COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 70Z
4ème chambre expropriations
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 03 JUILLET 2018
N° RG 16/02241
AFFAIRE :
M. Joao X... Y...
C/
GRAND PARIS AMENAGEMENT
Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 15 Février 2016 par le juge de l'expropriation de PONTOISE
RG n° : 15/25
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me K... B...
Me Bernard Z...
M. Frédéric CHOLLET Commissaire du Gouvernement
+ Parties
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TROIS JUILLET DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:
Monsieur Joao X... Y...
né le [...] à SABUGAL (Portugal)
[...]
Représentant : Maître Thomas A... substituant Maître K... B... de la SELARL GMR AVOCATS - GRANGE J... B..., avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R 251
bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 78646/002/2017/005417 du 03/05/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES
APPELANT
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GRAND PARIS AMENAGEMENT anciennement AGENCE FONCIERE ET TECHNIQUE DE LA REGION PARISIENNE 'AFTRP'
Ayant son siège [...]
pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Yann C... substituant Maître Bernard Z... de la SELARL Z... I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 0043
INTIME
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Les fonctions du COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT étant exercées par Monsieur Frédéric CHOLLET, Direction Départementale des Finances Publiques selon pouvoir spécial en date du 9 Janvier 2017
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mai 2018, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laurence D..., président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Laurence D..., Président, spécialement désigné pour présider cette chambre par ordonnance de Madame le premier président de la cour d'appel de Versailles
Madame Anna MANES, Conseiller à la cour d'appel de Versailles, désigné par ordonnance de Madame le premier président de la cour d'appel de Versailles
Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller à la cour d'appel de Versailles, désigné par ordonnance de Madame le premier président de la cour d'appel de Versailles
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Françoise DUCAMIN
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FAITS ET PROCÉDURE :
M. Joao X... Y... est propriétaire de la parcelle cadastrée section [...], située [...] (Val d'Oise).
Par arrêté du 8 août 2002, le préfet du Val d'Oise a déclaré d'utilité publique, au profit de l'Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne 'AFTRP', devenue Grand Paris Aménagement, l'acquisition de terrains en vue de la réalisation de la ZAC 'Les Bois de Rochefort'.
Par arrêté de cessibilité du 9 mars 2011, les parcelles nécessaires à la réalisation de cette opération, dont celle appartenant à M. X... Y..., ont été déclarées immédiatement cessibles et, par ordonnance du 7 juin 2011, le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Pontoise, a prononcé le transfert de propriété de ces parcelles au profit de l'Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne, ci-après l'AFTRP.
Par jugement du 18 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Pontoise a fixé le montant des indemnités de dépossession dues à M. X... Y... à la somme de 695.750 euros et lui a accordé une indemnité de déménagement d'un montant de 10.000 euros. L'AFTRP a été condamnée, en outre, au versement de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 6 juin 2014 l'AFTRP a versé à M. X... Y... une somme de 207.614,49 euros, puis le 26 septembre 2014, les 10.000 euros correspondant aux frais de déménagement. Le reliquat, soit 478.635,51 euros, a fait l'objet d'une consignation.
Saisi par acte du 15 septembre 2014, le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Pontoise, statuant en référé a, par ordonnance du 3 octobre 2014, ordonné l'expulsion de M. X... Y.... Cette ordonnance a été annulée par arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 24 mai 2016.
En parallèle, M. X... Y... a contesté l'arrêté de cessibilité du 9 mars 2011, qui a été irrrévocablement annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 4 décembre 2014, en ce qu'il a déclaré cessible au profit de l'AFTRP la parcelle [...] propriété de M. X... Y....
Ce dernier a saisi le juge de l'expropriation aux fins de constatation de perte de base légale de l'ordonnance du 7 juin 2011 sur le fondement de l'article L.223-2 du code de l'expropriation.
Par jugement contradictoire du 15 février 2016, le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Pontoise a :
- constaté que l 'ordonnance en date du 7 juin 2011 est dépourvue de base légale en ce qu 'elle a prononcé le transfert de propriété de la parcelle cadastrée section [...] sise [...] appartenant à M. X... Y...,
- prononcé la nullité de cette ordonnance mais seulement en ce qui concerne la parcelle cadastrée section [...],
- dit que la restitution de son bien à M. X... Y... ne pourrait intervenir qu'après paiement par celui-ci des sommes dues à l'expropriant,
- fixer le préjudice subi par M. X... Y... à 10.500 euros au titre de l'immobilisation de son bien immobilier du 7 juin 2011 au 4 décembre 2014,
- ordonné la compensation entre les sommes de 10.500 euros et de 4.500 euros dues à M. X... Y... par l'expropriant et la somme de 217.614,49 euros due par M. X... Y... à l'expropriant,
- condamné le Grand Paris Aménagement à payer à M. X... Y... une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seraient supportés par le Grand Paris Aménagement.
Par déclaration déposée le 24 mars 2016, M. X... Y... a interjeté appel de ce jugement.
Par lettre adressée le 20 décembre 2016, il a informé la cour qu'il restait dans l'attente de réponse de sa demande d'aide juridictionnelle déposée le 22 mars 2016.
Par conclusions d'incident aux fins de caducité envoyées le 26 janvier 2017, notifiées à M. X... (avis de réception signé le 1er février 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 31 janvier 2017), l' établissement public Grand Paris Aménagement demande à la cour de :
- déclarer caduque la déclaration d'appel formée par M. X... le 24 mars 2016,
- condamner M. Joao X... à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par lettre du 6 février 2017 et reçue au greffe le 14 février 2017, notifiée à l'établissement public Grand Paris Aménagement (avis de réception signé le 16 février 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 16 février 2017), M. X... Y... demande à la cour de rejeter les conclusions d'incident aux fins de caducité de l'établissement Grand Paris Aménagement.
Par conclusions en réponse adressées le 22 mars 2017, notifiées à M. X... (avis de réception signé le 29 mars 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 28 mars 2017), l'établissement public Grand Paris Aménagement réitère les demandes formulées dans ses conclusions du 26 janvier 2017.
Par avis du 20 mars 2017, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Versailles a indiqué à la cour que M. X... avait déposé le 13 mars 2017 une demande d'aide juridictionnelle.
Par conclusions en réponse sur la caducité adressées le 23 mai 2017, notifiées à l'établissement Grand Paris Aménagement (avis de réception signé le 31 mai 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 31 mai 2017), M. X... Y... demande à la cour de :
- débouter Grand Paris Aménagement de l'ensemble de ses demandes,
- condamner Grand Paris Aménagement à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions au fond du même jour, notifiées à l'établissement Grand Paris Aménagement (avis de réception signé le 31 mai 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 31 mai 2017), M. X... Y... demande à la cour, au visa des dispositions des articles L. 223-1, R. 223-6 et R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et 38 du décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, de :
- infirmer la décision de première instance, sauf en ce qui concerne le constat du défaut de base légale de l'ordonnance en date du 7 juin 2011 en ce qu'elle a prononcé le transfert de propriété de la parcelle cadastrée [...] ; le prononcé de la nullité de ladite ordonnance ; la condamnation de Grand Paris Amenagement au versement de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ; ainsi que la déduction par compensation de la somme due à l'expropriant de la somme de 4.500 euros correspondant à la condamnation de l'expropriant au titre de l'article 700,
Par suite, statuant à nouveau :
- fixer le préjudice qu'il a subi du fait de l'irrégularité de la procédure d'expropriation à la somme de 102.644 euros correspondant aux sommes suivantes :
* 13.800 euros au titre aux frais qu'il a exposés pour la location d'un bien afin de stocker ses biens meubles,
* 32.178 euros au titre des frais exposés pour l'acquisition d'un bien de substitution,
* 10.000 euros au titre du préjudice moral,
* 46.666 euros au titre du trouble qu'il a subi dans l'exercice de son droit de propriété,
- ordonner la compensation entre les sommes de 4.500 euros, 1.500 euros, 500 euros et 102.644 euros dues à M. X... par l'expropriant et la somme de 217.614,49 euros due par M. X... à l'expropriant,
- condamner Grand Paris Aménagement à lui payer la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me K... B... sous réserve de sa renonciation à percevoir l'indemnité due au titre de l'aide juridictionnelle,
- dire que les dépens seront supportés par Grand Paris Aménagement.
Par conclusions responsives et récapitulatives n° 2 aux fins de caducité adressées le 13 juillet 2017, notifiées à M. X... (avis de réception signé le 23 août 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 23 août 2017), l'établissement public Grand Paris Aménagement demande à la cour de :
- déclarer caduque la déclaration d'appel formée par M. X... le 24 mars 2016,
- solliciter du Bureau de l'Aide Juridictionnelle du tribunal de grande instance de Versailles tout élément permettant d'établir la date de transmission à M. X... de la décision du 29 septembre 2016 déclarant caduque sa demande d'aide juridictionnelle,
- condamner M. Joao X... à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions au fond du même jour, notifiées à M. X... (avis de réception signé le 23 août 2017) et au commissaire du gouvernement (avis de réception reçu le 23 août 2017), l'établissement public Grand Paris Aménagement demande à la cour de :
- confirmer le jugement du juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Pontoise dans toutes ses dispositions,
- rejeter l'ensemble des conclusions d'appel de M. Joao X...,
- fixer le délai imparti à M. Joao X... pour procéder au versement des sommes qui lui sont dues, préalable à toute restitution de son bien,
- condamner M. Joao X... à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le commissaire du gouvernement a adressé ses conclusions le 1er septembre 2017. Elles ont été notifiées à M. X... et à l'établissement public Grand Paris Aménagement (avis de réception signés le 6 septembre 2017).
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
'''''
SUR CE, LA COUR :
Sur la caducité de l'appel invoquée par le Grand Paris Aménagement :
Attendu qu'il n'est pas contesté que M. X... Y... n'a pas déposé ses conclusions d'appelant dans le délai de trois mois de l'article R.311-26 alinéa 1er du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, à compter de l'appel qu'il a interjeté le 24 mars 2016 ;
Attendu cependant, qu'il résulte des documents versés aux débats, que l'appelant avait déposé le 22 mars 2016 une demande d'aide juridictionnelle ;
Que, cette demande a fait l'objet d'une décision de caducité le 28 septembre 2016 ;
Que, M. X... Y... soutient ne pas avoir reçu la notification de cette décision ;
Attendu que, les notifications des décisions prises par le bureau d'aide juridictionnelle étant faites à cette époque par lettre simple, la preuve d'une notification effective de celle du 28 septembre 2016 à M. X... Y... dans les jours qui ont suivi, ne peut être rapportée ;
Qu' il convient de constater qu'après réception des conclusions de l'expropriant soulevant la caducité de sa déclaration d'appel faute de dépôt de ses conclusions d'appel dans le délai de trois mois précité, M. X... Y... a demandé au bureau d'aide juridictionnelle la copie de la décision litigieuse du 28 septembre 2016 ;
Qu'il a reçu cette copie le 25 février 2017 ;
Qu'en conséquence, en l'absence d'autre élément de preuve, seule cette dernière date peut être retenue comme constituant le point de départ du délai de trois mois de l'article R.311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui, en application des dispositions de l'article 38-1 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, commence à courir, en cas caducité de la demande d'aide juridictionnelle, à compter de la notification de cette décision ;
Que, les conclusions de l'appelant ayant été postées le 23 mai 2017, elles doivent être déclarées recevables ;
Que la demande de l'expropriant sera donc rejetée ;
Sur l'irrecevabilité des conclusions du commissaire du gouvernement :
Attendu que la cour a relevé d'office à l'ouverture des débats, sans que les parties ne formulent d'observations particulières, l'irrecevabilité des conclusions du commissaire du gouvernement au regard de l'article R.311-26 alinéas 2 et 4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui dispose, dans sa version applicable à la cause :
'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant.
Le cas échéant il forme appel incident dans le même délai et sous les mêmes sanctions.
(...)
Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa' ;
Attendu qu'en l'espèce, les conclusions d'appel de M. X... Y... ont été reçues le 26 mai 2017 et notifiées au commissaire du gouvernement par lettre recommandée du 29 mai 2017, dont l'avis de réception a été signé par le service de la Direction départementale des finances publiques du Val d'Oise le 31 mai 2017 ;
Que, le commissaire du gouvernement ayant adressé ses conclusions par lettre postée le 1er septembre 2017, il convient de constater que le délai de deux mois susvisé n'a pas été respecté et que ces écritures doivent être déclarées irrecevables ;
Sur les limites de la saisine :
Attendu qu'il convient de constater qu'aucune des parties ne remettant en cause les chefs de dispositif du jugement constatant la perte de base légale de l'ordonnance d'expropriation du 7 juin 2011, prononçant la nullité de l'ordonnance en ce qu'elle concerne la parcelle [...], disant que la restitution de son bien par M. X... Y... ne pourra intervenir qu'après paiement par celui-ci des sommes dues à l'expropriant et ordonnant la compensation entre la somme de 4 500 € due à M. X... Y... par l'expropriant et la somme de 217 614,49 € due par M. X... Y... à l'expropriant, ces chefs sont irrévocables;
Sur le préjudice subi par M. X... Y... :
Sur les frais de location :
Attendu que, l'appelant soutient avoir été contraint de louer un local pour entreposer ses biens mobiliers par crainte de l'imminence de son expulsion et afin d'anticiper cette mesure ;
Qu'il a ainsi loué un local à Mme E... Conceicao F... du 1er mars 2014 au 31 janvier 2016, au prix de 600 € par mois, soit un total de 13 800 €, réglé de manière différée le 10 mai 2017 en accord avec le bailleur ;
Attendu cependant que, la période ainsi revendiquée est pour le moins étonnante dans la mesure où, comme le fait à juste titre observer l'expropriant, aucune expulsion ne pouvait intervenir avant le paiement ou la consignation des indemnités de dépossession ;
Qu'un paiement partiel et une consignation ayant été effectués par l'expropriant le 6 juin 2014, c'est au mieux à compter de cette date qu'une expulsion pouvait être 'crainte' ;
Que de même, s'agissant du terme de la période de location, la date du 31 janvier 2016 est tout aussi surprenante dès lors que le pourvoi formé par l'expropriant contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles annulant l'arrêté de cessibilité du 9 mars 2011 a fait l'objet d'une décision de non admission le 28 septembre 2015 ;
Qu'à compter de cette date, même si l'ordonnance d'expulsion du 3 octobre 2014 n'avait pas encore été annulée par la cour d'appel de ce siège, elle ne pouvait plus faire l'objet d'une exécution ;
Que c'est donc au mieux entre le 7 juin 2014 et le 28 septembre 2015 qu'une mesure d'expulsion de la part de l'expropriant, pouvait être redoutée par M. X... Y... ;
Attendu en toute hypothèse, qu'au regard des éléments versés aux débats, la réalité de la location invoquée n'est pas établie ;
Qu'en effet, M. X... Y... ne produit aucun bail ; Que, s'il verse une quittance de loyer, pour répondre à l'un des motifs de rejet de sa demande par le premier juge, il doit être constaté que cette quittance date du 18 mai 2017 et fait état d'un seul versement de 13 800 euros ;
Que l'on ne peut que s'étonner qu'un tel délai de paiement ait été accordé par la bailleresse à son locataire ;
Qu'en outre, ainsi que le souligne fort justement l'expropriant, M. X... Y... a demandé, dans des conclusions du 18 avril 2014 déposées devant la présente cour dans l'instance en fixation de son indemnité d'expropriation, une indemnité de déménagement dont le montant qu'il qualifiait lui même d'élevé (38 678 €) était justifié par 'le très grand nombre d'objets mobiliers présents dans les lieux';
Qu'il produit d'ailleurs dans la présente instance des photographies du mobilier entreposé dans son pavillon ; Que les pièces photographiées sont en effet très encombrées par de nombreux meubles et objets ;
Qu'en revanche, il ne produit aucun document (photographies par exemple alors que devant le premier juge cette location était censée être toujours en cours) attestant du stockage effectif de meubles lui appartenant à l'adresse figurant sur la quittance de loyer ;
Qu'enfin, la pièce n° 13 de l'appelant, constituée par un virement de 13 800 € de son compte vers celui de Mme E... Conceicao F... le 10 mai 2017, est une photocopie sur laquelle aucun nom de la banque émettrice n'est lisible ;
Que, surtout, ainsi que le fait valoir Grand Paris Aménagement, ce virement ne prouve pas en lui même l'existence de la prestation de location invoquée ;
Attendu qu'il découle de ce qui précède que, les éléments produits par M. X... Y... sont insuffisants pour établir avec certitude qu'il a effectivement entreposé des meubles dans le local appartenant à Mme E... Conceicao F..., et ceci, contre paiement d'un loyer;
Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande à ce titre ;
Sur les frais d'acquisition d'un nouveau bien immobilier :
Attendu que M. X... Y... demande le remboursement des frais qu'il a dû exposés pour l'acquisition d'un bien immobilier afin de remplacer celui dont il pensait être exproprié ; Qu'il s'agit d'une part, des frais d'agence immobilière et d'autre part, du montant de la clause pénale prévue au compromis de vente, qu'il a dû régler après l'annulation de ce dernier ;
- Sur la rémunération de l'agence immobilière :
Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats que M. X... Y... a signé avec la société Laforêt le 12 septembre 2014 une 'commande de services' prévoyant des honoraires de conseil en constitution de patrimoine d'un montant de 13 000 € pour la recherche d'un terrain à bâtir et des conseils ;
Que, cette somme, versée en deux chèques dès le 12 septembre, a été encaissée les 6 et 7 octobre 2014, soit postérieurement à la signature de la promesse de vente signée le 27 septembre 2014 entre M. X... Y... et M. L... et Mme Pereira G..., pour un terrain à bâtir situé à Pierrelaye ;
Que, toutefois, ainsi que l'expropriant le fait valoir, l'acquisition de ce terrain n'a pas été conduite à son terme, de sorte que l'agence immobilière n'était pas en droit aux termes de la loi dite Hoguet du 2 janvier 1970 de percevoir une rémunération ;
Qu'il n'est pas soutenu que celle-ci serait dûe sur un autre fondement que la recherche d'un bien immobilier ou, que la non réitération de la promesse étant le fait de M. X... Y..., la rémunération était tout de même dûe pour ce motif ;
Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de paiement de la somme de 13 000 € ;
- Sur la clause pénale et les frais d'acte :
Attendu que M. X... Y... expose avoir dû verser la somme de 19 000 € aux vendeurs, M. L... et Mme Pereira G..., au titre de la clause pénale figurant à la promesse de vente ;
Attendu qu'il est compréhensible, contrairement à ce que fait valoir l'expropriant, que M. X... Y... ait voulu trouver un bien de remplacement avant de connaître le résultat du recours qu'il avait introduit devant la cour administrative d'appel afin d'anticiper son éventuelle expulsion et assurer son relogement dans de bonnes conditions ;
Que, le Grand Paris Aménagement prétend que les conditions de mise en oeuvre de la clause pénale sont suspectes, particulièrement en ce qui concerne son calendrier ;
Que, M. X... Y... explique qu'il a été transparent à l'égard des vendeurs sur le lien existant entre la procédure d'expropriation et son projet d'acquisition et que les parties à la promesse sont convenues que l'annulation du compromis et la mise en oeuvre de la clause seraient différés jusqu'à ce qu'il ait obtenu l'annulation du transfert de propriété ;
Qu'il résulte des documents de la cause que la promesse de vente a fait l'objet d'une annulation par acte du 5 décembre 2016 signé devant M. H..., notaire et que la somme de 19 000 €, versée par M. X... Y... le 6 octobre 2016 en l'étude notariée a été réglée aux vendeurs le 11 janvier 2017 ;
Attendu qu'il est en effet pour le moins étonnant qu'alors que les parties ont acquis la certitude depuis le 28 septembre 2015, date du rejet du pourvoi formé par l'expropriant contre la décision de la cour administrative d'appel du 4 décembre 2014 annulant l'arrêté de cessibilité, que toute expulsion est devenue impossible et qu'alors que la perte de base légale de l'ordonnance d'expropriation a été prononcée le 15 février 2016 par le jugement dont appel, l'annulation de la promesse de vente ne soit intervenue que plus de 13 mois après le rejet du pourvoi et plus de 10 mois après le jugement ;
Que ce déroulement jette la suspicion sur l'existence et le contenu réel de l'accord intervenu entre les parties et conduit à considérer que la formalisation tardive de l'annulation de la promesse et du versement du montant de la clause pénale sont intervenus pour les besoins de la présente instance ;
Que l'on peut également observer, à titre surabondant, que le préjudice résultant de la mise en oeuvre de l'accord entre les parties différant l'application de la clause pénale jusqu'à la constatation de perte de base légale de l'ordonnance d'expropriation n'a pas été évoqué, même au titre d'un préjudice futur mais certain, devant le premier juge, alors que les parties sont censées avoir conclu cet accord bien avant ledit jugement ;
Qu'enfin, ainsi que le relève l'expropriant, M. X... Y... n'établit pas avoir été dans l'obligation de payer la clause pénale dans la mesure où la promesse de vente fait état au titre des conditions suspensives, d'une condition pesant sur les vendeurs (la délivrance d'un certificat d'urbanisme opérationnel) sans qu'aucune information ne soit fournie à son sujet pour savoir si elle a été satisfaite ou non ;
Qu'il découle de ce qui précède que la demande de M. X... Y... sera rejetée ;
Sur le préjudice moral :
Attendu que, contrairement à ce que soutient le Grand Paris Aménagement, l'action en constatation de perte de base légale d'une ordonnance d'expropriation n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral souffert par l'exproprié du fait du caractère irrégulier de la procédure mise en oeuvre à son encontre ;
Que, l'interdiction de la réparation du préjudice moral résultant de l'article L.322-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne concerne que l'indemnisation de l'expropriation ;
Attendu que si M. X... Y... n'établit pas le lien de causalité entre son état de santé et la procédure d'expropriation, il n'est pas contestable que le fait d'avoir dû subir une procédure d'expropriation irrégulière a entraîné pour lui, comme il l'expose, de nombreux tracas qu'il n'aurait pas dû subir, qu'il convient d'indemniser à hauteur de la somme de 2000€ ;
Sur le préjudice matériel :
Attendu que le premier juge a accordé à M. X... Y..., en réparation du préjudice subi du fait de l'immobilisation de son bien du 7 juin 2011 au 4 décembre 2014 lui interdisant toute aliénation pendant cette période, la somme de 10 000 euros ;
Que l'appelant demande à ce titre mais pour la période du 7 juin 2011 au 15 février 2016, la somme de 10 000 euros par an, soit 46 666 euros au total ;
Attendu que c'est à juste titre que M. X... Y... demande que la période prise en compte soit étendue jusqu'à la date du jugement dont appel qui a constaté la perte de base légale de l'ordonnance d'expropriation ;
Que cette demande est conforme aux dispositions de l'article R.223-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique qui prévoit que le juge qui constate l'absence de base légale du transfert de propriété en précise les conséquences de droit, parmi lesquelles figure, en cas de restitution du bien, la réparation du préjudice causé par l'opération irrégulière;
Attendu que, contrairement à ce que fait valoir l'expropriant, le fait que M. X... Y... a été condamné en 1995 par le tribunal correctionnel de Pontoise pour des travaux non conformes au permis de construire qui lui avait été délivré, ne fait pas obstacle à l'aliénation de son bien ;
Que M. X... Y... a donc bien été privé, pendant plus de 4 ans, de la possibilité, dont dispose tout propriétaire, de vendre son bien ;
Attendu que la cour dispose des éléments suffisants pour fixer la réparation de ce préjudice à la somme de 5 500 € par an, soit 25 666 €, au total ;
Attendu que cette somme, ainsi que celles de 1 500 et 500 € allouées à M. X... Y... respectivement par la cour d'appel de ce siège dans son arrêt du 24 mai 2016 qui a annulé l'expulsion de M. X... Y... prononcée par ordonnance de référé du 3 octobre 2014 qui est directement en lien avec la présente procédure, et par le jugement dont appel, se compenseront avec les sommes dues par M. X... Y... à l'expropriant ;
Sur les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens :
Attendu que le sens de la présente décision conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
Qu'il ne parait pas inéquitable d'allouer une somme supplémentaire de 2 000 euros à M. X... Y... au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
Que la demande de l'expropriant formée au même titre sera rejetée ;
Que l'expropriant sera condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
Statuant contradictoirement, dans les limites de l'appel,
Déclare recevables les conclusions d'appel de M. X... Y... du 23 mai 2017 et rejette la demande de caducité de l'appel, formée par le Grand Paris Aménagement,
Déclare irrecevables les conclusions les conclusions du commissaire du gouvernement du 1er septembre 2017,
Confirme le jugement en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,
Infirme le jugement en ce qu'il a fixé le préjudice subi par M. X... Y... à la somme de 10 500 euros au titre de l'immobilisation de son bien immobilier du 7 juin 2011 au 4 décembre 2014,
Statuant à nouveau,
Fixe le préjudice subi par M. X... Y... au titre de l'immobilisation de son bien du 7 juin 2011 au 15 février 2016 à la somme de 25 666 euros ;
Y ajoutant,
Fixe le préjudice moral subi par M. X... Y... à la somme de 2 000 euros ;
Ordonne la compensation entre les sommes de 25 666 euros et 2 000 euros ainsi que celles de 1500 et 500 euros dues à M. X... Y... avec celle de 217 614,49 euros due par M. X... Y... au Grand Paris Aménagement,
Rappelle que la compensation de la somme de 4 500 euros due à M. X... Y... avec la somme de 217 614,49 euros due par lui à l'expropriant résulte d'un chef du jugement devenu irrévocable,
Déboute les parties de toute autre demande,
Condamne le Grand Paris Aménagement à payer la somme de 2 000 euros à M. X... Y... au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne le Grand Paris Aménagement aux dépens d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Laurence D..., Président et par Mme Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,