COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 54G
4e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 11 JUIN 2018
N° RG 16/05149
AFFAIRE :
Société M...
C/
Société SMABTP
...
Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 28 Juin 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° chambre : 7ème
N° RG : 14/08194
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Bertrand X...
Me J... Y...
Me Franck Z...,
Me Christophe A...
Me Martine B...
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE ONZE JUIN DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:
Société M...
Ayant son siège [...]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Bertrand X... N... L...-K... C... AVOCATS, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 20160542 vestiaire : 617
Représentant : Maître Sophie D..., avocat plaidant du barreau de PARIS, vestiaire : G 0212
APPELANTE
****************
SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS 'S.M.A.B.T.P'
N° de Siret : 775 684 764 R.C.S. PARIS
Ayant son siège [...]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître J... Y... de la E... J..., avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 20160299 vestiaire : 619
Représentant : Maître Paul-Henry O..., avocat plaidant du barreau de PARIS, vestiaire : P 0242
Société TUKANA ARCHITECTURE
Ayant son siège [...]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Franck Z..., avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 20160281 vestiaire : 618
Représentant : Maître Roland F..., avocat plaidant du barreau de PARIS, vestiaire : B 0837
Société AXA FRANCE IARD assureur de la société TUKANA ARCHITECTURE
Ayant son siège 313, Terrasses de l'Arche
[...]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Christophe A..., avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 16301 vestiaire : 627
Représentant : Maître Julie P... GIORGETTI HENNEQUIN & ASSOCIES, avocat plaidant du barreau de PARIS
Société VITRY
Ayant son siège [...]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Martine B... de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 1656260 vestiaire : 625
Représentant : Maître Joseph G... N... I... AVOCATS, avocat plaidant du barreau de PARIS, vestiaire : J 100
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Avril 2018, Madame Brigitte Q..., président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Brigitte Q..., Président,
Madame Anna MANES, Conseiller,
Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Françoise DUCAMIN
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FAITS ET PROCÉDURE :
La société civile immobilière Vitry a fait l'acquisition, suivant acte du 30 juin 2009, du 'Domaine de Vitry', une propriété exceptionnelle située à Gambais dans les Yvelines.
Elle a confié à la société Tukana Architecture, suivant contrat du 8 avril 2010, une mission de conception et de maîtrise d'oeuvre d'exécution pour d'importants travaux de rénovation ; la société Tukana Architecture a établi le dossier de consultation des entreprises et rédigé les pièces constitutives des marchés d'entreprises.
Un appel d'offres a été lancé pour le lot peinture ; le marché a été attribué à la société M... et conclu le 20 décembre 2010, moyennant le prix initial de 290.000 euros HT (305.950 euros TTC), porté ensuite, par des avenants, à la somme de 383698,23 euros TTC.
Les travaux ont commencé le 17 janvier 2011 ; le maître de l'ouvrage a refusé de procéder à la réception des travaux prévue le 21 juillet 2011 invoquant des malfaçons affectant les peintures.
A sa demande, une mesure d'expertise a été ordonnée en référé le 18 juin 2012 ; les opérations d'expertise ont été rendues communes aux différents locateurs d'ouvrage et assureurs respectifs ; l'expert judiciaire a accompli sa mission et déposé son rapport le 23 avril 2014.
Suivant acte d'huissier de justice du 27 juin 2014, la société Vitry a fait assigner en réparation, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la société M... , la société Tukana Architecture et, en qualité d'assureur de cette dernière, la société Axa France lard, devant le tribunal de grande instance de Nanterre ; la société M... a attrait en la cause son assureur la société SMABTP ; la jonction des procédures a été prononcée.
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Par jugement contradictoire du 28 juin 2016, le tribunal de grande instance de Nanterre a, au visa des dispositions des articles 122 du code de procédure civile, 1134, 1147 et 1184 du code civil et L 124-3 du code des assurances,
- déclaré irrecevable l'action de la société Vitry à l'encontre de la société Tukana Architecture introduite suivant exploit du 27 juin 2014,
- déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles formées par la société Tukana Architecture à l'encontre de la société Vitry,
- condamné in solidum la société M... et la société Axa France lard, en qualité d'assureur de la société Tukana Architecture à payer à la société Vitry les sommes de :
* 225. 500 euros TTC, au titre des travaux de réfection suivant devis Bechet,
* 37. 800 euros TTC, au titre des frais de déménagement,
* 29. 880 euros TTC, au titre des frais de garde-meubles,
* 16. 603,20 euros TTC, pour les déposes de doubles rideaux et tringles,
* 1. 728,00 euros TTC, pour les déposes et reposes des détecteurs d'alarme et d'incendie,
* 2. 279,27 euros TTC, au titre de la dépose et repose des radiateurs,
* 15. 000 euros, à titre de perte de jouissance pendant les travaux de réfection,
* 5. 000 euros, au titre du « caractère déceptif » des travaux réalisés,
- fixé le partage de responsabilité entre les intervenants de la façon suivante :
* société Établissements R... : 85 %,
* société Tukana Architecture : 15 %,
- débouté la société M... de toutes ses demandes,
- mis hors de cause la SMABTP, en qualité d'assureur de la société Établissements R...,
- dit que dans leurs recours entre eux, les intervenants responsables seront garantis des condamnations prononcées à leur encontre, tant en principal et intérêts qu'au titre des dépens et frais irrépétibles, à proportion du partage de responsabilité fixé par le tribunal,
- dit que les sociétés d'assurance ne sont tenues au paiement des sommes susvisées que dans les limites contractuelles de leurs polices respectives,
- condamné la société M... à payer à la société Vitry la somme de 8. 000 euros et à la SMABTP la somme de 1. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société M... aux dépens, y compris les frais d'expertise,
- accordé le bénéfice de distraction de l'article 699 du code de procédure civile aux avocats qui en ont fait la demande,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration remise au greffe le 6 juillet 2016, la société M... (SA) a interjeté appel de ce jugement à l'encontre des sociétés SMABTP, Tukana Architecture, Axa France Iard et Vitry.
Par dernières conclusions signifiées le 11 décembre 2017, la société M... demande à la cour, au visa de l'article 1792-6 du code civil, d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
1- dire et juger que les travaux du lot peinture ont été réceptionnés avec réserves le 27 septembre 2011 et que les désordres allégués par la société Vitry affectent les travaux après réception,
- dire et juger que la SMABTP doit garantir la responsabilité des désordres affectant, après réception, les travaux qu'elle a réalisé pour le compte de la société Vitry,
Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour dirait que les travaux n'ont pas réceptionnés,
- dire et juger que les désordres sont apparus en cours de chantier et sont couverts par la police qu'elle a souscrite auprès de la SMABTP,
En conséquence,
- condamner la SMABTP à :
* la relever et garantir de toutes les condamnations qui ont été prononcées par jugement rendu le 28 juin 2016 par le tribunal de grande instance de nanterre et qui pourraient être prononcées par la cour d'appel de Versailles à son encontre du fait des travaux réalisés pour le compte de la société Vitry,
* lui payer la somme de 306. 388,05 euros, en remboursement des sommes effectivement versées en trois chèques, à la société Vitry le 8 novembre 2016, le 22 décembre 2016 et le 16 janvier 2017, en exécution du jugement rendu le 28 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Nanterre,
- débouter la SMABTP de ses demandes, fins et conclusions,
2 - dire et juger que la différence entre la conception et l'exécution des travaux ne lui est pas imputable,
- dire et juger qu'il n'existe pas de lien de causalité entre les désordres et l'exécution du contrat conclu le 20 décembre 2011,
- dire et juger que la société Vitry ne justifie pas de son préjudice,
En conséquence,
- condamner la société Vitry à lui rembourser toutes les sommes effectivement versées entre le 8 novembre 2016 et le 16 janvier 2017, soit la somme totale de 306. 388,05 euros en exécution du jugement rendu le 28 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Nanterre,
- débouter la société Vitry de toutes ses demandes et de son appel incident visant à voir condamner in solidum la société M..., la société Tukana Architecture et la société Axa France Iard à lui payer la somme de 87. 500 euros en réparation de son trouble de jouissance,
3 - condamner in solidum la SMABTP, la société Tukana Architecture et la Compagnie Axa France Iard à la relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,
- débouter la société Axa France Iard de ses demandes formées au titre de son appel incident,
4 - condamner la société Vitry à lui payer la somme de 17. 715 euros au titre du solde du marché,
En tous cas,
- ordonner la compensation entre la somme de 17. 715 euros due par la société Vitry et les sommes éventuellement dues par la société M...,
5 - condamner la partie succombant à lui payer une somme de 15. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la partie succombant aux entiers dépens de l'instance dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 1er décembre 2016, la société Tukana Architecture (EURL) demande à la cour, au visa des articles 1134, 1147 et 1289 du code civil, de :
- constater que la société Vitry n'a pas saisi préalablement le Conseil de l'Ordre des Architectes,
En conséquence,
- déclarer irrecevables les demandes formulées à son encontre et,
- confirmer le jugement à ce titre.
Sur sa responsabilité,
- constater, dire et juger qu'il n'est pas établi de faute à son égard,
- constater, dire et juger qu'il n'existe pas de lien de causalité entre les prétendues fautes alléguées et les dommages,
En conséquence,
- réformer le jugement, et,
- la déclarer hors de cause,
A titre infiniment subsidiaire,
- dire qu'en tout état de cause sa responsabilité ne saurait être que résiduelle, et,
- réformer le jugement, et,
- faire application de la clause d'absence de solidarité, et,
- dire qu'aucune condamnation à son encontre sur un fondement contractuel ne saurait excéder le pourcentage de responsabilité résiduelle pouvant être imputé à l'architecte,
En conséquence,
- débouter la société Vitry de sa demande de condamnation in solidum, avec la société R....
Par ailleurs,
- constater, dire et juger, que la société Vitry ne justifie pas de préjudices personnels outre le coût des travaux de reprise,
En conséquence,
- réformer le jugement entrepris, et,
- la débouter de toutes ces demandes indemnitaires,
En tant que de besoin, en cas de condamnation de la société Tukana,
- condamner in solidum la société R..., la SMABTP, et la société Axa France Iard à la relever et garantir indemne de l'ensemble des condamnations éventuellement mises à sa charge et ce à titre principal, frais et accessoires, et,
- débouter la société R... et la SMABTP de leurs demandes de garantie formulées à son encontre,
Dans le cas où les demandes de la société Vitry seraient jugées recevables,
- condamner la société Vitry à lui verser la somme de 13. 301,90 euros au titre du solde de son contrat outre intérêts au taux légal à compter de la réception du chantier, et,
- ordonner si besoin la compensation entre les sommes dues réciproquement,
- condamner la société Vitry ou qui mieux le devra à lui verser la somme de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 28 novembre 2017, la société Vitry (SCI) demande à la cour, au visa des articles 1134, 1147 et 1184 devenus les articles 1103 et 1231-1 et 1217 du code civil, de :
- déclarer la société Axa France Iard irrecevable et mal fondée son appel incident,
- déclarer la société R... irrecevable et mal fondée son appel principal,
- les en débouter,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a alloué les sommes suivantes et condamner in solidum les sociétés R..., Axa France Iard et Tukana Architecture au paiement desdites sommes à savoir :
* 225. 500 euros TTC au titre des travaux de réfection,
* 37. 800 euros TTC au titre des frais de déménagements comprenant la prime d'assurance,
* 29. 880 euros TTC au titre des frais de garde-meubles pendant la période des travaux,
* 16. 603,20 euros TTC au titre des frais annexes,
* 2. 279,27 euros TTC au titre de la dépose et repose des radiateurs, et
* 5. 000 euros au titre du caractère déceptif des travaux compte tenu du niveau de qualité très élevé souhaité,
* 8. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens comprenant les frais d'expertise,
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident et en ses demandes,
- dire et juger que la demande de condamnation à l'égard de la société Tukana était recevable en l'absence d'une tentative de conciliation préalable,
En conséquence, statuant à nouveau,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable sa demande à l'égard de la société Tukana Architecture,
- l'infirmer en ce qu'il a fixé à 15. 000 euros l'indemnisation de la perte de jouissance pendant les travaux,
Faisant droit à son appel incident, concernant le trouble de jouissance,
- condamner in solidum la société R..., la société Axa France Iard et la société Tukana Architecture, à lui payer la somme de 87 500 € à ce titre,
- condamner in solidum la société R..., la société Axa France Iard et la société Tukana Architecture à lui payer la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles supportés du fait de l'appel interjeté indûment devant la cour ainsi qu'aux entiers dépens,
- dire que les dépens pourront être directement recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 27 janvier 2017, la société SMABTP, en qualité d'assureur la société M... demande à la cour, au visa des articles 1792-6 et 1189 du code civil, de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il considère que les garanties souscrites auprès de la SMABTP n'ont pas vocation à être mobilisées,
En conséquence,
I - constater, dire et juger que les travaux réalisés par la société R... n'ont fait l'objet d'aucun procès-verbal de réception signé,
- constater, dire et juger que les désordres affectant la peinture sont apparus en cours de chantier tel qu'il en résulte des comptes rendu de chantier,
- constater, dire et juger qu'aucune garantie spécifique au titre de la garantie parfait achèvement n'a été souscrite par la société R... auprès d'elle,
- dire et juger que la garantie ' Dommages à l'ouvrage après réception', n'a pas vocation à être mobilisée en l'absence de réception,
- la mettre hors de cause.
II - constater, dire et juger que les dommages subis par la société Vitry ne résultent nullement :
* d'un incendie, d'une explosion, d'un effondrement, d'une tempête ouragan et d'une catastrophe naturelle (article 20.1 des conditions générales),
* d'un vol,
* d'un événement naturel à caractère catastrophique.
- constater /dire et juger que la garantie complémentaire 'Tous dommages à votre ouvrage avant réception' n'a pas vocation à être mobilisée,
- la mettre hors de cause.
III - constater, dire et juger qu'au titre des préjudices matériels, la société Axa France Iard, reconnaît bien volontiers que 'les dommages matériels affectant l'ouvrage ne sont pas garantis par le chapitre II des conditions générales de la police souscrite auprès de la SMABTP'
- constater, dire et juger que la garantie 'Assurance de responsabilité en cas de dommages extérieurs à votre ouvrage', n'a vocation à être mobilisée qu'en cas de dommages affectant un ouvrage tiers à celui dont la société R... avait la charge,
- constater, dire et juger que ' les dommages matériels (ou les indemnités compensant ces dommages) subis par votre ouvrage' sont expressément exclus de ladite garantie,
- constater, dire et juger que les dommages causés par la société R... affectent les ouvrages réalisés par ladite société,
En conséquence,
- dire et juger que la garantie 'Assurance de responsabilité en cas de dommages extérieurs à votre ouvrage', revendiquée par la société Axa France Iard uniquement au titre des préjudices immatériels, n'a pas vocation à être mobilisée,
- la mettre hors de cause.
IV- En cas d'infirmation,
- constater, dire et juger que le contrat souscrit par la société R... auprès de la SMABTP n'a pas vocation à garantir :
* « 36.9 Les dépenses nécessaires à l'exécution ou à la finition de votre marché, * « 36.10 Les amendes astreintes et pénalités de retard ».
- la mettre hors de cause,
VI - En cas d'infirmation,
- constater, dire et juger que le coût des travaux de reprise a été évalué par l'économiste mandaté par la SMABTP à la somme de 118. 987,30 euros HT,
- constater, dire et juger que les demandes au titre du préjudice de jouissance ne sont pas justifiées,
V - constater, dire et juger que le contrat souscrit auprès d'elle a été résilié le 29 octobre 2012 avec effet au 31 décembre 2012,
- constater, dire et juger que les demandes de la société Vitry au titre des préjudices immatériels relèvent de la garantie facultative qui n'a pas vocation à être maintenue en cas de résiliation,
- constater, dire et juger qu'elle a été assigné selon acte du 12 mars 2013, soit postérieurement à ladite résiliation,
En conséquence,
- la mettre hors de cause,
- débouter les sociétés Axa France Iard, Tukana et R... de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- faire application des franchises et plafond de garantie prévus au contrat souscrit auprès d'elle, qui s'élève au titre de la garantie décennale à 10% du sinistre avec un minimum de 3. 300 euros et un maximum de 33.000 euros et au titre des préjudices immatériels à 990 euros,
- condamner la société Tukana et la société Axa France Iard à la relever et garantir indemne de toutes éventuelles condamnations prononcées à son encontre,
- condamner la société R... à lui payer une somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société R... aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 24 février 2017, la société Axa France Iard, en qualité d'assureur de la société Tukana Architecture, demande à la cour, au visa des articles 1134, 1147, 1182, 1382, et suivants du code civil, 4, 5, 142, 699 et 700 du code de procédure civile et L 124-3 du code des assurances, de :
- réformer le jugement entrepris,
A titre principal,
- dire et juger que la société Tukana Architecture a rempli son obligation de moyens à l'égard de la société Vitry,
- dire et juger que les désordres relèvent de défauts d'exécution ponctuels imputables exclusivement à l'entreprise R...,
- dire et juger que ces défauts d'exécution n'étaient pas décelables par la société Tukana Architecture en cours de chantier,
- dire et juger que la société R... a également commis une faute en sous-traitant les travaux qui lui ont été confiés par la société Vitry sans obtenir l'agrément préalable du maître de l'ouvrage,
En conséquence,
- rejeter toute demande de condamnation formulée par la société Vitry, la société R... et la SMABTP à l'encontre de la société Tukana Architecture et de la société Axa France Iard,
- prononcer la mise hors de cause de la société Tukana Architecture et de la société Axa France Iard, en principal, frais et accessoires,
A titre subsidiaire,
1) Sur l'application de la clause d'exclusion,
- dire et juger valide et opposable à la société Axa France Iard la clause d'exclusion de solidarité insérée dans le contrat conclu entre la société Vitry et la société Tukana,
En conséquence,
- dire et juger qu'aucune condamnation in solidum ne pourra être prononcée à son encontre,
- limiter sa garantie à la part de responsabilité de la société Tukana qui ne pourra excéder 15%.
2) Sur les appels en garantie,
- condamner la société R... à relever et garantir la société Tukana et la société Axa France Iard à hauteur de l'intégralité des sommes qui seraient mises à leur charge en principal, frais et accessoires,
- condamner la société SMABTP in solidum avec son assuré, l'entreprise R..., à les relever et garantir à hauteur de l'intégralité des sommes qui seraient mises à leur charge en principal, frais et accessoires au titre des postes de préjudices suivants allégués par la société Vitry :
* les frais de déménagement,
* les frais de garde-meubles,
* les déposes de doubles rideaux et tringles,
* la dépose et repose des détecteurs d'alarme et d'incendie,
* la dépose et repose des radiateurs,
* la perte de jouissance pendant les travaux de réfection,
* le caractère déceptif des travaux allégués,
* les frais d'expertise judiciaire,
A titre très subsidiaire,
- fixer le coût des travaux de réfection à la somme de 225.800 euros TTC,
- prendre acte que la société Axa France Iard s'en remet à la sagesse de la cour, s'agissant des :
* dépose et repose des détecteurs d'alarme et incendie à hauteur de 1 728 euros TTC,
* dépose et repose des radiateurs à hauteur de 2 279,27 euros TTC,
* frais de déménagement à hauteur de 37 800 euros TTC,
- débouter la société Vitry de sa demande d'indemnisation de la dépose des doubles rideaux et tringles à hauteur de 16. 603,20 euros TTC,
- réduire la réclamation de la société Vitry concernant les frais de garde meuble à hauteur de 5. 976 euros TTC conformément au chiffrage de l'expert judiciaire,
- débouter la société Vitry de sa demande d'indemnisation du préjudice de jouissance à hauteur de 87.500 euros et de sa demande d'indemnisation du caractère déceptif des travaux réalisés,
- déduire des sommes éventuellement mises à sa charge le montant de la dernière facture émise par la société Tukana à hauteur de 13. 301,90 euros TTC correspondant aux honoraires non réglés par la société Vitry au maître d'oeuvre,
A titre encore plus subsidiaire,
- faire application des limites de garantie opposables aux tiers (plafonds et franchises),
En tout état de cause,
- condamner tout succombant à régler à la société Axa France Iard, prise en sa qualité d'assureur de la société Tukana Architecture, la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- laisser à la charge de la société R... les entiers dépens dont les frais d'expertise judiciaire.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 9 janvier 2018.
'''''
SUR CE :
Il résulte de leurs écritures précédemment exposées que les parties maintiennent devant la cour leurs prétentions telles que soutenues devant les premiers juges et que le débat en cause d'appel se présente dans les mêmes termes que devant les premiers juges ;
Sur la fin de non recevoir opposée par la société Tukana Architecture à la société Vitry,
La société Vitry poursuit, par voie d'appel incident, l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a déclarée irrecevable à agir contre la société Tukana Architecture faute d'avoir saisi, avant d'introduire la procédure, le Conseil régional de l'Ordre des architectes ainsi que l'impose le contrat convenu entre les parties ;
Elle soutient, sans autre précision, que le contrat lui-même n'est pas litigieux, en particulier, sa résiliation, n'est pas demandée et que, sont en cause, les malfaçons pour lesquelles la responsabilité de l'entreprise et celle du maître d'oeuvre sont recherchées ;
Or, la société Vitry, maître de l'ouvrage, a confié à la société Tukana Architecture, suivant contrat du 8 avril 2010, une mission de maîtrise d'oeuvre complète de conception et d'exécution concernant l'opération de rénovation du Domaine de Vitry ;
Le litige a pour objet les désordres affectant les travaux de peinture réalisés dans le cadre de l'opération de rénovation et la procédure engagée par la société Vitry vise à obtenir de l'entrepreneur et du maître d'oeuvre, dont la responsabilité contractuelle est mise en cause, la réparation des préjudices subis des suites de ces désordres ;
La société Vitry précise en effet (page 13 de ses écritures) que c'est sur le terrain de la responsabilité contractuelle qu'elle fonde ses demandes en réparation tant à l'égard de la société R... qu'à l'égard de la société Tukana Architecture ;
S'agissant de la société Tukana Architecture, elle lui reproche des défaillances dans sa mission de conception des travaux et dans sa mission de surveillance des travaux ;
Il s'en infère que les demandes formées par le maître de l'ouvrage à l'encontre du maître d'oeuvre sont fondées sur les manquements de ce dernier à l'exécution de ses obligations contractuelles telles que définies au contrat de maîtrise d'oeuvre liant les parties;
Il est stipulé à l'article 5.3 de ce contrat qu' En cas de litige portant sur l'exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le Conseil Régional de l'Ordre des Architectes dont relève l'architecte avant toute procédure judiciaire.
A défaut de règlement amiable, le litige opposant les parties sera du ressort des juridictions civiles territorialement compétentes ;
La clause précitée impose aux parties, en cas de litige sur l'exécution du contrat, de satisfaire, avant d'engager toute action en justice, à une mesure préalable de consultation des autorités ordinales et de tentative de règlement amiable ; c'est en effet, selon la clause, à défaut de règlement amiable que le litige sera soumis aux juridictions civiles compétentes;
La méconnaissance de cette clause prive les parties du droit d'agir en justice ;
Il n'est pas démenti que la société Vitry a omis de solliciter, préalablement à l'assignation introductive d'instance délivrée à l'encontre de la société Tukana Architecture, l'avis du Conseil régional de l'Ordre des architectes ;
C'est dès lors à juste raison que la société Tukana Architecture soulève l'irrecevabilité de la société Vitry à lui demander réparation pour les préjudices subis des suites de l'inexécution de ses engagements contractuels ;
La société Vitry se prévaut d'une saisine du Conseil de l'Ordre des architectes en cours de procédure (par courrier du 18 juin 2015) et prétend avoir ainsi régularisé la cause de fin de non- recevoir ;
Or, la situation donnant lieu à la fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en oeuvre d'une clause contractuelle qui institue une procédure, obligatoire et préalable à la saisine du juge, favorisant une solution du litige par le recours à un tiers, n'est pas susceptible d'être régularisée par la mise en oeuvre de la clause en cours d'instance ;
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société Vitry à l'encontre de la société Tukana Architecture ;
Sur la fin de non recevoir opposée par la société Vitry à la société Tukana Architecture,
La société Tukana Architecture fait grief au jugement entrepris de l'avoir déclarée irrecevable en sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 13.301,90 euros TTC au titre du solde restant dû sur les honoraires fixés au contrat ;
Elle allègue avoir ' saisi la juridiction une fois exercé son recours amiable dans le cadre duquel la SCI Vitry n'a pas daigné se présenter' (page 20 de ses écritures) ;
Force est toutefois de constater que la société Tukana Architecture a formé sa demande reconventionnelle en paiement des honoraires contractuels, avec intérêts au taux légal à compter de la réception du chantier, par conclusions signifiées devant le tribunal le 19 avril 2016 et, ainsi qu'il a été relevé par les premiers juges, elle n'avait pas saisi , à cette date, le Conseil régional de l'Ordre des architectes ;
Les pièces du débat montrent qu'elle a saisi le Conseil régional de l'Ordre des architectes après que le jugement dont appel a été rendu le 28 juin 2016, et qu'il lui a été répondu, par courrier du 4 août 2016, que la société Vitry avait décliné, par lettre de son conseil du 2 août 2016, l'invitation à se présenter à une réunion de conciliation ;
A défaut d'avoir mis en oeuvre, préalablement à sa demande en justice, la clause du contrat imposant aux parties une tentative de règlement amiable du litige devant le Conseil de l'Ordre des architectes, la société Tukana Architecture est irrecevable en son action en paiement du solde de ses honoraires ;
Le jugement déféré est en conséquence confirmé de ce chef ;
Sur les désordres et la responsabilité de la société R...,
Il importe de rappeler que le lot peinture a été confié à la société R... suivant marché du 20 décembre 2010 ; le document signé à cette date par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur précise que le marché est constitué , outre du 'présent document', des pièces contractuelles telles que, notamment, le cahier des clauses administratives particulières (CCAP), du devis descriptif du présent lot et de la totalité des descriptifs de tous les corps d'état établis par le maître d'oeuvre concepteur, des cahiers de prescriptions techniques générales du centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), la norme NF P 03 001, le recueil des ensembles et éléments français (REEF), les documents techniques unifiés (DTU) ;
Les travaux de peinture ont été effectués du 17 janvier 2011 au 27 septembre 2011;
L'expert judiciaire a constaté, au terme de ses réunions contradictoires, organisées sur les lieux, de nombreux désordres affectant les travaux de peinture, et, en particulier :
- dans la chambre d'enfant n°2 du premier étage, la teinte grise de l'un des murs n'est pas identique à celle des autres murs de la pièce : cet écart de teinte est dû à une différence de préparation du mélange de teintes ;
- la finition au spalter prévue par avenant pour un montant de 20.250 euros HT, destinée à conférer à la peinture un aspect plus 'gras' et plus 'garnissant', n'a pas fourni le résultat escompté sur 30% de la surface traitée ;
- la peinture sur les boiseries (portes, placards, coffrages) est recouverte d'une importante épaisseur d'un enduit rigide qui se décolle ou se fissure ; l'expert judiciaire rappelle que, compte tenu des variations dimensionnelles du bois en fonction des conditions ambiantes d'humidité, la peinture qui le recouvre doit être suffisamment souple pour supporter ces variations sans se décoller ni se fissurer ; en l'espèce, le peintre a appliqué , pour ce type de support, des épaisseurs trop importantes d'enduit trop rigide ;
L'expert judiciaire a écarté, par des conclusions claires, précises et circonstanciées, l'explication que la société R... persiste à avancer devant la cour, selon laquelle, les décollages et fissurations de la peinture proviendraient d'un défaut de chauffage ; il relève à cet égard, à juste titre, que les comptes-rendus de chantier montrent que les locaux ont été chauffés à partir du mois d'octobre 2010 et que, pendant la période hivernale, seuls les travaux préparatoires étaient en cours ; il observe en outre, pertinemment, que selon les règles de l'art, il appartient au peintre de s'assurer que le support est apte (aspect, température et hygrométrie) à recevoir le revêtement étant ajouté qu'il lui incombe de ne pas exécuter sa prestation s'il estime que les conditions d'un parfait résultat ne sont pas réunies; il constate enfin, très justement, que la société R... n'a émis aucune réserve écrite, ni auprès du maître d'oeuvre, ni auprès du maître de l'ouvrage, relativement à un manque de chauffage ;
L'expert judiciaire a en outre relevé, sur les boiseries, des coulures de peinture dans les rainures et des colmatages des moulures, attestant d'un travail non soigné du peintre ;
- les micro-fissures sur les murs, sont provoquées, selon l'expert judiciaire, par des mouvements de maçonnerie et l'application d'un enduit trop rigide , inadapté au support ; c'est encore à juste titre que l'expert judiciaire a écarté la justification de la société R..., tenant au très mauvais état du support, exposant à cet égard, que selon le DTU, le peintre doit reconnaître le support et proposer les travaux appropriés à son état ; il ajoute que le DTU prévoit encore que le peintre doit adresser des réserves écrites au maître d'oeuvre ou au maître de l'ouvrage, dans le cas où il apparaîtrait , au cours des travaux, que le support n'est pas conforme à celui observé lors de l'établissement du devis ; or, aucune réserve écrite de l'entreprise de peinture n'a été faite en ce sens ;
- les micro-fissurations sur des interfaces de supports différents (plâtre/bois) résultent selon l'expert judiciaire des variations dimensionnelles différentes des matériaux soumis à des variations de température ou d'hygrométrie ; pour éviter ce type de désordre, le peintre doit procéder à la pose de calicot qui assurera un renfort et une uniformité de surface sur la zone de liaison ; ce travail n'a pas été effectué par la société R... ;
- dans les salles de bains, l'expert judiciaire a relevé sur les murs, des faïençages et décollements du revêtement sous l'action de l'humidité et résultant de l'application d'une peinture inadaptée à l'usage de la pièce ;
L'expert judiciaire observe qu'en définitive, le peintre a utilisé la même peinture quels que soient les supports (boiseries, murs, plafonds) et quelles que soient les pièces (sèches ou humides) et ajoute avoir constaté une aggravation des désordres entre septembre 2012 et novembre 2013 date de sa dernière visite ;
Il s'infère de ces conclusions, précises, détaillées et circonstanciées, énoncées au contradictoire des parties et en réponse aux dires des conseils, que la société R... a commis des défauts d'exécution qui attestent d'une méconnaissance des règles de l'art élémentaires telles qu'elles résultent des DTU lesquels font partie intégrante, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, des documents contractuels du marché ;
C'est en vain que la société R... soutient qu'elle a exécuté les prestations qui lui ont été commandées et qu'elle ne saurait répondre des manquements du maître d'oeuvre qui lui a attribué le marché sans avoir décelé la différence entre la qualité des finitions souhaitée par le maître de l'ouvrage et celle résultant de l'exécution de son devis ;
Force est de rappeler en effet que l'entrepreneur, tenu d'une obligation de résultat, doit fournir une prestation exempte de tout défaut d'exécution et d'observer que des travaux de peinture, en toute hypothèse et indépendamment de la qualité de finitions voulue par le maître de l'ouvrage, ne sont pas conformes aux règles de l'art en présence de fissurations et de décollements généralisés à l'ensemble des supports (boiseries et maçonneries) et des pièces (sèches et humides) ;
En l'état de malfaçons aussi évidentes que celles constatées par l'expert judiciaire, qui relève, en particulier, que les peintures appliquées sont inadaptées au support, que les mélanges de teintes ont été mal effectués, que le travail a été peu soigné, la société R... ne saurait ainsi sérieusement prétendre avoir correctement exécuté les prestations prévues dans son devis ;
Il importe à cet égard de souligner que la société R... ne manque pas de mettre en exergue, sur ses devis, un message promotionnel, garantissant une expérience et un savoir -faire de plus de 75 ans ainsi qu'un 'souci constant de propreté et de qualité' (certifié par le label Qualibat) et promettant les travaux 'les plus soignés et rigoureux' ;
Le manquement contractuel de la société R... à son obligation d'exécution de ses travaux en conformité aux règles de l'art est ainsi caractérisé et établi à l'égard du maître de l'ouvrage ; ce dernier est fondé à lui demander la réparation des préjudices qui en sont résultés ;
Sur la responsabilité de la société Tukana Architecture,
Ainsi qu'il a été à bon droit retenu par les premiers juges, la société Vitry dispose, en vertu de l'article L. 124-3 du code des assurances, de l'action directe ouverte au tiers lésé à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ; elle est ainsi recevable à demander à la société Axa France Iard, qui ne conteste pas sa garantie à son assurée la société Tukana Architecture, la réparation de ses préjudices subis en conséquence des manquements contractuels du maître d'oeuvre ;
Il importe en conséquence d'examiner la responsabilité encourue par la société Tukana Architecture dans la survenance des désordres ayant affecté les travaux de peinture ;
Le contrat de maîtrise d'oeuvre complète confié à la société Tukana Architecture impartit au maître d'oeuvre une mission de direction de l'exécution des contrats de travaux dans le cadre de laquelle il lui incombe, notamment, de vérifier l'avancement des travaux et leur conformité avec les pièces du marché ; il est précisé au contrat que l'architecte n'est pas tenu à une présence constante sur le chantier et indiqué que la fréquence moyenne de ses visites est hebdomadaire ;
Le maître d'oeuvre ne répond pas des malfaçons commises par les entreprises et n'est tenu dans l'accomplissement de sa mission que de l'obligation de mettre en oeuvre tous les moyens de nature à permettre de conduire le chantier à bonne fin ;
Ceci posé, l'expert judiciaire observe, à juste titre, compte tenu notamment de l'ampleur et de la gravité des défauts d'exécution relevés à la charge de l'entrepreneur, un manque de surveillance du maître d'oeuvre à qui il incombait de vérifier, selon sa mission contractuelle, la conformité des travaux avec les pièces du marché et, en particulier, au devis et aux DTU ;
C'est en vain qu'il est soutenu que les défauts d'exécution de l'entrepreneur n'auraient été que ponctuels alors qu'il a été précédemment constaté, à l'inverse, qu'ils ont été généralisés à l'ensemble des travaux réalisés ;
C'est encore en vain qu'il est prétendu que les défauts d'exécution n'auraient pas été décelables pour le maître d'oeuvre, alors qu'il est exactement indiqué par l'expert judiciaire, au vu des comptes-rendus de chantier, que les désordres, en particulier les craquelures d'enduit, sont apparus alors que les travaux étaient en cours, que le maître de l'ouvrage n'a pas manqué de les signaler au maître d'oeuvre, que ce dernier n'a pas pour autant renforcé les contrôles qui lui auraient permis de constater que l'exécution des travaux n'était pas conforme aux règles de l'art ;
Enfin, la société Tukana Architecture ne saurait sérieusement prétendre que la réputation professionnelle de la société R... la dispensait de faire preuve d'une vigilance accrue alors d'une part, que les malfaçons, grossières et généralisées, sont apparues pendant le chantier, ainsi qu'il a été précédemment relevé, et qu'il est constant que l'entreprise n'a pas réalisé les travaux elle-même mais les a fait réaliser à moindre coût par des sous-traitants qu'elle n'avait pas fait agréer par le maître de l'ouvrage ;
La défaillance du maître d'oeuvre à son obligation contractuelle de surveillance des travaux est ainsi caractérisée ;
Sur le partage des responsabilités et les recours en garantie réciproques,
Au regard de la gravité des manquements respectifs, les premiers juges ont procédé à une juste appréciation, qui sera approuvée, du partage des responsabilités à concurrence de 85% à la charge de la société R... et de 15% à la charge de la société Tukana Architecture;
Il est fait droit aux recours en garantie réciproques de la société R... et la société Axa France Iard assureur de la société Tukana Architecture, dans les proportions ci-dessus fixées du partage des responsabilités ;
Le jugement déféré doit être en revanche réformé en ce qu'il a prononcé une condamnation in solidum de la société R... et la société Axa France Iard au paiement des dommages-intérêts compensatoires alloués à la société Vitry ;
Il est en effet énoncé au contrat de maîtrise d'oeuvre conclu entre la société Tukana Architecture et la société Vitry (article 1.1), que 'l'architecte ne peut être tenu responsable de quelque manière que ce soit, et en particulier solidairement, des dommages imputables aux actions ou omissions du maître d'ouvrage ou des autres intervenants dans l'opération faisant l'objet du présent contrat' ;
Cette clause du contrat est opposable au maître de l'ouvrage, qui est partie au contrat, et exclut la condamnation solidaire ou in solidum du maître d'oeuvre à raison des dommages imputables à d'autres intervenants ;
La condamnation à réparation qui sera prononcée à l'encontre de la société Axa France Iard, assureur de la société Tukana Architecture, sera prononcée à concurrence de la part de responsabilité incombant au maître d'oeuvre c'est-à-dire à concurrence de 15% du montant de la réparation ;
Sur la demande en garantie de la société R... à l'égard de la SMABTP,
La société R... critique le jugement déféré en ce qu'il a retenu que les garanties de la police CAP 2000 'contrat d'assurance professionnelle des entreprises du bâtiment et des travaux publics' souscrites auprès de la société SMABTP n'étaient pas mobilisables et a mis hors de cause l'assureur ;
Elle soutient que la réception des travaux avec réserves est intervenue le 27 septembre 2011 de sorte que la garantie offerte applicable aux dommages après réception doit être mise en oeuvre ;
La police souscrite offre en effet une garantie 'assurance de responsabilité en cas de dommages à l'ouvrage après réception' en vertu de laquelle l'assureur prend en charge 'les dommages matériels affectant après réception les ouvrages de bâtiment et de génie civil à la réalisation desquels l'assuré a participé (page 3 de la police) ;
Force est toutefois d'observer, à l'instar des premiers juges dont la cour adopte les motifs, que la réception initialement programmée pour le 21 juillet 2011, a été reportée en raison du refus du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux et, que le document en date du 27 septembre 2011, regardé comme un 'procès-verbal de réception', est un compte-rendu de chantier qui a été signé par l'entrepreneur mais non par le maître de l'ouvrage ainsi que l'admet, au demeurant, la société R... ; ce document n'est pas un acte de réception au sens de l'article 1792-6 du code civil, la condition essentielle à laquelle doit satisfaire l'acte, à savoir le caractère contradictoire, n'étant pas établie ;
La société R... invoque la réception tacite , laquelle doit être caractérisée par la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage, d'accepter l'ouvrage ; or, les courriers versés aux débats montrent que le maître de l'ouvrage n'a cessé, avant et après le 27 septembre 2011, de signaler les malfaçons affectant les peintures et de demander qu'elles soient reprises, ce qui exclut qu'il ait accepté de prendre possession de l'ouvrage ; l'entreprise est en outre mal fondée à se prévaloir du paiement de ses factures alors qu'il est constant qu'elle n'a pas été intégralement réglée du montant du marché, le maître de l'ouvrage ayant suspendu ses règlements, et qu'elle forme de ce chef une demande dans le cadre de la procédure ;
C'est en vain que la société R... s'appuie sur deux courriers adressés, le 18 septembre et le 6 novembre 2012, par le maître de l'ouvrage à la BTP Banque faisant état, pour s'opposer à la mainlevée de la caution, de travaux réceptionnés le 21 septembre 2011 avec des réserves non levées à ce jour ;
Ces courriers relatifs au sort de la caution de garantie d'achèvement des travaux ne sauraient être regardés comme caractérisant une volonté du maître de l'ouvrage non équivoque d'accepter les travaux ; force est de souligner, en outre, qu'ils ont été adressés non pas à l'entrepreneur mais à un tiers et qu'ils ne présentent pas le caractère contradictoire auquel doit satisfaire, en toute hypothèse, la réception, fût-elle tacite ;
En l'absence de réception des travaux, l'assurance applicable aux dommages à l'ouvrage après réception n'est pas mobilisable ainsi qu'il a été jugé à bon droit par les premiers juges ;
La société R... se prévaut par ailleurs, de la clause de la police selon laquelle le contrat ' garantit la responsabilité civile encourue vis-à-vis des tiers par le sociétaire, du fait de ses activités professionnelles mentionnées ci-avant, que ce soit en cours ou après exécution des travaux' ;
Il importe cependant de relever que cette garantie est stipulée au chapitre II de la police afférent à l' 'assurance de responsabilité en cas de dommages extérieurs à (votre) ouvrage';
Elle ne couvre pas les désordres affectant l'ouvrage réalisé par l'assuré et résultant de défauts d'exécution de ses obligations contractuelles à l'égard du maître de l'ouvrage ; ceci est au demeurant exposé en préambule de la police, sous le titre 'Objet du contrat', où il est énoncé que l'assureur prend en charge d'une part, les dommages matériels affectant après réception les ouvrages de bâtiment et de génie civil à la réalisation desquels l'assuré a participé, d'autre part, les dommages extérieurs à ces ouvrages, survenant avant ou après réception, qui sont imputables à l'assurés du fait de l'exercice de ses activités professionnelles déclarées ;
Ce volet de la police invoqué par la société R... n'est pas mobilisable ;
Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société SMABTP ;
Sur les préjudices,
La cour adopte, sur l'estimation des préjudices subis par la société Vitry des suites des désordres et de leur nécessaire reprise, les motifs circonstanciés des premiers juges qui ont, au vu des conclusions précises et complètes de l'expert judiciaire et des pièces produites, procédé à une juste appréciation exempte de toute critique ;
Les chefs de préjudice retenus sont en effet fondés, sur le principe et sur le quantum, et seront approuvés ;
La société Vitry, demande au titre du préjudice de jouissance, que le montant de la réparation, raisonnablement fixé à 15.000 euros par les premiers juges pour la durée de cinq mois de réfection totale des travaux, soit élevée à 87.750 euros ; elle fonde sa demande sur le montant des loyers et des charges que règlent à la SCI Vitry, M.et Mme H... qui en sont les associés ;
Ces éléments d'appréciation ne sont pas suffisamment probants pour établir une estimation du préjudice de jouissance et ne justifient pas le montant de la demande qui est excessif ;
L'estimation des premiers juges sera en tous points approuvée et le jugement confirmé de ce chef ;
Sur la demande de la société R... au titre du solde du marché,
Il n'est pas contesté, et établi par les comptes effectués par l'expert judiciaire, que la société Vitry reste devoir à l'entrepreneur une somme de 17.715 euros au titre du solde du marché ;
Si les malfaçons sont patentes, il n'est pas prétendu que les travaux n'auraient pas été achevés ;
La société R... ayant été condamnée à verser , à titre de dommages-intérêts, le coût de la reprise complète des travaux de peinture tels que prévus dans les pièces du marché, est en droit de se faire payer le solde lui restant dû sur le prix du marché ;
Par réformation du jugement déféré, il sera en conséquence fait droit à la demande formée de ce chef ;
Il n'y a pas lieu à ordonner la compensation dès lors qu'il est constant que la société R... a d'ores et déjà réglé le montant des condamnations, assorties de l'exécution provisoire, prononcées par les premiers juges ;
Sur les autres demandes,
Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions retenues par les premiers juges concernant les frais irrépétibles et les dépens de première instance ;
L'équité ne commande pas de faire droit aux demandes des parties formées au titre des frais irrépétibles d'appel ;
La société R... qui succombe pour l'essentiel à l'appel en supportera les dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de l'appel,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il condamne in solidum la société Etablissements R... et la société Axa France Iard en qualité d'assureur de la société Tukana Architecture à payer à la société Vitry, en réparation des préjudices subis par cette dernière, les sommes d'argent, telles qu'énoncées au dispositif du jugement,
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne la société M... et la société Axa France Iard en qualité d'assureur de la société Tukana Architecture à payer à la société Vitry en réparation des préjudices subis par cette dernière, les sommes d'argent, telles qu'énoncées au dispositif du jugement, à concurrence de 85% à la charge de la société M... et de 15 % à la charge de la société Axa France Iard,
Infirme le jugement en ce qu'il a débouté la société M... de sa demande en paiement du solde du marché,
Statuant à nouveau de ce chef ,
Condamne la société Vitry à payer à la société M... la somme de 17.715 euros en règlement du solde lui restant du sur le montant du marché,
Dit n'y avoir lieu à compensation,
Confirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions,
Déboute les parties de leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles d'appel,
Condamne la société M... aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Brigitte Q..., Président et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,