COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 MAI 2022
N° RG 19/02965 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TLBK
AFFAIRE :
[Z] [G]
C/
SAS MOONGY
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 25 Avril 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE-BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section : E
N° RG : F17/00976
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Vanessa DARGUEL
Me Jean-François BOULET
le : 13 Mai 2022
Expédition numérique délivrée à Pôle Emploi le 13 Mai 2022
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant,fixé au 24 Mars 2022,puis prorogé au 12 Mai 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :
Madame [Z] [G]
née le 03 Janvier 1982 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par : Me Vanessa DARGUEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1728
APPELANTE
****************
SAS MOONGY
N° SIRET : 488 404 823
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par : Me Jean-François BOULET de la SELARL INTER-BARREAUX BLB ET ASSOCIES AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0002,substitué par Me GRARE Nicolas,avocat au barreau de Paris.
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Février 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle VENDRYES, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,
Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT,
Rappel des faits constants
La SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy, dont le siège social est situé à [Localité 3] dans les Hauts-de-Seine en région Île-de-France, est une société de conseils exerçant sous le nom commercial Agap2, qui envoie ses salariés en mission chez des clients. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec.
Mme [Z] [G], née le 3 janvier 1982, a été engagée par cette société le 10 décembre 2012 à effet au 4 février 2013, selon contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d'ingénieur consultant, moyennant une rémunération brute mensuelle de 3 250 euros, actualisée en dernier lieu à 3 500 euros.
Au cours de la relation contractuelle, Mme [G] a effectué les missions suivantes :
- suivi administratif et financier des marchés de travaux d'un projet pour le client Systra à [Localité 8] en Moselle à compter du 4 février 2013,
- assistance technique achats sur les projets de l'entité Ecobusiness pour le client Schneider Electric à [Localité 7] en Isère à compter du 15 janvier 2014,
- assistance à la gestion de contrats et suivi d'un marché de travaux pour le client Systra à [Localité 9] à compter du 11 mai 2015,
- achats des Eoliennes Onshore pour le client EDF Energies Nouvelles à [Localité 9] à compter du 29 septembre 2015.
Le 21 août 2015, la société Hiq Consulting a notifié un avertissement à Mme [G].
Puis, après un entretien préalable qui s'est déroulé le 25 avril 2016, Mme [G] s'est vu notifier son licenciement pour faute par courrier du 28 avril 2016.
La salariée a été dispensée d'effectuer son préavis de trois mois qui lui a été rémunéré, la rupture du contrat de travail étant intervenue le 3 août 2016.
Mme [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en contestation de son licenciement, par requête reçue au greffe le 3 août 2017.
La décision contestée
Par jugement contradictoire rendu le 25 avril 2019, la section encadrement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :
- débouté Mme [G] de l'intégralité de ses demandes,
- reçu Hiq Consulting en sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais l'en a débouté,
- condamné Mme [G] aux entiers dépens.
Mme [G] avait demandé au conseil de prud'hommes de :
- annuler l'avertissement notifié le 21 août 2015,
- condamner Hiq Consulting à lui verser 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour sanction abusive,
- condamner Hiq Consulting à lui verser 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des dispositions de la convention collective et de l'article 6 du contrat de travail,
- condamner Hiq Consulting à lui verser 8 000 euros pour manquement à l'obligation de santé et de sécurité de l'employeur,
- fixer son salaire mensuel brut à 3 573,83 euros,
- requalifier le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner Hiq Consulting à lui verser 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- exécution provisoire dans les conditions de l'article 515 du code de procédure civile,
- article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros,
- dépens a la charge de l'employeur.
La société Hiq Consulting avait, quant à elle, conclu au débouté de la salariée et avait sollicité sa condamnation à lui verser une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La procédure d'appel
Mme [G] a interjeté appel du jugement par déclaration du 18 juillet 2019 enregistrée sous le numéro de procédure 19/02965.
Prétentions de Mme [G], appelante
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 18 octobre 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [G] conclut à l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la cour d'appel, statuant de nouveau, de :
- annuler l'avertissement qui lui a été notifié le 21 août 2015,
- condamner la société Hiq Consulting à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour sanction abusive,
- requalifier le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la société Hiq Consulting à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la société Hiq Consulting à lui verser la somme de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des dispositions de la convention collective Syntec (articles 50 et suivants) et de l'article 6 du contrat de travail,
- condamner la société Hiq Consulting à lui verser la somme de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de santé et de sécurité.
La salariée appelante sollicite en outre une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Prétentions de la société Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy, intimée
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 17 janvier 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande donc à la cour d'appel de débouter Mme [G] de l'ensemble de ses demandes.
La société intimée sollicite également une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance rendue le 12 janvier 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 3 février 2022.
À l'issue des débats, il a été proposé aux parties de recourir à la médiation, ce qu'elles ont décliné.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Il sera examiné les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail puis les demandes relatives à la rupture du contrat de travail.
Au titre de l'exécution du contrat de travail, Mme [G] a formulé les demandes suivantes :
- 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des dispositions de la convention collective Syntec et du contrat de travail concernant la prise en charge des frais de déplacement,
- 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de santé et de sécurité,
- l'annulation de l'avertissement notifié le 21 août 2015,
- 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour sanction abusive.
Sur les frais de déplacement
Mme [G] invoque la violation des dispositions conventionnelles et contractuelles en ce qui concerne le traitement de ses frais de déplacement. Elle invoque également une exécution déloyale du contrat de travail. Elle soutient que ses frais n'ont pas été pris en charge à hauteur de ce que cela aurait dû être dans le cadre de l'exécution de ses missions par son employeur, l'obligeant à supporter pour partie les frais réellement exposés.
La société Hiq Consulting conteste avoir violé les dispositions applicables. Elle indique que les frais ont fait l'objet d'un forfait préalablement au départ en mission de la salariée, conformément à ce qu'autorise la convention collective, et que Mme [G] ne justifie pas avoir exposé des dépenses supplémentaires à celles prises en charge dans le cadre du forfait, ni avoir adressé de décompte de frais ou de justificatif de dépenses à sa hiérarchie.
Sur ce,
Concernant la saisine de la cour, celle ci relève, en tant que de besoin, qu'aux termes de motifs non repris dans le dispositif de ses écritures, l'employeur a relevé que la cour n'était pas saisie d'une demande de dommages-intérêts sur le fondement de l'exécution déloyale du contrat de travail non plus que d'une demande fondée sur l'article L. 1222-1 du code du travail.
Rappelant qu'aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des écritures, il sera ici constaté que le salarié ne sollicite dans le cadre du dispositif de ses conclusions que le paiement de frais de déplacement ce qui rend sans objet l'argumentation susvisée de la société.
Concernant la question de fond, il est rappelé que les frais professionnels sont des charges inhérentes à l'emploi du salarié, que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions et qui doivent lui être remboursés par l'employeur.
L'article 50 de la convention collective Syntec, relatif à la prise en charge par l'employeur des frais de déplacements hors du lieu de travail habituel, prévoit que ces frais font en principe l'objet d'un remboursement, mais peuvent également faire l'objet d'un forfait préalable au départ. Il stipule précisément : « article 50 : frais de déplacement. Les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l'occasion d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire. L'importance des frais dépend du lieu où s'effectuent les déplacements, ils ne sauraient être fixés d'une façon uniforme. Ils seront remboursés de manière à couvrir les frais d'hôtel et de restaurant du salarié. Ils pourront faire l'objet d'un forfait préalablement au départ, soit par accord particulier, soit par règlement spécifique approprié. »
L'article 52 de la convention collective Syntec sur les voyages de « détente », prévoit quant à lui que « pendant les déplacements occasionnels de longue durée (au moins un mois consécutif) il sera accordé, à titre de détente, au salarié éloigné de sa famille (conjoint, enfant), un certain nombre de voyages aller et retour, dont les conditions de fréquence, de durée d'absence, de mode de locomotion devront être précisées dans l'ordre de mission ou fixées par un règlement spécifique approprié. »
Le contrat de travail liant les parties prévoit quant à lui :
« Article 6.2.1 ' Lieu d'exercice :
L'activité de conseil de la société s'exerce principalement dans les locaux des clients et plus rarement à partir des locaux de la société.
Dès lors, le salarié exercera ses fonctions à partir des bureaux de la société, et/ou du client (usines, centres informatiques, laboratoires, centres d'essai, etc.) sis en France et à l'étranger, étant souligné que le lieu d'exercice sera le site habituel d'intervention et pourra être modifié par la société, ce que le salarié accepte d'ores et déjà. (') ».
« Article 6.2.2 ' Déplacements :
Si, dans le cadre de ses activités pour le compte de la société, le salarié vient à effectuer un déplacement hors du site habituel d'intervention (en France ou à l'étranger), il doit au préalable, dès qu'il en a connaissance, prévenir le service du personnel. (') Si ce déplacement entraîne des frais particuliers, la société les remboursera au salarié dans les conditions en vigueur en son sein :
- sur présentation d'un « décompte de frais » en vigueur dans la société, accompagné des justificatifs,
- après accord du responsable hiérarchique de la société,
- sous réserve de la déclaration préalable ci-dessus. »
Mme [G] remet en cause la pratique de remboursement des frais professionnels suivie par la société Hiq Consulting à plusieurs titres.
Elle prétend d'abord, concernant les frais de transports au cours de la mission Systra de février à septembre 2013, que ses frais de déplacements domicile ([Localité 9])/mission ([Localité 8]) n'ont pas été pris en charge, alors qu'ils auraient dû l'être compte tenu de l'éloignement et de la durée de la mission.
Comme le soutient cependant pertinemment la société, les voyages aller et retour visés à l'article 52 de la convention collective concernent uniquement « le salarié éloigné de sa famille (conjoint, enfant) », ce qui n'était pas la situation de la salariée, ainsi qu'elle l'admet.
Il sera également retenu que Mme [G] ne justifie pas avoir adressé de décompte de frais ou de justificatif de dépenses à sa hiérarchie à ce titre.
La salariée soutient ensuite au sujet de la location de [Localité 8] que les frais d'assurance et de dépôt de garantie sont restés à sa charge.
La société justifie toutefois que les indemnités logement versées, à hauteur de 628,57 euros par mois, excédaient significativement le montant du loyer, de 450 euros par mois, et permettaient donc le paiement des frais accessoires.
Aucun manquement ne peut être retenu à l'encontre de l'employeur à ce titre.
Mme [G] prétend ensuite, concernant les indemnités de repas, que le montant de prise en charge, tel qu'il a été fixé par l'employeur, est excessivement bas pour un consultant cadre et qu'elle s'est retrouvée, en pratique, à devoir assumer une partie de ses frais de repas. Elle soutient que les frais qu'elle a exposés pour le soir, ne lui ont pas été remboursés, même lorsque le plafond de prise en charge fixé a été respecté.
Cependant, ainsi que le rappelle la société, les forfaits convenus préalablement au départ en mission de Mme [G] prévoyaient les indemnités repas suivantes :
- mission Systra à [Localité 8] : 6 euros le midi et 10 euros le soir pendant toute la mission,
- mission Schneider Electric à [Localité 7] : 6 euros le midi et 17,70 euros le soir pendant trois semaines le temps de trouver un logement sur place,
- mission Systra à [Localité 9] : 6 euros par jour travaillé,
- mission EDF à [Localité 9] : 6 euros par jour travaillé.
La salariée admet avoir reçu ces indemnités.
L'employeur ajoute qu'il prenait en charge le remboursement des frais de logement, notamment le paiement du loyer, lorsque la salariée était en mission en province, ce qui permettait à cette dernière de prendre ses repas chez elle.
La cour retient que Mme [G] ne justifie pas des déjeuners avec la clientèle dont elle fait état et qu'en toute hypothèse, la salariée ne démontre pas avoir adressé de décompte de frais ou de justificatifs de dépenses à sa hiérarchie, comme le prévoyait pourtant le contrat de travail.
Aucun manquement de l'employeur n'est ici caractérisé.
De façon générale, Mme [G], qui soutient que le système de prise en charge de ses frais de déplacement lui était défavorable, ne rapporte pas la preuve d'un préjudice et sera en conséquence déboutée de cette demande, par confirmation du jugement entrepris.
Au demeurant, la cour constate que l'employeur a répondu aux alertes de la salariée au sujet des difficultés rencontrées, même si cette réponse n'était pas conforme aux attentes de Mme [G].
Sur l'obligation de sécurité
Mme [G] soutient qu'elle s'est retrouvée, à plusieurs reprises, mise en difficulté professionnelle, du fait de pressions morales et financières, et que sa santé a été directement impactée par ses conditions de travail.
La société Hiq Consulting répond que Mme [G] ne démontre pas que ses problèmes de santé soient en lien avec ses conditions de travail.
L'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, applicable au litige, dispose : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail,
2° des actions d'information et de formation,
3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. »
L'employeur ne peut s'exonérer de sa responsabilité que s'il démontre qu'il a bien pris toutes les mesures des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Mme [G] fait état d'une pression morale et financière, en relation avec des difficultés rencontrées concernant la prise en charge de ses frais professionnels et des conditions de négociation d'une rupture conventionnelle.
Mme [G] prétend que cette situation a été facteur de stress et d'une angoisse importante et a entraîné une dégradation de son état de santé.
Elle produit un important dossier médical duquel il ressort, comme elle le soutient, l'existence d'une souffrance au travail, le suivi de la médecine du travail (pièces 32 à 40 de la salariée) mettant en évidence une dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail.
Le docteur [L], médecin du travail a ainsi écrit au médecin traitant de Mme [G] le 15 juillet 2015 en ces termes : « Mon cher confrère, je reçois ce jour en visite de reprise Mlle [G] [Z] qui présente un état d'anxiété très important. Elle semble encore très fragile et une reprise du travail me semble prématurée. Une prise en charge (') sur le plan psychologique me semble indispensable afin de tenter d'éviter un burn-out complet. Merci de la prendre en charge et de lui prolonger son arrêt avant une reprise du travail dans cette société ou ailleurs » (pièce 39 de la salariée).
Le docteur [A], médecin généraliste, a attesté le 30 mars 2017, en ces termes : « (') que je suis régulièrement cette patiente en consultation depuis janvier 2016 et que j'ai constaté dès le début de ce suivi des symptômes d'épuisement professionnel avec manifestations somatiques et psychiques caractéristiques, dont troubles du sommeil, symptômes dépressifs et anxiété. Cet épuisement professionnel a nécessité des soins prolongés dont des arrêts de travail. » (pièce 43 de la salariée).
Mme [G] produit encore de nombreux arrêts de travail (le premier débutant le 8 mai 2014 et le dernier finissant le 10 avril 2016) dont l'un, du 4 mars 2016, fait expressément état d'une souffrance au travail tandis que d'autres mentionnent des troubles manifestement associés, tels que « état d'anxiété généralisé »ou « asthénie et vertiges avec anémie [en fer] et carence en vitamine D » (pièces 47 à 62 de la salariée).
Or, en l'espèce, face à ces constatations qu'elle ne pouvait ignorer, la société Hiq Consulting ne rapporte pas la preuve qui lui incombe qu'elle a pris les mesures nécessaires pour protéger la santé physique et mentale de Mme [G].
Ces différents éléments conduisent à retenir la responsabilité de l'employeur et à fixer l'indemnisation due à la salariée, au regard des circonstances de la cause, telles qu'elles ont été rappelées précédemment, à la somme de 5 000 euros, par infirmation du jugement entrepris.
Sur l'avertissement
Conformément aux dispositions des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code civil, en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Par courrier du 21 août 2015, la société Hiq Consulting a notifié un avertissement à Mme [G] en ces termes :
« (') Par ailleurs, j'ai été alerté suite à notre entretien d'un comportement inadapté la semaine du 10 août 2015 lors d'une réunion de qualification dans les locaux de GRT Gaz avec M. [E]. Cela s'est traduit par un manque de sérieux, une ironie déplacée, et une série de réponses maladroites au regard de votre expérience, qui s'est soldé par la qualification d'un autre consultant Agap2 de seulement 2 ans d'expérience, alors que cette prestation a été successivement menée par deux collaboratrices d'environ 7 ans d'expérience. Dans le cadre de cette même réunion et juste avant la présentation à notre client, vous avez déclaré à M. [E] que vous « démissionneriez si on ne vous donnait pas ce que vous vouliez » d'un point de vue financier et vous avez eu un échange avec votre collègue consultant Agap2 moins expérimenté cité précédemment, où vous avez évoqué explicitement les griefs que vous portez à l'égard d'[5], tout en finissant par lui dire que vous ne vouliez pas « provoquer en lui de désillusion puisqu'il était encore jeune arrivé chez Agap2 », sur un ton évidemment ironique et fortement déplacé.
Ce comportement est inacceptable et à ce titre, je vous adresse un avertissement. Je vous demande de vous ressaisir immédiatement afin de remplir vos obligations professionnelles et de respecter le devoir de réserve et de loyauté incombant à tout salarié.
J'espère sincèrement que mes explications vous auront permis de mieux apprécier votre situation au sein de notre société et de réagir en conséquence. Nous espérons pouvoir compter sur vous pour que de tels faits ne se reproduisent pas à l'avenir et que nous puissions reprendre une collaboration agréable et efficace » (pièce 8 de l'employeur).
Mme [G] demande l'annulation de cet avertissement, lequel n'est pas, selon elle, justifié objectivement, et qui doit s'analyser en une mesure de rétorsion de l'employeur intervenue dans un contexte spécifique.
La société Hiq Consulting prétend que Mme [G] tente en réalité d'éluder les raisons pour lesquelles elle a été avertie et qu'elle n'a pas contestées à l'époque des faits, en prétendant à l'existence d'une mesure de rétorsion.
La cour constate que le courrier avait, ainsi que cela résulte de ses propres mentions, deux objets clairement distingués, répondre au courrier de réclamation de la salariée reçu le 18 août 2015 d'une part, et lui notifier un avertissement, d'autre part.
S'agissant de la sanction, il sera constaté que l'employeur ne produit aucune pièce à ce titre.
Dès lors, faute pour la société de produire les éléments retenus pour prendre la sanction prononcée à l'encontre de Mme [G], celle-ci sera annulée, sans qu'il n'y ait lieu de se prononcer sur l'argument subsidiaire tenant à l'existence d'une mesure de rétorsion, et l'indemnisation due à la salariée du fait de cette sanction injustifiée sera fixée, compte tenu du contexte rappelé, à la somme de 2 500 euros, par infirmation du jugement entrepris.
En revanche, [G], qui fait état d'une sanction financière en ce qu'elle n'a pas perçu la prime de 500 euros qu'elle avait négociée, ne sera pas suivie en son argumentation, faute pour elle de démontrer avoir négocié et obtenu le bénéfice de cette prime, aucune demande n'étant quoi qu'il en soit formulée dans le dispositif de ses conclusions.
Sur le licenciement
L'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.
Par courrier du 28 avril 2016, la société Hiq Consulting a notifié à Mme [G] son licenciement pour cause réelle et sérieuse dans les termes suivants :
" Nous avons à vous reprocher différents griefs, notamment concernant votre comportement des derniers mois ainsi que l'exécution des tâches qui vous ont été confiées dans le cadre de votre contrat de travail.
En effet, depuis, le 22 mars 2016, notre société vous a confié par le biais de son pôle Innovation une mission de recherche, d'étude et de veille technologique (bibliographie) sur les outils d'aide à la mise en 'uvre (OAMO).
Comme en attestent vos échanges e-mails avec Mme [R] [Y], et pour reprendre plus en détails vos manquements, dès le mardi 22 mars 2016 vous n'avez pas répondu lors du point qui avait été prévu à 17h et ce malgré les relances téléphoniques et e-mails qui vous ont été adressés.
Le mercredi 23 mars, le brouillon de vos travaux n'a pas été validé et nous vous avons demandé de reprendre le travail confié.
Le jeudi 24 mars, vous nous avez transmis vos travaux par e-mails. Ceux-ci étaient largement insuffisants et ne respectaient pas le format demandé, Mme [Y] a tenté de vous joindre en vain, elle vous a donc fait part de ses remarques par écrit.
Le vendredi 25 mars, vous nous informez que vous avez décidé de poser un RTT à 9h30 le jour même, sans accord ni même information préalable de notre société et vous nous indiquez que vous nous ferez un retour sur vos travaux le 29 mars.
Le mardi 29 mars, nous sommes sans aucune nouvelle de votre part.
Le 30 mars, vous êtes de nouveau relancée par écrit afin d'obtenir votre retour sur l'avancée de vos travaux, écrit reprécisant le travail attendu et le processus à respecter.
Le 31 mars au matin, vous nous informez que vous avez décidé de poser un RTT le jour même, sans accord préalable de notre société.
Le 1er avril, vous indiquez à Mme [Y] que vous n'avez pas pu avancer sur vos travaux. Le même jour, votre manager vous a donc fait part du fait que nous vous retirions du projet pour le confier à un autre salarié.
Dans le cadre de ce projet vous n'avez donc pas respecté les directives de votre responsable et notamment des responsables du pôle Innovation. D'une manière générale, vous n'avez pas respecté les rendez-vous programmés, les échéances de remise de vos travaux, ce qui a conduit le pôle Innovation à vous retirer de cette mission parce que vous ne respectiez pas les échéances, parce que les travaux rendus n'étaient pas exploitables par manque de matière, et parce que vous ne répondiez pas aux sollicitations appels et e-mails. Finalement après dix jours de projet le travail produit était proche du néant. Ces éléments sont purement factuels et objectifs puisque ce même projet a donc été confié à l'un de nos salariés et a été réalisé en 23 heures de travail, à savoir trois jours et demi.
Durant cette période de projet vous avez, les 25 et 31 mars pris des jours de congés sans l'accord préalable de votre responsable hiérarchique et en l'informant le matin même, en violation des dispositions de votre contrat de travail et des règles en vigueur au sein de la société concernant la prise des journées de congés. Et ce de surcroît alors que vous aviez des échéances à respecter dans le rendu de vos travaux.
Vous avez de plus fait part, dès la fin de votre précédente mission (le 28 janvier 2016) du fait que vous aviez mis à jour votre curriculum vitae en ligne et que vous entendiez quitter la société par le biais d'une rupture conventionnelle. Nous n'étions pas opposés à vous accorder une telle rupture afin que nos relations se terminent en bonne intelligence.
Malgré l'accord que vous aviez pu trouver avec votre manager, vous avez décidé de revenir sur votre décision et demandé un an de salaire pour quitter la société. De plus, vous nous avez menacés de vous mettre en mi-temps thérapeutique si nous n'acceptions pas vos conditions. Ces menaces que nous assimilons à du chantage ne sont pas isolées puisque vous avez déjà eu recours à cette méthode au cours de l'année 2015, comportement qui avait fait l'objet d'un avertissement.
Devant de nouvelles menaces, la détérioration de nos relations, et l'absence de travail de votre part, nous vous avons convoquée à un entretien préalable à licenciement en date du 25 avril, entretien au cours duquel vous étiez assistée par notre délégué syndicale, Mme [W] [F].
Cet entretien était destiné à vous exposer ces éléments et à recueillir en retour vos observations. Toutefois, les échanges intervenus ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation de la situation, dans un sens qui nous aurait invités à renoncer à la rupture de votre contrat de travail. En effet, au cours de cet entretien vous n'avez apporté aucune justification aux reproches que nous avons formulés, vous vous êtes contentée de nier les faits et d'indiquer que ce n'était pas votre version, sans autres précisions. A aucun moment vous ne vous êtes remise en cause, encore un élément démontrant votre volonté de quitter notre société. Dans ces conditions, il nous semble donc impossible de maintenir une relation de travail avec vous.
Par conséquent, après réflexion, nous avons pris la décision de procéder à la rupture de votre contrat de travail sur la base des éléments ci-dessus, constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement."
Aux termes de cette lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, la société Hiq Consulting reproche à Mme [G] de ne pas avoir rempli la mission de recherche qui lui avait été confiée, relative au développement de l'outil d'aide à la mise en 'uvre (OAMO).
Le 22 mars 2016, M. [I], directeur technique, responsable Agap2innovation, a confié à Mme [G] un projet en ces termes :
« Suite à nos échanges, dans le cadre de ta période d'inter-projets, tu es sollicitée pour intervenir sur un des projets d'Agap2innovation. Tu trouveras en PJ de ce mail les documents te détaillant l'utilisation de la plate-forme Myinnovation. (')
Comme convenu ensemble, par téléphone, merci d'appeler [R] aujourd'hui vers 17h (...) et de lui envoyer auparavant un premier plan de tes recherches.
Pour rappel, informations importantes une fois ton démarrage sur une tâche Agap2innovation :
- L'intervention sur une tâche d'un projet Agap2innovation est obligatoire et à temps plein pour l'ensemble des consultants intervenants.
- En revanche, il reste prioritaire pour Agap2 que tu trouves un projet. L'ensemble des activités liées (qualification, prospection, tâches demandées par ton manager) sont donc prioritaires. Cependant, il est impératif de nous prévenir de ces activités pour que nous prenions ceci en compte. » (pièce 33 de l'employeur).
Concernant le calendrier des travaux
L'employeur ne justifie ni d'une échéance précise de restitution du travail, ni d'aucun calendrier prévisionnel des travaux, qui auraient été portés à la connaissance de la salariée.
Il est uniquement justifié que la restitution des travaux était en principe attendue, pour l'ensemble des salariés concernés, les vendredis à 12h (courriel en ce sens, pièce 81 de la salariée).
La société Hiq Consulting établit certes qu'elle n'est pas parvenue à joindre la salariée le 22 mars 2016 à 17h comme prévu, Mme [R] [Y], directrice technique, lui ayant adressé un courriel en ces termes : « Bonjour [Z], on devait se faire un point à 17h. Je t'ai appelée mais sans réponse. Bloques-tu sur le sujet ' Où es-tu occupée avec ton manager ' Rappelle-moi dès que tu vois ce message. Je te remercie » (pièce 34 de l'employeur), ce que Mme [G] conteste, faisant valoir avoir fait un point téléphonique avec Mme [Y], sans toutefois en rapporter la preuve.
Les difficultés rencontrées par la société pour joindre la salariée caractérisant selon l'employeur une attitude fuyante de cette dernière, sont toutefois démenties par les réponses apportées par celle-ci à son interlocutrice sur l'avancement des travaux, de sorte qu'aucun manquement ne peut lui être reproché à ce titre.
Concernant la qualité du travail
La société Hiq Consulting fait état d'une mauvaise qualité du travail remis par la salariée et produit pour en justifier le courriel adressé par Mme [Y] à Mme [G] le 24 mars 2016 :
« Bonjour [Z],
J'ai essayé de te joindre par téléphone mais sans succès. Comme dit dans le message vocal, je te fais mon retour par mail. (') Peux-tu me rassembler toutes ces informations sur la trame FDP disponible sur la plate-forme (')
Les informations que tu nous donnes sont intéressantes. Par contre, on aurait vraiment besoin du maximum d'informations. Il faudrait que pour chaque point tu nous détailles exactement ce qu'ils donnent comme informations, comment les utilisateurs sont aidés, nous donner des exemples concrets, l'état de l'art doit réellement nous donner tous les détails trouvés. (')
On peut se faire un point demain pour échanger sur les remarques faites. » (pièce 34 de l'employeur).
Il se déduit cependant de ce message uniquement un échange sur l'avancement du travail confié, correspondant à un point d'étape et non à la restitution d'un travail finalisé.
D'ailleurs, Mme [G] a adressé un courriel à Mme [Y] le 24 mars 2016 en ces termes : « Hello [R], suite au travail que j'avais fait mardi que je t'ai présenté en face à face mercredi, je réponds par le présent mail à la seconde tâche. Pour te répondre, j'ai fait le tour de la problématique d'hier (') A présent, j'attends ton retour pour savoir quoi faire. Quelles suites donner à cela. » (pièce 79 de la salariée).
Concernant la prise de congés
La société Hiq Consulting reproche à la salariée d'avoir posé un jour de RTT à 9h30 le jour même, 25 mars, sans accord ni information préalable de son employeur.
Mme [G] rapporte la preuve d'avoir informé son supérieur, M. [U] [N], le 25 mars 2016 par SMS : « Salut [U], j'ai des obligations personnelles de dernière minute, je dois poser mon RTT aujourd'hui. Bon week-end. A mardi. », ainsi que Mme [Y], et souligne que M. [N] a donné son accord par SMS en ces termes : « OK, dis moi ce que tu comptes faire par rapport à notre dernière discussion » (pièce 80-1 de la salariée).
Il résulte de cet échange qu'il existait une certaine souplesse concernant la pose des jours de RTT, en concertation avec la hiérarchie.
Le 31 mars 2016, Mme [G] a informé M. [N] de son absence au titre d'un jour de RTT, sans que ce dernier ne manifeste son opposition (pièce 83 de la salariée).
Ce reproche n'apparaît dès lors pas fondé.
Concernant le déroulement de la mission
La société Hiq Consulting prétend avoir été sans nouvelles de la salariée le mardi 29 mars sans justifier qu'un rendez-vous de travail ou une restitution étaient prévus ce jour-là.
La société Hiq Consulting fait également état d'une demande de retour insatisfaite le 30 mars 2016.
Ce jour-là, Mme [Y] a adressé à la salariée le courriel suivant :
« Bonjour [Z],
Nous avions convenu en fin de semaine dernière de faire un point sur le projet innovation hier et je n'ai pas eu de tes nouvelles ni reçu ton document.
Voici un résumé du retour que j'attendais de ta part :
- Rédaction d'un document présentant tes recherches (celles écrites sur papier et celles transmises par mail) suivant la trame disponible sur la plate-forme myinnovation.fr
- Dépôt de documents sur la plate-forme (afin de centraliser les documents en un seul endroit)
Les informations que tu nous as communiquées n'étaient pas complètes, nous avons besoin :
- D'un maximum d'informations : détailler tous les outils existants (peut être les classer par famille)
- D'avoir des éléments concrets tirés d'une bibliographie complète (tous les sites consultés)
La prochaine étape sera l'analyse des outils (atouts, adaptabilités, inconvénients, etc.)
J'ai besoin que tu reviennes vers moi le plus tôt possible pour notre suivi de projet. C'est important pour nous, pour le bon suivi de nos recherches. Peux-tu m'appeler demain matin 9h30 pour qu'on fasse un bilan ensemble.
De manière générale, si tu rencontres des difficultés, n'hésite pas à me faire un retour, en tout cas tiens nous bien au courant, c'est important.
Merci par avance et bonne soirée. » (pièce 36 de l'employeur).
Mme [G] fait valoir à juste titre ici que cette demande visait à la mettre en difficulté, que la restitution des travaux avait lieu en principe le vendredi, et qu'il lui a été subitement demandé de faire un retour avant cette date, sans justification objective, et la veille pour le lendemain. Elle indique qu'elle s'est sentie mise volontairement sous pression et a été prise de fortes angoisses, ce qui l'a conduit à poser un jour de RTT le lendemain pour éviter de craquer et d'être de nouveau en arrêt de travail en raison de son état d'anxiété important.
Le 1er avril 2016, prétendant que la salariée n'avait pas avancé sur ses travaux, M. [N] a indiqué à [G] qu'il lui retirait ce projet.
Les circonstances ainsi rappelées, notamment l'absence de calendrier de restitution des travaux et la précipitation de l'employeur à retirer cette mission à la salariée, alors que celle-ci justifie d'échanges avec son interlocutrice sur l'avancement des travaux, conduisent à retenir que la matérialité du grief relatif à la non-exécution de la mission n'est pas établie.
Par ailleurs, le grief relatif à la négociation abusive d'une rupture conventionnelle n'est établi par aucune pièce utile versée aux débats.
Au demeurant, la cour relève que la salariée a donné satisfaction dans l'exécution de ses missions tout au long de son contrat de travail au sein de la société Hiq Consulting, que les difficultés visées dans la lettre de licenciement concernent une courte période, du 22 mars au 13 avril 2016, et s'inscrivent dans un contexte de difficultés majeures rencontrées par la salariée, sans aide de son employeur.
Le jugement entrepris doit dès lors être infirmé en ce qu'il a dit le licenciement prononcé fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnisation de la salariée
En application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Mme [G] sollicite l'allocation d'une somme de 30 000 euros à ce titre. Elle fait valoir qu'elle a subi un préjudice du fait de son licenciement sur le plan professionnel, puisqu'elle a été licenciée en pleine période de progression professionnelle et alors qu'elle aurait pu prétendre, au moment de son licenciement à une promotion et un passage au grade senior consultant, au regard de son expérience et de ses excellents résultats, que son licenciement a donc freiné une progression professionnelle au poste d'ingénieur confirmé. Elle souligne encore qu'elle a rencontré de grandes difficultés à retrouver un emploi, malgré une recherche active, qu'elle n'a rien trouvé avant mai 2019 et a élargi ses recherches à des postes plus éloignés de son domaine de compétences et postulé également à l'étranger, qu'elle a finalement retrouvé un emploi au Canada en mai 2019, qu'entre temps elle n'aura rempli qu'une courte mission de deux mois, qu'elle a été inscrite et indemnisée par Pôle emploi à compter du 30 novembre 2016 jusqu'au mois d'avril 2019, avec un préjudice financier important. Elle fait enfin état d'un préjudice moral, indiquant que sa confiance personnelle avait été atteinte par les reproches injustifiés, les accusations fallacieuses et les pressions subies dont elle a fait l'objet pour la contraindre à quitter la société au plus vite.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, eu égard à son ancienneté (3 ans et 6 mois), son âge au moment du licenciement (34 ans), à la rémunération qui lui était versée (3 573,83 euros correspondant à la moyenne des trois derniers mois) et au vu des pièces produites sur sa situation postérieure à la rupture du contrat, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer les dommages-intérêts dus à la salariée en réparation de la perte de son emploi, à la somme de 24 000 euros.
Sur les indemnités de chômage versées à la salariée
L'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version applicable à l'espèce, énonce : « Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées. »
En application de ces dispositions, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés du montant des indemnités de chômage éventuellement servies à la salariée du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités.
Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
La société Hiq Consulting, qui succombe pour l'essentiel dans ses prétentions, supportera les dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Elle sera en outre condamnée à payer à Mme [G] une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 3 000 euros.
La société Hiq Consulting sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.
Le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions concernant les dépens et les frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 25 avril 2019, excepté en ce qu'il a débouté Mme [Z] [G] de sa demande de dommages-intérêts pour violation des dispositions de la convention collective et du contrat de travail sur le remboursement des frais professionnels, en ce qu'il a condamné la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy au paiement des dépens de première instance et a débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
CONDAMNE la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy à payer à Mme [Z] [G] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et de santé,
ANNULE l'avertissement du 21 août 2015 prononcé par la SAS Hiq Consulting à l'encontre de Mme [Z] [G],
CONDAMNE la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy à payer à Mme [Z] [G] la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du prononcé de cette sanction injustifiée,
DIT dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé par la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy à l'encontre de Mme [Z] [G],
CONDAMNE la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy à payer à Mme [Z] [G] la somme de 24 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
ORDONNE le remboursement par la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme [Z] [G] dans la limite de trois mois d'indemnités,
DIT qu'une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée par le greffe par lettre simple à la direction générale de Pôle emploi conformément aux dispositions de l'article R. 1235-2 du code du travail,
CONDAMNE la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy à payer à Mme [Z] [G] une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy de sa demande présentée sur le même fondement,
CONDAMNE la SAS Hiq Consulting dorénavant dénommée Moongy au paiement des entiers dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signé par Madame Isabelle VENDRYES, Président, et par Madame BOUCHET-BERT Elodie,Greffière,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,