COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 57B
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 03 MAI 2018
N° RG 17/01338
AFFAIRE :
[R] [O]
C/
[E] [L]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Septembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS
N° Chambre : 5
N° Section : 2
N° RG : 10/11068
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Emmanuel MOREAU de la SCP MOREAU E. & ASSOCIES
Me Sandrine BOSQUET de la SCP BERGER/BOSQUET/
SAVIGNAT
Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TROIS MAI DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
DEMANDEUR devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (1ère chambre civile) du 15 mai 2015 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS (Pôle 2 - Chambre 2) le 21 février 2014 et APPELANT
Monsieur [R] [O]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Emmanuel MOREAU de la SCP MOREAU E. & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 147
Représentant : Me DEMBA, Plaidant, avocat au barreau de CARPENTRAS
****************
DEFENDEUR DEVANT LA COUR DE RENVOI et INTIME
1/ Monsieur [E] [L]
né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 2]
de nationalité Française
ci-devant
[Adresse 2]
[Adresse 3]
et actuellement [Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentant : Me Sandrine BOSQUET de la SCP BERGER/BOSQUET/SAVIGNAT, Postulant, avocat au barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 20 - N° du dossier 4719
Représentant: Me Frédéric GUITTARD, Plaidant, avocat au barreau de CARPENTRAS
DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI et INTIMEE
2/ SA ALLIANZ IARD
N° SIRET : 542 110 291
ci-devant
[Adresse 4]
[Adresse 5]
et actuellement [Adresse 6]
[Adresse 6]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20150704
Représentant : Me Stéphane BOUILLOT de la SCP HB & ASSOCIES-HITTINGER-ROUX BOUILLOT & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0497
ASSIGNEE EN INTERVENTION FORCEE:
3/ SA ALLIANZ VIE
N° SIRET : 340 234 962
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20150704
Représentant : Me Stéphane BOUILLOT de la SCP HB & ASSOCIES-HITTINGER-ROUX BOUILLOT & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0497
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Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Mars 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller, et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Maguelone PELLETERET,
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FAITS ET PROCÉDURE
M. [L] a exercé les fonctions d'agent général d'assurances pour la société AGF devenue Allianz à compter du 1er octobre 2006 à [Localité 3].
M. [V], soutenant avoir remis à M. [L], au moyen d'un chèque de banque libellé à l'ordre d'AGF et de versements en espèces, des fonds destinés à alimenter des contrats d'épargne, dont il aurait demandé le rachat deux mois plus tard, sans succès, a assigné l'intermédiaire, depuis lors révoqué, et la société Allianz Iard, venant aux droits de la société AGF, en remboursement d'une somme de 230.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2009, ainsi qu'en dommages-intérêts, sur le fondement des articles L. 511-1 du code des assurances et 1384, alinéa 5 du code civil. L'assureur a soulevé une fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir du demandeur.
Par un jugement du 13 septembre 2012, le tribunal de grande instance de Paris a écarté cette fin de non-recevoir, débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes, l'a condamné à payer à la société Allianz Iard la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté toutes autres demandes des parties et condamné M. [V] aux dépens.
Sur l'appel de M. [V], la cour d'appel de Paris a confirmé ce jugement en toutes ses dispositions, et, "y ajoutant", a déclaré "irrecevable l'action de M. [V] à l'encontre de la société Allianz Iard, aux motifs que la société Allianz Iard n'ayant pas la qualité de mandante de M. [L], l'action, mal dirigée, était irrecevable, faute d'intérêt à agir'.
Par arrêt du 15 mai 2015, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions cette décision et renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Versailles.
Par acte d'huissier délivré le 18 février 2016, M. [V] a fait assigner en intervention forcée la société Allianz Vie.
Par ordonnance du 26 janvier 2017 le conseiller de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance.
Par dernières écritures du 12 février 2018 M. [V] demande à la cour de :
infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a écarté l'exception de nullité et la fin de non-recevoir soulevées par la société Allianz,
juger recevable et bien fondée l'assignation en intervention forcée de la société Allianz Vie,
rejeter les demandes, fins et prétentions de l'ensemble des intimés,
juger que M. [L] s'est engagé par acte du 10 décembre 2008, à lui rembourser les fonds versés,
juger que cet engagement a été contracté au nom et pour le compte des AGF,
juger que les sociétés Allianz et donc Allianz Iard et Allianz Vie viennent aux droits de la société AGF,
juger qu'à défaut de preuve contraire rapportée dans les conditions de l'article 1341 du code civil, la cause de cet engagement exprimée à l'acte est valable et réelle,
juger que M. [L] a agi en sa qualité d'agent général AGF,
prononcer la jonction de la présente instance avec l'assignation en intervention forcée de la société Allianz Vie,
condamner solidairement, le cas échéant in solidum, M. [L], la société Allianz Iard et Allianz Vie venant aux droits des AGF, à lui rembourser la somme de 230.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2009, date de la mise en demeure,
les condamner solidairement, le cas échéant in solidum, à lui verser la somme de 200.000 euros en réparation du préjudice moral subi par l'attitude des intimées,
les condamner tout aussi solidairement, le cas échéant in solidum, à lui verser la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens de première instance et d'appel.
Dans des conclusions du 14 février 2018 les sociétés Allianz Iard et Allianz Vie demandent à la cour de :
juger irrecevable ou, en tout état de cause, prescrite l'action tardive que M. [V] affirme avoir entreprise à l'encontre d'Allianz Vie, s'agissant non seulement d'une prétention nouvelle soutenue pour la première fois devant la cour, mais en outre, d'une action éteinte, sur le fondement de l'article 2224 du code civil,
débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre d'Allianz Vie,
infirmer partiellement le jugement frappé d'appel en ce qu'il a jugé recevable l'action entreprise par M. [V] à l'encontre d'Allianz Iard,
juger irrecevables toutes demandes dirigées à l'encontre d'Allianz Iard par M. [V],
juger irrecevable, puisque formulée pour la première fois en cause d'appel, la demande en paiement d'une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts 'en réparation du préjudice moral subi' par M. [V],
subsidiairement et sur le fond, confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamner M. [V] à payer à Allianz Iard une somme de 7.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel avec recouvrement direct.
Par dernières écritures du 15 avril 2016 M. [L] demande à la cour de :
juger M. [V] irrecevable en son action faute de qualité à agir,
débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamner M. [V] à lui verser les sommes de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice et de 155.938,12 euros en répétition des sommes avancées pour son compte outre intérêts au taux légal.
à titre subsidiaire, confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
en tout état de cause, condamner M. [V] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct.
Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 février 2018.
SUR QUOI, LA COUR
- Sur les demandes à l'encontre de Allianz Vie
La société Allianz Vie n'a jamais été mise en cause par M. [V] avant d'être assignée en intervention forcée en cours de procédure d'appel.
Aux termes des dispositions de l'article 555 du code de procédure civile des parties qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ne peuvent être appelées devant la cour que si l'évolution du litige implique leur mise en cause.
Or, en l'espèce il n'est pas justifié de la moindre circonstance de droit ou de fait née du jugement ou postérieure à celui-ci modifiant les données juridiques du litige.
Les demandes nouvellement formées en cause d'appel à l'encontre de la société Allianz Vie seront donc déclarées irrecevables.
- Sur les demandes à l'encontre de M. [L]
Il est constant que M. [V] a remis à M. [L] le 10 octobre 2008 un chèque de banque d'un montant de 166.498,50 euros à l'ordre des AGF qui a été encaissé.
M. [V] prétend avoir complété ce placement par plusieurs versements en espèces qui auraient porté le montant total des sommes investies à la somme de 230.000 euros.
Il verse aux débats un document dactylographié du 10 décembre 2008 à l'entête de '[E] [L], conseil en finance agent général AGF 7 place du Champ de Mars ...' ainsi rédigé :
je soussigné [E] [L] [Adresse 7] atteste avoir remis à M [V] [R] deux chèques de la banque Marze suite au rachat total de ces contrats d'épargne
+ CB n°0676697 montant 100 000,00 €
+ CB n°0676697 montant 100 000,00 €
Fait pour valoir ce que de droit.
M. [V] produit deux chèques de 100.000 euros chacun datés du 10 décembre 2008 lesquels sont à son ordre et émanent de 'M. [L] [E] Agent AGF [Adresse 7]
[Adresse 7]', dont il dit qu'ils étaient destinés à lui rembourser son placement, ce que conteste M. [L].
Cependant les numéros de ces deux chèques ne correspondent pas à ceux visés dans l'attestation précitée puisqu'ils portent les numéros 0673397 et 0673398.
Il est justifié de ce que le chèque n° 0673398 de 100.000 euros n'a été présenté à l'encaissement par M. [V] qu'en décembre 2009 et qu'il n'a pas été payé au motif que M. [L] qui était le tiré avait fait opposition pour perte le 7 août 2009. Il n'est pas justifié du refus de paiement du second chèque de 100.000 euros.
M. [L] ne conteste pas avoir établi ces deux chèques, se contentant, dans une attestation du 12 janvier 2010, dépourvue de toute valeur probante compte tenu de sa qualité de partie à l'instance, d'expliquer qu'il n'a émis ces chèques que pour satisfaire la demande de M. [V], sans aucun lien avec un versement antérieur de sa part, l'appelant l'ayant sollicité à de nombreuses reprises pour lui faire prendre en charge ses propres dépenses.
Aucun élément ne permet de considérer que M. [V] aurait versé 30.000 euros de plus entre les mains de M. [L], aucune copie du chèque que lui aurait fait celui-ci en remboursement n'étant versée aux débats.
Il n'est donc pas démontré avec la certitude requise qu'une somme de 230.000 euros aurait été reçue par M. [L] en sa qualité d'agent d'assurance, puisqu'il est seulement justifié du dépôt entre ses mains d'un chèque de banque de 166.498,50 euros à l'ordre d'AGF. En effet, compte tenu de l'opacité des relations entre les parties et des interrogations soulevées par les modalités du remboursement avorté dont il est justifié (dont le montant de correspond pas à celui du chèque de banque), seule la somme de 166.498,50 euros sera retenue comme ayant effectivement été versée entre les mains de M [L] en sa qualité d'agent général d'assurance.
Cependant, M. [L] soulève le défaut de qualité pour agir de M. [V] faute de démontrer que la somme susvisée de 166.498,50 euros versée par chèque de banque lui appartient et qu'il est ainsi recevable à en solliciter la restitution.
M. [V] n'apporte pas la moindre réponse à cette fin de non recevoir et ne fournit donc aucune explication sur la propriété des fonds dont il réclame la restitution.
Or, dans la pièce n°16 produite par l'appelant, la caisse d'Epargne Loire Drôme Ardèche atteste que le chèque de banque en cause de 166.498,50 euros émis le 10/10/2008 à l'ordre d'AGF l'a été 'à partir du livret B de Mme [V] [K]'.
Cette information révèle que les fonds sont issus d'un livret dont Mme [V] est seule titulaire. Or, même si l'article 1421 du code civil prévoit que chacun des époux a le pouvoir d'administrer seul les biens communs et d'en disposer, encore aurait-il fallu que M. [V] invoque cette explication et justifie du caractère commun des sommes déposées sur le livret B de Mme [K] [V].
Faute de la moindre réponse de M. [V] sur la fin de non recevoir invoquée par M. [L], il n'est pas établi que la somme de 166.498,50 euros lui appartenait.
En conséquence, M. [V] ne justifie pas de sa qualité à agir et sa demande à l'encontre de M. [L] sera déclarée irrecevable.
Par voie de conséquence, sa demande à l'encontre de la société Allianz iard est irrecevable également.
- Sur les demandes de M. [L]
M. [L] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de M. [V] faute de justifier et de la faute de ce dernier et du préjudice qui en serait résulté. Sa demande tendant à le voir condamné à lui rembourser la somme de 155.938,12 euros sera également rejetée, aucun élément objectif probant n'étayant ses dires selon lesquels il aurait versé cette somme à l'appelant.
- Sur les autres demandes
Compte tenu du sens de la présente décision, M. [V] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [V] à verser la somme de 2.000 euros à la société Allianz Iard au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens d'appel seront mis à la charge de M [V] qui succombe.
Il n'y a pas lieu pour des considérations d'équité d'allouer aux sociétés Allianz Iard et Allianz Vie et à M. [L] une indemnisation au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement sur renvoi après cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 21 février 2014 par arrêt du 15 mai 2015 de la Cour de cassation,
Déclare irrecevables les demandes formées par M. [V] à l'encontre de la société Allianz Vie,
Déboute M. [L] des ses demandes indemnitaires,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [V] de ses demandes,
Le confirme en ce qu'il a condamné M. [V] à payer la somme de 2.000 euros à la société Allianz Iard au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens,
Statuant à nouveau du chef infirmé :
Déclare irrecevables les demandes de M. [V] à l'encontre de M [L] et de la société Allianz Iard,
Condamne M. [V] aux dépens d'appel lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,
Rejette toutes les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,