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03/07/2018 | FRANCE | N°16/03671

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 03 juillet 2018, 16/03671


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 56B



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 03 JUILLET 2018



N° RG 16/03671





AFFAIRE :



J... G... K...



C/



SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

...









Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 31 Mars 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre : 3

N° Section :

N° RG : 2014F01336


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Expéditions

Copies

délivrées le : 03.07.18



à :



Me Véronique L...



Me Christophe X...,



Me Bertrand Y...,



Me Martine Z...,



TC NANTERRE,



M.P



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE TROIS JUILLET DEU...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56B

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 03 JUILLET 2018

N° RG 16/03671

AFFAIRE :

J... G... K...

C/

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

...

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 31 Mars 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre : 3

N° Section :

N° RG : 2014F01336

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 03.07.18

à :

Me Véronique L...

Me Christophe X...,

Me Bertrand Y...,

Me Martine Z...,

TC NANTERRE,

M.P

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE TROIS JUILLET DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:

J... G... K...

[...]

[...]

Représentée par Maître Véronique L... de la A..., avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 39316 et par Maître F. B..., avocat plaidant au barreau de BEZIER

APPELANTE

****************

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

[...]

Représentée par Maître Christophe X..., avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 16103 et par Maîtres O.LOIZON, L-A. MONTIGNY et Me C..., avocats plaidants au barreau de

PARIS

Société ENEDIS anciennement dénommée ERDF - ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - N° SIRET : 444 608 442

[...]

[...]

Représentée par Maître Bertrand Y... M... I...-H... D... AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20160423 et par Maître P. E... avocat plaidant au barreau de MARSEILLE

Société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE

1 Cours Michelet - CS 30051

[...]

Représentée par Maître Martine Z... de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1656077 et par Maître Alexandra F... - JONATHAN avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mars 2018, Madame Sophie N..., présidente ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie N..., Présidente,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER

L'avis du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général a été transmis le 10 janvier 2018 au greffe par la voie électronique

FAITS ET PROCEDURE

La société G... K... a pour activité la production d'électricité d'origine renouvelable.

Afin de favoriser le développement des énergies renouvelables en France, la loi du 10 février 2000 a organisé les modalités de conclusion des contrats d'achat de l'électricité ainsi produite entre la société Electricité de France (ci-après EDF) et les producteurs de celle-ci.

Cette loi a notamment donné lieu aux décrets d'application du 6 décembre 2000 et du 10 mai 2001 et aux arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010 qui fixent les prix d'achat.

Il est ainsi fait obligation à la société EDF de conclure avec les producteurs intéressés un contrat pour l'achat de l'électricité produite par les installations de production d'électricité qui utilisent des énergies renouvelables à un prix supérieur au prix auquel la société EDF vend son énergie aux consommateurs.

Le raccordement de ces installations au réseau de distribution est réalisé par la société Électricité Réseau de France, devenue Enedis (ci-après 'la société Enedis').

Dans le cadre de cette réglementation, la société G... K... a décidé de l'implantation d'une centrale photovoltaïque d'une puissance de 906 kW, sur la commune de Florensac. Son projet étant soumis à proposition technique et financière de raccordement au réseau (ci-après 'PTF'), le délai d'instruction de la demande de raccordement était de trois mois à compter de la date de réception de la demande complète.

Elle a ainsi envoyé une demande de raccordement dont la société Enedis a accusé réception par lettre du 4 octobre 2010. La société Enedis n'a pas adressé de PTF à la société G... K....

Le décret du 9 décembre 2010 entré en vigueur le 10 décembre 2010 a suspendu pour une durée de trois mois à compter de son entrée en vigueur l'obligation de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par certaines installations photovoltaïques, aucune demande de contrat d'achat ne pouvant être déposée durant la période de suspension et les demandes suspendues devant faire l'objet, à l'issue de la période de suspension, d'une nouvelle demande complète de raccordement au réseau. Cette suspension ne s'applique toutefois pas aux installations dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la PTF. A l'issue de ce moratoire, un arrêté du 4 mars 2011 a fixé le prix d'achat de cette électricité à des tarifs inférieurs à ceux prévus par les arrêtés antérieurs et exclu du bénéfice de l'obligation d'achat les installations d'une puissance supérieure à 100 kWc, désormais soumises à une procédure d'appel d'offres.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 janvier 2011, la société Enedis a informé la société G... K... de la suspension de sa demande en application du décret du 9 décembre 2010 et l'a invitée à déposer une nouvelle demande à l'issue de la période de suspension.

A la fin de la période de suspension, la société G... K... n'a pas déposé de nouvelle demande de raccordement.

Soutenant que la société Enedis avait commis des fautes, la société G... K... l'a fait assigner devant le tribunal de commerce de Nanterre en réparation de son préjudice.

La société Enedis a appelé en garantie les sociétés Axa corporate solutions assurances (ci-après 'la société Axa') et Allianz global corporate et speciality (ci-après 'la société Allianz').

Par jugement contradictoire du 31 mars 2016, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- joint les trois procédures ;

- dit la société G... K... recevable en ses demandes ;

- débouté la société G... K... de toutes ses demandes ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur les autres demandes des sociétés Enedis, Axa et Allianz ;

- condamné la société G... K... à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- à la société Enedis la somme de 5 000 euros ;

- à la société Axa la somme de 2 000 euros ;

- à la société Allianz la somme de 2 000 euros ;

- condamné la société G... K... aux dépens de l'instance ;

Par déclaration reçue le 31 mai 2016, la société G... K... a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance d'incident du 22 mai 2017, le conseiller de la mise en état a débouté la société Enedis de sa demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Versailles dans le cadre de la procédure venant devant cette juridiction portant le n° RG 16/05166 (affaire CS Ombrière Le Bosc).

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 21 novembre 2017, la société G... K... demande à la cour :

- constatant que le propre de la responsabilité civile est de replacer la victime dans la situation qui aurait été la sienne si la faute n'avait pas été commise et, par voie de conséquence, en l'absence d'annulation des contrats en cours, que la concluante aurait obtenu un contrat d'achat insusceptible d'être remis en cause ;

- constatant que par sa validation législative du 12 juillet 2010, l'arrêté du 12 janvier 2010 n'a plus le caractère réglementaire ;

- constatant l'impossibilité pour le tribunal de commerce puis la cour de céans de remettre en cause une disposition législative ;

- constatant l'absence de démonstration de la réunion des trois critères de l'aide d'Etat exclus par la CJUE au visa de l'article 9 du code de procédure civile ;

- constatant que la société Enedis comme ses assureurs n'invoquent pas que les contrats en cours soient annulables ;

- constatant que même une illégalité de l'arrêté ne peut avoir pour effet de remettre les contrats conclus en cause et que le contrat d'achat aurait nécessairement été conclu en 2011 sans difficulté puisque l'arrêté du 12 janvier 2010 ne fait l'objet d'aucun recours et qu'il est définitif ;

- constatant que même dans l'hypothèse d'une invalidation de l'arrêté 12 janvier 2010, celle-ci ne peut être rétroactive au vu de la jurisprudence de la CJUE et du nombre de contrats impactés;

- en tout état de cause, constatant la conformité avec le droit européen de l'aide d'Etat apportée aux énergies renouvelables et au secteur photovoltaïque en particulier excluant que l'arrêté du 12 janvier 2010 puisse être invalidé, même s'il devait être considéré comme une aide d'Etat et avait organisé la contribution au service public de l'électricité;

- constatant que la demande ne consiste pas à obtenir un contrat d'achat en application de l'arrêté du 12 janvier 2010 ;

- constatant que si l'arrêté du 12 janvier 2010 devait être écarté, l'arrêté du 10 juillet 2006 s'appliquait avec un tarif de 60, 176 cts/kWh en lieu et place des 42 ou 50 cts revendiqués;

- constatant la faute de la société Enedis consistant en l'absence de transmission dans le délai réglementaire de trois mois d'une proposition technique et financière et en la violation de l'obligation d'instruction des dossiers de manière non-discriminatoire ;

- constatant l'existence du lien de causalité aussi bien sur la causalité adéquate que sur l'équivalence des conditions ;

- constatant l'absence d'une quelconque pièce venant démontrer l'augmentation prétendue par la seule société Enedis des demandes de raccordements durant la dernière semaine d'août 2010;

- rappelant que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même et qu'il appartenait à donc à la société Enedis de produire la fil d'attente des dossiers de demande de raccordement ;

- constatant que la société Enedis est soumise à une obligation de résultat par l'absence d'aléa sur la réalisation de sa prestation ;

- constatant que la société Enedis n'a pas même respecté une obligation de moyens en embauchant uniquement 18 intermédiaires à l'automne 2010 alors que la période était prétendument critique;

- constatant la parfaite connaissance par la société Enedis du problème des retards dans le traitement des demandes de raccordement excluant toute imprévisibilité et tout extériorité, et par voie de conséquence toute force majeure ;

- constatant la baisse très importante des demandes de raccordement en soutirage et l'application de la même documentation technique aux demandes de raccordement en injection, excluant toute irrésistibilité, et par voie de conséquence toute force majeure ;

- constatant l'aveu de la société Enedis devant l'Autorité de la concurrence de ne pas avoir traité les dossiers dans l'ordre chronologique, fait constitutif de discrimination ;

- rejeter toute conséquence du défaut de notification de l'arrêté du 12 janvier 2010 ;

- rejeter l'argument de l'illégitimité et de l'illicéité de la demande ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la recevabilité de la concluante ;

- constatant la pérennité du tarif d'achat et la fiabilité de la technologie photovoltaïque ;

- constatant la fiabilité des prévisions de production d'énergie par la transmission de pièces afférentes à plusieurs dizaines de centrales en fonctionnement ;

- constatant que la jurisprudence indemnise dans une telle hypothèse (contrat d'achat obligatoire à un tarif connu pour une durée déterminée) la perte de marge sur le contrat perdu;

- constatant que même l'application de la théorie de la perte de chance aboutit à l'indemnisation de près de 100% de la perte de marge ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a exclu la responsabilité de la société Enedis et débouté la concluante de sa demande indemnitaire ;

- par voie de conséquence, condamner la société Enedis sur la base de la somme de 8 206 426 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

- à titre subsidiaire, si la méthode de la VAN devait être retenue, condamner la société Enedis sur la base de la somme de 7 808 035 euros ;

- constatant qu'en tout état de cause, si l'arrêté du 12 janvier 2010 ne pouvait servir de base au calcul de l'indemnisation, la cour peut valablement l'évaluer à titre forfaitaire et non plus consécutivement au calcul lié à l'arrêté, à la somme de 8 206 426 euros ;

- condamner en outre Enedis au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de la SCP Buquet-Roussel-de-Carfort.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 9 janvier 2018, la société Enedis demande à la cour de :

Sur la confirmation du jugement,

1) Sur l'absence de discrimination dans le traitement du dossier,

- dire et juger que les accusations de discrimination formulées par la société G... K... ne sont ni démontrées ni fondées ;

2) Sur le défaut de lien de causalité,

- constater que le dossier de demande de raccordement déposé par la société G... K... n'était pas complet à la date de réception et n'a pas été complété par cette dernière ;

En conséquence,

- confirmer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre du 31 mars 2016 en ce qu'il a débouté la société G... K... de ses demandes;

En tout état de cause,

- dire et juger que la société G... K... ne démontre pas que, en l'absence de retard de la société Enedis dans la transmission de la PTF, elle aurait nécessairement matérialisé son accord sur ce document avec le 2 décembre 2010 ;

- dire et juger, en conséquence, qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la PTF et le préjudice allégué, qui résulte exclusivement de l'application du décret du 9 décembre 2010 au projet ;

3) Subsidiairement, sur le caractère non réparable du préjudice allégué,

- dire et juger que l'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil à un prix supérieur à sa valeur de marché, dans les conditions définies par l'arrêté du 12 janvier 2010, a le caractère d'une aide d'Etat;

- constater que cet arrêté n'a pas été notifié préalablement à la Commission européenne en violation de l'article 108 paragraphe 3 du TFUE ;

- dire et juger que cet arrêté est illégal et que son application doit, en tout état de cause, être écartée ;

- écarter, au besoin, l'application de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010 en raison de sa contrariété avec l'article 108 du paragraphe 3 du TFUE ;

- rejeter, en conséquence, les demandes de la société G... K... fondées sur une cause illicite ;

4) Plus subsidiairement, sur la perte de chance inexistante,

- dire et juger que le seul préjudice dont pourrait se prévaloir la société G... K... est la perte d'une chance (i) d'avoir pu matérialiser son accord sur une PTF avant le 1er décembre 2010 minuit (ii) puis d'avoir obtenu un contrat d'achat après avoir réalisé et mis en service sa centrale dans un délai de 18 mois et (iii) enfin d'avoir pu exploiter sur 20 ans sa centrale virtuelle ; que cette perte de chance est inexistante et, dès lors, non indemnisable ;

5) Encore plus subsidiairement, sur l'assiette de la perte de chance,

- dire et juger que les hypothèses de calcul de l'assiette de préjudice sont totalement injustifiées en leur principe et leur quantum ;

6) En conséquence,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 31 mars 2016 ;

- débouter la société G... K... de l'ensemble de ses demandes et de sa requête d'appel;

7) A titre très infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où une condamnation devrait intervenir à son encontre,

- condamner la compagnie Axa et la compagnie Allianz à la garantir de l'ensemble des condamnations mises à sa charge en principal, frais, intérêts ou accessoires ;

- débouter la compagnie Axa de sa demande visant à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle se réserve le droit de refuser sa garantie, malgré les termes de la décision à intervenir ;

8) Reconventionnellement,

- condamner la société G... K... à lui payer une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens conformément aux dispositions des articles 695 et suivants du code de procédure civile;

- condamner solidairement la compagnie Axa à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens conformément aux dispositions des articles 695 et suivants du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 5 janvier 2018, la société Axa demande à la cour de :

A titre principal,

- dire et juger que la société Enedis n'a commis aucune faute dans le traitement du dossier de la demande de raccordement de la société G... K... ;

- dire et juger que la société G... K... ne justifie pas du lien de causalité entre la prétendue faute imputée à la société Enedis et le préjudice allégué, ni de l'existence de ce préjudice ;

- dire et juger que le préjudice allégué par la société G... K... n'est pas réparable dès lors que l'arrêté du 12 janvier 2010 fondant le calcul de ce préjudice est illégal pour défaut de notification préalable à la Commission européenne ;

- en conséquence, confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 31 mars 2016 en ce qu'il a débouté la société G... K... de toutes ses demandes;

A titre subsidiaire, et si, par extraordinaire, la cour reconnaissait l'existence d'un préjudice réparable,

- ordonner une expertise et désigner un expert afin que ce dernier donne à la cour les éléments nécessaires pour apprécier la réalité et le quantum de l'éventuel préjudice subi par la société G... K...,

En tout état de cause :

- rejeter l'ensemble des demandes de la société G... K... ;

- débouter la société Enedis de ses demandes de garantie à son égard et, à défaut, faire application du seuil d'intervention de 1 500 000 euros ;

- subsidiairement, lui donner acte qu'elle se réserve le droit de refuser sa garantie dans l'hypothèse où des pratiques anti-concurrentielles étaient retenues ;

- condamner la partie succombante à lui verser la somme de 10 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Christophe X..., Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 12 janvier 2018, la société Allianz demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer la décision du tribunal de commerce de Nanterre du 31 mars 2016 ;

En conséquence,

- dire et juger que la responsabilité délictuelle de la société Enedis ne peut pas être engagée ;

- débouter G... K... de ses demandes, fins et conclusions ;

- dire et juger sans objet la demande de garantie de la société Enedis contre elle,

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ne confirmait pas la décision du 31 mars 2016 sur l'absence de responsabilité délictuelle de la société Enedis, il est demandé à la cour de,

A titre principal,

- constater l'absence de conformité au droit de l'Union européenne des divers arrêtés - dont l'arrêté ministériel du 12 janvier 2010 - fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative ;

- constater en conséquence que l'arrêté ministériel du 12 janvier 2010 - et le cas échéant tous autres arrêtés antérieurs - fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative est illégal par voie d'exception, pour défaut de notification préalable à la Commission européenne ;

- dire et juger que la société G... K... ne peut justifier d'un dommage réparable dès lors que le texte sur lequel elle fonde l'existence de ce dommage est entaché d'illégalité ;

- dire et juger qu'en tout état de cause, le préjudice n'est ni certain, ni direct;

- en conséquence, déclarer la société G... K... mal fondée en ses demandes et l'en débouter ; déclarer en conséquence sans objet l'appel en garantie de la société Enedis contre elle ;

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la société G... K... ne justifie ni d'une faute ni d'un lien de causalité entre la faute imputée à la société Enedis et le préjudice allégué;

- en conséquence, déclarer la société G... K... mal fondée en ses demandes et l'en débouter ; déclarer en conséquence sans objet l'appel en garantie de la société Enedis contre elle ;

A titre plus subsidiaire,

- dire et juger que le préjudice ne peut s'analyser qu'en une perte de chance infime;

- ordonner une expertise et désigner un expert afin que ce dernier donner à la cour les éléments nécessaires pour apprécier la réalité et le quantum de l'éventuel préjudice subi par la société G... K... ;

En tout état de cause sur la garantie,

- constater que la société Enedis ne rapporte pas la preuve de l'existence, de la nature et des conditions de la garantie qu'elle revendique auprès d'elle, ni du fait que sa responsabilité au cas d'espèce ne relèverait d'une telle garantie ;

- constater plus généralement que la société Enedis ne fonde ni ne précise aucunement sa demande contre elle ;

- en conséquence, débouter la société Enedis de ses demandes dirigées contre elle;

A titre subsidiaire sur la garantie,

- dire qu'elle ne saurait être tenue que dans les termes, limites et conditions des garanties d'assurance dont la société Enedis sollicite le bénéfice ;

- et constater qu'elle est susceptible, en fonction d'évolutions d'autres procédures en cours, d'opposer à la société Enedis le fait qu'elle aurait commis, dans sa relation avec les assureurs de sa responsabilité civile, une faute dolosive exclusive de garantie;

- constater en conséquence qu'elle se réserve le droit d'opposer une exclusion de garantie ;

En tout état de cause,

- condamner la partie succombante à lui verser à la somme de 15 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit du cabinet Lexavoue, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

- débouter les autres parties de leurs demandes dirigées contre elle faites au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le ministère public, dans son avis notifié aux parties le 10janvier2018, sollicite de la cour qu'elle tire les conséquences de l'ordonnance rendue par la Cour de justice de l'Union européenne le 15 mars 2017 dans l'affaire C-515/16 et adopte les points de droit suivants ' le mécanisme de l'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité, en application des arrêtés ministériels des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, doit être considéré comme une intervention de l'Etat ou au moyen de ressources d'Etat. En effet, dès lors qu'il accorde un avantage aux producteurs de cette électricité, cet avantage est susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres et d'avoir une incidence sur la concurrence ; sont ainsi réunis les critères de l'aide d'Etat au sens de l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Les arrêtés susvisés, pris en méconnaissance de l'obligation de notification préalable à la Commission européenne résultant de l'article 108 paragraphe 3 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, sont entachés d'illégalité, et, dès lors, ne peuvent être appliqués à la présente affaire'. Il s'en rapporte enfin à la sagesse de la cour sur le caractère juridiquement réparable d'un ou de plusieurs préjudices invoqués par l'intimée, qui pourrait reposer sur un fondement autre que les arrêtés ministériels susmentionnés.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2018.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures signifiées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Aucune des parties ne sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit la société G... K... recevable en ses demandes. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

La société G...K... soutient que la société Enedis avait l'obligation de mettre à disposition une PTF au plus tard le 27novembre2010, sa demande complète de raccordement ayant été reçue par la société Enedis le 27août2010, que sa demande n'a pas été instruite dans les délais, que sans cette faute que la société Enedis ne conteste pas elle aurait pu retourner son accord sur la PTF avant l'entrée en vigueur du moratoire de sorte que la société Enedis a engagé sa responsabilité.

Elle soutient également que la société Enedis a violé son obligation légale d'instruire les dossiers sans discrimination, que dans un audit réalisé par elle-même la société Enedis reconnaît que le traitement des demandes a répondu à d'autres règles que leur date d'enregistrement, que ces éléments ont conduit l'Autorité de la concurrence à poursuivre son enquête sur les pratiques de la société Enedis, qu'alors que sa propre demande n'a pas été instruite dans les trois mois une autre société a obtenu une PTF en moins de cinq semaines et qu'ainsi le principe de sa demande est justifié sur ce seul fondement.

La société Enedis conteste que le dossier de la société G... K... ait été complet au 27août2010 faisant valoir que par courriel du 8octobre2010 elle a indiqué à la demanderesse que des données nécessaires à la réalisation des études manquaient et que ces informations ne lui ont jamais été transmises par la société G... K.... Elle en conclut que c'est à bon droit que le tribunal a considéré qu'elle n'avait pas commis de faute.

La société Enedis conteste tout traitement discriminatoire des demandes de raccordement répliquant que la décision du 14 février 2013 de l'Autorité de la concurrence n'établit pas un tel traitement, que celle du 17décembre 2013 concerne les sociétés EDF et EDF EN et un autre sujet, que le Conseil d'Etat ne l'a pas sanctionnée dans un arrêt du 28novembre2012 qui a annulé le tarif d'utilisation du réseau de distribution d'électricité dont la détermination relève du Gouvernement et non de la société Enedis.

Les sociétés Allianz et Axa considèrent que la demande de raccordement déposée par la société G... K... n'était pas complète, la société Enedis ayant demandé des données par courriel du 8octobre2010 sans lesquelles elle estimait que les études ne pouvaient être réalisées et que la société G... K... ne justifie pas les avoir transmises, de sorte que le délai de trois mois n'a pas commencé à courir.

Il résulte de la délibération de la commission de régulation de l'énergie du 11 juin 2009 portant décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement au réseau public de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en oeuvre et de son annexe 1 que la société ERDF, devenue Enedis, avait l'obligation de transmettre aux demandeurs une PTF dans un délai n'excédant pas trois mois à compter de la réception de sa demande de raccordement complète.

L'article 7.2.3 de la procédure de traitement des demandes de raccordement individuel d'Enedis applicable à compter du 3 juillet 2010 (ERDF-PRO-RAC-14E Version V.1) pour les installations d'une puissance supérieure à 36 kVA, prévoit que ' A l'issue de cet examen et lorsque le dossier est complet, la demande de raccordement est qualifiée. La date de qualification de la demande de raccordement est fixée à la date de réception du dossier lorsque celui-ci est complet ou à la date de réception de la dernière pièce manquante. ERDF confirme par courrier postal ou électronique au demandeur que son dossier est complet. A cette occasion, ERDF communique également la date de qualification de sa demande de raccordement (...) ainsi que le délai d'envoi de l'offre de raccordement'.

L'article 8.2.1 de ce document précise qu'à "compter de la date de qualification de la demande de raccordement, le délai de transmission au demandeur de l'offre de raccordement (...) n'excédera pas trois mois quel que soit le domaine de tension de raccordement".

Ainsi, sur le fondement des dispositions de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, la société Enedis commet une faute délictuelle lorsque le délai de trois mois dont elle dispose pour adresser une PTF à un candidat au raccordement au réseau électrique n'est pas respecté.

Ce délai maximum de trois mois se calcule à partir de la date de la réception par la société Enedis du dossier complet de demande de raccordement et s'apprécie à la date de réception de la PTF par le demandeur.

En l'espèce, il est justifié que, par lettre du 4 octobre2010, la société Enedis a accusé réception de la demande de PTF formée antérieurement, sans que sa date soit justifiée par les pièces produites par les parties, par la société G... K... pour la centrale solaire Altrad Nord. Cette lettre fixe la date d'entrée en file d'attente au 27août2010 et indique que le chiffrage, sous forme de devis, sera proposé après une étude du tracé de raccordement, au plus tard le 27novembre2010, sous réserve de validation de l'ensemble du dossier technique.

La fiche A de la demande de raccordement indique comme interlocuteur de la société Cédric André joignable à l'adresse électronique [...].

Par courriel du 8 octobre 2010 adressé à cette personne à cette adresse électronique, la société Enedis a indiqué que dans ce dossier il manquait les données (comportement en cas de court-circuit triphasé et biphasé) et au niveau des impédances (schéma série ou parallèle) et si les données sont données en BTA ou HTA et précisé que sans ces éléments les études ne peuvent être réalisées.

La société G... K... se borne à dire qu'il n'est pas justifié que le courriel ait été envoyé et reçu. Elle ne conteste pas les éléments manquants ainsi recensés par la société Enedis.

Il résulte des termes des fiches de collecte de renseignement composant le dossier de demande de PTF que si les données de comportement en cas de court-circuit triphasé et biphasé ne sont pas obligatoires pour considérer la demande comme complète, en revanche celles relatives à l'impédance sont nécessaires pour la complétude de la demande.

La société G... K... n'a pas transmis à la société Enedis des éléments essentiels à l'établissement d'une PTF et précisés dans le courriel du 8 octobre2010 sus évoqué dans le délai d'instruction de sa demande de raccordement.

La demande de la société G... K... étant ainsi incomplète n'a pu entrer régulièrement en file d'attente et ce quand bien même la société Enedis en a accusé réception le 4octobre2010 en fixant la date de complétude de la demande au 27août 2010. Cette dernière date ne peut donc être considérée comme ayant constitué le point de départ du délai de trois mois imparti à la société Enedis. La société G... K... n'ayant pas transmis à celle-

ci les informations relatives à l'impédance nécessaires à la complétude de sa demande, le délai d'instruction n'a pas couru de sorte qu'aucune faute n'est établie à l'encontre de la société Enedis.

Le délai n'ayant pas couru, par suite, aucun reproche lié à un traitement discriminatoire ne peut être formulé à l'encontre de la société Enedis.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions;

Y ajoutant,

Condamne la société G...K... à payer à la SA Enedis la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société G...K... à payer à la société Axa corporate solutions assurances la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société G...K... à payer à la société Allianz global corporate et speciality la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société G...K... aux dépens d'appel et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie N..., Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 16/03671
Date de la décision : 03/07/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-03;16.03671 ?
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