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19/03/2020 | FRANCE | N°18/01333

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 19 mars 2020, 18/01333


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 58E



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 MARS 2020



N° RG 18/01333



N° Portalis DBV3-V-B7C-SGPB



AFFAIRE :



[L] [Z]



C/



SA AXA FRANCE IARD

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Décembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 13/13303



Expédi

tions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :







Me Bernard MASSAT



Me Claire RICARD



Me Véronique BUQUET-ROUSSEL



Me Martine DUPUIS



Me Francis CAPDEVILA







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE DIX NEUF MARS ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58E

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 MARS 2020

N° RG 18/01333

N° Portalis DBV3-V-B7C-SGPB

AFFAIRE :

[L] [Z]

C/

SA AXA FRANCE IARD

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Décembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 13/13303

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Bernard MASSAT

Me Claire RICARD

Me Véronique BUQUET-ROUSSEL

Me Martine DUPUIS

Me Francis CAPDEVILA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [L] [Z]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Bernard MASSAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 73

Représentant : Me Jean-gilles HALIMI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0789

APPELANT et INTIME

****************

1/ SA AXA FRANCE IARD

N° SIRET : 722 057 460

[Adresse 6]

[Localité 9]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2018119

Représentant : Me Franck LE CALVEZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0318

INTIMEE et APPELANTE

2/ SA HELVETIA ASSURANCES

[Adresse 4]

[Localité 8]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 5718

Représentant : Me Henri JEANNIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0480

INTIMEE

3/ SARL DOLPHY SERVICES

RCS n° 449 852 367

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1859280 -

Représentant : Me Franck LE CALVEZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0318

INTIMEE

4/ SA MMA IARD

N° SIRET : 440 048 882

[Adresse 2]

[Localité 7]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Francis CAPDEVILA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189 - N° du dossier 1801113

Représentant : Me Philippe BALON de la SCP CABINET BALON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0186

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 Janvier 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-José BOU, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

--------

FAITS ET PROCÉDURE

Le 6 avril 2005, M. [Z] a fait l'acquisition d'un bateau de plaisance de type 'Excellence 38" auprès de la société ACM-Chantier naval de Colombelles (ci-après ACM).

Par contrat de mandat du 24 mai 2008, M. [Z] a confié à la société Selestiboat la mission de louer le bateau.

Le 21 août 2008, le navire a fait l'objet d'un sinistre.

Une expertise amiable a été réalisée à l'initiative de la société Axa France Iard, assureur du navire.

Le 20 février 2009, M. [Z] et la société Axa France Iard ont fait assigner les sociétés Selestiboat et ACM en référé afin de voir désigner un expert.

Par ordonnance du 4 mai 2009, le président du tribunal de commerce de Fréjus a désigné M. [I] en qualité d'expert maritime.

Par jugement en date du 4 février 2010, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société ACM.

M. [I] a déposé son rapport le 17 novembre 2012.

Le 29 juillet 2013, la société Axa France Iard a fait assigner la société Helvetia Assurances, en sa qualité d'assureur de la société ACM, devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de la voir condamner à lui payer la somme de 207 843,57 euros qu'elle avait versée à M. [Z] à titre d'indemnisation.

Les 27 et 30 septembre 2013, M. [Z] a fait assigner les sociétés Helvetia Assurances et Dolphy Services devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de les voir condamner in solidum à l'indemniser de ses préjudices. Il présentait la société Dolphy Services comme ayant été chargée par ACM de procéder à la préparation finale du navire, consistant à poser les balcons périmétriques, le mât et le pupitre de navigation.

Par jugement du 20 mai 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a dit la société Helvetia Assurances recevable en son exception de connexité, s'est dessaisi de l'instance introduite par la société Axa France Iard et l'a renvoyée au tribunal de grande instance de Nanterre.

Le 20 juin 2014, la société MMA Iard est intervenue volontairement en qualité d'assureur de la société Dolphy Services.

Les instances introduites par M. [Z] à l'encontre des sociétés Helvetia Assurances et Dolphy Services et par la société Axa France Iard à l'encontre de la société Helvetia Assurances ont été jointes.

Par jugement du 22 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Nanterre a :

déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Axa France Iard,

rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Dolphy Services liée au défaut d'intérêt à agir,

déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes présentées par M. [Z] à l'encontre de la société Dolphy Services,

débouté M. [Z] et la société Axa France Iard de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société Helvetia Assurances,

condamné M. [Z] à payer à la société Dolphy Services la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum M. [Z] et la société Axa France Iard à payer à la société Helvetia Assurances la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties du surplus de leurs demandes,

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

condamné M. [Z] et la société Axa France Iard aux dépens.

Par acte du 23 février 2018, M. [Z] a interjeté appel de cette décision

Par arrêt du 31 octobre 2019, la cour a :

confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société MMA Iard,

infirmé le jugement en toutes ses autres dispositions,

statuant à nouveau des chefs infirmés :

déclaré recevables les demandes formées par M [Z] à l'encontre de la société Dolphy Services mais les a rejetées comme non fondées,

avant de statuer sur les indemnisations sollicitées par la société Axa France Iard et par M [Z] ainsi que sur les dépens et frais irrépétibles,

ordonné la réouverture des débats afin que la société Helvetia Assurances conclue sur les indemnisations réclamées,

renvoyé l'affaire à l'audience du 27 janvier 2020 à 9h.

Aux termes de conclusions du 24 janvier 2020, la société Helvetia Assurances demande à la cour de :

enjoindre à M [Z] de produire la facture de revente du bateau 'Le Fantasque',

déclarer que le montant du préjudice immatériel de M [Z], susceptible d'être mis à la charge de la société Helvetia Assurances ne saurait excéder la somme de 90 752 euros, sous déduction du prix de revente du bateau par M [Z],

vu les pièces versées aux débats par M [Z] :

constater que M [Z] ne justifie pas du prix de revente du bateau 'Le Fantasque',

en conséquence : débouter M [Z] de sa demande au titre du préjudice immatériel,

vu le contrat d'assurance Axa :

constater que la société CGI, propriétaire du bateau, n'est pas l'assurée d'Axa,

constater qu'Axa n'est subrogée que dans les droits de son assuré, M [Z], à hauteur de la somme de 80 888,76 euros,

déclarer que le montant du préjudice de la société Axa France Iard susceptible de faire l'objet d'une indemnisation ne saurait excéder la somme de 80 888,76 euros,

débouter les appelants du surplus de leurs demandes,

statuer ce que de droit quant aux dépens.

Par conclusions du 24 janvier 2020, M [Z], dont le dispositif des écritures ne tient aucun compte de l'arrêt du 31 octobre 2019, demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris,

constater qu'il a conclu un contrat de vente en juillet 2005 avec la société ACM, portant sur le navire Excellence 38, et baptisé 'le Fantasque',

constater que la société ACM avait chargé la société Dolphy Services d'effectuer les dernières préparations du navire, par un contrat intitulé contrat de louage d'ouvrage et que la société Dolphy Services a mal exécuté le contrat conclu avec la société ACM,

constater que la société Helvetia SA est l'assureur du constructeur ACM, et qu'à ce titre elle assure au titre de l'article 5 de la police, la responsabilité civile de son assuré,

constater que la société Dolphy Services a mal exécuté le contrat conclu avec la société ACM,

en conséquence :

condamner la société Helvetia à garantir son assuré, la société ACM au titre de sa responsabilité civile quant aux travaux réalisés tant par ACM que par les sociétés auxquelles ont été confiés contractuellement par elle, la préparation et la mise à disposition du navire auprès de M [Z],

condamner solidairement les société Dolphy Services et Helvetia à l'indemniser de ses préjudices,

en conséquence, et en tout état de cause :

constater que la société Axa lui a versé la somme de 207 793,57 euros en exécution du contrat d'assurance,

juger que son préjudice matériel s'élève à la somme de 209 293,57 euros,

condamner solidairement les société Dolphy Services et Helvetia Assurances à lui payer la différence de 1 500 euros,

constater que son préjudice immatériel s'élève à la somme de 187 903 euros,

condamner solidairement les sociétés Dolphy Services et Helvetia Assurances au paiement entre ses mains de la somme de 187 903 euros au titre de la réparation de son préjudice immatériel,

condamner solidairement les sociétés Dolphy Services et Helvetia Assurances au paiement entre ses mains de la somme de 180 000 euros au titre de la réparation de sa perte de jouissance et de son préjudice matériel,

condamner solidairement les sociétés Dolphy Services et Helvetia Assurances au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile,

condamner solidairement les sociétés Dolphy Services et Helvetia Assurances aux entiers dépens.

Dans des conclusions du 24 janvier 2020, la société Axa demande à la cour de :

la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes en sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de M [Z] à l'encontre d'Helvetia Assurances SA,

condamner la société Helvetia Assurances à lui payer la somme de 205 308,37 euros avec intérêts capitalisés au taux légal à compter du 9 juillet 2013,

condamner la société Helvetia Assurances aux entiers dépens y compris les frais d'expertise s'élevant à la somme de 10 303,68 euros,

condamner Helvetia Assurances à lui régler la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR QUOI,

L'affaire étant en état d'être jugée, il y a lieu d'ordonner la clôture de la procédure et de la fixer à la date des plaidoiries, le 27 janvier 2020.

Il sera préalablement observé que les développements que consacre M [Z] à la critique de l'arrêt du 31 octobre 2019 sont stériles dès lors que la cour, dans cette décision, a définitivement tranché certains points, seuls restant en débat les demandes indemnitaires.

M [Z] ayant cru devoir reprendre l'intégralité de ses prétentions dans ses dernières conclusions, seront déclarées irrecevables celles tendant à la condamnation de la société Dolphy Service, qui ont été rejetées par l'arrêt du 31 octobre 2019.

Par ailleurs, ses demandes tendant à ce que la cour procède à diverses constatations ne constituent pas des prétentions auxquelles la cour est tenue de répondre au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

Sur les demandes d'Axa

Axa indique qu'en sa qualité d'assureur dommages du navire, elle a dû à la suite du sinistre indemniser M [Z] en lui versant la somme de 80 888,76 euros et régler la somme de 126 954,81 euros à CGI Finance, organisme qui avait financé le navire et en était propriétaire au moment du sinistre. Observant qu'Helvetia conteste pour la première fois, après plus de 6 ans de procédure, la subrogation dont elle bénéficie, elle juge que cette critique n'est pas sérieuse puisqu'elle a payé les sommes susvisées et se trouve donc bien légalement subrogée à hauteur de la somme de 208 843,57 euros et de celle de 10 303,66 euros au titre des frais d'expertise. Elle ajoute qu'à l'évidence le coût de la main d'oeuvre fait bien partie du dommage matériel indemnisable et que l'affirmation sur ce point d'Helvetia mériterait qu'elle soit condamnée à une amende civile pour oser présenter un tel argument.

Elle indique enfin que l'indemnisation doit tenir compte de la TVA dès lors que le navire a été acquis TTC et que les travaux de réparation ont été facturés TTC.

Helvetia fait valoir que le seul assuré d'Axa est M [Z] et que la société 'CGL' ne figure aucunement comme bénéficiaire de l'indemnité d'assurance et qu'Axa n'est en outre pas subrogée dans les droits de 'CGL'. Elle indique qu'Axa ne peut donc pas réclamer la réparation d'un préjudice inexistant, le versement qu'elle a fait à CGL relevant d'une pure intention libérale à son égard, qui ne peut fonder une quelconque subrogation. Elle soutient donc qu'elle ne doit à Axa que la somme de 80 888,76 euros que celle-ci a versée à son assuré, M [Z].

***

L'expert a chiffré le coût des travaux de remise en état du navire à la somme de 205 308,37 euros.

M [Z] y a ajouté la perte de gasoil pour 1 250 euros, la perte de petits équipements pour 2 670 euros et la TVA sur les frais de stationnement pour 2 365,20 euros (l'expert ayant retenu ce poste de préjudice, mais hors taxes). Le préjudice matériel s'élèverait donc selon lui à la somme de 211 593,57 euros (mais il indique dans ses écritures qu'il est de 209 293,57 euros).

L'article 5 de la police souscrite par ACM, intitulé 'risques garantis' prévoit que le contrat a pour 'objet de couvrir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l'assuré vis-à-vis des tiers encourue après livraison des navires ou engins maritimes ... en raison des dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs et résultant des activités garanties'.

La cour a rappelé dans l'arrêt du 31 octobre 2019 que l'article 7 de la police stipule que : 'ne sont pas garantis les frais incombant à l'assuré lorsqu'il est tenu de refaire un travail mal exécuté ou de remplacer ou de réparer tout ou partie de sa fourniture ou d'en rembourser totalement ou partiellement le prix' et qu'il est ensuite précisé que 'la présente exclusion ne porte que sur l'organe technique atteint de vice, défaut ou malfaçon mais non pas sur les dommages matériels par répercussion pouvant être causés à d'autres parties du navire techniquement indépendantes de l'organe défaillant, atteint de malfaçon ou vicié'. La cour a précisé qu'en l'espèce, ce sont bien les dommages par répercussion causés à d'autres parties du navire indépendantes du flybridge et de l'emplacement des orifices d'évacuation qui sont en cause, puisque les défauts affectant le bateau ont entraîné la présence d'eau dans la cale, laquelle a ensuite endommagé les moteurs, propulseurs d'étrave et groupe électrogène.

Compte tenu de ces dispositions contractuelles, Helvetia est tenue de supporter le coût des travaux de remise en état tel qu'il a été évalué par l'expert judiciaire et ne saurait donc prétendre qu'elle n'est tenue de supporter que le prix de remplacement des deux moteurs, du groupe électrogène et du propulseur d'étrave, soit la somme de 82 655,86 euros HT, alors que le bateau a été immergé dans l'eau de mer, ce qui a, évidemment, entraîné des dégâts au-delà des seuls éléments qu'elle cite.

Axa, bien qu'elle ait versé une somme totale de 207 843,57 euros, limite sa demande à la somme de 205 308,37 euros, qui correspond à l'évaluation réalisée par l'expert judiciaire.

Cette somme de 205 308,37 euros correspond au préjudice dont Helvetia pourrait être condamnée à supporter la réparation.

M [Z] indique que son assureur Axa lui a versé la somme de 207 793,57 euros, déduction faite de la franchise de 1 500 euros.

Toutefois, il résulte des pièces produites par Axa qu'il n'a perçu de celle-ci que la somme de 80 888,76 euros, une autre somme, de 126 954,81 euros, ayant été versée par Axa à la société CGI Finance (le total des paiements étant d'ailleurs de 207 843,57 et non de 207 793,57 comme l'indique M [Z]).

Axa verse aux débats la copie d'un chèque qu'elle a établi le 13 juillet 2011 à l'ordre de la CARPA d'un montant de 207 843,37 euros. Ce chèque a été envoyé à son avocat, le cabinet Clyde & Co, accompagné de cette explication : ' ce chèque représente règlement selon le rapport de notre expert M [S]'.

Le cabinet Clyde & Co a ensuite transmis un chèque de 80 888,76 euros à M [Z], par courrier du 3 octobre 2011, et un chèque de 126 954,81 euros à la société CGI Finance par courrier du 7 octobre 2011.

S'agissant de CGI Finance, Axa indique qu'elle était propriétaire du navire qu'elle louait à M [Z] mais aucune pièce n'est produite pour justifier de la nature du contrat qui liait CGI à M [Z].

CGI s'était manifestée auprès d'Axa par un courrier du 15 juin 2011 dans lequel elle indiquait : 'Nous apprenons que le navire Excellence V 2 de marque ACM francisé sous le n° CB8730720 donné en location à notre client commun M [L] [Z] a été endommagé. Nous vous informons que notre créance arrêtée au jour du sinistre se chiffre à 126 954,81 euros ...'. Puis, par courrier daté du 1er septembre 2011, elle a de nouveau écrit à Axa en lui rappelant qu'elle lui avait envoyé une 'opposition' pour 126 954,81 euros le 15 juin 2011 et en s'interrogeant sur la date à laquelle elle percevrait le règlement.

Axa se contente d'invoquer les dispositions de l'article L 121-12 du code des assurances et la qualité de propriétaire du navire de CGI pour justifier ses prétentions à l'encontre d'Helvetia, et n'a développé aucune explication pour s'opposer aux moyens que celle-ci a développés en défense.

CGI Finance était manifestement propriétaire du navire puisque le 12 octobre 2011 elle l'a vendu à M [Z] pour la somme de 126 879,81 euros (acte de vente dont M [Z] a fini par justifier le 23 janvier 2020).

Toutefois, aux termes des dispositions de l'article L 121-12 du code des assurances, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers, qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.

Pour bénéficier de la subrogation légale de plein droit, l'assureur doit donc justifier qu'il a effectivement payé l'indemnité d'assurance et que le paiement est intervenu en exécution de l'obligation de garantie qu'il avait souscrite par contrat.

Or, il n'est pas démontré que le paiement serait intervenu en exécution d'un contrat d'assurance, puisque le seul contrat d'assurance dont justifie Axa est celui qu'elle a signé avec M [Z], qui y figure seul en qualité d'assuré.

Aucune pièce du dossier ne permet de considérer que la société CGI Finance ait eu la qualité d'assurée et le seul fait qu'elle ait été propriétaire du bateau le jour du sinistre ne suffit pas à justifier qu'elle ait, en exécution de l'obligation de garantie souscrite par M [Z] auprès d'Axa, bénéficié de partie de l'indemnité d'assurance.

En conséquence, faute pour Axa de démontrer qu'elle bénéficie de la subrogation légale s'agissant de la somme versée à CGI Finance, et en l'absence de quittance subrogative, sa demande en paiement de la somme de 126 954,81 euros ne saurait prospérer.

La société Helvetia ne sera donc condamnée à payer à Axa, légalement subrogée dans les seuls droits de M [Z], que la somme de 80 888,76 euros.

Cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013 (date de l'assignation d'Helvetia par Axa devant le tribunal de commerce de Nanterre). Les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil

La demande d'Axa relative au paiement par Helvetia des honoraires de l'expert judiciaire sera examinée au titre des dépens.

Sur le préjudice de M [Z]

M [Z], qui dit avoir perçu de son assureur la somme de 207 793,57 euros, sollicite la condamnation d'Helvetia à lui payer la somme de 1 500 euros correspondant au montant de la franchise d'assurance.

La cour ayant fixé le préjudice susceptible d'être indemnisé par Helvetia à la somme de 207 673,57 euros, il résulte des propres dires de M [Z] qu'il a perçu une somme supérieure de la part de son assureur, en sorte qu'il ne saurait obtenir le paiement de la franchise par Helvetia, faute de préjudice de ce chef.

Par ailleurs, M [Z] sollicite la somme de 187 903 euros au titre de son préjudice immatériel dont 181 000 euros de perte de loyers et la somme de 180 000 euros au titre de son préjudice de jouissance et moral.

Helvetia sollicite de la cour qu'elle retienne l'évaluation du préjudice immatériel qui a été faite par l'expert judiciaire à hauteur de la somme de 90 752 euros, soit 84 000 euros au titre des pertes de loyers de 2009 à 2011, 5 222 euros au titre des frais et charges afférents au navire et 1 530 euros au titre des frais inhérents au sinistre et à l'expertise.

L'expert judiciaire a retenu :

au titre des frais d'assurance la somme de 1 986 euros,

au titre des droits de navigation la somme de 3 236 euros,

au titre des voyages de M [Z] la somme de 1 200 euros,

et au titre des frais Selestiboat la somme de 330 euros,

soit 6 752 euros au total, qu'Helvetia accepte de payer.

M [Z] soutient que c'est une somme de 5 703 euros qui lui est due au titre des droits de navigation, car l'expert avait arrêté son préjudice de ce chef à l'horizon 2011, soit pendant 2 ans et demi après le sinistre, alors qu'en réalité il a duré 4 ans et demi.

Il ne verse toutefois aucun justificatif du paiement de ces frais, la seule communication de l'avis de paiement du droit annuel de navigation 2012 (à payer avant le 1er avril 2012) ne valant pas preuve de règlement, étant ajouté qu'il a fini par justifier, par communication de pièce du 23 janvier 2020 qu'il avait vendu son bateau le 5 mars 2012, rendant ainsi sans objet la demande d'Helvetia tendant à ce qu'il lui soit enjoint de produire la facture de revente du navire.

Il convient donc d'arrêter le montant de ce poste de préjudice à la somme de 4 206 euros (correspondant aux frais sur la période du 1er septembre 2008 au 31 décembre 2011, sur la base d'une taxe annuelle de 1 262 euros).

Le poste 'frais' sera donc évalué à la somme de 7 722 euros : (1 986 + 4 206 + 1 200 + 330).

S'agissant des loyers non perçus du fait du sinistre, il convient de rappeler les constatations de l'expert, in extenso :

'Le mandat de gestion signé le 24/05/2008, conclu pour une durée de 3 mois à partir du 19/07/2008, reconductible, réservait l'usage du bateau à la location pour les périodes du 19/07 au 13/08. Sous réserve de la production des justificatifs de location des années précédentes et du montant de la location, sur la base de location de 7.000 €/semaine, sous réserve du justificatif des montants et des périodes réelles des locations (lors de la réunion, M. [Y], responsable de Selestiboat a en effet affirmé 'qu'il y avait eu peu de locations, que le bateau était resté à quai la plupart du temps' Cf page 14) :

- saison été 2009 : 4 semaines 28 000 €

- saison été 2010 : 4 semaines 28 000 €

- saison été 2011 : 4 semaines 28 000 €

soit, au total : 84 000 €'.

M [Z] n'élève aucune critique précise sur l'estimation de l'expert et se contente de dire que son navire pouvait être loué à la semaine entre 6 000 et 10 000 euros, pendant 8 semaines par an, et qu'il a subi une perte en 2008 de 25 000 euros et de 2009 à 2011 de 156 000 euros, sur une base de 7 000 euros/semaine.

Il apparaît que l'expert a commis une erreur puisqu'il a retenu une période de location de 4 semaines alors qu'elle était, pour la saison 2008, de 6 semaines (du 19 juillet au 29 août et non 13 août).

Toutefois, les demandes de M [Z] restent fort excessives à plusieurs égards :

- il ne justifie de la location effective de son navire que du 28 juillet 2006 au 7 août 2006 (gain effectif de M [Z] ignoré, le loyer facturé par le mandataire chargé de louer ayant été de 10 000 euros), du 14 juillet 2007 au 16 juillet 2007 (gain de 2 535 euros), du 21 au 28 juillet 2007 (gain de 4 517 euros), et du 2 au 3 août 2007 (gain de 1 690 euros),

- il n'est pas justifié de ce que la location du bateau pourrait procurer à M [Z] un gain supérieur à celui retenu par l'expert de 7 000 euros/semaine, la seule location obtenue pour une semaine (du 21 au 28 juillet 2007) lui ayant procuré un gain de 4 517 euros,

- il existe un aléa inhérent à toute location, M [Z] ne prouve pas qu'il aurait, chaque année, mis son navire en location pendant 6 semaines en juillet et août et la location effective n'est jamais certaine.

Dans ces conditions, il convient de juger que la somme de 84 000 euros retenue par l'expert et acceptée par Helvetia correspond à une juste indemnisation de ce poste de préjudice.

Ainsi, au total, c'est une somme de 91 722 euros (7 722 + 84 000) qui sera retenue au titre du préjudice immatériel.

M [Z] a versé aux débats, le 23 janvier 2020 un acte de vente du navire, intervenu entre lui-même et M [P], daté du 5 mars 2012, au prix de 20 000 euros, mais cet acte n'est pas signé de l'acheteur.

Quoi qu'il en soit, il n'y a pas lieu de déduire des indemnités mises à la charge d'Helvetia la somme perçue par M [Z] au titre de la vente du bien, celle-ci ne pouvant avoir pour effet de réduire le droit à indemnisation de l'intéressé.

M [Z] sollicite une somme de 180 000 euros en réparation du préjudice résultant de la privation de jouissance de son bien, subie depuis le sinistre du 28 août 2008, et évalué à 3 000 euros par semaine, sachant qu'il naviguait d'avril à fin juin, puis de septembre jusqu'à mi-octobre chaque année, soit pendant 18 semaines par an.

Il est évident que M [Z] a subi un préjudice du fait de l'immobilisation de son navire d'août 2008 jusqu'à sa vente en mars 2012, puisqu'il n'a pas pu l'utiliser.

Toutefois, la réparation sollicitée à hauteur de 3 000 euros par semaine sur la base de 18 semaines par an est très excessive, s'agissant tant du montant hebdomadaire réclamé que de la durée de navigation alléguée, dont la preuve n'est pas rapportée, M [Z] versant aux débats trois attestations d'amis qui indiquent qu'il utilisait 'très souvent' son bateau, ou que le navire était 'comme une résidence secondaire' pour lui ou encore qu'il faisait de 'nombreux séjours à bord', dont il ne peut être déduit une utilisation aussi intensive du navire que celle qu'il revendique.

Ce préjudice, qui a duré du 21 août 2008 jusqu'au 15 octobre 2011, sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 20 000 euros.

Il n'est pas justifié par M [Z] d'un préjudice moral distinct du préjudice de jouissance indemnisé ci-dessus qui comprend le fait d'avoir été privé de l'usage de son navire et donc du plaisir lié à cet usage.

Sur les frais et dépens

Succombant la société Helvetia sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire.

Elle sera condamnée à payer à M [Z] la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'allouer à Axa une indemnisation au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l'arrêt de cette cour du 31 octobre 2019.

Ordonne la clôture de la procédure à la date du 27 janvier 2020.

Déclare irrecevables les demandes de condamnation et en paiement formées par M [Z] à l'encontre de la société Dolphy Services.

Rejette la demande de la société Helvetia Assurances tendant à enjoindre à M [Z] de produire la facture de vente du navire.

Condamne la société Helvetia Assurances à payer à la société Axa France Iard la somme de 80 888,76 euros.

Dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013 et que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil

Condamne la société Helvetia Assurances à payer à M [Z] les sommes de 91 722 euros en réparation de son préjudice immatériel et de 20 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance.

Rejette la demande formée par M [Z] au titre du préjudice moral.

Condamne la société Helvetia Assurances à payer à M [Z] la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Helvetia Assurances aux dépens de première instance et d'appel

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Monsieur Alexandre GAVACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 18/01333
Date de la décision : 19/03/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°18/01333 : Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-03-19;18.01333 ?
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