encontre de Me [L] ès qualités, co-intimé défaillant, en l'assignant le 14 décembre 2015 dans le délai de deux mois qui courait à compter de la date à laquelle la Société générale avait reçu notification des premières conclusions d'appel de M. et Mme [V] le 18 octobre 2015 ; que l'appel incident de la Société générale à l'encontre de Me [L] ès qualités est dès lors recevable ;
Sur la créance de la Société générale à l'égard de la société Albert en liquidation :
Considérant que la Société générale soutient que le jugement doit être réformé en ce qu'il a arrêté sa créance au jour de son prononcé le 4 juin 2015 la privant ainsi du cours des intérêts au taux Eonia + 3 points l'an courus entre le jour du redressement judiciaire, soit le 15 octobre 2012, et le 4 juin 2015, alors qu'il y a lieu pour la constatation et la fixation de la créance de se placer au jour du redressement judiciaire, sauf à faire perdre à l'établissement bancaire plus de deux ans et demi d'intérêts ; que la banque sollicite ainsi que la créance porte intérêts au taux contractuel à compter du 15 octobre 2012 ;
Considérant que la créance de la Société générale doit porter intérêts contractuels à compter du jugement d'ouverture de la procédure collective du 15 octobre 2012 ; que la somme de 385.069,39 € fixée au passif de la société Albert sans contestation de la part de la Société générale comprenant les intérêts contractuels jusqu'au 19 octobre 2012 doit porter intérêts au taux contractuel à compter du 20 octobre 2012 ; que le jugement sera réformé en ce sens ;
Sur la disproportion de l'engagement de caution de Mme [V] :
Considérant que M. et Mme [V] soutiennent que le cautionnement de Mme [V] était manifestement disproportionné à son patrimoine et à ses revenus puisque selon la fiche de renseignements elle était célibataire, ne disposait d'aucun patrimoine et percevait une rémunération mensuelle brute de 6.000 € depuis le 24 septembre 2008 en qualité de présidente de la société Albert, cette rémunération étant alors aléatoire car dépendante de la santé financière de la société, que son avis d'imposition relatif à ses revenus 2008 indique qu'ils s'élevaient à 28.854 € lui laissant un revenu net mensuel de 2.220 €, que le montant de son engagement était 23,69 fois plus élevé que celui de sa capacité d'épargne et que ses revenus perçus en 2009 (60.491 €) lui laissaient un revenu net mensuel de 4.137 € le montant de son engagement étant alors 11 fois supérieur à ses revenus disponibles ; qu'ils ajoutent qu'en invoquant le défaut de remise de son avis d'imposition lors de l'étude de la demande de prêt la Société générale se prévaut de son propre manquement à l'obligation qui lui est faite de vérifier la proportionnalité du cautionnement qu'elle avait érigé en condition d'octroi du prêt ;
Considérant que la Société générale fait valoir que la disproportion de l'engagement de Mme [V] doit être écartée dès lors que selon la fiche de renseignements remplie par ses soins elle disposait de ressources mensuelles de 6.000 € et qu'elle ne peut se retrancher derrière un avis d'imposition non produit à l'époque ;
Considérant que Mme [V] s'est portée caution à hauteur de 204.750 € le 3 octobre 2008 ; qu'elle a signé une fiche de renseignements le 24 septembre 2008 aux termes de laquelle elle déclarait être célibataire, n'avoir aucun patrimoine et percevoir en tant que président-gérant de la société Albert un salaire mensuel brut de 6.000 € ; que ses biens et revenus étant alors constitués de son seul salaire, l'engagement de caution de Mme [V] était manifestement disproportionné à ses biens et revenus, que son salaire soit évalué à un montant de 6.000 € brut mensuel comme dans la fiche de renseignements ou de 28.854 € annuels comme cela résulte de l'avis d'imposition sur les revenus de 2008 ; que la Société générale ne peut dès lors se prévaloir du cautionnement de Mme [V] ; que le jugement sera réformé sur ce point ;
Sur la réduction de l'engagement de M. [V] :
Considérant que Mme [V] et M. [V] prétendent qu'en application de l'article 1147 du code civil doit être condamné à des dommages-intérêts le créancier professionnel qui manque à son obligation en faisant perdre au cofidéjusseur tout recours contre le cofidéjusseur déchargé de son engagement, que la déchéance du cautionnement de Mme [V] a pour conséquence d'interdire à M. [V] toute action récursoire à son encontre et que la cour devra, en réparation du préjudice subi, réduire la condamnation qu'elle prononcera à son encontre de 25 % correspondant au montant garanti par le cautionnement de Mme [V] ; qu'ils font valoir que le paragraphe II de l'acte de caution invoqué par la Société générale ne fait qu'interdire à M. [V] de contester l'existence même de son engagement en se prévalant de circonstances relatives à son consentement à se porter caution mais ne lui interdit pas de rechercher la responsabilité de la banque à raison de ses fautes commises lors de la formation du contrat et de la réception des cautionnements ou au cours de leur exécution ;
Considérant que la Société générale soutient que la demande de réduction de 25 % de la portée de l'engagement de M. [V] doit être rejetée aux motifs que le cofidéjusseur d'une caution déchargée de son engagement à raison de sa disproportion manifeste ne peut, lorsqu'il est recherché par le créancier, revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article 2314 du code civil faute de transmission d'un droit dont il aurait été privé, que l'article 1147 du code civil invoqué par M. [V] ne s'applique pas aux cautionnements et que selon le paragraphe II de l'acte de caution signé par M. [V] la caution déclare ne pas faire de la situation du cautionné ainsi que de l'existence et du maintien d'autres cautions la condition déterminante de son cautionnement ;
Considérant que M. [V] recherche non l'application de l'article 2314 en sa faveur mais la responsabilité de la banque sur le fondement de l'article 1147 du code civil ; que l'application des dispositions spécifiques aux cautions ne fait pas obstacle à l'application des règles générales de la responsabilité contractuelle telles quel'article 1147 du code civil ;
Considérant qu'en vertu de l'article 2310 du code civil, la caution qui s'est engagée avec une autre pour garantir le même débiteur pour une même dette dispose, après avoir acquitté la dette, d'un recours personnel contre ses autres cofidéjusseurs, chacune pour leur part et portion ; qu'un tel recours de la caution contre son cofidéjusseur n'est possible que dans la mesure où son paiement excède sa part et portion ;
Considérant qu'en l'espèce, M. et Mme [V] se sont rendus cautions du même prêt en limitant chacun leur engagement à hauteur de 614.500 € pour le premier et de 204.750 € pour la seconde ; que la perte par la Société générale de la possibilité de se prévaloir du cautionnement de Mme [V] est dépourvue de toute incidence en ce qui concerne les obligations de M. [V] qui ne peut être poursuivi que pour sa part et portion dans la limite de la somme de 614.500 € pour le paiement de laquelle il n'aurait pu, en tout état de cause, exercer aucun recours contre Mme [V] si la Société générale avait pu se prévaloir de l'engagement de cette dernière ; que M. [V] ne peut donc invoquer aucune faute de la banque à son égard à raison de la perte d'un recours qu'il n'aurait pas pu exercer ; que sa demande de dommages-intérêts doit dès lors être rejetée ;
Sur l'information annuelle de la caution :
Considérant que Mme [V] et M. [V] font valoir que la Société générale n'a pas adressé de lettre d'information annuelle à M. [V] aux 31 mars 2009 et 2010 et que celles envoyées en mars 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 ne satisfont pas aux dispositions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier de sorte que la banque doit être déchue des intérêts échus et impayés représentant une somme de 7.647,08 €, que les paiements effectués par la société Albert de 2009 à 2011 au titre des intérêts (56.051,37 €) doivent venir en déduction de la créance de la banque de même que le paiement des échéances en capital des 3 octobre 2009 et 2010 et le paiement de 89.010 € du 18 octobre 2012 ; qu'ils estiment que la créance s'établit dès lors à l'égard de M. [V] à la somme de 59.956,13 € à réduire de 25 % compte tenu de la perte du recours subrogatoire ;
Considérant que la Société générale indique verser aux débats les lettres d'information annuelle de la caution adressées à M. [V] les 20 mars 2014 et 18 mars 2015 en sus de celles produites aux débats par M. [V] qu'elle a envoyées les 11 mars 2011, 19 mars 2012 et 25 mars 2013 ; qu'elle estime que ces lettres comportent bien la distinction entre principal et intérêts ; qu'elle fait valoir que s'il est considéré que les lettres d'information ne respectent pas toutes les mentions légales exigées, la seule sanction encourue porte sur la déchéance des intérêts échus, sachant que les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement de crédit, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette, et que par application de l'article 1153 du code civil les intérêts au taux légal à compte du 9 décembre 2011 doivent s'appliquer ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement ; que le défaut d'accomplissement de ces formalités emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information et les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ; que l'obligation d'information doit être respectée jusqu'à l'extinction de la dette cautionnée, même après l'assignation de la caution ;
Considérant que sont versées aux débats les lettres d'information que la banque a adressées à M. [V] les 11 mars 2011, 19 mars 2012, 25 mars 2013, 20 mars 2014 et 18 mars 2015 ; que la lettre du 11 mars 2011 indiquant le seul montant du principal restant dû ne respecte pas les mentions légales exigées ; que les autres lettres ne respectent pas non plus les exigences légales dès lors que, si elles font état de la somme totale restant due et des intérêts compris dans cette somme, elles ne distinguent pas du montant restant dû celui de l'indemnité d'exigibilité anticipée que la Société générale décompte pourtant depuis la mise en demeure qu'elle a adressée à la société débitrice et à M. [V] le 9 décembre 2011 ; que la banque doit donc être déchue des intérêts dès l'année 2008 et les paiements effectués par le débiteur principal réputés affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ; que dès lors la créance s'établit au capital versé (630.000 €) déduction faite des versements (deux échéances payées, soit 180.000 €, et un paiement 'Sequoia' de 89.010 €), soit au montant de 360.990 € ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Reçoit la Société générale en son appel incident formé à l'encontre de Me [L] ès qualités ;
Déboute M. [Z] [V] de sa demande de dommages-intérêts ;
Infirme le jugement en ce qu'il a dit que la créance privilégiée de 385.069,39 € fixée au passif de la société Albert porte intérêts au taux EONIA + 3 points l'an à courir à compter de la date du jugement, en ce qu'il a débouté Mme [L] [V] de sa demande de constat du caractère disproportionné de son cautionnement et l'a condamnée à payer à la Société générale la somme de 385.069,39 € dans la limite d'une somme maximum de 204.250 € et celle de 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et ce qu'il a condamné M. [Z] [V] à payer à la Société générale la somme de 385.069,39 € ;
Statuant sur les chefs infirmés,
Dit que la créance privilégiée de 385.069,39 € fixée au passif de la société Albert porte intérêts au taux EONIA + 3 points à compter du 20 octobre 2012 ;
Dit que la Société générale ne peut se prévaloir du cautionnement souscrit par Mme [L] [V] en sa faveur le 3 octobre 2008 ;
Déboute la Société générale de toutes ses demandes formées à l'égard de Mme [L] [V] ;
Condamne M. [Z] [V] à payer à la Société générale la somme de 360.990 € avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2011 dans la limite d'une somme maximum de 614.500 € ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
Condamne M. [Z] [V] à payer à la Société générale la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [Z] [V] aux dépens d'appel et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Aude RACHOU, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, La présidente,