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19/11/2019 | FRANCE | N°19/03744

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 19 novembre 2019, 19/03744


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 4ID



13e chambre



ARRET N°



PAR DÉFAUT



DU 19 NOVEMBRE 2019



N° RG 19/03744 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TG7U



AFFAIRE :



[G] [U]





C/





[S] [H]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Avril 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 2018L02049



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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 19.11.2019





à :





Me Sabine LAMIRAND



Me Oriane DONTOT



TC de NANTERRE



MP



PÔLE ÉCOFI



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4ID

13e chambre

ARRET N°

PAR DÉFAUT

DU 19 NOVEMBRE 2019

N° RG 19/03744 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TG7U

AFFAIRE :

[G] [U]

C/

[S] [H]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Avril 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 2018L02049

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 19.11.2019

à :

Me Sabine LAMIRAND

Me Oriane DONTOT

TC de NANTERRE

MP

PÔLE ÉCOFI

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [G] [U]

né le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 10] (EGYPTE) de nationalité Egyptienne

[Adresse 8]

[Adresse 8]

Représenté par Maître Sabine LAMIRAND, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.455 et par Maître Thassadit KHEMISSI, avocat plaidant au barreau de PARIS

APPELANT

****************

Monsieur [S] [H]

né le [Date naissance 5] 1962 à [Localité 11] (EGYPTE)

de nationalité Egyptienne

[Adresse 7]

[Adresse 7]

DÉFAILLANT

Monsieur [Z] [B]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 12] (ITALIE)

de nationalité Italienne

[Adresse 3]

[Adresse 3]

DÉFAILLANT

Société ALLIANCE agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège mission conduite par Me [C] [J] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL NIL BATIMECO

N° SIRET : 830 051 512

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Maître Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20190491

INTIMÉS

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Octobre 2019, Madame Marie-Andrée BAUMANN, conseiller à la cour d'appel de Versailles, délégué par ordonnance de Madame le premier président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN

En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont l'avis du  4 juillet 2019 a été transmis le même jour au greffe par la voie électronique

La SARL Nil batimeco, constituée au cours de l'année 2007, était spécialisée dans les travaux tous corps d'état, la peinture, la décoration et la maçonnerie. Lors de sa constitution, le capital de la société était réparti de la façon suivante :

- à hauteur de 40 % pour Monsieur [G] [U] qui était le gérant ;

- à hauteur de 30 % pour Monsieur [O] [U] ;

- à hauteur de 30 % pour Monsieur [X] [U].

Par acte du 15 février 2015, M. [G] [U] a cédé l'intégralité de ses parts à Monsieur [S] [H], qui lui a également succédé à cette date dans ses fonctions de gérant.

À partir du 30 avril 2015, Monsieur [Z] [B] a été désigné en qualité de gérant en remplacement de M. [H], qui faisait l'objet d'une interdiction de gérer prononcée le 10 février 2014 pour une durée de deux ans.

Selon jugement réputé contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 27 janvier 2016, rendu sur assignation de l'Urssaf et après enquête, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Nil batimeco, fixé la date de cessation des paiements au 28 juillet 2014 et désigné la SCP BTSG, prise en la personne de maître [C] [J], puis la Selas Alliance, prise en la personne de maître [J], aux fonctions de liquidateur judiciaire.

La Selas Alliance, ès qualités, estimant que les opérations de la procédure ont mis en évidence un certain nombre de fautes de gestion imputables à M. [G] [U] en sa qualité de dirigeant de droit puis de fait, ainsi qu'à MM. [H] et [B], les a attraits en sanctions personnelles et comblement de l'insuffisance d'actif de la société Nil batimeco.

Par jugement réputé contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 3 avril 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- condamné MM. [U], [H] et [B] à payer chacun entre les mains de maître [J], ès qualités, la somme de 25 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, ce avec capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil ;

- prononcé à l'égard de MM. [U], [H] et [B] une interdiction de gérer pour une durée de cinq ans ;

- condamné MM. [U], [H] et [B] à payer chacun à maître [J], ès qualités, la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum MM. [U], [H] et [B] aux dépens, à l'exception des frais de greffe qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Le tribunal a estimé que les éléments constitutifs d'une gérance de fait ne sont pas établis à l'encontre de M. [U]. Il a relevé que le passif admis à titre définitif s'élève à 1 144 680 euros pour un actif recouvré de 18 279,27 euros, soit une insuffisance d'actif de 1 126 400,73 euros. Il a retenu les fautes de défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal et d'absence de tenue de comptabilité complète et régulière à l'encontre de MM. [U], [H] et [B], ainsi que celle de défaut de règlement des obligations fiscales et sociales à l'encontre de M. [B].

M. [U] a interjeté appel le 22 mai 2019 des dispositions du jugement le concernant.

La déclaration d'appel a été signifiée le 12 juin 2019 à M. [H] par remise à l'étude de l'huissier et à M. [B] selon procès-verbal de recherches infructueuses du même jour. Ils n'ont pas constitué avocat.

Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 27 septembre 2019 puis signifiées le même jour à M. [H], par acte remis à l'étude, et le 30 septembre 2019 à M. [B], selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, M. [U] demande à la cour de :

- le recevoir en son appel et l'en déclarer bien fondé ;

- infirmer le jugement, avec toutes conséquences en droit, en ce qu'il :

- l'a condamné à payer la somme de 25 000 euros entre les mains de maître [J], ès qualités, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, ce avec capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil,

- prononcé à son égard une interdiction de gérer pour une durée de 5 ans,

- dit que les fonds correspondants à hauteur de 75 000 euros seront déposés à la Caisse des dépôts et consignations jusqu'à l'obtention d'une décision définitive ayant autorité de la chose jugée,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement sur l'ensemble des condamnations prononcées,

- l'a condamné à payer à maître [J], ès qualités, la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamné in solidum avec MM. [H] et [B] aux dépens, à l'exception des frais de greffe qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective ;

En conséquence, statuant à nouveau,

- constater que les fautes de gestion qu'il a commises sont caractérisées par de la simple négligence et/ou ignorance ;

- dire et juger que les fautes sanctionnées par le tribunal de commerce de Nanterre ne lui sont pas imputables ;

- débouter la Selas Alliance, ès qualités, de l'ensemble de ses demandes ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la Selas Alliance, ès qualités, irrecevable en son action à son encontre en sa qualité de dirigeant de fait de la société Nil batimeco.

Dans ses conclusions formant appel incident déposées au greffe et notifiées par RPVA le 30 septembre 2019, étant précisé que ses précédentes écritures dont le dispositif n'a pas été modifié ont été signifiées à M. [B] selon procès-verbal de recherches infructueuses du 5 août 2019 et à M. [H] par remise à personne du 6 août 2019, la Selas Alliance, ès qualités, demande à la cour de :

A titre liminaire :

- déclarer M. [U] irrecevable en son appel à l'égard de MM. [H] et [B] ;

- déclarer irrecevables les conclusions d'appelant signifiées par M. [U] en date du 4 juillet 2019 ;

Sur le fond :

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que M. [U] doit supporter personnellement une partie de l'insuffisance d'actif de la société Nil batimeco et en ce qu'il a condamné M. [U] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé à l'égard de M. [U] une interdiction de gérer pour une durée de 5 ans ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en son action à l'encontre de M. [U] en sa qualité de dirigeant de fait de la société Nil batimeco ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a limité la condamnation de M. [U] au paiement de l'insuffisance d'actif de la société Nil batimeco à la somme de 25 000 euros ;

Statuant à nouveau,

- constater que M. [U] a exercé les fonctions de gérant de droit de la Nil batimeco à compter de sa constitution jusqu'au 15 février 2015, puis de gérant de fait à compter du 15 février 2015 jusqu'au prononcé de sa liquidation judiciaire ;

- constater que le montant de l'insuffisance d'actif de la société Nil batimeco s'élève à la somme de 1 131 190,66 euros ;

En conséquence,

- condamner M. [U] au paiement de la totalité de l'insuffisance d'actif de la société Nil batimeco, en application des dispositions de l'article L.651-2 du code de commerce, déduction faite du montant des condamnations mises à la charge de MM. [H] et [B] par le jugement du 3 avril 2019, soit la somme de 980 190,66 euros ;

- dire que les intérêts se capitaliseront pour ceux échus depuis une année entière au moins en application de l'article 1343-2 du code civil ;

En toutes hypothèses :

- débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner M. [U] à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [U] aux entiers dépens de l'instance et autoriser maître Ariane Dontot à en recouvrer directement le montant pour ceux la concernant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans son avis communiqué par RPVA le 4 juillet 2019, le ministère public recommande la confirmation du jugement, estimant que les premiers juges ne se sont pas montrés très sévères au regard des trois griefs qui sont caractérisés et du montant de l'insuffisance d'actif.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 septembre 2019.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

La société Alliance, ès qualités, qui a relevé dans ses écritures que M. [U] avait déclaré une adresse erronée au soutien de sa déclaration d'appel et de ses conclusions n° 1 et 2, a indiqué à l'audience qu'elle abandonnait sa demande relative à l'irrecevabilité des conclusions de l'appelant, celui-ci ayant justifié de son actuelle adresse, dans ses dernières écritures du 27 septembre 2019, en communiquant une facture d'électricité établie à son nom et datée du 22 septembre 2019. Il n'y a pas lieu par conséquent de statuer sur ce point.

Sur la mise en cause de MM. [H] et [B] :

La Selas Alliance, ès qualités, fait valoir que M. [U] ne justifie d'aucun intérêt à agir à l'encontre de MM. [H] et [B] dès lors qu'il ne sollicite l'infirmation d'aucun chef du jugement les concernant et que son appel est donc irrecevable en ce qu'il est dirigé à leur encontre.

M. [U] ne présente aucune observation particulière sur cette fin de non recevoir, celui-ci demandant simplement à la cour, dans le dispositif de ses écritures, de le déclarer recevable en son appel.

M. [U] a limité son appel aux seuls chefs du jugement l'ayant condamné au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif et en sanction personnelle ainsi qu'à la condamnation prononcée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à celle prononcée, in solidum avec les autres défendeurs, au paiement des dépens. Il avait cependant intérêt à intimer les autres défendeurs à la procédure dans la mesure où ceux-ci ont également été dirigeants de droit de la société Nil Batimeco et pouvaient apporter des éléments concernant la participation de chacun dans la direction et la gestion de la société, la condamnation aux dépens dont il sollicite l'infirmation ayant en outre été prononcée in solidum avec M. [H] et M. [B].

Cette fin de non-recevoir sera écartée. Aucun autre moyen n'étant soulevé ou susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer l'appel de M. [U] recevable.

Sur la gestion de fait de M. [U] :

La Selas Alliance, ès qualités, reproche au tribunal de s'être livré à une interprétation isolée de chacun des indices établissant la direction de fait de ce dernier. Elle soutient que celui-ci, postérieurement à la cessation de son mandat de dirigeant de droit, a persisté à exercer les fonctions de gérant de fait en continuant de disposer d'un pouvoir dans l'entreprise lui permettant de faire usage de sa trésorerie et de la représenter à l'égard des tiers. Elle expose que lors du contrôle fiscal le conseil de la société a déclaré ne pas être au courant du changement de direction et les salariés ignoraient les coordonnées de M. [B] ; que M. [U] a continué à disposer seul de la signature bancaire des comptes de la société ouverts dans les livres de la société BTP banque et de la Banque populaire, au vu des cartons de signature qui n'ont pas été modifiés par les gérants successifs, aucune procuration n'ayant été mentionnée par les établissements bancaires et les comptes ayant continué de fonctionner après la démission de M. [U] ; qu'en outre il est mentionné en qualité de gérant dans des factures adressées à un client de la société entre le 16 juillet 2012 et le 25 avril 2015; qu'il est par ailleurs le signataire des déclarations 2065 au titre des exercices clos les 31 décembre 2012, 31 décembre 2013 et 31 décembre 2014 respectivement déposées les 24 avril 2013, 16 mai 2014 et 11 mai 2015, alors même qu'à cette date il n'exerçait plus aucune fonction salariée au sein de la société, qu'il n'en était plus associé ni gérant de droit et que c'est également son conseil qui a pris attache avec les organes de la procédure afin de représenter la société dans le cadre de la contestation de la proposition de rectification fiscale. Elle en conclut qu'il est ainsi démontré que M. [U] a accompli des actes positifs de direction et de gestion de la société Nil batimeco.

M. [U] demande à la cour de confirmer le jugement dont il soutient qu'il a justement retenu que les éléments constitutifs d'une gérance de fait ne sont pas établis à son encontre après s'être livré à une analyse précise et détaillée de chacun des indices invoqués par le liquidateur. Il observe que les premiers juges ont notamment considéré que l'ignorance des salariés, à l'époque du contrôle fiscal, des coordonnées du gérant de la société ne constitue pas la preuve suffisante de ce qu'il était gérant de fait lors de ce contrôle, que les éléments communiqués par le liquidateur ne démontrent pas qu'il ait fait fonctionner les comptes de l'entreprise postérieurement à la fin de son mandat le 15 février 2015, le tribunal relevant qu'il était produit la preuve des encaissements sur les comptes bancaires jusqu'au 28 mai 2014, date à laquelle il était toujours gérant de droit et qu'il appartenait à la nouvelle gérance de faire modifier les cartons de signature, lui-même n'ayant plus le pouvoir de le faire ; que la production de deux factures sur lesquelles figurent son nom, émises peu de temps après la fin de la gérance, ne constitue pas un élément suffisant pour prouver l'accomplissement d'actes positifs de gestion ou de direction ; qu'enfin si le dépôt d'une déclaration fiscale est un indice de la direction de fait, le dépôt par lui-même le 11 mai 2015 de la déclaration 2065 auprès des autorités fiscales ne suffit pas à établir la direction de fait.

L'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 décembre 2016 applicable immédiatement aux procédures collectives et aux instances en responsabilité en cours, dispose notamment que 'lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut pas être engagée'.

La direction de fait d'une personne morale ou physique suppose de démontrer l'exercice en toute indépendance d'une activité positive de gestion et de direction.

Il ressort de la proposition de rectification émise par l'administration fiscale le 8 décembre 2015, suite à la vérification de la comptabilité de la société Nil batimeco dont celle-ci a été avisée le 5 juillet 2015, et de ses annexes communiquées sous la pièce 6 de la Selas Alliance, ès qualités, que :

* cette vérification a porté sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, période étendue jusqu'au 31 mai 2015 en matière de taxe sur le chiffre d'affaires ;

* malgré ses tentatives répétées et les lettres de convocation et de mises en garde qu'elle a adressées tant au siège social de la société Nil Batimeco et à l'adresse de son nouveau dirigeant en juillet et septembre 2015, l'administration fiscale n'a pas pu rencontrer les nouveaux dirigeants de la société et a établi dans ces circonstances le 5 novembre 2015 un procès-verbal pour opposition à contrôle fiscal ;

* suite à un courrier en date du 4 août 2015 de la société Nil Batimeco, l'administration fiscale, le 29 septembre 2015, s'est présentée à la demande de la société dans les locaux de M. [L] [F], conseil, qu'elle avait déjà rencontré lors d'une précédente vérification de la comptabilité de la société relative aux années 2009 et 2010, celui-ci disposant alors d'un mandat de représentation établi par M. [U] ; M. [F] a indiqué lors de ce rendez-vous ne pas avoir été informé du changement de gérant de la société et ignorer les coordonnées de M. [B] ;

* dans le cadre de son droit de communication bancaire, l'administration fiscale a obtenu de la Bred Banque populaire et de BTP banque des relevés de compte et les cartons de signature des deux comptes courants ouverts au nom de la société Nil Batimeco ; M. [U] y figure comme le seul signataire et aucune procuration n'y est mentionnée, étant observé que si le compte ouvert dans les livres de la Bred a été clôturé au cours de l'année 2013, le compte ouvert à la BTP banque a continué de fonctionner postérieurement à la date à laquelle M. [U] a cessé ses fonction de dirigeant de droit, le relevé communiqué sous l'annexe 2 mentionnant de nombreux et réguliers encaissements non seulement jusqu'au 28 mai 2014 comme le tribunal l'a indiqué mais aussi entre le 18 février 2015 et le 22 mai 2015 ;

* M. [U] est le signataire des déclarations 2065 des exercices clos les 31 décembre 2012, 31 décembre 2013 et 31 décembre 2014, cette dernière déclaration ayant été déposée auprès de l'administration fiscale le 11 mai 2015 alors qu'il n'était plus gérant de droit depuis le 17 février 2015 ;

* les factures obtenues par l'administration fiscale également dans le cadre de son droit de communication, qui sont des factures établies par la société Nil batimeo au nom de deux de ses clients au cours de la période du 16 juillet 2012 au 25 avril 2015 portent toutes la mention ' signature de M. [U], gérant', deux des factures communiquées étant datées des 24 et 25 avril 2015 ; aucune de ces factures n'a été signée par M. [U], y compris pour les factures établies lorsqu'il était encore gérant de droit de la société,

Il est ainsi établi que postérieurement au 17 février 2015, M. [U] a continué d'être le seul à disposer de la signature bancaire sur le compte ouvert au nom de la société Nil batiméo, lequel a continué de fonctionner sans changement des cartons de signature ; postérieurement à son remplacement, les factures ont continué de porter le nom de M. [U] en qualité de gérant et ce dernier, qui n'était plus ni associé, ni gérant, ni salarié de la société, a signé la déclaration fiscale 2065, engageant ainsi la société à l'égard de l'administration fiscale. En outre, M. [F], alors même qu'il ressort du mail adressé le 29 février 2016 au liquidateur judiciaire, sous la pièce 8 de ce dernier, qu'il a tenu la comptabilité de la société Nil batimeco jusqu'au 30 juin 2015, n'a eu aucun contact avec les dirigeants de droit qui ont succédé à M. [U], celui-ci n'ayant pas été informé d'une modification intervenue dans la direction de la société. Enfin, l'administration fiscale n'est jamais parvenue à entrer en contact avec les dirigeants de droit qui ont succédé à M. [U] à la tête de la société Nil batimeco.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que postérieurement à son remplacement au poste de dirigeant de droit de la société Nil batimeco, M. [U] a accompli, au sein de cette dernière, des actes de gestion et de direction, en toute indépendance. Sa responsabilité en tant que dirigeant de fait de la société Nil batimeco peut donc être engagée.

Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif :

L'insuffisance d'actif est égale à la différence entre le montant du passif antérieur admis définitivement et le montant de l'actif réalisé de la personne morale débitrice. Elle s'apprécie à la date à laquelle le juge statue.

Le passif admis à titre définitif, tel que visé par le juge-commissaire le 7 avril 2017, s'élève à la somme de 1 144 680,93 euros. Déduction faite de l'actif recouvré par la Selas Alliance à hauteur de 18 279,27 euros, le montant de insuffisance d'actif s'élève donc a minima à la somme de 1 126 401,66 euros, montant non contesté par M. [U].

Sur le défaut de déclaration de cessation des paiements :

M. [U], qui observe à titre liminaire que la nature des fautes de gestion retenues par le tribunal n'est aucunement caractérisée et qu'il a seulement fait preuve de négligence manifeste, expose que le passif de la société Nil batimeco a été constitué sur la base du montant de la dette fiscale due à la suite du contrôle ouvert alors qu'il avait démissionné de son poste de gérant et que la gérance était assurée par M. [H], et de la proposition de rectification fiscale notifiée le 8 décembre 2015 à la société. Il soutient ne pas avoir eu connaissance du montant du redressement, que les inscriptions apparaissant sur l'état des créances sont elles aussi postérieures à sa démission et qu'en conséquence, la faute constituée par le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal ne peut pas lui être imputée.

La Selas Alliance explique que M. [U] s'est délibérément abstenu de déclarer la cessation des paiements de la société Nil batimeco dans le délai légal dans la mesure où l'état des inscriptions de privilèges et publications de la société laisse apparaître deux inscriptions de privilèges de la Caisse de retraite prises les 11 août et 17 novembre 2015 pour des montants respectifs de 8 402,43 euros et 6 269,99 euros, une inscription de privilège de l'Urssaf du 15 octobre 2015 pour la somme de 9 363 euros ainsi qu'une inscription de nantissement judiciaire sur le fonds de commerce de la société en date du 12 avril 2012 renouvelée le 20 janvier 2015 en garantie d'une créance de 6 000 euros, de sorte que M. [U] ne pouvait ignorer l'état de cessation des paiements de la société. Elle ajoute que la société Nil batimeco a cessé de s'acquitter de ses cotisations sociales entre le 1er janvier 2012 et le 30 septembre 2015, qu'une créance fiscale d'un montant total de 20 117 euros a également été mise en recouvrement le 2 février 2015, de sorte qu'avant même l'issue de la vérification de comptabilité de la société par l'administration fiscale, M. [U] avait connaissance de l'antériorité de son passif ; qu'en outre la rectification fiscale a porté sur la période du 1er janvier 2012 au 31 mai 2015 durant la quasi-intégralité de laquelle M. [U] a été gérant de droit, ce qui montre d'une part que l'état de cessation des paiements de la société Nil batimeco est antérieur à la date fixée par le jugement, et d'autre part que M. [U], qui ne pouvait ignorer l'existence de dettes fiscales et sociales, n'a sciemment pas déclaré la cessation des paiements ; que cette faute de gestion a directement contribué à la naissance et l'aggravation de l'insuffisance d'actif, en faisant naître un passif supplémentaire au préjudice de la collectivité des créanciers.

Le défaut de la déclaration de cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours, telle que prévue par l'article L.640-4 du code de commerce, s'apprécie au regard de la date de cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report.

En l'espèce, la date de cessation des paiements qui a été fixée au 28 juillet 2014 par le jugement de liquidation judiciaire du 27 janvier 2016 n'a fait l'objet ni de contestation ni d'une action en report. Elle s'impose donc dans le cadre de la présente instance et il ne peut être contesté que la cessation des paiements aurait dû être déclarée au plus tard le 12 septembre 2014.

Il est constant que M. [U] qui était toujours gérant de droit au second semestre de l'année 2014 n'a pas déclaré la cessation des paiements qui a été constatée et fixée par le tribunal lorsqu'il a été saisi sur assignation de l'Urssaf du 25 novembre 2015.

Au vu des déclarations de créances communiquées par le liquidateur, ce retard a aggravé insuffisance d'actif. En effet :

- la déclaration de créance de Pro BTP contentieux, en tant que représentant des caisses du bâtiment et des travaux publics, mentionne une créance privilégiée totale de 20 843 euros correspondant aux cotisations arrêtées au 31 décembre 2014 (3 228 euros) outre celles de 2015 (16 793 euros) et du 1er au 27 janvier 2016 (822 euros) ;

- la déclaration de l'Urssaf comprend notamment les cotisations du 4ème trimestre 2014 (2 129 euros) outre celles de l'année 2015 (28 613 euros) ;

- l'administration fiscale a notamment émis le 2 février 2015 deux titres portant sur les sommes de 15 444 euros et 4 673 euros, au titre de la contribution spéciale et de la contribution forfaitaire outre la somme de 2 386 euros due au titre de la cotisation foncière des entreprises pour l'année 2015.

De plus, la vérification de comptabilité qui a été opérée en 2015 par l'administration fiscale, a donné lieu à des rappels de TVA sur les années 2012 à 2015 outre des majorations et intérêts de retard, pour un montant de 997 936 euros, selon sa demande d'admission définitive de sa créance initialement déclarée à titre provisionnel ; pour la plus grande part de cette période, M. [U] était toujours dirigeant de droit de la société Nil Batimeco.

L'absence de paiement des cotisations sociales et des obligations fiscales, compte tenu de leur montant, ne pouvait être ignorée par M. [U], gérant de droit puis gérant de fait de la société Nil Batimeco, d'autant que la société a fait l'objet le 20 janvier 2015 d'un renouvellement de l'inscription d'un nantissement judiciaire du 12 avril 2012 en garantie du paiement d'une somme de 6 000 euros et de plusieurs inscriptions de privilèges à l'initiative d'une part de la Caisse de retraite du bâtiment et des travaux publics, à hauteur de 8 402,43 euros le 11 août 2015 et de 6 269,99 euros le 17 novembre 2015 et d'autre part de l'Urssaf, à hauteur de 9 363 euros le 15 octobre 2015. Par conséquent, contrairement à ce que prétend M. [U], le défaut de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal ne peut constituer une simple négligence.

Faute de toute déclaration de cessation des paiements par M. [U], en sa qualité de gérant de droit puis de fait, et l'actif n'ayant pas été renforcé dans le même temps, la contribution à l'insuffisance d'actif est établie au moins à hauteur de 1 072 024 euros.

Sur le non respect des obligations fiscales et sociales

La Selas Alliance, ès qualités, expose que le passif admis de la société Nil batimeco est composé à 92% de créances privilégiées et quasi-exclusivement de nature fiscale et sociale, représentant la somme globale de 1 056 114 euros et que ce non-respect des obligation fiscales et sociales, qui a permis à la société de se doter d'une solvabilité artificielle, est une faute de gestion imputable à M. [U] en ce que la rectification fiscale a porté sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, étendue jusqu'au 31 mai 2015 en matière de taxe sur le chiffre d'affaires, durant laquelle il a été seul dirigeant de droit puis dirigeant de fait de la société. Cette faute a substantiellement et directement contribué au montant de l'insuffisance d'actif. Elle ajoute qu'il ressort du montant réduit du passif chirographaire déclaré que les principaux fournisseurs de la société Nil batimeco ont bénéficié de paiements préférentiels au préjudice de ses créanciers fiscaux et sociaux et en conclut que M. [U] doit être sanctionné à ce titre sur le fondement de l'article L.651-2, comme les autres dirigeants de la société liquidée, contrairement à ce qu'a décidé le tribunal.

M. [U] ne formule aucune observation sur cette faute de gestion.

Les déclarations de créances rappelées précédemment démontrent le non paiement des cotisations sociales et des créances fiscales, étant précisé que la déclaration de la créance de l'Urssaf fait également état, en plus des sommes précédemment citées, de cotisations restées impayées à compter de 2012 jusqu'au 1er trimestre 2014, pour un montant supplémentaire de 36 224,67 euros.

Le non respect des obligations fiscales et sociales est une faute de gestion, caractérisée en l'espèce au regard de l'ancienneté et de la répétition des impayés et de leur montant. Elle s'étend sur la période durant laquelle par M. [U] a été dirigeant de droit puis dirigeant de fait de la société liquidée. Il ne peut s'agir d'une simple négligence et celle-ci a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif. Ce grief est ainsi également caractérisé à l'encontre de M. [U], le jugement étant infirmé de ce chef.

Sur la comptabilité :

M. [U] soutient que lorsqu'il était en fonctions, il tenait la comptabilité de la société Nil batimeco, le tribunal mentionnant, en page 6 du jugement dont appel, que les bilans de 2012 à 2014 ont été déposés dans les délais légaux de clôture de chaque exercice ; il souligne que si l'administration fiscale indique qu'à l'occasion du contrôle fiscal elle a dû reconstituer la comptabilité, c'est parce qu'elle n'avait pas accès aux pièces comptables et non pas à la comptabilité ; qu'il n'était plus gérant lorsque la procédure collective a été ouverte, de sorte qu'il n'a pas été en mesure de communiquer la comptabilité au liquidateur judiciaire et qu'il ne saurait donc lui être reproché le défaut de tenue de la comptabilité qui aurait dû être présentée par les deux gérants lui ayant succédé.

Le liquidateur judiciaire expose qu'aucun élément comptable n'a été communiqué aux organes de la procédure, et qu'aucun compte annuel n'a été déposé depuis au moins l'exercice 2013 ; que ce n'est que postérieurement à l'assignation qu'ont été communiqués les grands livres de la société Nil batimeco sur les exercices 2009 à 2014, lesquels n'ont pas permis de déterminer l'origine des difficultés de la société Nil batimeco ; que les motifs du redressement fiscal conduisent en outre à conclure que les comptes annuels n'ont été ni réguliers, ni sincères, et n'ont pas donné une image fidèle du patrimoine de la société sur la période contrôlée, l'administration fiscale ayant dû reconstituer l'activité sociale au moyen des relevés des comptes bancaires de la société ; que ces carences ont privé la société d'un outil qui lui aurait permis d'apprécier la réalité de sa situation et d'en tirer les conséquences qui s'imposent ; que dès lors, la faute d'absence de tenue d'une comptabilité régulière est caractérisée à l'encontre de M. [U].

Les articles L.123-12 à L.123-28 et R.123-172 à R.123-209 du code de commerce imposent aux commerçants personnes physiques et personnes morales la tenue d'une comptabilité donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise, au moyen de la tenue d'un livre journal, d'un grand livre et d'un livre d'inventaire ; les mouvements doivent être enregistrés chronologiquement au jour le jour et non en fin d'exercice, seuls les comptes annuels étant établis à la clôture de l'exercice. La comptabilité d'une entreprise ne se limite pas ainsi à l'établissement de ses bilans annuels et de la tenue d'un grand livre.

Si l'administration fiscale, à l'occasion de la vérification de la comptabilité de la société Nil batimeco, a constaté que lui ont été adressées les déclarations 2065 des exercices clos aux 31 décembre 2012, 31 décembre 2013 et 31 décembre 2014, lesquelles contiennent les bilans de la société correspondant à chacun de ces exercices, il n'a pas été déposé d'autres pièces comptables à l'occasion de la vérification de comptabilité qui a donné lieu à la proposition de rectification du 8 décembre 2015, l'administration fiscale s'étant appuyée sur les relevés bancaires après exercice de son droit de communication auprès des banques détenant les comptes de la société contrôlée. Il n'a été communiqué au liquidateur judiciaire, postérieurement à l'assignation introductive de la présente instance, que des éléments parcellaires de comptabilité, à savoir les grands livres de 2009 à 2014, à l'exclusion des autres documents comptables que la société était tenue d'établir, étant également observé par le liquidateur, que la société n'a déposé aucun compte annuel au greffe du tribunal de commerce, au moins depuis l'exercice 2013. En outre, aucun document n'a été remis pour la période postérieure au 31 décembre 2014.

Il est donc suffisamment démontré que la société liquidée n'a pas tenu une comptabilité régulière et conforme aux exigences légales.

L'établissement d'une comptabilité conforme incombe au dirigeant de la société. Faute d'une telle comptabilité, M. [U], dirigeant de droit et de fait de la société Nil Batimeco, s'est privé des moyens d'appréhender l'évolution de la société et de prendre les mesures adaptées. Le grief tenant au défaut d'établissement et de tenue d'une comptabilité régulière qui ne peut s'analyser en une simple négligence, est par conséquent constitué à son encontre.

Sur le lien de causalité et la sanction au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif :

M. [U] soutient qu'aucun lien de causalité n'existe entre l'insuffisance d'actif et les fautes pouvant lui être imputées au moment où il avait la gérance de la société de sorte qu'il ne saurait être condamné sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce.

Le liquidateur judiciaire soutient que M. [U] a entendu se soustraire à ses responsabilités en cédant sa participation au capital de la société Nil batimeco à M. [H] tout en persistant à en assurer la direction de fait ; qu'en outre, il a fait le choix de payer par priorité les créanciers chirographaires de la société tout en constituant le 1er juillet 2015 la société PNE bâtiment pour la nature et l'environnement qu'il persiste à exploiter malgré l'interdiction de gérer dont il fait l'objet. Il expose que les fautes de gestion de l'appelant ayant contribué à la naissance de l'intégralité de l'insuffisance d'actif, il y a lieu de le condamner au comblement de la totalité de cette insuffisance, déduction faite des sommes mises à la charge de MM. [B] et [H], soit la somme de 980 190,66 euros.

Ainsi que détaillé précédemment, les trois fautes caractérisées à l'encontre de M. [U] ont contribué à l'insuffisance d'actif, d'un montant supérieur à un million d'euros et constitué pour l'essentiel de créances fiscales et sociales, le passif chirographaire représentant à peine plus de 8 % du montant total du passif. Il convient, infirmant le jugement, de le condamner au paiement de la somme de 100 000 euros qui portera intérêts au taux légal dans la limite de 25 000 euros à compter de la signification du jugement et pour le surplus à compter du présent arrêt.

Comme le sollicite le liquidateur judiciaire, il convient, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, d'ordonner la capitalisation des intérêts.

Sur la sanction personnelle :

M. [U] soutient que la sanction prononcée à son encontre est manifestement injustifiée, les fautes retenues par le tribunal ne pouvant lui être imputées.

La Selas alliance, ès qualités, demande à la cour de confirmer la sanction personnelle prononcée à l'encontre de M. [U] sur le fondement des articles L.653-8 et L.653-1 du code de commerce dans la mesure où il est établi qu'il a sciemment reporté la déclaration de cessation des paiements ainsi que sur le fondement de l'article L.653-5 5° et 6 °, l'intimée exposant que le défaut de coopération de M. [U] avec les organes de la procédure collective ne lui a pas permis de déterminer l'historique et l'origine des difficultés de l'entreprise et qu'il ne lui a remis aucun élément comptable concernant la société liquidée.

L'article L.653-8 dispose que le tribunal, dans les cas prévus aux articles L.653-3 à L. 653-6 du code de commerce, peut prononcer à la place de la faillite personnelle l'interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celle-ci. Elle peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L.653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

Au regard de l'ancienneté et de la répétition des impayés, tels qu'ils ont été détaillés précédemment, ce n'a pu être que sciemment que M. [U] a omis de déclarer la cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours. Celui-ci n'ayant pas par ailleurs sollicité l'ouverture d'une procédure de conciliation, ce manquement est établi.

Le défaut de tenue d'une comptabilité complète et régulière tel qu'il est sanctionné à l'article L.653-5 6° est en outre caractérisé à l'encontre de M. [U] au vu des développements précédents.

S'agissant du troisième grief évoqué par la Selas Alliance, ès qualités, il n'est cependant pas suffisamment établi à l'encontre de M. [U] un défaut de coopération en dehors du défaut de remise des éléments comptables déjà sanctionné sur le fondement de l'article L.653-5 6°. En effet, dans ses rapports des 29 février 2016 et 17 décembre 2018 qui figurent au dossier du tribunal de commerce transmis à la cour, maître [J] évoque uniquement que M. [B], dernier gérant de droit de la société Nil batimeco, ne s'est pas présenté au cours de l'enquête et que dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire, 'le dirigeant n'a toujours pas répondu' à ses convocations, sans faire état de vaines convocations adressées à M. [U]. Le défaut de coopération, visé par l'article L.653-5 5° ne peut donc être retenu à l'encontre de ce dernier.

M. [U] qui aura 44 ans le 8 décembre 2019, n'a versé aux débats aucun élément sur sa situation personnelle et professionnelle. Il ressort des pièces 12 et 13 de la société intimée, sur lesquelles l'appelant n'a présenté aucune observation, qu'il est le dirigeant depuis le 7 juillet 2015 de la société PNE bâtiment pour la nature et l'environnement, spécialisée dans les travaux de peinture et de vitrerie et immatriculée depuis le 1er juillet 2015.

Compte tenu de ces seuls éléments dont la cour dispose concernant la situation personnelle de M. [U], dirigeant de droit et de fait de la société Nil batimeco, la sanction prononcée par le tribunal est proportionnée à la gravité des deux fautes établies à son encontre, étant observé qu'il n'a pas été relevé appel incident du quantum de la sanction prononcée ; le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans, sous la précision que cette interdiction s'applique à toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt par défaut, dans la limite de l'appel principal et de l'appel incident dont la cour est saisie,

Déclare l'appel de M. [G] [U] recevable,

Infirme le jugement du 3 avril 2019 en ce qu'il a condamné M. [U] à payer à maître [J], ès qualités, la somme de 25 000 euros et en ce qu'il a dit, le concernant, que les frais de greffe seront employés en frais privilégiés de la procédure collective,

Le confirme pour le surplus notamment en ce qu'il a prononcé à l'égard de M. [G] [U], né le [Date naissance 9] 1975 à [Localité 10] (Egypte), de nationalité égyptienne, demeurant [Adresse 4], une interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement pour une durée de 5 ans, sous la précision que cette interdiction s'appliquera à toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale,

Dit qu'en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, cette sanction fera l'objet d'une inscription au Fichier national automatisé des interdits de gérer, tenu sous la responsabilité du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce auprès duquel la personne inscrite pourra exercer ses droits d'accès et de rectification prévus par les articles 15 et 16 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données,

Dit qu'en application des articles 768 et R.69-9° du code de procédure pénale, la présente décision sera transmise par le greffier de la cour d'appel au service du casier judiciaire après visa du ministère public,

Statuant de nouveau des chefs infirmés,

Condamne M. [G] [U] à payer à la Selas Alliance, ès qualités, la somme de 100 000 euros en application des dispositions de l'article L.651-2 du code de commerce, avec intérêts au taux légal portant sur la somme de 25 000 euros à compter de la signification du jugement du 3 avril 2019 et du présent arrêt pour le surplus,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus depuis au moins une année entière,

Condamne M. [G] [U] à verser à la Selas Alliance, ès qualités, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [G] [U] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés, pour ceux dont elle a fait l'avance, par maître Oriane Dontot.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03744
Date de la décision : 19/11/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°19/03744 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-19;19.03744 ?
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