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08/10/2020 | FRANCE | N°18/08444

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 08 octobre 2020, 18/08444


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53B



16e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 08 OCTOBRE 2020



N° RG 18/08444 - N° Portalis DBV3-V-B7C-S2UY



AFFAIRE :



[P] [X]



C/



Caisse CAISSE DE CREDIT MUTUEL SAINT-JEAN



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Novembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de Pontoise

N° RG : 15/09187



Expéditions exécutoires

Expéditions



Copies

délivrées le : 08/10/2020

à :



Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES






...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

16e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 OCTOBRE 2020

N° RG 18/08444 - N° Portalis DBV3-V-B7C-S2UY

AFFAIRE :

[P] [X]

C/

Caisse CAISSE DE CREDIT MUTUEL SAINT-JEAN

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Novembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de Pontoise

N° RG : 15/09187

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 08/10/2020

à :

Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [P] [X]

né le [Date naissance 6] 1980 à [Localité 11] (Algérie)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentant : Me Francis MARTIN de la SELARL CABINET SABBAH & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0466

Représentant : Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.26 - N° du dossier 18128680

APPELANT

****************

Caisse CAISSE DE CREDIT MUTUEL SAINT-JEAN

Association coopérative à responsabilité limitée inscrite auprès du Tribunal d'Instance de STRASBOURG sous le n°II 0043

[Adresse 5]

[Localité 8]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : B0228 - N° du dossier 20190065

Représentant : Me Serge PAULUS, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG, substitué par Me Jean-Edouard ANTZ, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Mars 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Patricia GRASSO, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant convention conclue le 6 mai 2011, la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean a consenti à la société Bady II un prêt professionnel d'un montant de 380.000 euros remboursable en 84 mensualités de 5.271,26 euros (assurance incluse) au taux nominal contractuel de 3,60 % l'an, en vue de financer l'acquisition d'un fonds de commerce d'exploitation d'une activité de restauration sous l'enseigne " Le comptoir des colonies " à Strasbourg.

Par acte séparé du 5 février 2011, M. [P] [X] s'est porté caution solidaire des engagements de l'emprunteuse à hauteur de la somme de 152.000 euros pour une durée de 9 ans. Un cautionnement solidaire a été donné dans les mêmes termes par MM. [R] et [T] et Mmes [U] et [V] [X].

La société Bady II a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg et le 24 novembre 2014, un plan de redressement a été adopté. Par jugement du 12 mai 2016, la résolution du plan a été prononcée et cette société a été mise en liquidation judiciaire.

Par arrêt du 17 mai 2017, la cour d' appel de Colmar a infirmé ce dernier jugement, maintenu la période d'observation, enjoint à la société Bady II de présenter une demande de modification du plan de redressement et lui a donné acte de ce qu'elle pouvait honorer la première échéance du plan.

Parallèlement, la société Bady II étant défaillante dans le remboursement des échéances, le prêteur a prononcé la déchéance du terme le 11 décembre 2013, puis, par lettre recommandée avec accusé de réception distribuée le 21 octobre 2015, a vainement mis M. [P] [X] en demeure de lui régler la somme de 152.000 euros au titre de son engagement de caution.

Par acte d' huissier du 19 novembre 2015, la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean a fait assigner M. [P] [X] aux fins d'obtenir le paiement des sommes dues en sa qualité de caution solidaire.

Par jugement rendu le 16 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Pontoise a :

- rejeté les fins de non recevoir tirées de la prescription,

- condamné M. [X], pris en sa qualité de caution solidaire, à payer à la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean la somme de 152.000 euros au titre du remboursement du prêt consenti à la SARL Bady II,

- condamné M. [X] à payer à la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné M. [X] aux dépens qui comprendront le remboursement des frais avancés par la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean du chef de la prise de garantie et qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Le 14 décembre 2018, M. [X] a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions transmises le 17 décembre 2019, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [X], appelant, demande à la cour de :

À titre principal,

- débouter la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean de toutes ses demandes,

- infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription,

- constater le caractère manifestement disproportionné de son engagement de caution,

- le décharger de cet engagement et débouter la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean de toutes ses demandes,

À titre subsidiaire,

- constater le manquement de la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean à son obligation de mise en garde,

- débouter la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean de toutes ses demandes,

En tout état de cause,

- condamner la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés par son avocat postulant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, M. [X] fait valoir :

- que la prescription ne peut courir avant que le créancier professionnel tente de se prévaloir du cautionnement à l'égard de la caution ; qu' en tout état de cause, la contestation sur la disproportion constitue une défense au fond qui échappe à la prescription, à l'instar de la contestation relative au manquement de la banque à son obligation de mise en garde en ce qu'elle tend au rejet de la demande en paiement,

- qu'au jour de sa conclusion, soit le 5 février 2011, son engagement de caution était disproportionné au regard de ses revenus, de son patrimoine, des autres engagements souscrits et de son état d'endettement,

- qu'il convient de ne pas retenir sa participation au sein de la société débitrice, immatriculée au mois de mai 2011 soit postérieurement à la signature de son engagement ; que la banque ne produit aucune fiche de renseignements antérieure à son engagement ; que ses seuls revenus doivent être pris en compte puisqu'il ne s'est marié que le [Date décès 7] 2011 ; qu'il ne dispose pas d'un compte courant d'associé dans la société débitrice ; que la banque ne démontre pas qu'au jour où sa garantie a été appelée, il était en mesure de faire face à son engagement de caution,

- qu'à titre subsidiaire, la banque a manqué à son devoir de mise en garde en ne l'avertissant pas, en sa qualité de caution profane, sur le risque encouru par la société débitrice de ne pas pouvoir faire face à l'endettement contracté, les difficultés rencontrées par l'emprunteuse étant la preuve qu'elle n'avait pas les moyens d'effectuer l'emprunt garanti par lui ; que la banque aurait dû exiger une attestation certifiée conforme de l'expert comptable de la société débitrice.

Dans ses conclusions comportant appel incident, transmises le 23 janvier 2020, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean, intimée, demande à la cour de :

- déclarer M. [X] mal fondé en son appel,

- recevoir son appel incident et le déclarer bien-fondé,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les fins de non recevoir tirées de la prescription des demandes reconventionnelles formulées par M. [X],

- dire et juger que les demandes reconventionnelles de M. [X] sont prescrites et donc irrecevables,

- débouter M. [X] de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles,

- condamner M. [X] à lui payer en sa qualité de caution solidaire de la SARL Bady II en redressement judiciaire, la somme de 152.000 euros au titre du prêt professionnel accordé à la SARL Bady II,

- déclarer mal fondées les prétentions de M. [X] et les rejeter,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [X], en qualité de caution solidaire, à lui payer la somme de 152.000 euros au titre du remboursement du prêt consenti à la SARL Bady II,

En tout état de cause,

- condamner M. [X] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [X] aux entiers frais et dépens, ainsi que ceux de première instance comprenant le remboursement des frais avancés par elle du chef de la prise de garantie, dont distraction au profit de la Selarl Patricia Minault, agissant par Me Patricia Minault, avocat, et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean fait valoir :

- que la contestation de M. [X] tendant à voir reconnaître la responsabilité pré-contractuelle de la banque, formulée plus de cinq ans après son engagement de caution, est prescrite ; qu'en l'espèce, le prêt ayant été consenti le 6 mai 2011, la prescription est acquise depuis le 6 mai 2016 ; que la prescription élevée ne concerne que la question des prétendus manquements à son devoir de mise en garde,

- que la caution ne rapporte pas la preuve de la disproportion de son engagement ; qu'au moment de la conclusion de ce contrat, M. [X] était titulaire de revenus, propriétaire de biens immobiliers et de participations dans diverses sociétés, qui lui permettaient de souscrire l'engagement contracté et que son patrimoine actuel lui permet de faire face à ses engagements ; que la caution ne fournit pas toutes les pièces justificatives de sa situation au moment de la conclusion du cautionnement ni de sa situation actuelle ; qu'il convient de prendre en compte l'ensemble des revenus et patrimoine de M. [X], qu'il soit propre ou commun, pour apprécier la disproportion alléguée,

- qu'elle n'était pas tenue à un devoir de mise en garde dès lors que la preuve n'est pas rapportée que la société Bady II ne pouvait assumer l'emprunt au moment où il a été contracté ; qu' en effet, ni le risque d'endettement de la société, ni la qualité de profane de la caution, qui était associé de la société Bady II, ne sont démontrés.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 janvier 2020 et l'audience de plaidoirie fixée au 12 mars 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la prescription des demandes de M. [X]

En l'espèce, M. [P] [X] a été attrait en justice par la banque Caisse de Crédit mutuel de Strasbourg, en sa qualité de caution solidaire et associé de la société Bady II, société débitrice principale, à laquelle la Caisse de crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean a consenti le 6 mai 2011 le prêt professionnel précité.

L'intimée soulève la prescription des demandes reconventionnelles de M. [X] visant à voir reconnaître la disproportion de son engagement et à en obtenir décharge, ainsi qu'à mettre en cause la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde au moment de la souscription du cautionnement litigieux.

Sur la prescription de l'action en responsabilité de la banque pour manquement au devoir de mise en garde

Il convient de souligner que, dans la motivation de ses conclusions, la banque limite sa fin de non-recevoir tirée de la prescription à la demande reconventionnelle portant sur l'engagement de sa responsabilité en raison d'un éventuel manquement à son devoir de mise en garde vis à vis tant de la caution que de l'emprunteur principal.

Il est rappelé que le préjudice subi par l'emprunteur du fait de la perte d'une chance de ne pas contracter à défaut d'exercice par la banque de son devoir de mise en garde de l'emprunteur ou de la caution non avertie, ressort de la responsabilité pré-contractuelle et se manifeste donc dès l'engagement de la caution.

M. [X], faute d'avoir introduit cette action en responsabilité antérieurement à ses dernières conclusions de première instance signifiées le 19 mars 2018, en laissant expirer le délai de la prescription quinquennale qui courait à compter du contrat de cautionnement du 6 mai 2011, doit être déclaré prescrit en son action étant, surabondamment, relevé qu'il n'a pas évalué la demande présentée à ce titre ni n'a sollicité la compensation.

Le jugement qui en dispose autrement sera donc infirmé.

Sur la prescription de la demande de décharge du cautionnement

Aux termes de l'article L 341-4 du code de la consommation, applicable à la cause, ' un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. '

La caution qui poursuit la sanction légale de la disproportion de son engagement ne saurait se voir opposer une prescription de cinq ans commençant à courir au jour de la signature de son engagement, la sanction de la disproportion prévue par la loi ayant vocation à être invoquée à compter du jour où le créancier professionnel se prévaut par sa mise en demeure à l'égard de la caution personne physique, de l'engagement contracté par celle-ci.

Pour apprécier si le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation, au moment où elle est appelée, le juge doit en principe se placer au jour où la caution est assignée. Il s'ensuit que la contestation soulevée par la caution au sujet de la disproportion de son engagement constitue non une demande reconventionnelle, mais une défense au fond qui échappe à la prescription.

Le jugement doit, par conséquent, être confirmé en ce qu'il a déclaré non-prescrite la demande de Monsieur [X] fondée sur l'article L 341-4 (devenu L 332-2) du code de la consommation sur laquelle il convient de se prononcer.

Sur le non-respect du principe de proportionnalité de l'engagement de la caution

Sur son appréciation au moment de la formation du contrat

Sur le fondement de l'article L 341-4 précité l'appelant critique le jugement de première instance en ce qu'il n'a pas retenu le prétendu caractère disproportionné de l'engagement de caution limité à 152 000 euros (couvrant le principal, les intérêts et le cas échéant les pénalités ou intérêts de retard pour une durée de neuf ans) souscrit le 05 février 2011 en garantie du prêt consenti à la SARL Bady II.

Pour son appréciation, il est constant qu'il lui appartient d'apporter la preuve de l'existence, lors de la souscription de celui-ci, d'une disproportion manifeste entre le montant de la somme garantie, d'une part, la valeur de son patrimoine propre et commun ainsi que le montant de ses revenus et salaires propres et communs, d'autre part.

Il est tout aussi acquis que la valeur des parts sociales que peut détenir une caution et le montant d'une créance inscrite en compte courant d'associé doivent être pris en considération, ainsi que cela résulte d'ailleurs de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass com, 26 janvier 2016, pourvoi n° 13-28378, publié au bulletin, ').

Enfin, il convient de rappeler qu'en l'absence d'anomalies apparentes, l'établissement prêteur n'est pas débiteur d'un devoir de contrôle sur les revenus et biens ainsi que sur l'endettement, réel et potentiel, déclarés par la caution, laquelle répond d'éventuelles dissimulations ou tromperies quant aux renseignements fournis lors de la conclusion du contrat de cautionnement.

En l'espèce, il importe de relever qu'en première instance, M.[X] n'a produit que des informations parcellaires sur sa situation financière et de rappeler que c'est à l'issue d'une vérification détaillée des pièces produites que pour écarter le moyen tiré de la disproportion, les premiers juges ont pu déterminer que M. [X] percevait mensuellement des revenus salariaux de 2 858 euros (nets), disposait d'un patrimoine immobilier présentant un solde positif d'environ 43.220 euros découlant de l'acquisition de deux immeubles et possédait un compte courant d'associé dans la société Bady (et non Bady II, comme indiqué par une erreur de plume dans le jugement) s'établissant à la somme de 99 189 euros.

En appel, M. [X] qui reprend ce moyen soutient qu'en réalité son actif était constitué :

- d'un revenu moyen annuel réellement disponible de 28.000 euros,

- et d'un seul bien immobilier à Bischeim (67), acquis en 2005 pour un montant de 109.783 euros.

faisant, en outre, état d'un passif composé des éléments suivants :

- un prêt de 108.000 euros souscrit en 2005 auprès du Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine, agence d'Illkirch-Graffenstaden, destiné à l'acquisition d'un bien immobilier à Bischeim dont il lui restait à rembourser la somme de 86.382,38 euros au jour de l'engagement de caution,

- un engagement de caution pour un montant de 140.000 euros souscrit le du 29 décembre 2010 au bénéfice de la CCM Saint-Jean en garantie d'un prêt consentit par la banque à la société Bady,

- auquel il ajoute l'engagement de caution en cause pour un montant de 152.000 euros.

La cour appelée à se prononcer sur l'engagement « manifestement disproportionné (aux) biens et revenus » de la caution - en constatant que, sommé par l'intimée de produire les trois dernières fiches de paye précédant la signature de son engagement de caution, ses trois derniers avis d'imposition la précédant (impôt sur le revenu et taxe foncière), les trois dernières déclarations de revenus foncier n°2044 et les trois derniers relevés bancaires la précédant et enfin les bilans des sociétés Bady I et Bady II la précédant également, M. [X], sur qui pèse pourtant la charge de la preuve, n'a satisfait que très partiellement à ces sommations - retiendra des éléments soumis à son appréciation :

- que le montant des rémunérations doit être apprécié à son niveau net imposable, que monsieur [X] ne peut opérer de lui-même des déductions sur ses revenus et qu'elles ont été appréciées par les premiers juges à leur juste valeur,

- que l'analyse des avis d'imposition de l'appelant établit qu'il percevait des revenus locatifs qu'il a d'abord sciemment omis de mentionner, puis, contraint d'en reconnaître l'existence , il a affirmé qu'au regard de ses déficits fonciers, il disposait d'un revenu inférieur à ceux annoncés ; en réalité, l'existence d'un déficit foncier traduit l'existence de revenus locatifs, auxquels il ne faisait pas référence dans ses premiers écrits, et l'existence de charges déductibles de son revenu imposable et le minorant, qui n'ont aucun impact sur son revenu réel.

- qu'ainsi conduit à produire en première instance un relevé du livre foncier de Haguenau, il en ressort que M. [X] est également propriétaire, depuis le 5 juillet 2007, de biens immobiliers à [Localité 12] (67) acquis antérieurement au cautionnement et désignés comme suit :

* [Adresse 13], désignation cadastrale S [Cadastre 10] n°[Cadastre 2]/[Cadastre 1] - 0ha19a73a, Lot n°3, tantième lot : 88/1000, Bâtiment A rez-de-chaussée : un appartement ;

* [Adresse 13], désignation cadastrale S [Cadastre 10] n° [Cadastre 2]/[Cadastre 1] - 0ha19a73ca, Lot n°15, tantième lot 1/1000, Bâtiment A Sous sol 1 cave n°3 ;

* [Adresse 13], désignation cadastrale S [Cadastre 10] n° [Cadastre 2]/[Cadastre 1] - 0ha19a73a, Lot n°31, tantième lot 7/1000, Bâtiment A Sous-sol : 1 parking n°9 ;

* [Adresse 13], désignation cadastrale S [Cadastre 10] n° [Cadastre 2]/[Cadastre 1] - 0ha19a73a, Lot n°32, tantième lot 7/1000, Bâtiment A Sous-sol 1 parking n°10 ;

* [Adresse 13], désignation cadastrale S [Cadastre 10] n° [Cadastre 2]/[Cadastre 1] - 0ha19a73a, Lot n°32, tantième lot 7/1000, Bâtiment A Cour 1 parking n°4. (Annexe 8),

- qu'en outre, M. [X] est associé de plusieurs sociétés et détient à ce titre des parts sociales, constitutives de biens mobiliers, faisant partie de son patrimoine dont il aurait convenu qu'il mentionne la consistance et la valeur au jour de la signature de l'engagement de caution.

- que si M. [X] affirme qu'il ne détenait aucun compte courant dans les livres de la Sarl Bady (exploitant un restaurant ' Alambar ') au capital de 7.500 euros ayant son siège social [Adresse 4] et immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Strasbourg sous le numéro Siren 499 648 509, il produit pourtant les bilans de cette société mentionnant à la fois l'existence d'importants comptes courant d'associés et celle d'un disponible permettant le remboursement immédiat desdits comptes courants.

- que ces mentions établissent l'existence de comptes courants d'associé d'un montant de 99 189 euros pour l'exercice du 01/07/2009 au 30/06/2010, et de 93 854 euros pour l'exercice du 01/07/2010 au 30/0/06/2011 (selon l'état des créances et des dettes à la clôture de chaque exercice).

- que dès la première instance, Monsieur [X] a été sommé de démontrer qu'il n'était pas titulaire de ces comptes courants mais force est de constater que pas plus qu'en première instance et alors que cette preuve lui aisément accessible (puisqu'il est associé avec ses frères de cette société Bady), il s'enferre dans une simple attitude de dénégation, si bien que le tribunal en a justement tiré les conséquences en considérant qu'il était réputé détenteur dudit compte courant inscrit au bilan de cette société Bady.

- qu'il dénie, par ailleurs, la perception d'une rémunération ou d'un intéressement du fait de sa qualité de gérant associé de la SARL Bady mais n'emporte pas la conviction de la cour sur cet autre point. Il apparaît, en effet, que cette société, spécialisée dans le secteur d'activité de la restauration et dotée d'un effectif de six à neuf salariés, a réalisé pour l'année 2009 un chiffre d'affaire de 508.500 euros, que son bilan a cru de 47,82 % entre 2008 et 2009, que si cette société a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire prononcée par le Tribunal de Strasbourg le 2 décembre 2013 (comme mis en avant par Monsieur [X] pour démontrer que sa participation était sans valeur), le concours bancaire accordé à la société Bady II et le cautionnement sont largement antérieurs à cette date et les difficultés financières de la société Bady (en lien avec un apport de trésorerie à la société Bady II du fait d'un sinistre) n'ont été que ponctuelles, la société Bady étant redevenue in bonis.

- que, s'agissant enfin de ses charges et et des éléments de son passif au jour du cautionnement, M. [X] ne peut valablement y inclure la charge représentée par l'engagement de caution litigieux, seule la situation antérieure à la signature de l'engagement devant être prise en considération.En conséquence de tout ce qui précède, il convient de juger que le patrimoine, les avoirs financiers et les revenus de Monsieur [X] étaient suffisants pour garantir le cautionnement qu'il a souscrit le 5 février 2011 à hauteur de 152.000 € au bénéfice de la société Bady II.

Il doit donc est déclaré mal fondé en sa demande tendant à se voir déchargé de la garantie à laquelle il a consenti en raison de la disproportion de son engagement lors la souscription du contrat, qui n'est que prétendue.

Sur la disproportion au jour où la caution est appelée

La question de l'évolution du patrimoine de la caution postérieurement à un engagement disproportionné n'a pas lieu d'être tranchée, en l'espèce, dès lors qu'il a été retenu que le principe de proportionnalité avait été respecté au moment de l'engagement de la caution.

Il suit de là que le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions hormis en son rejet de la fin de non-recevoir opposée à l'action en responsabilité introduite par Monsieur [X].

Sur les demandes accessoires

L'équité commande d'allouer à la Caisse de Crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer en défense à un appel injustifié.

Succombant en son recours, M. [X] supportera les dépens d'appel comme de première instance.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée à l'action en responsabilité introduite par la caution et, statuant à nouveau de ce seul chef ;

DÉCLARE irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité fondée sur la faute pré-contractuelle de la banque ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE M. [P] [X] à payer à l'association coopérative à responsabilité inscrite auprès du Tribunal d'instance de Strasbourg Caisse de Crédit mutuel Strasbourg Saint-Jean la somme complémentaire de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens qui pourront être directement recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller, pour le Président empêché et par Monsieur Antoine DEL BOCCIO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 18/08444
Date de la décision : 08/10/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 16, arrêt n°18/08444 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-08;18.08444 ?
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