COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 MAI 2022
N° RG 19/03687 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TPR3
AFFAIRE :
[O] [P]
C/
SAS SOCOTEC ENVIRONNEMENT
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES
N° Section : I
N° RG : F18/00054
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Evelyn BLEDNIAK de la SELARL ATLANTES
Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [O] [P]
né le 23 Octobre 1989 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Evelyn BLEDNIAK de la SELARL ATLANTES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0093 substituée par Me Kama MACALOU, avocat au barreau de PARIS
APPELANT
****************
SAS SOCOTEC ENVIRONNEMENT
N° SIRET : 834 096 695
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J153
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Hélène PRUDHOMME, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,
M. [O] [P] était embauché à compter du 26 octobre 2015 par la société Socotec France (devenue la société Socotec Environnement) en qualité de technicien de mesures, en contrat à durée indéterminée.
Le contrat de travail était régi par la convention collective du bâtiment des ETAM IDCC.
Le 6 février 2017, la société Socotec Environnement convoquait M. [P] à un entretien préalable en vue de son licenciement. L'entretien se déroulait le 16 février 2017. Le 22 février 2017, elle lui notifiait son licenciement pour faute grave. Il était reproché au salarié d'avoir refusé de signer un formulaire permettant la commande d'un véhicule de service adapté à son métier et prévenant les expositions aux particules d'amiante client et ce malgré plusieurs entretiens avec sa hiérarchie et courriers de mise en demeure. Le salarié contestait le motif de son licenciement et estimait qu'il revenait à l'entreprise de lui allouer un véhicule de service conforme.
Le 2 février 2018, M. [P] saisissait le conseil des prud'hommes de Versailles.
Vu le jugement du 3 septembre 2019 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Versailles qui a':
- Dit que sur la forme, l'action est recevable ;
- Dit que M. [P] a commis une faute grave en ne se conformant pas aux décisions de la société Socotec Environnement en matière de réglementation d'hygiène et de sécurité ;
- Constaté et dit que la société Socotec Environnement a engagé la procédure de licenciement de M. [P] alors que celui-ci n'était pas en arrêt accident du travail ;
- Dit et jugé que M. [P] a commis une faute grave en ne se conformant pas aux décisions de la société Socotec Environnement en matière de réglementation d'hygiène et de sécurité ;
- Dit et jugé souverainement que le licenciement pour faute grave de M. [P] du 6 février 2017 repose sur des motifs et une cause réelle et sérieuse ;
- Dit et jugé M. [P] mal fondé en ses demandes ;
- Débouté M. [P] du surplus et de l'ensemble des autres chefs de sa demande ;
- Débouté la société Socotec Environnement de sa demande reconventionnelle présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Rejeté en tant que besoin tout autre demande formulées par les parties ;
- Condamné M. [P] aux entiers dépens.
Vu l'appel interjeté par M. [P] le 7 octobre 2019.
Vu les conclusions de l'appelant, M. [O] [P], notifiées le 24 décembre 2019 et soutenues à l'audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :
- Dire et juger que M. [P] est recevable et bien fondé en son appel et ses présentes écritures ;
- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par la section industrie du conseil de prud'hommes de Versailles (RG n° F18/00054) le 3 septembre 2019 ;
Et statuant a nouveau,
- Fixer la rémunération moyenne mensuelle brute de M. [P] à la somme de 2'343,77 euros ;
À titre principal :
- Dire et juger le licenciement notifié à M. [P] le 22 février 2017 l'a été alors que le contrat de travail du salarié était suspendu du fait d'un accident du travail ;
- Dire et juger que le licenciement de M. [P] est nul pour avoir été notifié en méconnaissance des dispositions des articles L.1226-9 et L.1226-13 du code du travail ;
- Ordonner la réintégration subséquente de M. [P] au sein de la société Socotec Environnement, venant aux droits de la société Socotec France, avec reprise de son ancienneté initiale ;
- Dire et juger que la réintégration de M. [P] interviendra dans le mois qui suivra le paiement par la société de toutes les sommes auxquelles elle sera condamnée (en principal et intérêts), paiement qui devra intervenir au plus tard un mois après la notification de l'arrêt à intervenir ;
- Condamner la société Socotec Environnement, venant aux droits de la société Socotec France, à procéder à cette réintégration de M. [P] sous astreinte de 100 euros par jour de retard à défaut de réintégration à la date qui sera fixée par la cour d'appel de Versailles et porter cette astreinte à 500 euros par jour de retard, à défaut de réintégration effective après un mois, et à 1'000 euros après 2 mois ;
- Condamner la société Socotec Environnement, venant aux droits de la société Socotec France, à verser à M. [P] la somme correspondant à l'ensemble des salaires qu'il aurait dû percevoir depuis le 22 février 2017 jusqu'à la date fixée pour sa réintégration au sein de la société sur la base d'un salaire mensuel de référence (soit la somme mensuelle de 2'343,77 euros bruts), déduction faite des sommes reçues de Pôle emploi, ainsi qu'à l'indemnité compensatrice de congés payés afférents.
À titre subsidiaire :
- Dire et juger le licenciement notifié à M. [P] le 22 février 2017 n'est fondé sur aucune cause réelle et sérieuse et, a fortiori, sur aucune faute grave ;
- Condamner la société Socotec Environnement, venant aux droits de la Société Socotec France, à payer à M. [P] les sommes suivantes, lesquelles porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'entreprise de sa convocation à comparaître par-devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes :
- Indemnité compensatrice de préavis : 4'687,54 euros
- Indemnité compensatrice de congés payés afférents : 468,75 euros
- Indemnité pour licenciement abusif : 14'000 euros
En tout état de cause :
- Condamner la société Socotec Environnement, venant aux droits de la Société Socotec France, à payer à M. [P] :
- Dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait du caractère brutal et vexatoire de la rupture : 10'000 euros
- Dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat : 30'000 euros
- Dommages et intérêts en réparation du préjudice d'anxiété : 30'000 euros
- Article 700 du code de procédure civile : 4'000 euros
- Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires, de la société Socotec Environnement, venant aux droits de la Société Socotec France,
- Condamner la société Socotec Environnement, venant aux droits de la Société Socotec France, aux entiers dépens.
Vu les écritures de l'intimée, la société Socotec Environnement, notifiées le 10 mars 2020 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de':
A titre principal :
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement pour faute grave de M. [P] est fondé,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [P] de l'ensemble de ses demandes afférentes au licenciement prononcé,
Et statuant sur les autres demandes,
- Juger que M. [P] ne justifie pas de manquements de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat,
- Juger que M. [P] ne justifie pas d'un préjudice d'anxiété,
- Débouter M. [P] de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité et de résultat,
- Débouter M. [P] de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'anxiété,
A titre subsidiaire :
- Limiter la condamnation de la société à verser à M. [P] 1 euro symbolique à titre d'indemnité pour licenciement abusif,
En tout état de cause,
- Condamner M. [P] à verser à la société la somme de 1'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu l'ordonnance de clôture du 28 février 2022.
SUR CE,
Sur la nullité du licenciement':
M. [P] soulève la nullité de son licenciement en faisant valoir que son licenciement lui a été notifié le 22 février 2017 alors que son contrat de travail était suspendu du fait d'un accident du travail, de sorte que le licenciement lui a été notifié en méconnaissance des dispositions des articles L.1226-9 et L.1226-13 du code du travail ;
La société Socotec fait valoir en réplique qu'elle a toujours contesté la qualification d'accident du travail du 31 octobre 2016 et que la CPAM, après enquête, n'a pas reconnu le caractère d'accident du travail et qu'en tout état de cause le licenciement repose sur une faute grave de sorte que l'argument du salarié n'est pas valable, et ce, même dans l'hypothèse où la qualification d'accident du travail serait retenue ;
L'article L1226-9 du code du travail relatif aux accidents du travail et maladies professionnelles dispose qu' "au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie" ;
En application de l'article L.1226-13 du même code, « Toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L.1226-9 et L.1226-18 est nulle. » ;
En l'espèce, par courriel du 12 janvier 2017, M. [P] a déclaré à son employeur avoir subi un accident du travail ; le 30 janvier 2017, il a été placé en arrêt de travail et à compter du 13 février 2017 en arrêt de travail 'accident du travail' ' initial';
La société Socotec a licencié M. [P] le 22 février 2017 en invoquant à son encontre une faute grave ;
Il résulte des motifs ci-après que la faute grave reprochée est établie ;
En conséquence, les demandes liées à la nullité alléguée du licenciement sont rejetées ;
Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement
En application de l'article L. 1232-1 du code du travail, un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;
Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ; la charge de la preuve incombe à l'employeur qui l'invoque ;
En l'espèce, M. [P] a utilisé courant 2016 un véhicule de service Peugeot 208 ; il est reproché au salarié, aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, d'avoir refusé de signer le formulaire remis pour permettre la commande d'un véhicule adapté à son emploi et ce de manière réitérée, en prétextant de la perte d'un avantage, refusant ainsi, malgré des relances et mise en demeure, de se conformer aux décisions prises par la société au regard de l'emploi occupé ;
La demande de la société Socotec s'inscrivait dans le cadre de sa nouvelle «'politique relative aux déplacements en voiture'» en vigueur au sein de l'entreprise à compter du 2 mai 2016 ;
La nouvelle politique relative aux déplacements en voiture en vigueur au sein de l'entreprise à compter du 2 mai 2016, qui a été remise au salarié, prévoyait précisément un moratoire de 6 mois, permettant d'effectuer des tests afin de déterminer si le changement de véhicule était nécessaire ou non ;
Le courriel de M. [J] en date du 7 novembre 2016 acte la décision, à l'issue de cette période de tests, d'attribuer les véhicules les plus adaptés aux collaborateurs;
Il ressort également du courriel de M. [F], responsable agence, en date du 28 décembre 2016 qu'il était attribué à M. [P] un véhicule sécurisé Berlingo Blue HDI 100 ch. taille XL finition business avec cloison pleine vitrée et demandé au salarié de venir signer le formulaire de demande de mise à disposition ;
C'est dans ces conditions qu'il a été demandé à M. [P] de signer un nouveau bon de commande, pour un véhicule Berlingo également adapté et sécurisé ; le grief développé dans la lettre de licenciement se réfère au comportement de refus alors opposé par le salarié, au début de l'année 2017 ;
La société Socotec a notamment adressé à M. [P] deux lettres le mettant en demeure, datées du 25 et du 27 janvier 2017, de signer le formulaire de mise à disposition du nouveau véhicule de service adapté à ses missions ;
Il est avéré que M. [P] s'est opposé à ce moment-là à la signature du formulaire de commande d'un véhicule Berlingo, pourtant adapté et sécurisé, et ce malgré les demandes réitérées de son employeur ;
La société Socotec rappelle à juste titre qu'aucune disposition du contrat de travail ne prévoyait d'engagement de sa part d'octroyer au salarié un véhicule spécifique de 5 places pour une durée indéterminée, permettant en revanche aux salariés de bénéficier d'avantages en nature, régulièrement mentionnés sur leurs bulletins de paie, dans la mesure où ils étaient parfois autorisés à utiliser leur véhicule professionnel à des fins privées ;
A nouveau, il est rappelé que le choix de l'employeur de commander un véhicule Berlingo, qui était un véhicule adapté et sécurisé, a été retenu à l'issue des analyses réalisées pendant une période de 6 mois ayant permis de déterminer si le changement de véhicule était nécessaire ou non ;
La société Socotec ne pouvait obliger le salarié à conduire un véhicule qu'il ne souhaitait pas utiliser ;
Comme le fait justement observer la société intimée, il ne peut pas non plus être à la fois reproché à l'employeur d' avoir imposé au salarié le changement de son véhicule, pour un modèle plus sécurisé, et allégué que l'employeur n'a pas agi correctement pour protéger sa santé ;
A cet égard, M. [P] ne justifie pas que le véhicule retenu par la société n'offrait pas les garanties nécessaires et il ne revient pas au salarié de choisir la solution qu'il estime préférable, telle que le maintien d'un véhicule 5 places avec le tractage d'une remorque HSE ou encore l'utilisation d'un véhicule de service HSE partagé entre tous les salariés, alors que le choix retenu par l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, s'imposait au salarié ;
Par ailleurs, l'embauche de deux nouveaux salariés le 4 puis le 26 janvier 2017 dont fait état M. [P] sans y apporter de précisions, ne suffit pas à établir la volonté de l'employeur de se séparer prématurément de M. [P] ;
Compte tenu de ces éléments, le refus de M. [P] de se conformer aux décisions prises par la société au regard de l'emploi occupé est établi et caractérise une faute grave ;
Il n'est pas non plus démontré de caractère brutal ni vexatoire de la rupture, ni en tout état de cause, d'un préjudice spécifique subi à ce titre ;
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement est fondé sur une faute grave et a débouté par suite M. [P] de ses demandes en lien avec le licenciement ;
Sur l'obligation de sécurité
Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, « l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1°Des actions de prévention des risques professionnels ;
2°Des actions d'information et de formation ;
3°La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. »;
Selon l'article L. 4121-2 du même code, « l'employeur met en 'uvre les mesures prévues par L.4121-1 du code du travail sur la base des principes généraux de prévention suivants :
1°Eviter les risques,
2°Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités,
3°Combattre les risques à la source,
4°Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé,
5°Tenir compte de l'état d'évolution de la technique,
6°Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
7°Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment en ce qui concerne les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L 1152-1 du code du travail,
8°Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle,
9°Donner les instructions appropriées aux travailleurs. » ;
En l'espèce, M. [P] expose que l'agence d'[Localité 6], au sein de laquelle il travaillait, ne présentait pas les équipements, aménagement et agencement propres à garantir la sécurité des salariés y travaillant et que l'entreprise ne pouvait conditionner la fourniture d'un véhicule adapté à la signature d'un formulaire de demande de mise à disposition mais devait le fournir de son propre chef ; il ajoute que son employeur ne lui a dispensé la formation préalable obligatoire que plus de 6 mois après sa prise de fonction ;
La société Socotec souligne d'abord la particularité de son activité, ses interventions - contrairement à une entreprise dont l'activité la conduit à intervenir directement et de manière continue sur des matériaux divers susceptibles de libérer des fibres d'amiante - étant soit ponctuelles soit sans action directe sur ces matériaux, rappelle que l'ensemble de ses agences sont accréditées et ajoute qu'elle s'inscrit dans le cadre d'une démarche concertée et constructive avec l'administration du travail, sans avoir été jamais sanctionnée ; elle invoque également des contradictions dans l'argumentation du salarié ;
Elle indique que M. [P] n'est pas intervenu en zone confinée avant de réaliser sa formation, qui a été effectuée les 2 et 3 mai 2016 ;
Les éléments versés aux débats font ressortir les échanges qui ont eu lieu avec l'inspection du travail et le CHSCT ;
Si l'inspection du travail a ponctuellement relevé des irrégularités et informé la société Socotec en mai 2017 de la rédaction d'un procès-verbal, la société Socotec les a contestées dans un courrier du 27 juillet 2017 et il n'est pas justifié qu'une suite ait été donnée à ce procès-verbal ;
Il ressort en outre des motifs précités que la société Socotec a effectué des tests afin de déterminer si le changement de véhicule était nécessaire ou non pour M. [P] et qu'elle a tiré les conséquences du refus de ce dernier de se conformer à la commande d'un véhicule adapté à sa situation, c'est à dire sécurisé ;
Comme le relève justement la société intimée, M. [P] n'explicite pas comment son employeur aurait pu l'obliger à conduire un véhicule qu'il ne souhaitait pas utiliser ;
En tout état de cause, M. [P] n'explicite, ni ne justifie, le préjudice qu'il aurait subi au titre de la violation de l'obligation de sécurité qu'il invoque ;
La demande de dommages et intérêts formée de ce chef est en conséquence rejetée ;
Le jugement est confirmé sur ce point ;
Sur le préjudice d'anxiété
M. [P] se contente de rappeler que le préjudice d'anxiété a été reconnu par la Cour de cassation en 2010, pour les salariés exposés à la poussière d'amiante ;
La Haute juridiction a retenu que les salariés qui avaient travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi de 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouvaient par le fait de l'employeur dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante et étaient amenés à subir des contrôles et examens réguliers propres à réactiver cette angoisse ;
Toutefois, comme le relève justement la société intimée, M. [P] ne donne pas d'explication précise au soutien de cette demande en ce qui le concerne et ne justifie pas du préjudice qu'il prétend avoir subi à ce titre ;
La demande de dommages et intérêts formée de ce chef est en conséquence rejetée ;
Le jugement est également confirmé sur ce point ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise est confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel sont mis à la charge de M. [P];
La demande formée par la société Socotec au titre des frais irrépétibles en cause d'appel est accueillie, à hauteur de 500 euros ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris,
Condamne M. [O] [P] aux dépens d'appel,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [O] [P] à payer à la SAS Socotec Environnement la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme'Sophie RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER Le PRÉSIDENT