COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
19e chambre
ARRET N°
contradictoire
DU 31 JANVIER 2018
N° RG 16/00590
AFFAIRE :
[H] [Q] veuve [V]
C/
[Y] [A]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PONTOISE
Section : Encadrement
N° RG : 15/00065
Copies exécutoires délivrées à :
Me Philippe LEJARD
Me David VAN DER BEKEN
Copies certifiées conformes délivrées à :
[H] [Q] veuve [V]
[Y] [A]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [H] [Q] veuve [V]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Assistée de Me Philippe LEJARD, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 112 substitué par Me Gilles SALETEN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 453
APPELANTE
****************
Monsieur [Y] [A]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représenté par Me David VAN DER BEKEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1857
INTIMÉ
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Claire GIRARD, Président,
Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,
Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,
FAITS ET PROCÉDURE :
Par contrat à durée déterminée du 7 mars 2001 qui s'est prolongé jusqu'au 21 novembre 2011, Mme [H] [Q], veuve [V] (ci-après, Mme [Q]), a été embauchée comme secrétaire-comptable, coefficient 214, par M. [Y] [A] pour lequel elle avait déjà travaillé par le passé, de 2000 à 2006, puis quelques semaines en 2009. A l'issue de ce contrat, elle a été engagée par M. [A] par contrat à durée indéterminée à effet au 21 novembre 2011, s'inscrivant dans le cadre d'un contrat unique d'insertion, toujours en qualité de secrétaire-comptable, coefficient 215, pour une durée de travail de 27 heures par semaine réduite ultérieurement par 2 avenants en date des 1er août 2013 et 17 septembre 2014, à 24 heures puis 16 heures hebdomadaires. Dans le dernier état de la relation contractuelle, elle bénéficiait du statut de cadre et percevait une rémunération conduisant à une moyenne de salaire sur les 3 derniers mois de 1 932,85 euros brut selon la salariée, 1 765,67 euros selon la lettre de licenciement.
Le 15 octobre 2014, une rupture conventionnelle a été signée entre les parties mais n'a pas abouti du fait de la rétractation de l'employeur.
Le 21 octobre 2014, Mme [Q] a présenté un arrêt de travail jusqu'au 31 octobre 2014, pour maladie ne relevant pas de la législation sur les risques professionnels, prolongé par la suite jusqu'au 10 décembre 2014.
Par lettre recommandée du 28 octobre 2014 lui notifiant sa mise à pied conservatoire, Mme [Q] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 12 novembre 2014 puis s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par courrier adressé sous la même forme le 18 novembre 2014.
Au moment de la rupture du contrat de travail, M. [A] employait moins de onze salariés. La convention collective applicable à la relation de travail est celle du personnel des cabinets médicaux du 14 octobre 1981, étant précisé que M. [A] est médecin anesthésiste et médecin conseil auprès des assurances.
Contestant son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [Q] a saisi le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise le 2 octobre 2015 afin d'obtenir diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail et des rappels de salaires.
Par jugement du 14 janvier 2016 auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, prétentions et moyens antérieurs des parties, le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise, section encadrement, a débouté Mme [Q] de l'ensemble de ses demandes, M. [A] de ses demandes reconventionnelles et mis les dépens à la charge de Mme [Q].
Mme [Q] a régulièrement relevé appel du jugement par déclaration formée au greffe le 12 février 2016.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 29 novembre 2017, Mme [Q] demande à la cour d'infirmer le jugement et :
- dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner M. [A] à lui payer les sommes suivantes :
* 1 038,19 euros au titre de la mise à pied conservatoire outre 103,81 euros au titre des congés payés y afférents,
* 5 798,55 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 579,85 euros au titre des congés payés y afférents,
* 1 525,20 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
* 3 850 euros à titre de dommages-intérêts pour remise tardive et erronée de documents sociaux,
* 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'exécution provisoire,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 29 novembre 2017, M. [Y] [A] prie la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter Mme [Q] de l'ensemble de ses demandes, dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et statuer ce que de droit sur les dépens.
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 29 novembre 2017,
Vu la lettre de licenciement,
SUR CE :
La lettre de licenciement fixant les limites du litige est motivée dans les termes suivants :
'[...] nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave, dont les motifs sont les suivants.
Vous étiez employée dans notre cabinet depuis le 07 mars 2011 et occupiez, au dernier état, un emploi de secrétaire comptable, coefficient 215, au salaire brut moyen de 1 765,67 €, pour un temps partiel passé de 24 heures à 16 heures hebdomadaires depuis le 1er octobre 2014.
Ainsi, votre classification et votre rémunération - que vous gériez vous-même en toute confiance de ma part - étaient celles d'un cadre rémunéré plus d'une fois et demie le montant du salaire brut minimal conventionnel.
Vous comprendrez aisément que, pour ces seules raisons, il était attendu de votre part d'exercer vos fonctions avec la rigueur et la loyauté requises.
A fortiori lorsque j'avais accepté, en toute bonne foi, de vous laisser pour partie exercer depuis votre domicile.
Or, nous avons tout à fait récemment découvert qu'en réalité, et depuis plusieurs mois, vous vous étiez totalement désintéressé du plein exercice de vos responsabilités.
Alors que vos obligations contractuelles et conventionnelles vous imposaient, outre les diverses tâches du secrétariat, la tenue de la comptabilité du cabinet, de la paie, ainsi que des charges sociales et fiscales, il s'est avéré :
- que vous ne m'avez pas alerté sur la chute brutale des revenus du cabinet, découlant notamment de l'important retard apporté à la frappe des rapports d'expertise, dont votre unique collègue de travail avait la charge ;
- qu'aucun double des factures émises par le cabinet n'avait été conservé par vos soins ;
- que le suivi des encaissements et des décaissements ne faisait l'objet d'aucun reporting de votre part auprès de moi ;
- que plusieurs patients se sont plaints de ne pas parvenir à joindre le cabinet, et ce alors même que, lorsque d'autres y parvenaient, les RDV étaient planifiés à plusieurs mois, sans aucune justification calendaire ;
- que de très nombreuses erreurs affectent la tenue de la comptabilité de mon cabinet comme le respect de ses obligations déclaratives, lesquelles vous étaient pourtant spécialement dévolues.
Il est donc établi que, malgré les conditions de travail exceptionnellement avantageuses dont vous avez bénéficié au sein du cabinet, vous avez délibérément négligé vos obligations contractuelles, et ce au préjudice de l'activité professionnelle et économique du cabinet, de sa réputation et de l'intérêt des patients.
Il s'en suit une perte absolue de confiance, laquelle rend inenvisageable la poursuite de nos relations contractuelles.
Pour dire clairement les choses, vous aviez bénéficié d'une totale liberté pour gérer les divers aspects administratifs et comptables du cabinet dont je ne pouvais m'occuper à raison de mon activité médicale.
Je vous faisais donc une confiance aveugle, dont témoignent les substantielles augmentations de salaires dont vous avez bénéficié au cours de votre carrière au sein du cabinet, ainsi que la classification de cadre qui vous avait été reconnue, tout simplement parce que j'avais jusqu'alors toujours signé, sans vérification, le moindre document que vous me présentiez.
Cette situation qui a d'ailleurs failli se reproduire tout à fait récemment lorsque j'ai accepté de vous signer, une fois de plus en toute confiance, un formulaire de « rupture conventionnelle » que vous n'aviez pas hésité à me présenter durant votre arrêt de travail pour maladie.
En effet, la signature de ce formulaire étant intervenue à votre initiative sans aucun respect de la procédure s'y rapportant (étant rappelé que vous aviez la charge du respect de la législation sociale...), la poursuite de cette procédure m'aurait exposé à des conséquences prud'homales, si d'aventure je ne m'étais pas rétracté...
Vous avez donc, indubitablement, abusé de ma confiance, pour en tirer des avantages salariaux et organisationnels sans rapport avec la qualité réelle de votre travail, telle qu'elle s'est brutalement (mais aussi cruellement) révélée à moi au cours de ces dernières semaines, puisque j'ai été contraint par la force des choses de me plonger dans la gestion administrative et comptable du cabinet du fait de votre absence pour maladie et de celle votre collègue affectée plus spécialement à des tâches de secrétariat de direction, et notamment à la frappe des rapports d'expertise. Pour ces raisons, je n'exclue pas de donner à cette affaire toutes les suites qu'elle mériterait, y compris pénales.
D'ores et déjà, j'ai mandaté un expert-comptable aux fins d'audit et de reprise de la comptabilité du cabinet, de même que j'ai fait constater et établir l'ensemble des manquements professionnels qui vous sont imputables.
Rendez-vous seulement compte que, sur une activité économique de l'ordre de 10 000 € TTC pour la partie « expertise », les charges sociales du personnel de secrétariat pesaient pour 70 %, sans que jamais vous n'ayez cru devoir attirer mon attention sur ce ratio exceptionnellement élevé.
Vous étiez pourtant destinataire de toutes les informations qui auraient nécessairement dû vous contraindre, au regard de vos fonctions, et à tout le moins compte tenu de la qualité de cadre que vous aviez revendiquée et qui vous avait été reconnue, à m'alerter de cette dérive.
A mes yeux, il est donc clairement établi que vous avez délibérément privilégié votre confort personnel au détriment de mon activité professionnelle, exécutant ainsi de mauvaise foi, et non sans une certaine déloyauté, le contrat de travail qui nous liait.
Au surplus, vous avez manifestement agi de mèche avec votre collègue de travail, ce qui caractérise une forme de concertation frauduleuse incompatible avec la poursuite de votre contrat de travail.
Le délaissement de vos tâches de gestion a mis en péril mon activité.
Les faits qui vous sont reprochés, ainsi que leurs conséquences, sont d'une telle gravité qu'ils rendent impossible votre maintien au sein des effectifs du cabinet pendant la durée de votre préavis.[...]'
La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve repose sur l'employeur qui l'invoque.
Il est reproché à la salariée de s'être totalement désintéressée du plein exercice de ses responsabilités de sorte que l'employeur a perdu confiance en elle et de n'avoir pas :
- alerté M. [A] de la chute brutale des revenus du cabinet,
- conservé un double des factures émises par le cabinet,
- procédé à des reporting sur le suivi des encaissements,
Il lui est également fait reproche :
- des difficultés que rencontraient les patients à joindre le cabinet et de la manière dont étaient planifiés les rendez-vous,
- des erreurs affectant la tenue de la comptabilité,
- d'avoir abusé de la confiance de l'employeur pour en tirer des avantages salariaux et organisationnels sans rapport avec la qualité de son travail,
- de s'être concertée frauduleusement avec sa collègue de travail.
Mme [Q] de son côté, soutient que son licenciement est dénué de toute cause légitime et sérieuse et conteste l'ensemble des griefs qui lui sont reprochés faisant valoir que ceux-ci au surplus relèvent de l'insuffisance professionnelle et ne peuvent de ce fait, justifier un licenciement disciplinaire.
La cour relève tout d'abord que contrairement à ce que soutient la salariée, les reproches formés à son encontre ne relèvent pas que de l'insuffisance professionnelle qui se définit comme l'impossibilité pour un salarié d'exécuter sa tâche, malgré sa bonne volonté, puisqu'au contraire l'employeur invoque la volonté délibérée de Mme [Q] d'abuser de sa confiance, la concertation frauduleuse avec l'autre salariée du cabinet, sa volonté de privilégier son confort personnel et l'exécution déloyale du contrat de travail.
La cour rappelle ensuite que la perte de confiance ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement, même quand elle repose sur des éléments objectifs et que seuls ces éléments objectifs peuvent le cas échéant constituer une cause de licenciement.
En premier lieu, l'employeur reproche à la salariée de ne pas l'avoir alerté sur la chute brutale des revenus du cabinet, découlant notamment de l'important retard apporté à la frappe des rapports d'expertise dont son unique collègue de travail avait la charge et ce, de mèche avec celle-ci. Il fait également état du ratio exceptionnellement élevé des charges sociales du personnel de secrétariat qui pesait pour 70 % sur l'activité économique générée par les expertises sur lequel la salariée aurait dû l'alerter.
La cour relève tout d'abord qu'il n'est pas justifié du retard de frappe allégué, en effet, l'employeur en communiquant trois factures établies l'une, 16 ans après la réalisation d'un examen, les deux autres environ un an après, n'établit pas que les retards de facturation étaient dus aux délais de frappe dont Mme [Q] n'était d'ailleurs pas chargée. En effet, le contrat de travail de la salariée lui donnait pour mission 'la tenue de la comptabilité du cabinet, de la paie, des charges sociales et fiscales' et de 'diverses tâches de secrétariat'. Par ailleurs, Mme [Q] s'est également vu confier la comptabilité personnelle de M. [A] et elle ne le conteste pas. La dégradation du chiffre d'affaires résultant de l'activité d'expertise est justifiée par l'attestation d'expert-comptable établie par le cabinet EMS audit puisque l'activité passe de 173 120,21 euros en 2013 à 140 656,08 euros en 2014. Cependant aucun élément du dossier ne permet de retenir que dans ses missions, Mme [Q], simplement chargée de la comptabilité du cabinet même en qualité de cadre, se devait de prévenir l'employeur de la baisse du chiffres d'affaire généré par les expertises ou du ratio élevé des charges sociales sur cette activité, d'autant que l'employeur a également un devoir de contrôle de sa propre activité. Le grief ne sera donc pas retenu.
Sur les négligences dans la tenue et le suivi comptable du cabinet, l'employeur reproche à la salariée de n'avoir conservé aucun double des factures émises par le cabinet, de n'avoir fait aucun reporting du suivi des encaissements et des décaissements et de n'avoir pas procédé aux déclarations obligatoires. Sur ce dernier point, l'employeur justifie de l'absence de déclaration des salaires pour l'année 2013 en communiquant un courrier de l'organisme HUMANIS en date du 4 mars 2015. Le surplus des griefs n'est pas justifié, d'autant que le 13 octobre 2014, Mme [Q] indiquait à l'employeur qu'elle allait imprimer les notes d'honoraires des années 2012 à 2014 ce qui implique qu'elles avaient été conservées. La cour ne retiendra donc de cette série de reproches que la non déclaration à l'organisme HUMANIS pour l'année 2013, l'absence de reporting n'étant pas davantage justifiée.
S'agissant des plaintes des patients ne parvenant pas à joindre le cabinet et des planifications des rendez-vous à plusieurs mois sans justification calendaire, l'employeur verse aux débats l'attestation d'un seul patient (M. [K] [G], pièce 22) qui indique que pour prendre rendez-vous en urgence avec le Dr [A], ou pour renouveler une ordonnance, il a toujours été obligé de l'appeler sur son téléphone portable, mentionnant avoir des difficultés à joindre le secrétariat qui ne rappelait pas malgré les messages laissés sur le répondeur ou rappelait trop tard. Compte tenu de l'imprécision de l'attestation sur le nombre d'appels restés sans réponse, leur date et le caractère urgent des demandes (il est question de renouvellement d'ordonnance) et du fait que Mme [Q] ne travaillait qu'à temps partiel, à raison de 16 heures hebdomadaire en dernier lieu, le grief ne sera pas retenu par la cour. Par ailleurs, la planification lointaine des rendez-vous sans nécessité n'est aucunement démontrée. La cour ne retiendra donc aucun des reproches formés par l'employeur de ces chefs.
S'agissant des erreurs affectant la tenue de la comptabilité, dans ses écritures, l'employeur invoque des erreurs et des incohérences sur les bulletins de paie des deux salariées dont il entend justifier en communiquant (pièce 12) la copie de deux pages à en-tête OFCP, non datées, qui seraient extraites d'un audit qui aurait été effectué à une date qui n'est pas justifiée, comme le relève la salariée, de sorte que l'employeur n'établit pas suffisamment la matérialité du grief. Quant aux factures de l'expertise réalisée en 1998 et adressée en 2014, la cour observe qu'il n'est pas justifié que l'absence de facturation est imputable à la salariée qui ne travaillait pas pour M. [A] en 1998. La communication des 2 autres facturations établies un an après l'examen médical ne suffit pas à établir l'erreur ou la négligence de la salariée compte tenu du grand nombre de facturations qu'elle a établies pendant son activité au sein du cabinet médical. Le grief ne sera donc pas retenu.
Enfin, l'employeur n'établit en rien la concertation frauduleuse avec l'autre salariée, ni l'abus de confiance dont il aurait été victime pour la signature de la convention de rupture conventionnelle ou l'octroi à Mme [Q] de la possibilité de travailler à domicile caractérisant une exécution déloyale du contrat de travail.
En définitive, les seuls griefs retenus par la cour ne sont pas de nature à rendre impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise ni de nature à constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour infirmera donc le jugement sur ce point.
Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Sur la base des 12 derniers mois de salaire précédant le licenciement, la cour retiendra une moyenne de salaire de 1 851,94 euros brut et une ancienneté de 3 ans, 8 mois et 11 jours.
En conséquence, l'indemnité conventionnelle de licenciement s'établit en application de l'article 25 de la convention collective à 1 461,99 euros. Le jugement sera infirmé de ce chef.
S'agissant de l'indemnité compensatrice du préavis, la cour allouera à Mme [Q] la somme de 1 851,94 euros × 3 correspondant aux salaires et avantages qu'elle aurait perçus si elle avait travaillé pendant le délai de congés de 3 mois prévu par la convention collective (article 25), soit une somme de 5 555,82 euros outre 555,58 euros au titre des congés payés y afférents. Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur le rappel de mise à pied conservatoire, il résulte des bulletins de salaire du mois de novembre 2014 qu'une somme de 1 038,19 euros brut a été retenue à la salariée au titre de la mise à pied conservatoire. L'employeur sera donc condamné à lui payer cette somme outre 103,81 euros au titre des congés payés y afférents. Le jugement sera infirmé de ce chef.
S'agissant des dommages-intérêts pour licenciement abusif, Mme [Q], employée depuis plus de deux ans dans une structure comprenant moins de onze salariés, doit être indemnisée du préjudice dont elle justifie en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L. 1235-5 du code du travail. Compte tenu de l'ancienneté de la salariée (3 ans), de son âge (née en 1961), de sa rémunération, des circonstances du licenciement, de ce qu'elle justifie de sa situation postérieure au licenciement, son préjudice sera entièrement réparé par l'allocation d'une somme de 6 000 euros et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur les dommages-intérêts pour remise tardive et erronée de documents sociaux :
Mme [Q] établit que l'employeur a volontairement tardé à lui remettre les documents légaux que lui imposait son arrêt maladie et le préjudice qu'elle a subi puisque par courrier du 3 décembre 2014, la caisse primaire d'assurance maladie lui indiquait ne pouvoir lui payer ses indemnités journalières en raison de l'absence de l'attestation de salaire de l'employeur qui expliquait à la salariée par mail du 21 janvier 2015 qu'elle bénéficiait de la pension de réversion de son conjoint décédé. Il lui sera par conséquent alloué au titre de son préjudice la somme de 1 000 euros.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Eu égard à la solution du litige, le jugement sera infirmé en ce qu'il a statué sur les dépens lesquels seront mis à charge de M. [A] en première instance et en cause d'appel et confirmé en ce qu'il a statué sur l'article 700 du code de procédure civile. L'employeur devra également verser à la salariée une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant par mise à disposition au greffe et contradictoirement,
Infirme le jugement sauf en ce qu'il a statué sur l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
Condamne M. [Y] [A] à payer à madame [H] [Q] veuve [V] les sommes de :
- 1 038,19 euros au titre du rappel de mise à pied conservatoire outre 103,81 euros au titre des congés payés y afférents,
- 5 555,82 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 555,58 euros au titre des congés y afférents,
- 1 461,99 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 6 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour remise tardive et erronée des documents sociaux,
- 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Y] [A] aux dépens de première instance et d'appel.
- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Claire GIRARD, président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,