COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 SEPTEMBRE 2017
R.G. N° 14/04374
AFFAIRE :
SASU T SYSTEMS FRANCE
C/
[F] [W]
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 septembre 2014 par le conseil de prud'hommes - formation paritaire - de NANTERRE
Section : encadrement
N° RG : F10/00177
Copies exécutoires délivrées à :
SELASU CORNILLIER AVOCATS
Me Amale EL MOUNFALOUTI
Copies certifiées conformes délivrées à :
SASU T SYSTEMS FRANCE
[F] [W]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SASU T SYSTEMS FRANCE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Lise CORNILLIER de la SELASU CORNILLIER AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, substituée par Me David BUSCHSENSCHUTZ, avocat au barreau de Paris, vestiaire : D0350
APPELANTE
****************
Monsieur [F] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
MAROC
représenté par Me Amale EL MOUNFALOUTI, avocate au barreau de METZ, vestiaire : 125
INTIMÉ
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 juin 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Clotilde MAUGENDRE, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,
Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,
Madame Monique CHAULET, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre (section encadrement) du 26 septembre 2014 qui a :
- prononcé la prise d'acte de la rupture du contrat de M. [F] [W] aux torts exclusifs de son employeur, la SASU T Systems France,
- dit que la prise d'acte produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la SASU T Systems France à payer à M. [F] [W] les sommes suivantes :
. 9 761,16 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
. 976,12 euros à titre de congés payés sur préavis,
. 6 496,57 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
. 900 euros à titre de rappel de salaire d'octobre, novembre et décembre 2009,
. 90 euros à titre d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire,
- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal du jour de la prise d'acte soit le 7 janvier 2010,
- condamné la SASU T Systems France à payer à M. [F] [W] les sommes suivantes :
. 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SASU T Systems France à délivrer à M. [W] une attestation Pôle emploi rectifiée, les bulletins de salaire rectifiés d'octobre 2009 à janvier 2010 et un certificat de travail conforme,
- prononcé l'exécution provisoire de la décision à intervenir conformément aux dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,
- débouté la SASU T Systems France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SASU T Systems France aux dépens,
Vu la déclaration d'appel adressée au greffe le 10 octobre 2014 et les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour la SASU T Systems France, qui demande à la cour de :
- constater que M. [W] a accepté la modification de son contrat de travail,
en conséquence,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 26 septembre 2014 en ce qu'il a qualifié la prise d'acte de rupture du contrat de travail de M. [W] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- dire que la prise d'acte de M. [W] produit les effets d'une démission,
- débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [W] aux entiers dépens,
- condamner M. [W] au paiement d'une somme de 1 500 euros à titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour M. [W], qui demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la SASU T Systems France, dit que la prise d'acte produirait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et constaté les manquements graves et répétés de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail,
statuant à nouveau,
- condamner la SASU T Systems France à lui payer les sommes suivantes :
. 10 125 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
. 1 012,50 euros à titre de congés payés sur préavis,
. 6 750 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
. 900,01 euros à titre de rappel de salaire d'octobre, novembre et décembre 2009,
. 90 euros à titre d'indemnité de congés payés sur cette somme,
ces sommes avec intérêts au taux légal au jour de la prise d'acte soit le 7 janvier 2010,
. 27 000 euros (8 mois de salaire) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 1 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SASU T Systems France à lui délivrer sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document à compter de l'arrêt à intervenir :
. un nouveau certificat de travail conforme,
. les fiches de salaire rectifiées d'octobre 2009 à janvier 2010,
. une attestation rectifiée et conforme destinée au Pôle emploi,
- condamner la SASU T Systems France aux dépens,
SUR CE LA COUR,
Considérant que la SASU T Systems France est une société de services et d'ingénierie informatique (SSII) et a pour principale activité l'ingénierie, l'intégration de systèmes et la tierce maintenance applicative qui consiste à concevoir, réaliser et installer un système informatique répondant à des besoins spécifiques ;
Considérant que M. [F] [W] a été engagé par la société T-Systems Telecommunications, en qualité de comptable, par contrat à durée indéterminée en date du 13 avril 2004 ;
Que par convention tripartite passée entre M. [W], la société T-Systems Télécommunications et la SASU T Systems France, en date du 30 juin 2008, le contrat de travail de M. [W] a été transféré à la SASU T Systems France ;
Qu'à la suite de ce transfert, M. [W] a bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée signé par la SASU T Systems France, l'engageant en qualité de consultant junior, prévoyant la reprise de l'ancienneté acquise au sein de la société d'origine et une rémunération fixe mensuelle brute d'un montant de 2 580 euros portée à compter du 1er décembre 2008 au montant de 3 000 euros ;
Que les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale de bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseil, sociétés de conseil dite SYNTEC ;
Que par courrier du 3 juillet 2009, M. [W] a informé la SASU T Systems France de sa décision de démissionner de son poste de travail de consultant fonctionnel et a demandé à être dispensé d'exécuter son préavis ;
Que, par courrier du 20 août 2009, il a informé son employeur de son souhait de rétracter sa démission en expliquant que son contexte personnel a changé ;
Que, par courrier du 28 septembre 2009, la SASU T Systems France a informé M. [W] qu'elle acceptait la rétractation de sa démission et que son contrat de travail se poursuivrait selon les mêmes conditions ;
Que le 1er octobre 2009, M. [W], qui jusqu'alors travaillait en région parisienne, a pris ses fonctions sur le site de [Localité 1] ;
Que, par courrier en date du 9 octobre 2009, la SASU T Systems France a transmis à M. [W] un avenant à son contrat de travail confirmant son affectation à [Localité 1] à partir du 1er octobre 2009 et la fixation de sa rémunération fixe au montant de 2 700 euros, ce qui était constitutif d'une diminution de son salaire ;
Que par courrier du 23 novembre 2009, M. [W], affirmant que la baisse de sa rémunération de 10 % n'a pas été évoquée avec lui avant sa mutation à [Localité 1], a notifié à la SASU T Systems France son refus de signer l'avenant ;
Que, par courrier du 7 janvier 2010, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société en lui reprochant de lui imposer une diminution de son salaire ;
Que, par requête du 11 janvier 2010, il a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles tendant à faire qualifier la prise d'acte de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Considérant, sur la rupture, que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués étaient d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que la charge de la preuve des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur à l'appui de sa prise d'acte pèse sur le salarié ;
Que M. [W] soutient qu'il a été informé tardivement par son employeur que sa mutation à [Localité 1] serait accompagnée d'une baisse de rémunération et que, sans son accord exprès, la SASU T Systems France n'avait pas le droit de lui imposer comme elle l'a fait la baisse de son salaire ;
Que la SASU T Systems France réplique que lorsqu'il a renoncé à sa démission M. [W] a négocié avec elle les conditions de son retour dans la société car il souhaitait un poste à [Localité 1] ; qu'elle affirme qu'il lui a alors été indiqué que les mutations en province impliquaient une diminution de rémunération de 10 % et qu'il a accepté expressément cette condition ;
Qu'il résulte de l'échange de mails produit au débat que M. [X], chargé de ressources humaines, par mail du 31 août 2009 a indiqué à M. [W] qu'il souhaitait le recevoir pour évoquer avec lui sa demande de rétractation de sa démission ; que dans un mail du 22 septembre 2009 adressé à M. [W], M. [B], Technical Manager [Localité 2], a écrit « Comme évoqué ensemble ce matin, les règles de mobilité de [Localité 2] à [Localité 1] impliquent une diminution de ton salaire brut de 10 %. Cette règle s'applique à tous les collaborateurs dans le sens [Localité 2]/Province et inversement. A ta disposition si tu as besoin de plus amples renseignements »; que par mail du 25 septembre 2009 à 10h23 M. [W] a répondu « J'ai bien noté que la clause de mobilité implique une diminution de salaire brut de 10 % » et a demandé que lui soit envoyée remplie l'attestation de l'organisme qui gère le 1 % logement ;
Que le mail de M. [B] du 22 septembre 2009 vaut notification au salarié de la diminution de son salaire et que le mail de celui-ci du 25 septembre 2009 vaut acceptation ;
Que l'employeur a ainsi respecté les termes de la convention collective qui prévoit que toute modification apportée à un élément substantiel du contrat en cours doit faire l'objet d'une notification écrite de la part de l'employeur et doit être acceptée par l'intéressé ;
Que M. [W] ne peut donc valablement se prévaloir des termes du courrier de son employeur du 28 septembre 2009 acceptant la rétractation de sa lettre de démission en précisant que son contrat de travail continuera dans les mêmes conditions pour affirmer qu'il ignorait que sa mutation serait accompagnée d'une réduction de son salaire et qu'il ne l'avait pas acceptée ;
Que c'est donc à tort qu'il reproche à son employeur lui avoir imposé illicitement à compter du 1er octobre 2009 une diminution de son salaire ;
Qu'il convient donc, infirmant le jugement, de dire que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'une démission et de débouter M. [W] de l'intégralité de ses demandes ;
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement par mise à disposition et contradictoirement,
Infirme le jugement,
Dit que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'une démission,
Déboute M. [W] de l'intégralité de ses demandes,
Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [W] aux entiers dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.
Le greffier,Le président,