COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 02 JUIN 2022
N° RG 19/02256 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TGTB
AFFAIRE :
[M] [V]
C/
S.A.S. SFR DISTRIBUTION
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Avril 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
N° Section : E
N° RG : F17/02127
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Aïcha CONDE
Me Antoine VIVANT
le : 03 Juin 2022
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [M] [V]
née le 16 Septembre 1982 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par : Me Aïcha CONDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0023
APPELANTE
****************
S.A.S. SFR DISTRIBUTION
N° SIRET : 410 358 865
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par : Me Antoine VIVANT de la SELEURL Vivant Avocat SELARL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B1063,substitué par Me CURNIER-CRIBEILLET Pauline ,avocate au barreau de Paris.
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 Mars 2022, devant la cour composée de :
Madame Isabelle VENDRYES, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SAS SFR Distribution intervient sur l'ensemble des activités de distribution du marché Grand Public au sein du Pôle Telecom du groupe SFR Group. Dans ce cadre, elle est en charge de l'exploitation des boutiques Espace SFR, du réseau Grandes enseignes, des circuits de proximité et de la vente à domicile.
En 2016, SFR Group a fait l'objet d'une réorganisation de ses activités de distribution. Il a été engagé le 9 septembre 2016 un processus d'information-consultation du comité d'entreprise sur ce projet et ses mesures d'accompagnement.
Un accord collectif majoritaire relatif à un projet de licenciement collectif pour motif économique a été signé le 19 octobre 2016 et validé par la Direccte le 17 novembre 2016.
Cet accord prévoyait un plan de mobilité professionnelle contenant des mesures de mobilité interne et externe (plan de départs volontaires) ainsi qu'un dispositif de transition de carrière.
Mme [M] [V], née le 19 septembre 1982, a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée par la société SFR le 29 mai 2008 à effet au 26 aout 2008 en qualité d'ingénieur commercial, la convention collective applicable étant celle des télécommunications.
Par courrier du 29 août 2016 Mme [V] a été informée du transfert de son contrat de travail au sein de la société SFR Distribution.
Suite à la conclusion de l'accord du 19 octobre 2016 portant sur les mesures sociales d'accompagnement du projet de réorganisation, la société SFR Distribution a informé 17 responsables de zone de vente dont Mme [V] de la suppression de leur poste et de leur éligibilité au plan de mobilité professionnelle.
Le 24 janvier 2017, Mme [V] a signé avec son employeur un protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique.
Par requête reçue au greffe le 28 juillet 2017, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre afin de voir contester la cause réelle et sérieuse de son licenciement et lui voir allouer diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.
Par jugement rendu le 18 avril 2019, le conseil de prud'hommes de Nanterre, section encadrement, a :
- ordonné la clôture de la mise en état de l'affaire,
- débouté Mme [V] de l'ensemble de ses demandes,
- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.
Mme [V] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 16 mai 2019.
Par conclusions adressées par voie électronique le 11 février 2020, Mme [V] demande à la cour de :
- la recevoir en ses demandes,
- l'en déclarer bien fondée,
Ce faisant :
- infirmer le jugement querellé,
Statuant à nouveau :
- dire et juger que le protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique signé le 24 janvier 2017 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- fixer la moyenne de salaire à la somme de 4 013,21 euros avant rappel de salaire et à 4 265,22 euros après rappel de salaire,
En conséquence :
- condamner la société SFR Distribution à Mme [V]:
' 2 518,84 euros à titre de rappel de commissions au titre de 2015 et 2016,
' 251,88 euros à titre de congés payés afférents,
' 1 261,40 euros à titre d'indemnité au titre de la maladie sur le salaire d'août 2016,
' 257,66 euros à titre de solde d'indemnité compensatrice de préavis,
' 25,76 euros, de congés payés afférents,
' 247,30 euros, à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,
' 686,88 euros titre de solde d'indemnité complémentaire de licenciement,
' 5 703,26 euros à titre de solde d'indemnité de solution professionnelle,
' 38 888 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des accords d'entreprise,
' 8 603,88 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage,
' 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance d'incident rendue le 2 septembre 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions adressées le 24 décembre 2019 par la société SFR Distribution.
Par ordonnance rendue le 9 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 29 mars 2022.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS
Sur l'obligation de reclassement
La salariée retient que si l'accord majoritaire portant sur les mesures sociales d'accompagnement du projet de réorganisation de la société SFR Distribution comprenait l'engagement de cette dernière de ne recourir qu'au volontariat et de ne procéder à aucun licenciement, il n'en demeure pas moins qu'afin d'atteindre la réorganisation cible de la société au sein du groupe, cet accord prévoyait des suppressions de postes déterminés et non un simple objectif global de réduction d'effectif.
Elle fait valoir qu'aux termes de la lettre d'éligibilité qui lui a été adressée le 24 novembre 2016, il lui a été notifié que la société entendait supprimer 17 postes relevant de la catégorie des responsables de vente/Ile de France , que dès lors, la société SFR Distribution était tenue d'une obligation de reclassement interne à son égard.
Elle retient qu'elle aurait été en droit de refuser la modification induite de son contrat de travail au cas où il lui aurait été proposé un repositionnement ce qui aurait nécessité son reclassement.
Elle observe que cette obligation de reclassement interne découle de la décision de la Direccte elle- même et des textes applicables. Elle énonce que cette obligation, préalable à la signature du protocole de rupture amiable découle du courrier même de l'employeur énonçant son éligibilité au plan de mobilité professionnelle en raison de la suppression de son poste étant relevé qu'à aucun moment, l'employeur n'indique dans sa lettre que faute d'acceptation du plan de départs volontaires, il n'y aurait pas de licenciement et qu'ainsi son emploi serait préservé.
Elle fait également valoir que l'obligation de reclasser un salarié avant la signature du protocole de rupture amiable découle de l'accord majoritaire dont l'article 1.1 visait la possibilité pour chaque salarié éligible de candidater en interne ce qui impliquait son information sur les postes disponibles correspondant à son profil laquelle n'a pas été donnée, qu'en l'espèce l'employeur s'est contenté d'inviter les salariés éligibles au plan de mobilité professionnelle, en raison de la suppression de postes, à consulter la bourse de l'emploi , qu'elle n'a bénéficie d'aucune mesure destinée à favoriser son maintien dans le groupe, ce alors même que l'employeur ne justifie pas qu'il n'existait pas en son sein, dans les sociétés du groupe, des emplois disponibles de la même catégorie que la sienne ou de catégorie équivalente ou à défaut et sous réserve de son accord, d'une catégorie inférieure, que la société ne peut se prévaloir du fait qu'elle ait candidaté au plan de départ volontaire pour échapper à son obligation, qu'elle n'a eu d'autre choix que d'accepter la rupture du 24 janvier 2017.
L'intéressée fait état d'une violation de l'accord majoritaire soit plus précisément de ses articles 4.1 , 4.2 et 4.3.1.
Elle retient également que si elle avait été informé de ce qu'elle bénéficiait sur son bassin d'emploi d'un emploi sans modification de rémunération et de même qualification, elle n'aurait jamais souscrit au plan de départs volontaires.
Sur ce,
L'accord majoritaire portant sur les mesures sociales d'accompagnement du projet de réorganisation de la société SFR Distribution du 19 octobre 2016 mentionne en en- tête qu'il est conclu en application des dispositions de l'article L 1233-24-1 du code du travail.
Ce dernier énonce , dans sa version applicable en l'espèce, que dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en 'uvre des licenciements.
L'article L.1233-57-2 1° du code du travail, dans sa version applicable en l'espèce, vise que l'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 , ces articles déclinant les obligations de reclassement de l'employeur.
Selon l'article L.1235-7-1 du code du travail, l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.
Il s'en déduit que le juge judiciaire ne saurait ici examiner la question de savoir si l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 comprenait un plan de reclassement interne valable au regard des critères retenus par la Cour de cassation dans sa jurisprudence citée par la salariée laquelle répondait à la question de savoir dans quels cas un plan de reclassement interne devait être intégré au plan de sauvegarde de l'emploi lorsqu'un projet de réduction d'effectifs de l'employeur impliquait la suppression de l'emploi de salariés ne voulant ou ne pouvant quitter l'entreprise dans le cadre d'un plan de départs volontaires.
Sans soulever précisément la question de la validité du plan de départs volontaires ici conclu , Mme [V] fait valoir qu'elle aurait du bénéficier d'un reclassement interne régulier avant de signer le protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique du 24 janvier 2017.
La question ainsi posée a trait à la mise en oeuvre des mesures de l'accord majoritaire et la décision du conseil de prud'hommes a lieu d'être confirmée en ce qu'elle a décidé de statuer sur le fond.
A cet égard, la cour observe à titre liminaire que l'accord vise distinctement les mesures favorisant la mobilité interne et externe des salariés de celles relatives à leur 'repositionnement', la direction s'engageant alors à 'garantir au salarié sur son bassin d'emploi (...), un emploi de même qualification, sans modification de sa rémunération lorsque la Direction n'aura pu maintenir l'emploi du salarié qui aura été supprimé par l'effet de la réorganisation et que le salarié n'aura ni souhaité candidater à un départ volontaire ni accepté une mobilité interne'.
Cette clause exclut le licenciement de la salariée du fait de la suppression de son emploi mais retient la proposition qui lui sera alors faite de la repositionner à défaut d'une mobilité interne ou externe.
Si l'intéressée énonce , dans ce cadre, que ce 'repositionnement' aurait inéluctablement conduit à une modification de son contrat de travail en raison de la suppression de la totalité des postes de distribution dans la région Ile de France' ce qui aurait abouti à son licenciement économique du fait de son refus de la modification de son contrat de travail en lien avec la réorganisation de l'entreprise, son moyen reste conditionnel, sans lien avec les faits soumis à la cour laquelle ne saurait déduire l'obligation de reclassement de l'employeur d'un cas juridiquement distinct de celui se déduisant des faits de l'espèce.
En tout état de cause, il ressort de ses termes que l'accord tout en visant la suppression de 868 postes visait aussi la création de 588 autres et que la proposition de repositionnement susvisée, qui dépendait également du nombre de départs volontaires effectifs, ne pouvait être anticipée, n'ayant vocation à intervenir que si la salariée, à terme, n'avait pas souhaité candidater à un départ volontaire ou à une mobilité interne ou si sa candidature n'avait pas été retenue ce qui ressort clairement des termes de l'accord majoritaire transmis aux salariés par les partenaires sociaux.
S'agissant de la proposition de 'reclassement' dont la salariée retient qu'elle aurait du lui être présentée avant la rupture d'un commun accord du 24 janvier 2017, il est rappelé qu'aux termes de l'article L.1233-24-3 du code du travail, l'accord prévu à l'article L 1233-24-1 ne peut en effet déroger à l'obligation de reclassement incombant à l'employeur en application de l'article L 1233-4 du même code.
Il est rappelé à cet égard que l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 signé après la conclusion de l'accord collectif New Deal du 3 août 2016 prévoit la mise en place d'un plan de mobilité professionnelle dont l'objet est défini par référence à l'article L.1233-24-2 et suivants du code du travail ( page 5) lequel retient l'obligation de reclassement.
La cour observe que dans sa décision du 17 novembre 2016, la Direccte des Hauts de Seine a fait porter son contrôle 'sur le contenu du plan de sauvegarde mentionné aux articles L 1233-61 à 63 du code du travail ' ce qui induit son examen des actions visées à l'article L.1233- 62 du code du travail.
Ainsi qu'il l'a été rappelé, il n'appartient pas au juge judiciaire de procéder à ce même contrôle soit notamment d'examiner les conditions dans lesquelles la société et les organisations syndicales représentatives ont entendu, en l'espèce, décider des modalités d'accès, par les salariés éligibles, aux postes à pourvoir en interne ( page 14 de l'accord), des délais accordés pour candidater sur ces derniers et des mesures d'accompagnement pour ce faire.
A cet égard, il sera uniquement constaté que le plan énonce qu'une lettre d'information sera adressée à chaque collaborateur éligible, chacun pouvant ainsi choisir de préparer ou de formaliser un projet pour présenter sa candidature à une mobilité interne ou externe, les départs volontaires ou ceux s'inscrivant dans le cadre du dispositif de transition de carrière ainsi que les mobilités internes s'échelonnant sur toute la durée du plan, une mise à jour quotidienne des catégories d'emplois éligibles étant disponible auprès de l'espace conseil mobilité.
Le plan décline, s'agissant plus précisément de la mobilité intra groupe (articles 4.1 à 4.3 dont le salarié invoque la violation), les moyens spécifiques mis à la disposition des collaborateurs éligibles soit le recensement des postes disponibles en interne, l'aide à la préparation des candidatures et à la mobilité géographique, les formations possibles, la prise en charge des frais induits, ces candidatures pouvant être présentées pendant une période de huit semaines pour les postes à pourvoir au sein de SFR Distribution et SFR Business Distribution et de quatre semaines pour les postes à pourvoir au sein des autres entités du groupe, les collaborateurs éligibles restant cependant prioritaires à compétence égale par rapport à tout autre collaborateur du groupe passé ce délai. Il est également mentionné que lorsque la candidature du collaborateur est retenue, il dispose d'un délai de huit jours calendaires pour accepter et signer l'avenant à son contrat de travail.
Les mobilités externes sont fondées, pour leur part, sur des projets individuels des salariés volontaires accompagnés de pièces justificatives permettant l'analyse et la validation du projet par la commission de validation des projets, des mesures d'accompagnement étant déclinées dont une indemnité de différentiel de rémunération ou un accompagnement d'un projet finalisé de création/reprise d'entreprise.
La cour observe que dans les termes du courrier du 24 novembre 2016 de la société, il est fait état à Mme [V] de son éligibilité tant au projet de mobilité interne qu'au projet de mobilité externe sur la base du volontariat et de son bénéfice, dans chacun des cas, des mesures d'accompagnement susvisées.
Il s'en déduit une pleine information de la salariée.
Il résulte des pièces produites qu'après validation du projet de l'intéressée par la commission de validation les 17 et 18 janvier 2017 et maintien par Mme [V] de sa candidature par courriel du 18 janvier 2017, cette dernière a signé le 24 janvier 2017 un protocole de rupture d'un commun accord puis le 13 avril 2017 une charte d'engagements réciproques dans le cadre du congé de reclassement.
Il est mentionné dans ces documents que son projet professionnel correspond à une création d'entreprise, l'intéressée bénéficiant de formations en anglais et en conduite de taxi.
Aucun élément ne vient justifier que son consentement au projet professionnel susvisé aurait été contraint ni qu'elle aurait candidaté à des postes en interne.
Sachant dès lors qu'il ressort des éléments en présence que l'intéressée a été informée de sa possibilité de candidater à des postes en interne par le courrier du 24 novembre 2016, qu'elle a eu accès à ces postes dans les termes déclinés dans l'accord du 19 octobre 2016, qu'elle ne justifie pas de candidatures en interne , qu'en tout état de cause, aucun élément ne vient justifier d'un refus systématique et non fondé de telles candidatures avant la validation de son projet et son acceptation de la rupture, les manquements opposés à la société SFR Distribution relativement à son obligation de reclassement en interne ne seront pas retenus.
- Sur la violation des accords d'entreprise,
La salariée fait observer que l'employeur était tenu d'une garantie d'emploi dans le cadre de l'accord sur la garantie d'emploi du 25 juin 2014 et de l'accord de New Deal du 3 août 2016 ce, jusqu'au 1er juillet 2017 et que cette obligation prévalait jusqu'à la signature du protocole de rupture d'un commun accord signé le 8 février 2017.
Elle oppose également à l'employeur la violation de l'accord du 17 décembre 2015 relatif aux mesures d'accompagnement dans le cadre de la transformation au sein de NC Numéricable et de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences GPEC du 1er février 2017
S'agissant de l'accord du 25 juin 2014 , il est ici observé que Mme [V] était salariée de la société SFR Distribution et que celle-ci ne figure pas parmi la liste des sociétés (annexe 1 de l'accord du 25 juin 2014) entrant dans le champ d'application de cet accord sur les garanties au titre de l'emploi dans le cadre du projet de rapprochement de Numericable Group et de SFR conclu entre la société Numericable Group et les organisations syndicales représentatives.
L'accord constitutif d'un 'New deal' pour le pôle Télécoms de SFR Group du 3 août 2016 a trait pour sa part au projet de réorganisation de la distribution et l'accord du 19 octobre 2016 est conclu à sa suite.
Si cet accord du 3 août 2016 étend jusqu'au 1er juillet 2017 la garantie d'emploi déclinée dans
l' accord du 25 juin 2014 au sein de Numericable Group à la société SFR Distribution ( annexe1), la cour observe qu'il y est mentionné (article 1.2) que cette garantie n'empêche pas la mise en place de plan de départs volontaires au sein de cette société, que ( article 1.3) jusqu'au 30 juin 2019, la direction s'engage sauf exceptions, à ce que les ruptures pour motif économique s'effectuent uniquement sur la base du volontariat, que ( article 1.4) si les sociétés parties du pôle Télécoms s'engagent à ce qu'aucun plan de départs volontaires pour motif économique ne soit mis en place avant le 1er juillet 2017, les filiales de la Distribution sont exclues de ce dispositif, la direction s'engageant ( article 1.5) à ce que les mesures d'indemnisation et d'accompagnement des plans de départs volontaires pour motif économique mis en 'uvre en 2016 et 2017 soient celles prévues au titre III de l'accord-cadre de méthode et de garanties sociales de SFR du 29 mars 2013 (ou PDV SFR 2013) annexé à l'accord de 2016.
Il s'en déduit que l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 n'ayant traité que de l'accompagnement à la mobilité interne et externe du plan de réduction des effectifs consécutif au projet de réorganisation des activités de distribution, ce dans les termes exhaustifs ici retenus, les accords sur la garantie d'emploi du 25 juin 2014 et de New Deal du 3 août 2016 n'ont pas été violés, la cour relevant en outre que dans le protocole de rupture d'un commun accord du 24 janvier 2017, la salariée énonce, sans justifier d'un vice de consentement à cet égard, renoncer en tout état de cause à toute garantie d'emploi qu'elle tient d'accords collectifs en vigueur.
S'agissant de l'accord du 17 décembre 2015 , la cour relève que ce dernier , antérieur à celui du 3 août 2016, signé entre la société NC Numéricable et les organisations syndicales représentatives, a trait à un socle de mesures d'accompagnement devant être mises en 'uvre dans le cadre des projets prioritaires faisant l'objet d'une procédure d'information/consultation du comité d'entreprise de la société NC Numéricable.
Il y est d'ailleurs à cette époque envisagé la possibilité pour les salariés de la société NC Numéricable d'accepter une proposition de poste au sein d'un espace SFR des filiales de distribution (page 15) .
Le champ d'application et l'objet de cet accord ne permettent en tout état de cause pas de l'opposer dans les présents débats.
L'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences GPEC pour le pôle Télécom de SFR Group du 1er février 2017 est pour sa part applicable à la société SFR Distribution sous réserve cependant de son titre 9 'modalités spécifiques de la GPEC de février au 30 juin 2017"ce, étant tenu compte de ce qu'il n'est plus prévu de plan de départs volontaires s'agissant de la société SFR Distribution à compter du 1er juillet 2017 ( page 8).
Cet accord du 1er février 2017 est entré en vigueur à compter de l'accomplissement de ses formalités de dépôt tandis que la rupture d'un commun accord du contrat de travail de Mme [V] était régi par les dispositions de l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 selon un dispositif dont le protocole du 24 janvier 2017 a été la dernière étape.
Mme [V] fait de nouveau valoir à ce stade que les articles 4.1, 4.2, 4.3.1 de l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 n'ont pas été respectés.
Cependant, il a d'ores et déjà été retenu par la cour que la salariée a bénéficié, dans les formes négociées par les partenaires sociaux, de l'information requise sur les postes disponibles en interne, que sa situation a fait l'objet d'un examen ayant débouché sur un nouvau projet professionnel , la cour observant que le plan prévoyait la possibilité de formations en cas de nécessité laquelle a été ici prise en compte.
Ces éléments conduiront à confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation en paiement de l'employeur pour non-respect des accords d'entreprise.
- sur le rappel de salaire au titre des commissions non perçues
Mme [V] fait ici valoir que durant l'année 2015, le service de vente SFR a été désorganisé en raison de la restructuration en cours du fait de son rachat par la société Numéricable, que de ce fait, les ingénieurs commerciaux ont connu des difficultés pour atteindre leurs objectifs. Elle ajoute que les objectifs 2015 et 2016 lui ont été assignés tardivement voire pas du tout. Elle fait état des rattrapages opérés concernant uniquement la prime qualitative. Elle sollicite un rappel de commissions pour les années 2015 et 2016.
Le contrat de travail de Mme [V] retient que celle-ci , en sa qualité d'ingénieur commercial, perçoit une rémunération mensuelle forfaitaire fixe d'un montant de 2372 € par 12 mois soit une rémunération annuelle brute forfaitaire fixe de 28464 € outre, le cas échéant, une rémunération variable dès lors qu'elle aura atteint pleinement au cours de l'année de référence les objectifs qui lui auront été fixés, représentant 30% de son salaire fixe annuel se décomposant de la façon suivante : une partie variable quantitative représentant 25 % de son salaire fixe annuel et une partie variable qualitative représentant 5 % de son salaire fixe annuel.
Par courrier du 20 mai 2016, l'employeur a notifié à Mme [V] que sa rémunération annuelle globale brute à 100 % des objectifs atteints était d'un montant de 43'562,52 euros, cette rémunération annuelle brute se décomposant comme suit : un salaire mensuel fixe de base brut équivalent temps plein d'un montant de 2793,11 euros payé sur 12 mois et un variable basé sur des objectifs commerciaux de 10'055,20 euros bruts dès lors que l'ensemble des objectifs fixés à titre individuel par la direction au cours de la période de référence auront été pleinement atteints.
Il est rappelé que les objectifs définis unilatéralement par l'employeur doivent être portés à la connaissance du salarié en début d'exercice. Les objectifs doivent également correspondre à des normes sérieuses et raisonnables, compatibles avec les moyens donnés.
Or en l' espèce, il découle des courriels produits aux débats que le 5 mai 2015 la direction informait les ingénieurs commerciaux d'une évaluation des résultats/objectifs commerciaux pour le premier trimestre et de sa décision de revoir les grilles de rémunération de la prime de ce trimestre tandis que le 6 mai 2015, M. [L], supérieur de la salariée, reconnaissait que les objectifs 2015 n'avaient pas encore été communiqués, la direction mentionnant également par courriel du 9 juillet 2015 que les objectifs du troisième trimestre n'étaient pas encore définis à cette date.
S'agissant de l'année 2016, il est produit un document intitulé 'retour sur le preread' déclinant des objectifs pour le premier trimestre 'sous réserve de changements', un courriel de la direction du 1er avril 2016 faisant état de l'élaboration au cours des objectifs du deuxième trimestre, ces derniers n'étant communiqués que le 26 avril.
Etant observé qu'il se déduit de ces éléments que la société SFR Distribution n'a pas donné à sa salariée et dans les délais requis la pleine information nécessaire pour atteindre des objectifs clairs et précis, l'employeur sera condamné à lui régler un rappel de commissions au regard du manque à gagner s'en déduisant et étant par ailleurs tenu compte de ses arrêts de travail pour maladie durant les années 2015 et 2016.
Il s'en déduit la condamnation de la société SFR Distribution à régler à Mme [V], au titre de l'année 2015, la somme de 1451,12 euros euros et , au titre de l'année 2016, une somme d'un montant de 1067,70 euros euros soit une somme totale d'un montant de 2518,84 euros outre 251,88 euros au titre des congés payés afférents.
-Sur le rappel de salaire au titre du mois d'août 2016
Il se déduit de l'attestation de paiement des indemnités journalières que Mme [V] a été en arrêt de travail du 1er au 6 juillet 2016 puis du 16 au 22 juillet 2016. Sur ces jours, 8 ont fait l'objet d'un règlement à l'employeur subrogé pour un montant de 338,80 euros, l'attestation faisant ,par ailleurs, état de cinq jours de carence durant ces mêmes périodes.
Le bulletin de salaire du mois d'août 2016 vise le paiement d'une somme de 823,36 euros au titre de la prévoyance et de cinq jours de carence pour un montant de 450,50 euros, la salariée explicitant, sans être contredite, que les sommes relatives à la prévoyance étaient relatives à une période antérieure.
Il est énoncé à l'article 4.3.1 de la convention collective des télécommunications qu'après 6 mois d'ancienneté et pendant 45 jours, le salarié, en arrêt maladie, recevra la rémunération nette qu'il aurait perçue s'il avait continué de travailler.
Dans ces conditions, et sachant que l'employeur a prélevé la somme de 1711,90 euros au titre de son absence dans le cadre du bulletin de salaire du mois d'août 2016, il y a lieu de faire droit à sa demande de rappel de la somme de 1261,40 euros.
- sur le rappel d'indemnités de rupture
L'article 12.2.2 de l'accord majoritaire retient que le salaire brut utilisé pour calculer le montant de l'indemnité complémentaire est le salaire brut moyen versé sur les douze derniers mois précédant la rupture, primes, bonus, heures supplémentaires , astreintes et variable inclus et exclusion faite de tout élément perçu qui ne correspond pas à la contrepartie du travail du salarié sans tenir compte des périodes d'indemnisation maladie et à l'exclusion des remboursements de frais.
La période de référence s'étend en l'espèce de janvier à décembre 2016.
Sur la base de la rémunération visée à l'article 12.2.2 perçue sur ces douze mois et après ajout du rappel de commissions durant la période de référence, la société SFR Distribution sera condamnée à régler à Mme [V] les sommes suivantes, sur la base d'un salaire de référence de 4066,33 euros par mois :
- 257,66 euros à titre de solde d'indemnité compensatrice de préavis et 25,76 euros au titre des congés payés afférents,
- 247,30 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 686,88 euros à titre de solde d'indemnité complémentaire de licenciement,
- 5703,26 euros à titre de solde d'indemnité de solution professionnelle
- sur la violation de la priorité de réembauche
Mme [V] fait ici valoir qu'elle a écrit à son employeur le 27 avril 2017 afin de lui indiquer qu'elle souhaitait bénéficier de la priorité de réembauche, que si par lettre du 25 septembre 2017, l'employeur lui a adressé une liste d'une trentaine de poste de conseiller de vente, aucune proposition ne lui a été faite concernant des postes d'ingénieur commercial, d'ingénieur technico-commercial pourtant disponibles. Elle observe qu'elle n'a plus été destinataire d'aucune offre, qu'n outre, le 5 mai 2018, elle a adressé sa candidature pour un poste d'ingénieur commercial PME qui a fait l'objet d'un rejet dans des termes contestables.
L'article L.1233-45 du code du travail retient que le salarié, licencié pour motif économique, bénéficie d'une priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat s'il en fait la demande au cours de ce même délai.
Dans ce cas, l'employeur informe le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. En outre, l'employeur informe les représentants du personnel des postes disponibles.
Le salarié ayant acquis une nouvelle qualification bénéficie également de la priorité de réembauche au titre de celle-ci, s'il en informe l'employeur.
L'article 5 du protocole de rupture amiable vise que l'intéressé bénéficie d'une priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date à laquelle cesseront toutes les relations contractuelles entre les parties à condition d'avoir informé la société , dans ce délai, de son désir d'user de cette priorité.
Or, en l'espèce, les pièces produites conduisent à constater que l'employeur a uniquement proposé le 25 septembre 2017 à Mme [V] un poste de conseiller de vente.
La société a rejeté le 5 mai 2018 sa candidature au poste d'ingénieur commercial PME ce alors qu'il est justifié aux débats de postes d'ingénieur commercial publiés en interne courant 2018 lesquels avaient vocation à être proposés à la salariée, la cour déduisant de la perception par l'intéressée d'une indemnité de solution professionnelle, le terme anticipé de son congé de reclassement et sa légitimité dans ce cadre à bénéficier de la priorité de réembauche pour le moins à la date du 5 mai 2018.
Ces éléments conduiront à condamner la société SFR Distribution à payer à Mme [V] la somme de 8132,66 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la priorité de réembauche.
Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.
Il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du dispositif.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de la salariée au titre du rappel de commissions, du rappel de rémunération du mois d'août 2016, du solde d'indemnités de rupture et de l'indemnité pour violation de la priorité de réembauche;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
CONDAMNE la société SFR Distribution à payer à Mme [M] [V] les sommes suivantes:
:-2518,84 euros à titre de rappel de commissions 2015 et 2016 et 251,88 euros au titre des congés payés afférents,
-1261,40 euros à tire de rappel de rémunération au mois d'août 2016,
- 257,66 euros à titre de solde d'indemnité compensatrice de préavis et 27,76 euros au titre des congés payés afférents,
- 247,30 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 686,88 euros à titre de solde d'indemnité complémentaire de licenciement,
- 5703,26 euros à titre de solde d'indemnité de solution professionnelle,
-8132,66 euros à titre d'indemnité pour non respect de la priorité de réembauche,
DIT que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la société SFR Distribution de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société SFR Distribution à payer à Mme [M] [V] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
CONDAMNE la société SFR Distribution aux dépens .
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signé par Madame Isabelle VENDRYES, Président, et par Madame BOUCHET-BERT Elodie,Greffière,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,