COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53B
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 03 MAI 2018
N° RG 16/08288
AFFAIRE :
[N] [C]
...
C/
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS ET D'ILE DE FRANCE ....
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Octobre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° chambre : 2
N° Section :
N° RG : 14/09897
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Pierre BORDESSOULE DE BELLEFEUILLE, avocat au barreau de VERSAILLES,
SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES -
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TROIS MAI DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [N] [C]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Pierre BORDESSOULE DE BELLEFEUILLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 392
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2016/014816 du 24/11/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
Madame [Y] [P]
née le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 2]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Pierre BORDESSOULE DE BELLEFEUILLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 392
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2016/016237 du 26/04/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANTS
****************
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS ET D'ILE DE FRANCE Société Civile Coopérative à personnel et capital variable, régie par le livre V du Code Rural, Immatriculée au RCS DE PARIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège.
N° SIRET : D 7 75 665 61515
[Adresse 2]
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 018845 -
Représentant : Me Adeline DASTE-BRAUT de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Mars 2018, Madame Ghislaine SIXDENIER, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Patricia GRASSO, Président,
Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,
Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO
FAITS ET PROCEDURE,
Par contrats en date du 11 juin 2005, M. [C] a souscrit auprès de la société « Caisse Régionale de Crédit Agricole de Paris et d'Île-de-France » -la CRCA- deux prêts, de 27.000 et 13.500 euros, destinés notamment à financer l'acquisition d'un bien immobilier situé [Adresse 1].
Par contrats en date du 20 mai 2010, M. [C] et Mme [P] ont souscrit auprès de la même société trois prêts immobiliers de 57.000, 75.600, et 50.400 euros, destinés à financer l'acquisition d'un bien situé [Adresse 3]) ; la société Crédit Logement s'est portée caution des prêts.
A compter des 5 juin et 5 juillet 2011, M. [C] et Mme [P] n'ont plus été en mesure d'honorer les échéances de leurs emprunts.
Ils ont saisi par requête le président du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-laye qui, par ordonnance, a ordonné la suspension de leurs obligations envers la banque pour une durée de douze mois, dit qu'au terme de la période de suspension, la durée des contrats sera prolongée de douze mois et que pendant les délais de grâce, les sommes dues ne produiraient pas d'intérêts.
Par ordonnance en date du 24 mai 2012, le président du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye a de nouveau prononcé la suspension des remboursements pour une durée de six mois.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 10 octobre 2014, la banque a adressé à M. [C] et Mme [P] une mise en demeure d'acquitter les échéances impayées en visant la déchéance du terme des contrats.
Les emprunteurs n'ont pas déféré à la mise en demeure de payer.
Par exploit en date du 7 novembre 2014, la banque a fait assigner M. [C] et Mme [P] devant le tribunal de grande instance de Versailles.
Par ordonnance en date du 18 janvier 2016, le juge de la mise en état a débouté M. [C] et Mme [P] de leur demande principale tendant à voir ordonner la production des contrats de cautionnement de la société Crédit Logement.
La CRCA, demandeur reconventionnel à l'incident, a également été déboutée de sa demande de production des pièces relatives au litige opposant M. [C] et Mme [P] à la société Pacifica, assureur du bien acquis à [Localité 3].
Par jugement rendu le 11 octobre 2016, le tribunal de grande instance de Versailles a :
-rejeté les fins de non-recevoir soulevées,
-déclaré l'action de la banque recevable comme non prescrite,
-condamné M. [C] à verser à la banque, au titre du prêt d'un montant initial de 27.000 euros contracté le 11 juin 2005 :
*la somme de 19.223 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 3,65% à compter du 10 octobre 2014 jusqu'à parfait paiement,
*la somme de 1 euro au titre de l'indemnité forfaitaire de résiliation,
-condamné solidairement M. [C] et Mme [P] à verser à la banque, au titre des emprunts contractés le 10 mai 2010, les sommes suivantes :
au titre du prêt d'un montant initial de 57.000 euros :
- 59.559,5 euros, somme qui portera intérêts au taux contractuel de 3,8% à compter du 10 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement,
- 1 euro au titre de l'indemnité forfaitaire de résiliation,
au titre du prêt d'un montant initial de 75.600 euros :
- 74.386,49 euros, somme qui portera intérêts au taux contractuel de 3,70% à compter du 10 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement,
- 1 euro au titre de l'indemnité forfaitaire de résiliation,
au titre du prêt d'un montant initial de 50.400 euros :
- 52.715,59 euros, somme qui portera intérêts au taux contractuel de 4% à compter du 10 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement,
1 euro au titre de l'indemnité forfaitaire de résiliation,
-condamné solidairement M. [C] et Mme [P] à payer à la banque la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-ordonné l'exécution provisoire de la décision,
-débouté les parties du surplus de leurs demandes,
-condamné solidairement M. [C] et Mme [P] aux dépens, lesquels comprendront le coût des inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoires, et qui pourront être recouvrés directement par la SCP Courtaigne Flichy Daste et Associés sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Le 23 novembre 2016, M. [C] et Mme [P] ont interjeté appel de la décision.
Dans leurs conclusions transmises le 11 avril 2017, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [C] et Mme [P], appelants, demandent à la cour de :
À titre principal,
-infirmer le jugement entrepris quant aux points critiqués dans les présentes et statuant à nouveau,
-dire et jugerles appelants recevables et bien fondés en leurs moyens, fins et conclusions,
En conséquence,
-déclarer la banque irrecevable en son action et, subsidiairement, mal fondée,
-rejeter les demandes adverses et subsidiairement, l'en débouter,
À titre principal, sur les fins de non-recevoir,
-dire que les ordonnances du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye des 10 juin 2011 et 24 mai 2012 n'ont pas interrompu le délai de deux ans,
-constater que de toutes les façons, l'action intentée par la banque intervient plus deux années après le premier incident de paiement non régularisé et même plus de deux années après les requêtes et ordonnances du juge du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye comme étant du 10 juin 2011 et 24 mai 2012,
-déclarer prescrite l'action de la banque, au visa des articles L. 137-2, L. 311-52 du code de la consommation et 2241 du code civil,
-en conséquence, déclarer la banque irrecevable en son action,
-constater que la banque n'a pas actionné la caution,
-dire que c'est le Crédit Logement qui eût dû être assigné par la banque et régler en lieu et place des appelants,
-donner acte aux appelants de ce que ce moyen ne constitue nullement une reconnaissance de dette à 'égard de la banque ou de la caution,
En conséquence :
-déclarer la banque irrecevable en son action contre les appelants,
À titre subsidiaire,
-débouter la banque mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions au visa de l'article 1103 du code civil,
-dire que la banque ne rapporte pas la preuve du montant de ses soi-disant créances,
En conséquence,
-la débouter de sa demande en paiement et ce, tant en principal, qu'en intérêts, frais et autres pénalités,
À titre infiniment subsidiaire,
-voir accorder aux appelants un moratoire d'au moins vingt-quatre mois,
-les voir décharger des intérêts contractuels et autres pénalités contractuelles et ce, depuis le premier impayé,
-voir dire que les condamnations ne pourraient être assorties que de l'intérêt légal,
En tout état de cause,
-condamner la banque à verser à chacun des appelants, une somme au moins équivalente aux sommes réclamées par la partie adverse -avec compensation légale- et, en tout état de cause, à une somme minimale de 5.000 euros réparation du préjudice qu'elle leur a causé,
-condamner la partie adverse à verser à Maître Pierre Bordessoule de Bellefeuille une somme de 2.500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile, sous réserve que Maître Pierre Bordessoule de Bellefeuille renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.
-condamner la partie adverse aux entiers dépens lesquels seront recouvrés par Maître Pierre Bordessoule de Bellefeuille dans le cadre des règles applicables à l'aide juridictionnelle.
Au soutien de leurs demandes, M. [C] et Mme [P] font valoir :
-que la banque ne pouvait agir en paiement contre le débiteur principal avant d'avoir actionné la caution ;
-que l'action de la banque était prescrite, car le délai de prescription biennale de l'article L. 137-2 du code de la consommation commence à courir à la date du premier incident de paiement non régularisé ; qu'il est nécessairement exclu de faire courir ce délai à compter de chacun des termes successifs ; que les premiers impayés, en l'espèce, datent du 5 juin 2011, tandis que les emprunteurs ont été assignés en paiement le 7 novembre 2014 ; que les ordonnances du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye des 10 juin 2011 et 24 mai 2012 n'ont aucunement interrompu le délai de deux ans ;
-que la banque n'a pas communiqué un relevé exact des sommes versées par les concluants, ainsi que les dates des dits versements ;
-que les remboursements prévus lors de la souscription des prêts étaient disproportionnés par rapport à leurs revenus, et il existait un risque d'endettement excessif ; que la banque a largement dépassé le taux usuel de 30 à 33 % d'endettement de l'emprunteur ; que la banque ne démontre pourtant pas avoir exercé auprès des emprunteurs son devoir de mise en garde dû dès lors que le prêt n'était pas adapté à leurs capacités financières ; que les appelants ne peuvent être considérés comme des clients avertis en matière de prêt et d'investissement immobilier.
Dans ses conclusions transmises le 14 juin 2017, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la Caisse Régionale de Crédit Agricole de Pet d'Île-de-France, intimée, demande à la cour de :
-débouter Mme [P] et M. [C] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soulevées, et déclaré l'action de la banque recevable comme non prescrite,
-réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le montant des créances de la banque et limité à 1 euro le montant de l'indemnité forfaitaire de résiliation pour chacun des contrats de prêts,
Statuant à nouveau,
-condamner M. [C] à verser à la banque la somme de 20.616,55 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 3,65 % à compter du 10 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement, au titre du prêt numéro 601298228336 d'un montant en principal de 27.000 euros (devenu prêt n°60300614281),
-condamner solidairement M. [C] et Mme [P] à verser à la banque les sommes de :
63.827,60 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 3,80 % à compter du 10 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement, au titre du prêt numéro 60271358288 d'un montant en principal de 57.000 euros (devenu prêt n°60300608717),
80.029,04 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 3,70 % à compter du 10 octobre 2014, au titre du prêt relais numéro 60271358299 d'un montant en principal de 75.600 euros (devenu prêt n°60271358299),
56.500,85 euros, assortie des intérêts au taux conventionnel de 4 % à compter du 10 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement, au titre du prêt numéro 60271358306 d'un montant en principal de 50.400 euros (devenu prêt n°60300605030),
dire sur le fondement de l'article 1154 du code civil, que les intérêts dus porteront eux-mêmes intérêts au même taux dès lors qu'ils seront dus pour une année entière,
-condamner solidairement . [C] et Mme [P] verser à la banque la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, ainsi qu'une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [C] et Mme [P] aux entiers dépens, lesquels comprendront le coût des inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoires que le Crédit agricole a été contraint de mettre en 'uvre, et dont distraction au profit de la SCP Courtaigne Avocats sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, la Caisse Régionale de Crédit Agricole de Pet d'Île-de-France fait valoir :
-que, concernant la prescription, les appelants ne tirent pas les conséquences de la saisine à deux reprises du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye aux fins que ce dernier rende une ordonnance sur requête suspendant les obligations de l'emprunteur ; que la prescription a été interrompue jusqu'au 24 novembre 2012, faisant courir un nouveau délai jusqu'au 24 novembre 2014, ce dont il résulte que l'assignation du 7 novembre 2014 a été faite dans le délai biennal ;
-qu'aucune texte n'impose au prêteur d'agir en paiement contre la caution avant d'agir contre le débiteur principal ; qu'aucune obligation de ce genre ne ressort des contrats de prêt ;
-que c'est de manière parfaitement incontestable que la juridiction de première instance a constaté que « la CRCAM produit pour chaque prêt dont il est réclamé le paiement le contrat ainsi que le décompte des sommes restant dues au 10 octobre 2014 » ;
-que la banque n'a pas commis de faute en accordant les prêts litigieux ; que le taux de 33% ne ressort d'aucune obligation législative ; que, afin de calculer le montant dû mensuellement par les emprunteurs, ces derniers n'hésitent pas à prendre en compte l'emprunt à taux zéro dont les mensualités doivent commencer à courir en 2020 ; qu'au moment où ils ont contracté, les mensualités s'élevaient à un total de 754 euros par mois, tandis que les revenus des emprunteurs s'élevaient à la somme de 2.218 euros ;
-que les appelants sont mal fondés à solliciter des délais de paiement alors qu'ils n'honorent aucun remboursement depuis juin 2011 ; qu'en outre, les appelants ne communiquent aucun élément relatif à leur situation financière actuelle.
***
La clôture de l'instruction a été prononcée le 23 janvier 2018.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 14 mars 2018 et le délibéré au 3 mai suivant.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la prescription de l'action de la CRCA
Aux termes de l'article L137-2 du code de la consommation «L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ».
C'est à bon droit que le premier juge a rappelé que la prescription se divisait comme la dette elle-même ce qui signifie que l'action en paiement des échéances impayées se prescrit à compter de leur date d'échéance respective, tandis que l'action en paiement du capital se prescrit à compter de la date de déchéance du terme.
Il n'est pas contesté que les premières échéances impayées sont celles du 5 juin et 5 juillet 2011 de sorte que toute demande en paiement relative à ces échéances devait être introduite avant les 5 juin et 5 juillet 2013 sauf interruption de la prescription.
Il doit être ici rappelé qu'aux termes de l'article 2241 du code civil, notamment « La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion »mais aussi qu'aux termes de l'article 2234 du code civil, « la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou encore de la force majeure ».
Comme relevé par le premier juge, le créancier a été empéché d'agir en suite des ordonnances rendues les 10 juin 2011 et 24 mai 2012 par le tribunal d'instance de Saint Germain en Laye et aux termes desquelles des délais de grâce pour 18 mois ont été accordés aux débiteurs.
Ces délais parce qu'ils ont été ordonnés par le juge d'instance constituent l'empêchement visé à l'article 2234 rappelé ci-dessus.
Il s'ensuit que la CRCA a été empéchée d'agir du 10 juin 2011 au 24 novembre 2012 de sorte que le cours de la prescription reprenait à partir du 25 novembre 2012 et pour 2 ans.
Par ailleurs et s'agissant des sommes réclamées par la CRCA au titre des sommes dues du fait de la déchéance du terme, il est observé que cette déchéance a été prononcée par la banque le 10 octobre 2014 de sorte que l'action en paiement devait être introduite au plus tard le 10 octobre 2016.
Il s'ensuit que c'est à bon droit que le premier juge a dit que l'action introduite le 7 novembre 2014 relative au paiement des sommes arriérées et au paiement du capital restant dû n'était pas prescrite puisqu'intervenant dans le délai biennal.
Le jugement est confirmé.
Sur l'action à l'égard de la société Crédit Logement
Comme rappelé par le premier juge par des motifs que la cour fait siens, il revient au créancier le choix des poursuites parmi lequel celui d'actionner le débiteur principal avant la caution étant rappelé que le cautionnement est toujours un contrat accessoire au contrat principal.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a dit que le défaut d'action à l'encontre de la caution ne constituait pas une fin de non recevoir.
Sur la preuve de la créance de la CRCA
Aux termes de l'article 1315 du code civil dans sa version applicable au cas présent « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ».
En l'espèce, la CRCA justifie des prêts accordés à M.[C] (prêts de 27.000 € et 13.500 €, ce dernier remboursable en 2020) ainsi que de ceux accordés à M.[C] et à Mme [P] (prêts de 57.000€, 75.600 € et 50.400 € pour un total de 183.000 € destiné à l'acquisition d'un appartement en résidence principale à [Localité 3]) par la production des contrats de financement.
Pour chacun des prêts (hormis bien entendu celui d'un montant de 13.500 € remboursable en 2020), il est remis un décompte des sommes dues à la date de prononcé de la déchéance du terme et les tableaux d'amortissement.
Par ailleurs, il résulte des pièces 15 et 16 que tant M.[C] que Mme [P] ont été destinataires du courrier recommandé avec demande d'avis de reception du 10 octobre 2014 relatif à la déchéance du terme des prêts, courriers recommandés auxquels était annexé le décompte des sommes réclamées au titre de chaque prêt.
La preuve des financements accordés comme des sommes restant dues est apportée par l'ensemble des documents remis.
La CRCA poursuit l'infirmation de la décision pour ce qui concerne l'indemnité de résiliation ramenée par le premier juge à la somme symbolique de 1 € pour chacun des prêts ce, sous le visa de l'article 1152 du code civil aux termes duquel « Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ».
Sur ce point particulier, les appelants ne répondent pas à l'intimé et le « par ces motifs » de leurs conclusions ne recherche pas la confirmation du jugement rendu.
La cour observe que les décaissements ont eu lieu en 2005 (prêt de 27.000 €) puis en 2010 (prêts dont le total se chiffre à la somme de 183.000 €), que les taux d'intérêts pratiqués s'établissent de 3,65% à 4%.
Les indemnités de résiliation sont, pour chaque prêt, de 7%.
C'est par de justes motifs que la cour fait siens que le premier juge a relevé que cette indemnité de résiliation devait être opportunément révisée.
Compte tenu de la durée pendant laquelle chaque prêt a été amorti conformément aux clauses des contrats, au regard des taux d'intérêts pratiqués, la cour fixe l'indemnité de résiliation à la somme de 500 € pour le prêt de 27.000 € et à la somme de 1.000 € pour chacun des prêts consentis à M.[C] et à Mme [P].
En conséquence, le jugement est confirmé s'agissant des créances en capital et intérêts et réformé s'agissant des indemnités de résiliation arrétées aux sommes de 500 € (prêt de 27.000 €) et 1.000€ (chacun des prêts de 57.000 €, 75.600 €, 50.400 €).
Sur le défaut de mise en garde de la banque et le taux d'endettement excessif des meprunteurs
Les emprunteurs affirment que la banque aurait manqué à leur égard à son devoir de mise en garde de sorte que des dommages intérêts seraient dûs.
Aux termes de l'article 1147 du code civil dans sa version applicable à l'espèce «Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ».
Il ressort de ce texte que le banquier doit s'assurer des capacités de remboursement de son client et s'assurer que le remboursement des crédits se fera sans difficultés, a priori.
C'est ainsi que la banque doit vérifier que les sommes à rembourser, et plus spécialement les échéances à régler ne sont pas d'un montant excessif au regard des facultés de remboursement des emprunteurs.
S'agissant du prêt de 27.000 € consenti à M.[C] et dont l'échéance s'élevait à la somme de 195,01 €, les revenus nets mensuels de l'emprunteur était de 1.200 € par mois (et 15.465 € annuel en 2004 puis 18.129 € en 2005) de sorte que la banque ne devait pas de mise en garde puisqu'il ne peut être dit que la somme de 195 € correspondant à 16% du revenu net mensuel était excessive par référence aux capacités de remboursement.
Pour les prêts octroyés solidairement à M.[C] et Mme [P] - étant observé que le prêt de 75.600 € est un prêt relais destiné à financer l'achat du bien immobilier d'[Localité 3] dans l'attente de la vente du bien immobilier appartenant à M.[C] et sis à [Adresse 4] il appartient à la banque de justifier qu'elle s'est, au préalable de l'octroi des crédits, assurée des capacités financières de ses clients.
Il convient de préciser que le cumul des mensualités à honorer (exception faite du prêt à amortir à partir de 2020 et du prêt relais dont le remboursement devait avoir lieu avec la vente du bien immobilier de Carrières sur Seine) est de :
195,01 (prêt de 27.000 €) + 294,61 € (prêt de 57.000 €) + 265,17 (prêt de 50.400 €) = 754,79 € tandis que les ressources annoncées se chiffraient à la somme mensuelle de 2.218,33 €.(soit cumul des revenus 2009 cf avis d'imposition pièces 18 et 19 appelants)
Par suite, l'endettement du couple est de 34% au seul titre des emprunts immobiliers.
Néanmoins cet endettement ne devait pas perdurer puisque la vente de l'immeuble de Carrières entrainait le remboursement anticipé du prêt de 27.000 € ramenant alors l'endettement à 25%. (soit 294,61€+265,17 €)
A partir des éléments repris ci-dessus, il n'apparait pas que la banque devait à ses clients une mise en garde puisque l'endettement à 25% est compatible avec les capacités financières de ceux-ci telles qu'existant en 2009.
La situation financière obérée de M.[C] et de Mme [P] tient à la perte d'emploi de M.[C] et au sinistre touchant l'immeuble d'[Localité 3].
C'est alors par de justes motifs que la cour fait siens qu'à l'instar du premier juge, la cour pose que la banque ne devait pas de mise en garde aux consorts [C]/[P].
Par ricochet, il n'y a lieu à compensation.
Sur la demande de délais
Depuis la déchéance du terme des prêts, les emprunteurs n'ont versé aucune somme d'argent à la banque nonobstant le fait que des délais sur 18 mois leur aient été accordés.
Par ailleurs, et alors qu'ils indiquent que le bien immobilier d'[Localité 3] aurait subi un dégât des eaux leur interdisant de s'y installer, ils ne communiquent aucun élément tant sur la prise en charge par l'assureur Pacifica des désordes que sur la mise en vente du bien de [Localité 4].
La situation personnelle et financière actuelle des emprunteurs demeure inconnue de la cour.
Le jugement est confirmé en ce que tout délai est refusé.
Sur la demande de dommages-intérêts pour « l'attitude fautive de la banque »
Il n'est pas justifié aux débats d'une « attitude fautive de la banque » ; Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté une telle demande.
Sur la demande de dommages-intérêts émanant de la CRCA
La preuve d'un abus dans la défense apportée par les consorts [C]/[P] n'est pas plus rapportée devant la cour que devant le premier juge.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la CRCA.
Sur les demandes annexes
M.[C] et Mme [P] succombent en leurs prétentions.
Ils sont condamnés solidairement au paiement de la somme fixée au dispositifi ci-après au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M.[C] et Mme [P] sont condamnés solidairement aux dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant des indemnités de résiliation,
Statuant à nouveau,
FIXE l'indemnité de résiliation à 500 € pour le prêt de 27.000 € et y condamne M.[N] [C],
FIXE l'indemnité de résiliation à 1.000 € pour chacun des prêts de 57.000 €, 75.600 € et 50.400€ et y condamne solidairement M.[N] [C] et Mme [Y] [P],
CONDAMNE solidairement M.[N] [C] et Mme [Y] [P] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole de Paris et d'Ile de France la somme de 1.000 € au titre des frais irrépétibles,
CONDAMNE solidairement M.[N] [C] et Mme [Y] [P] aux dépens en cause d'appel
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Patricia GRASSO, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,