COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 28 NOVEMBRE 2019
N° RG 16/05636 - N° Portalis DBV3-V-B7A-RFET
AFFAIRE :
[W] [Z] épouse [C]
C/
SAS GROUPE GLAXOSMITHKLINE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Novembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT GERMAIN EN LAYE
N° Chambre :
N° Section : E
N° RG : F15/00489
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
la AARPI JRF AVOCATS
Me Christophe DEBRAY
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [W] [Z] épouse [C]
née le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 7] (SARTHE)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentant : Me Thomas CARTIGNY de la SELEURL CARTIGNY AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P155 - substitué par Me WILLIG Déborah avocate au barreau de PARIS Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 16/05636
APPELANTE
****************
SAS GROUPE GLAXOSMITHKLINE
N° SIRET : 592 052 146
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Adeline LARVARON de la SELARL LUSIS AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0081 -
substituée par Me DAILLOUX Clémentine, avocate au barreau de PARIS
Représentant : Me Christophe DEBRAY, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 16577
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 23 Octobre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène PRUDHOMME, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Hélène PRUDHOMME, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,
Le 4 novembre 1989, Mme [W] [C] était embauchée par la société Laboratoire Glaxo, devenue SAS Laboratoire Glaxosmithkline en qualité de visiteur médical (salariée cadre) par contrat à durée indéterminée. Le contrat de travail était régi par la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique.
Un plan de sauvegarde de l'emploi dit PSE était adopté en mars 2014 au sein de la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline validé le 07 avril 2014 par la Direccte d'Île-de-France.
Le poste de Mme [W] [C] étant supprimé à la suite du plan, la société lui proposait une offre temporaire de reclassement à [Localité 6], qu'elle acceptait, et qui prendrait fin le 31 décembre 2016.
Le 21 mars 2015, la salarié relançait sa direction afin d'obtenir « la prime d'incitation à la mobilité interne d'un montant égal à trois mois de rémunération fixe brute » puis mettait le 19 mai 2015 son employeur en demeure de lui verser cette prime d'un montant de 11 242,47 euros brut.
Le 21 mai 2015, la société refusait de lui verser la prime en s'appuyant sur une décision de la commission de suivi du PSE selon laquelle la prime n'était attribuée qu'en cas de reclassement définitif. La société réitérait sa position par lettre recommandée du 15 juillet 2015.
Le 10 juin 2015, la société lui proposait un renouvellement de l'offre temporaire de reclassement jusqu'au 31 décembre 2016 sur le même poste et le même secteur géographique. Mme [C] l'acceptait puis saisissait le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye à défaut d'accord sur la question du paiement de la prime d'incitation à la mobilité.
Vu le jugement du 21 novembre 2016 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye qui a :
- débouté Mme [W] [C] de l'intégralité de ses demandes;
- laissé les dépens éventuels à la charge de Mme [W] [C].
Vu la notification de ce jugement le 25 novembre 2016
Vu l'appel interjeté par Mme [W] [C] le 15 décembre 2016.
Vu les conclusions de l'appelante, Mme [W] [C], notifiées le 6 septembre 2019 et soutenues à l'audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, il est demandé à la cour d'appel de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant de nouveau,
- condamner la SAS Laboratoire Glaxosmithkline à payer à Mme [W] [C] les sommes suivantes :
- 11 242,47 euros brut au titre du rappel de prime d'incitation à la mobilité interne, outre la somme de 1 124,24 euros brut au titre des congés payés y afférents, le tout portant intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes du 3 novembre 2015,
- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- ordonner la remise d'un bulletin de salaire conforme à l'arrêt à intervenir,
- ordonner la capitalisation des intérêts, sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil.
- condamner la SAS Laboratoire Glaxosmithkline aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Dontot, AARPI JRF Avocats conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les écritures de l'intimée, la SAS Laboratoire Glaxosmithkline, notifiées le 24 juillet 2019 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, il est demandé à la cour d'appel de :
- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye en ce qu'il a débouté Mme [C] de sa demande de rappel de prime d'incitation à la mobilité à hauteur de 11 242,47 euros et de sa demande de congés payés afférents à hauteur de 1 124,24 euros ;
- condamner Mme [C] aux éventuels dépens, dont distraction au profit de Maître Christophe Debray, avocat conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture du 16 septembre 2019.
SUR CE,
Dans le cadre du PSE adopté le 28 mars 2014 et validé par la Dirrecte, la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline a proposé à Mme [C] de maintenir son emploi de visiteur médical qu'elle exerçait dans le sud de la France mais de modifier son secteur géographique en l'affectant en région parisienne ; Mme [C] refusait le 15 mai 2014 cette modification de son contrat de travail et entrait en phase de ''reclassement interne'' à l'entreprise comme prévu en page 33 du PSE s'agissant d'un ''salarié ayant expressément refusé son avenant pour modification essentielle de son contrat de travail'' ;
En page 35, le PSE mentionnait que dans le cadre des mesures destinées à favoriser le reclassement interne du salarié dans le cadre d'une mobilité géographique, des aides à la mobilité étaient prévues, soit des mesures accompagnant la prise de décision du salarié, soit des mesures accompagnant la mobilité. Dans le cadre des mesures accompagnant la prise de décision, la société prévoyait que « durant une période de réflexion d'un mois, le salarié et sa famille auront la possibilité d'effectuer une visite de l'établissement et/ou du site de cet établissement afin de prendre le plus complètement possible connaissance de leur futur environnement potentiel de vie et du site de travail. Les salariés dans le cadre du reclassement interne qui seront appelés à changer de lieu de travail (d'une distance de plus de 50 km de leur lieu de travail habituel ou changement géographique de secteur ou de région égal à 100 %) percevront une prime d'incitation à la mobilité interne d'un montant égal à 3 mois de rémunération fixe brute (et au minimum de 6 500 euros bruts portés à 7 500 euros dans le cadre d'une mobilité province vers région parisienne). Cette prime (charges incluses) devra être restituée en cas de rétractation du salarié ».
Par lettre du 01/09/2014, la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline plaçait Mme [C] en situation de recherche de reclassement interne en lui faisant une offre temporaire de reclassement sous la forme d'une mission de 16 mois, du 28 août 2014 au 31 décembre 2015 au sein de la CDBU, en qualité d'attachée à la promotion du médicament sur la région sud, secteur 10209 lui précisant qu'en cas de refus, elle serait susceptible d'être concernée par un licenciement pour motif économique dans l'hypothèse où aucune solution de reclassement interne n'aurait pu être identifiée à la date de la notification.
Mme [C] acceptait l'offre et s'installait à [Localité 6] pour exercer l'emploi d'attachée à la promotion du médicament. Elle réclamait à son employeur de lui verser la prime d'incitation à la mobilité interne d'un montant égal à 3 mois de rémunération fixe brute. La SAS Laboratoire GlaxoSmithKline ne faisait pas droit à cette demande.
Le 21 mai 2015, la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline indiquait à Mme [C] que la commission de suivi du PSE avait acté qu'en cas de reclassement temporaire, les salariés concernés ne bénéficieront que des seules mesures accompagnant la mobilité, sous réserve de remplir les conditions pour en bénéficier et à l'exclusion des mesures accompagnant la prise de décision, qui ne sont attribués qu'en cas de reclassement définitif (pièce 9 de la salariée).
Par lettre du 10 juin 2015, la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline proposait à Mme [C] de prolonger l'offre temporaire de reclassement initialement prévue, jusqu'au 31 décembre 2016 dans les mêmes conditions, l'employeur lui rappelant qu'en cas de refus de sa part, elle serait susceptible d'être concernée par un licenciement pour motif économique ; Mme [C] acceptait la prolongation du reclassement interne et réclamait à nouveau la prime d'incitation à la mobilité interne d'un montant égal à 3 mois de rémunération fixe brute.
Enfin, le 2 décembre 2016, Mme [C] bénéficiait d'une solution de reclassement définitive au sein de l'entreprise, sur son secteur d'origine, sans changement de domicile.
Pour refuser de verser la prime dont s'agit, la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline invoque le caractère temporaire de son reclassement excluant la dite prime ; elle retient pour cela la mention indiquée en page 36 du PSE de restitution de la prime en cas de rétractation du salarié, cette rétractation pouvant intervenir dans les 6 mois du reclassement. Elle soulève également les termes de la commission de suivi du PSE qui a indiqué, au cours de la réunion du 22 avril 2015, que les aides à la mobilité en cas de reclassement interne ne concernaient pas le reclassement interne temporaire.
En ce qui concerne la référence à la rétractation possible du reclassement, celle-ci est inopérante alors que Mme [C] ne s'est pas rétractée sur le reclassement temporaire initié par l'employeur. Ce reclassement est resté pérenne, tant que l'employeur l'a proposé à la salariée qui l'a accepté et ne s'est pas rétractée.
En ce qui concerne l'interprétation donnée à cette mesure par la commission de suivi du PSE le 22/04/2015, en ce qu'elle a dit que les mesures d'aide à la prise de décision n'étaient pas dues dans le cadre des aides à la mobilité en cas de reclassement interne temporaire, sauf si le reclassement devient pérenne, tandis que les mesures accompagnant la mobilité géographique étaient dues (pièce 20 de l'employeur), il apparaît que la commission a rajouté une distinction que les partenaires sociaux n'avaient pas mentionnée dans le PSE. En effet, ce dernier n'avait nullement réservé la prime à un reclassement interne définitif, par opposition au reclassement interne temporaire de Mme [C], aucune mention de ce type n'étant mentionné dans le plan. Or, la commission justement instituée pour répondre au besoin d'appliquer le dispositif devait seulement interpréter les termes ambigus ou les dispositifs contradictoires afin de donner au plan toute son application. Cependant, aucune ambiguïté ou contradiction n'entache le plan, la clause concernant les conditions d'octroi de la prime est claire et non équivoque : le PSE ne faisait nullement la distinction entre les mobilités temporaires et les mobilités définitives en tant que critère d'attribution de la prime, la commission ne pouvait ajouter un critère supplémentaire qui n'était pas prévu dans le plan. Là où la loi des parties ne fait pas de distinction, il n'appartient ni à la commission, ni au juge, d'en faire.
En conséquence, le versement de la prime s'inscrit dans le cadre du reclassement interne de sorte que la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline doit verser à Mme [C] la prime d'incitation à la mobilité interne d'un montant égal à 3 mois de rémunération fixe brute, le montant sollicité n'étant pas contesté par l'employeur dans son quantum, ne serait-ce qu'à titre subsidiaire. Le PSE mentionnant que cette prime engendre des charges sociales, elle entraîne le règlement des congés payés afférents. Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.
La SAS Laboratoire GlaxoSmithKline devra remettre dans le mois de la signification de l'arrêt un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées.
Sur les intérêts
Les intérêts au taux légal seront dus à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation. ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera infirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline ;
La demande formée par Mme [C] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel sera accueillie, à hauteur de 2 000 euros.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant publiquement et contradictoirement
Infirme le jugement entrepris
Condamne la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline à verser à Mme [W] [C] la somme de 11 242,47 euros à titre de prime d'incitation à la mobilité interne outre 1 124,24 euros au titre des congés payés y afférents
Ordonne à la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline de remettre à Mme [C] dans le mois de la notification du jugement, un bulletin de paie récapitulatif des sommes allouées
Dit que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation ;
Condamne la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamne la SAS Laboratoire GlaxoSmithKline à payer à Mme [C] la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme Sophie RIVIÈRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIERLe PRESIDENT