COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 04 AVRIL 2019
N° RG 16/03056 - N° Portalis DBV3-V-B7A-QYY5
AFFAIRE :
[V] [Q]
C/
SAS APIC
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Mai 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL
Section : Encadrement
N° RG : 15/00236
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Mylène COHEN
Me Carole BAZZANELLA
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATRE AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [V] [Q]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Mylène COHEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0840
APPELANT
****************
SAS APIC
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Carole BAZZANELLA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0206
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Février 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Hélène PRUDHOMME, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
Le 17 mai 2010, M. [V] [Q] était embauché par la société Apic en qualité de responsable achat-fabrication et logistique (statut cadre) par contrat à durée indéterminée. Le contrat de travail était régi par la convention collective du commerce de gros du 23 juin 1970.
M. [V] [Q] était en arrêt maladie à compter du 06 janvier 2014.
Le 07 avril 2014, la société Apic lui adressait une première lettre de mise en demeure de reprendre ses fonctions.
Le salarié n'ayant pas repris son poste, la société Apic le convoquait à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement le 18 avril 2014. L'entretien avait lieu le 05 mai 2014. Le salarié se présentait seul à cet entretien. Par courrier du 12 mai 2014, la société Apic informait M. [V] [Q] qu'elle ne donnait pas de suite à sa décision de licenciement.
Par lettre du 08 juillet 2014, la SAS Apic adressait à M. [V] [Q] une nouvelle lettre de mise en demeure de reprendre son poste dans les dix jours. Le 18 juillet 2014, l'employeur le convoquait à un entretien préalable en vue de son licenciement. L'entretien avait lieu le 30 juillet 2014. Le 06 août 2014, il lui notifiait son licenciement pour absence prolongée causant un trouble sérieux dans l'entreprise et nécessitant le remplacement du salarié.
Le 28 mai 2015, M. [V] [Q] saisissait le conseil de prud'hommes d'Argenteuil en contestation du caractère réel et sérieux de son licenciement.
Vu le jugement du 17 mai 2016 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes d'Argenteuil qui a :
- dit que le licenciement de M. [V] [Q] est justifié par une cause réelle et sérieuse,
- débouté M. [V] [Q] de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la société Apic de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens à la charge de M. [Q],
Vu la notification de ce jugement le 17 mai 2016.
Vu l'appel interjeté par M. [V] [Q] le 03 juin 2016,
Vu les conclusions de l'appelant M. [Q] soutenues à l'audience du 20 février 2019 par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, il est demandé à la cour d'appel de :
- constater que la société Apic a enfreint les dispositions de l'article 48 de la convention collective du commerce de gros,
-dire et juger en conséquence le licenciement prononcé à l'encontre de M. [Q] sans cause réelle et sérieuse,
Subsidiairement,
- constater que la société Apic ne démontre pas la nécessité de remplacement définitivement pour M. [Q] en raison de son absence prolongée,
- dire et juger en conséquence le licenciement prononcé à l'encontre de M. [Q] sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la société Apic à verser à M. [Q] la somme de 92 300 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- condamner la société Apic à verser à M. [Q] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les écritures de l'intimée la société Apic développées à l'audience du 20 février 2019 par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, il est demandé à la cour d'appel de :
A titre principal,
- confirmer le jugement entrepris
- condamner M. [V] [Q] à payer 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner M. [V] [Q] aux dépens.
A titre subsidiaire
- ramener les prétentions de M. [V] [Q] à de plus justes proportions, faute de justification apportée sur le préjudice subi,
Vu la lettre de licenciement,
SUR CE,
Sur les demandes liées à la rupture du contrat de travail
En premier lieu, le salarié conclut à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement dès lors, selon lui, que la procédure qui a été suivie par la société n'a pas respecté les dispositions de la convention collective et plus précisément l'article 48 de la dite convention.
Selon ce texte : en cas d'absence d'un salarié se prolongeant au-delà du 80ème ou 170ème jour, l'employeur peut mettre l'intéressé en demeure, par lettre recommandée, de reprendre son travail dans les dix jours francs suivant l'envoi de la dite lettre. Dans le cas où l'intéressé n'a pas repris son travail dans ce délai et si les absences dépassant les délais ci-dessus entraînent des perturbations dans le fonctionnement de l'entreprise et imposent le remplacement effectif définitif de l'intéressé, l'employeur aura, à l'expiration des dits délais, la faculté de procéder au licenciement du collaborateur malade ou accidenté...
Le salarié soutient que la société n'a pas respecté les délais fixés par ce texte dès lors qu'ayant adressé une mise en demeure le 8 juillet 2014 et une lettre de convocation à l'entretien préalable le 18 juillet, elle n'a pas attendu l'expiration du délai de dix jours francs qui l'obligeait à attendre le 19 juillet 2014, soit le 11ème jour, pour mettre en oeuvre la procédure de rupture du contrat de travail.
Il ressort toutefois des dispositions sus-visées que l'employeur a la faculté, à l'expiration du délai précité, de procéder au licenciement, ce qui revient à notifier la décision de licenciement laquelle ne peut intervenir que par la lettre notifiant cette mesure dès lors qu'il est constant qu'au stade de l'entretien préalable aucune décision de rupture du contrat de travail n'est concrétisée.
Dans ces circonstances, il apparaît que la société Apic n'a, en l'espèce, nullement contrevenu aux dispositions conventionnelles et le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté ce moyen invoqué par le salarié.
En second lieu, sur le motif du licenciement : si l'article L 1132-1 du code du travail fait interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail, il ne s'oppose pas à son licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, à la condition que ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif par l'engagement d'un autre salarié, lequel doit intervenir dans un délai raisonnable après le licenciement.
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige faisait état des difficultés de fonctionnement liées à l'absence prolongée du salarié et à la nécessité de procéder à son remplacement.
La société Apic qui employait, à l'époque des faits examinés, 34 personnes rappelle qu'elle est une société de négoce qui fournit des produits de traitement de l'eau et que son activité se partage entre une activité d'achat (80 %) et une activité de fabrication (20 %) et, dès lors, souligne que M. [Q] en sa qualité de responsable du service achats-fabrication et logistique occupait un poste essentiel à son fonctionnement ainsi qu'en atteste l'organigramme de la société. En outre, elle fait valoir qu'elle dispose d'un système d'information centralisé (comptabilité, gestion des achats et des ventes) connu sous le nom de ERP Navision nécessitant une formation préalable.
La société Apic établit que M. [Q] a été absent à compter du 6 janvier 2014 et que les arrêts de travail se sont succédé sans qu'il soit possible d'avoir une visibilité sur la date éventuelle de son retour (pièce n° 24 de la société), alors que son assistante a été également absente entre le 17 septembre 2013 et le 31 mars 2014.
M. [D] (responsable des services techniques) a été sollicité pour remplacer son collègue [Q] mais, dès le 24 janvier 2014 (pièce n° 25 de la société), celui-ci avait exprimé qu'il se sentait bousculé dans son travail avec différentes tâches et la situation avait perduré dès lors que le 26 septembre suivant (pièce n° 26 de la société), il apparaissait que la société Apic souffrait d'un manque d'innovation, qu'il y avait eu peu d'évolution dans le domaine informatique et que la mise en place d'un plan qualité était repoussé.
Le responsable de la société Cappers (pièce n° 20 de la société) faisait état d'un premier semestre difficile dans ses relations avec la société Apic, de commandes reçues très tardivement et de problèmes pour joindre le service achat. A son tour, la société RPS Imprimerie (pièces n° 16 et 21 de la société) évoquait à la même époque des retards de livraison, des commandes tardives ; il apparaît que ces témoins ne sont dans aucun lien de subordination avec la société Apic et aucun élément et / ou indice ne permet de mettre en doute leur sincérité ; enfin, durant l'absence de M. [Q], l'état des stocks avait enregistré une chute (pièce n° 27 de la société).
A compter du 1er septembre 2014, M. [O] a été embauché dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité de responsable achat-fabrication et logistique (pièces n° 22 et 23 de la société) et il apparaît que celui-ci connaissait le logiciel ERP Navision.
Il ressort des explications qui précèdent que la société Apic établit la réalité des perturbations liées à l'absence de M. [Q] et les seules allégations de ce dernier ne peuvent utilement contredire ces éléments ; en tous cas, le fait que le conseiller du salarié ait noté au cours de l'entretien préalable que l'absence du salarié n'avait pas eu d'effet dramatique sur le fonctionnement de la société est sans effet sur les constations opérées. Il faut ajouter que la société a procédé au remplacement définitif de l'intéressé dans un délai proche du licenciement (de manière effective trois semaines après).
En conclusion, le jugement qui a retenu la cause réelle et sérieuse du licenciement sera confirmé et M. [Q] sera débouté de ses prétentions formées au titre de la rupture du contrat de travail.
Sur les dépens et sur l'indemnité de procédure
Le salarié qui succombe sera condamné aux dépens et débouté de sa demande formée par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Compte tenu de la situation respective des parties, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la société les frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes d'Argenteuil (section encadrement) en date du 17 mai 2016,
Y ajoutant,
Déboute M. [V] [T] [Q] et la société Apic de leur demande formée par application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [V] [T] [Q] aux dépens,
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme Sophie RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIERLe PRESIDENT