COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 35A
13e chambre
ARRET N°
PAR DEFAUT
DU 14 JUIN 2022
N° RG 21/02047
N° Portalis DBV3-V-B7F-UNAI
AFFAIRE :
[V] [U]
....
C/
[Z] [J]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Décembre 2020 par le Tribunal de Grande Instance de versailles
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 19/03627
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Isabelle DONNET
TJ VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATORZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [V] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Madame [F] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]
S.C.I. FA
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Isabelle DONNET de la SELARL FIDU-JURIS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 13
APPELANTS
****************
Madame [Z] [J]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Défaillante
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,
Suivant statuts en date du 24 mai 2000, M. [N] [J] et sa soeur Mme [Z] [J], ont constitué la SCI Fa. Le capital social, d'un montant de 200 euros, était divisé en 100 parts de 2 euros chacune, dont 51 pour M. [J] et 49 pour Mme [J].
La société a notamment pour objet l'acquisition, l'administration et la gestion par voie de location ou autrement d'un bien immobilier situé [Adresse 2], acquis le 17 août 2000, au prix d'un million de francs, soit 152 449 euros.
L'instance par laquelle Mme [J] et son concubin ont fait assigner la SCI Fa et M. [J] devant le tribunal de grande instance de Versailles, afin d'obtenir notamment la dissolution de la société, a fait l'objet d'une ordonnance de radiation en date du 30 octobre 2012.
A l'initiative d'un créancier personnel de M. [J], les parts sociales que ce dernier détenait dans la SCI Fa ont été saisies et judiciairement vendues à M. [V] [U] selon procès-verbal de vente publique en date du 17 mai 2013.
Selon procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du 2 août 2013, Mme [F] [U] a été désignée gérante de la SCI.
Par acte du 1er octobre 2013, la SCI Fa a fait assigner Mme [J] afin d'obtenir son expulsion du bien immobilier situé à Bezons et sa condamnation au paiement de l'arriéré des loyers et d'une indemnité d'occupation devant le tribunal d'instance de Sannois qui, par jugement du 6 mars 2014 confirmé par un arrêt du 18 août 2015, a débouté la SCI Fa de l'ensemble de ses demandes.
Après rétablissement de l'affaire radiée le 30 octobre 2012 et assignation en intervention forcée de M. [U] et de Mme [U], en sa qualité de nouvelle gérante de la SCI Fa, le tribunal de grande instance de Versailles, par jugement en date du 14 juin 2016, a notamment constaté l'accord des parties sur le retrait de Mme [J] de la SCI Fa et avant dire droit sur l'évaluation du passif, de l'actif et des créances entre associés, a ordonné une expertise confiée à M. [O] [H], expert judiciaire, avec pour mission de procéder à l'estimation du bien immobilier, de calculer l'actif et le passif de la SCI Fa et d'évaluer la valeur des parts sociales détenues par Mme [J] dans la SCI ; il a condamné Mme [J] à payer à la SCI Fa la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Après dépôt le 30 juin 2017 du rapport de l'expert judiciaire et réinscription de l'affaire au rôle le 7 juin 2019, le tribunal judiciaire de Versailles, par jugement contradictoire du 10 décembre 2020, a :
- déclaré irrecevables les demandes de la SCI Fa et de M. [U] tendant à voir ordonner l'expulsion de Mme [J] ainsi que sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation;
- dit que la demande de Mme [J] visant à voir reconnaître qu'elle occupe le bien au titre d'un prêt à usage est, par suite, sans objet ;
- rejeté les autres demandes de la SCI Fa et de M. [U] ;
- rejeté les autres demandes de Mme [J] ;
- condamné la SCI Fa et Mme [J] à payer chacune la moitié des dépens incluant les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de maître Ondine Carro, avocat.
Par déclaration du 26 mars 2021, la SCI Fa ainsi que M.[V] [U] et sa fille, Mme [F] [U], ont interjeté appel du jugement. La déclaration d'appel a été signifiée le 28 mai 2021, par acte d'huissier déposé à l'étude, à Mme [J] qui n'a pas constitué avocat.
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 24 juin 2021 puis signifiées le 6 juillet 2021 à la personne de Mme [J], les appelants demandent à la cour de :
- infirmer le jugement et statuant à nouveau,
- juger que les parts détenues par Mme [J] à hauteur de 49 % dans le capital de la SCI Fa seront évaluées à la somme de 105 018 euros, sous réserve des indemnités d'occupation à la charge de Mme [J] ;
- juger que le prix de cession des parts sociales de Mme [J] ne lui sera versé que postérieurement à la vente du bien immobilier situé [Adresse 2] ;
- ordonner l'expulsion de Mme [J], et de tous occupants de son chef, au besoin, avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;
- ordonner le transport et la séquestration des meubles, objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meuble qu'il désignera ou dans tout autre lieu, et ce en garantie de toutes sommes qui pourront être dues ;
- juger que Mme [J] et tous occupants de son chef ne pourront bénéficier de la trêve hivernale en application de l'article L. 613-3 du code de la construction ;
- condamner Mme [J] au paiement d'une indemnité d'occupation de 1 000 euros jusqu'à complète libération des lieux ;
- condamner Mme [J] à régler à la SCI Fa des indemnités d'occupation pour un montant de 110 000 euros, suivant décompte arrêté au mois de juin 2021, sauf à parfaire jusqu'à complète libération des lieux ;
- condamner Mme [J] à régler à M. [U] une somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, pour résistance abusive ;
- condamner Mme [J] à régler à la SCI Fa une somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal en vigueur ;
- condamner Mme [J] aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaire.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 février 2022.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des appelants, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
Il résulte de l'article 472 du code de procédure civile que si en appel, l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit aux prétentions de l'appelant que dans la mesure où il les estime régulières, recevables et bien-fondées.
Pour statuer sur l'appel lorsque l'intimé n'a pas conclu, la cour doit examiner les motifs du jugement relatifs aux prétentions de cette partie en première instance.
Sur la valorisation des parts sociales :
Les appelants, sur le fondement des dispositions de l'article 1869 du code civil et des éléments recueillis à l'occasion de l'expertise judiciaire dont ils acceptent les conclusions concernant l'évaluation de la maison d'habitation à 375 000 euros, indiquent que s'ils ne contestent pas la créance de M. [M] [J] à hauteur de la somme totale de 160 767 euros, ils s'opposent en revanche à la créance revendiquée par Mme [J] à hauteur de 32 500 euros ; ils observent qu'elle n'a communiqué aucune pièce permettant de qualifier les versements qu'elle a effectués de contribution à l'emprunt alors qu'elle les a elle-même intitulés 'loyers'. Ils demandent à ce que le montant des parts détenues par l'intimée soit chiffré à 105 018 euros, sous réserve des indemnités d'occupation dont le paiement est sollicité et aussi à ce que le prix de cession des parts sociales ne pourra lui être versé que lorsque que le bien de la SCI sera vendu. Ils précisent qu'en application de l'article 1844-5 du code civil, il faut qu'avant la dissolution, toutes les parts de la SCI aient été réunies en une seule main ce qui signifie le rachat préalable par M. [U] des parts de son associée de sorte qu'il n'a pas pu dissoudre la SCI tant que celle-ci possède un bien et qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir entrepris aucune démarche.
Devant le premier juge, Mme [J] a demandé à ce que le bien de la SCI ne soit pas cédé en dessous de la valeur proposée par l'expert, soit 375 000 euros net vendeur et a sollicité que d'une part la créance de M. [M] [J] soit fixée à 104 390,71 euros correspondant aux seules sommes qu'il a versées à partir de 2006 en remboursement du prêt et de la taxe foncière et que d'autre part sa créance soit fixée à la somme de 32 500 euros dès lors que la SCI a été déboutée de ses demandes pour faire reconnaître l'existence d'un bail ; elle a évalué la valeur de ses parts à 132 599 euros, précisant ne pas réclamer le remboursement des travaux d'amélioration qu'elle a fait effectuer.
En application de l'article 1869 du code civil, sans préjudice des droits des tiers, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, dans les conditions prévues par ses statuts ou, à défaut, après autorisation donnée par une décision unanime des autres associés, ce retrait pouvant être également autorisé pour justes motifs par une décision de justice. A moins qu'il ne soit fait application de l'article 1844-9 (3ème alinéa), l'associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d'accord amiable, conformément à l'article 1843-4.
Les associés, comme constaté par le jugement du 14 juin 2016, sont d'accord pour le retrait de Mme [J] de la SCI Fa.
C'est dans ce cadre et en application de l'article 1843-4 du code civil qu'une expertise judiciaire a été ordonnée à laquelle il convient de se référer pour l'évaluation des parts de Mme [J], étant observé que les parties n'étant pas parvenues à un accord, M. [U] n'a pu procéder au remboursement de la valeur des droits sociaux de son associée ; en outre, le bien immobilier n'a pu être mis en vente, M. [J] justifiant que les agences immobilières qu'il avait contactées en 2016 n'ont pu procéder à la visite du bien immobilier et que les mandats de vente donnés par la SCI les 13 mai 2017 et 20 mars 2019 n'ont pu aboutir.
Il convient, infirmant le jugement, de juger les appelants fondés en leur demande d'évaluation des parts sociales de la SCI.
L'actif de la SCI est constitué du bien immobilier qu'elle a acquis à Bezons et qui a été évalué par l'expert, après étude des ventes intervenues dans le même secteur, à la somme de 375 000 euros, valeur admise par les deux associés de la SCI.
Selon le calcul détaillé par l'expert et les pièces qu'il a pu recueillir, il est constant que M. [M] [J], père des deux premiers associés de la SCI, a assuré le paiement des échéances du prêt immobilier contracté pour acquérir le bien dont elle est propriétaire et des taxes foncières, ce qui a été admis tant par Mme [J] que par M. [U] même si quelques justificatifs ont fait défaut.
De 2000 à 2015, la créance de M. [J] à l'égard de la SCI s'élève à la somme de 160 767 euros admise par les appelants ; si Mme [J] s'est dit opposée à toute créance de son père sur la période de 2000 à 2005 durant laquelle il a occupé la maison, son avocat ayant expliqué à l'expert que les paiements alors effectués par M. [J] auraient constitué 'en quelque sorte un loyer payé par M. [J] à la SCI', elle n'a fourni à l'expert aucun élément pour justifier de l'existence d'un bail de sorte que la créance de M. [J] devra être retenue au montant de 160 767 euros.
L'expert, au vu des pièces communiquées, a considéré qu'il était justifié du paiement par Mme [J] d'une somme totale de 32 500 euros entre 2006 et 2012 ; dès lors qu'il a été jugé par le tribunal d'instance, confirmé en appel, qu'aucun bail n'avait été convenu entre la SCI Fa et Mme [J], il ne peut être considéré que ces versements ont été effectués à titre de 'loyers', peu important que les paiements effectués à ce titre soient identifiés sous cette mention sur les relevés bancaires de Mme [J] de sorte qu'il doit être retenu que cette dernière est créancière de la SCI à hauteur de 32 500 euros.
L'actif net de la SCI s'établit par conséquent à la somme de 214 233 euros et la valeur des parts de Mme [J] à la somme de 104 794 euros (49 % de 214 233 euros) telle qu'elle figure dans les conclusions de l'expert ; la cour ne pouvant statuer infra petita, il sera retenu la valeur de 105 018 euros proposée par les appelants.
Sur la demande d'expulsion de Mme [J] :
Les appelants qui précisent que M. [U] a acquis aux enchères les parts de M. [J] dans la SCI dans le but de réaliser un investissement immobilier, soulignent que malgré son souhait de vendre le bien immobilier dont il a fait part à Mme [J], celle-ci s'oppose à la réalisation des visites qu'ont tenté d'organiser les agences immobilières auxquelles mandat a été donné depuis 2016. Ils exposent, après avoir détaillé dans quels cas un associé d'une SCI peut occuper le bien immobilier appartenant à celle-ci, que Mme [J] ne peut revendiquer aucun droit et aucun titre lui permettant d'occuper la maison dont la SCI est propriétaire et d'en bloquer l'accès à de potentiels acquéreurs de sorte que la SCI Fa est bien fondée à solliciter son expulsion.
Ils soutiennent que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal la demande d'expulsion et de condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation jusqu'à la libération des lieux ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 18 août 2015 ; ils estiment en effet que la cour d'appel n'a pas examiné leur demande sollicitant qu'elle soit qualifiée d'occupante sans droit ni titre en 2015 dès lors qu'elle l'a écartée sans la motiver, que la cause juridique de la demande actuelle est différente et que la situation litigieuse a été modifiée depuis 2015 en raison du retrait d'un des deux associés autorisé par le jugement rendu en 2016 en application de l'article 1869 du code civil.
Devant les premiers juges Mme [J] qui a soutenu qu'elle occupait le bien immobilier au titre d'un prêt à usage et que la preuve n'était pas rapportée que le but de la société était la rentabilité locative alors que le bien a été occupé exclusivement par des membres de la famille, d'abord par son père puis par elle-même, a exposé que la SCI Fa avait déjà été déboutée de ses demandes par le tribunal d'instance dont le jugement a été confirmé en appel puis de nouveau par le tribunal de grande instance de Pontoise compte tenu de l'autorité de la chose jugée attachée aux précédentes décisions.
Conformément aux dispositions de l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.
La cause au sens de cet article est l'ensemble des faits existants lors de la formation de la demande de sorte qu'il n'y a pas autorité de la chose jugée lorsqu'un fait ou un acte postérieur à la décision dont l'autorité est invoquée modifie la situation antérieurement reconnue en justice.
La présente cour, dans son arrêt du 18 août 2015, a débouté la SCI Fa de sa demande tendant à faire constater que Mme [J] était occupante sans droit ni titre, à ordonner son expulsion et à la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 500 euros à compter du mois d'avril 2010.
Si les appelants ne peuvent utilement arguer du fait que la cour a rejeté cette demande au seul motif qu'elle n'était pas en possession des pièces nécessaires pour statuer, ils sont en revanche bien fondés à invoquer la modification de la situation depuis cette précédente décision de la cour dans la mesure où depuis l'arrêt de 2015, le tribunal, dans son jugement du 14 juin 2016, a constaté l'accord des parties sur le retrait de Mme [J] de la SCI FA, au visa de l'article 1869 du code civil.
Par conséquent, la demande d'expulsion de Mme [J] ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 18 août 2015 de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a jugé cette demande irrecevable.
Depuis qu'elle a accepté de se retirer de la SCI Fa Mme [J] ne dispose d'aucun droit pour continuer d'occuper le bien immobilier lui appartenant, étant observé que pour la période antérieure à juin 2016, le tribunal d'instance, confirmé par l'arrêt précité de la cour, a jugé que la preuve n'était pas rapportée de l'existence d'un bail verbal depuis 2006, que les statuts de la SCI ne prévoient pas l'occupation gratuite par un de ses associés du bien immobilier acquis par la SCI et que Mme [J] qui faisait état d'un prêt à usage n'a pas évoqué au cours des débats antérieurs une autorisation qu'elle aurait eue, par une assemblée générale des associés conformément aux dispositions des articles 1853 et 1854 du code civil, d'occuper le bien à titre gratuit.
Par conséquent son expulsion devra être ordonnée, étant précisé que contrairement à ce que les appelants sollicitent l'intimée pourra bénéficier de la trêve hivernale prévue à l'article L.412-6 du code des procédures civiles d'exécution dès lors que la mesure d'expulsion n'est pas prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui par voie de fait ; cette demande sera rejetée.
Sur la demande d'indemnité d'occupation :
Les appelants qui observent que les premiers juges n'ont pas répondu à cette demande, font valoir que Mme [J] qui occupe la maison de la SCI depuis 2006 et qui a réglé une somme mensuelle de 500 euros jusqu'en 2010 puis a encore effectué quelques versements jusqu'en avril 2012, ne peut se prévaloir d'aucun titre et d'aucun droit lui permettant d'occuper gratuitement et privativement cette maison dont la valeur locative s'élevait en 2011 à 1 000 euros. La SCI Fa sollicite la condamnation de l'intimée à lui payer les indemnités d'occupation suivantes :
- du 1er juin 2011, le premier commandement de payer ayant été délivré le 27 mai 2011, au mois de mai 2013, date à laquelle les parts sociales de M. [N] [J] ont été vendues, une indemnité d'occupation mensuelle de 500 euros pour tenir compte du caractère familial de la SCI sur cette période, soit 13 000 euros ;
- à compter de juin 2013, la SCI ayant perdu son caractère familial, une indemnité d'occupation mensuelle de 1 000 euros, soit une somme de 97 000 euros arrêtée au 1er juin 2021.
Les premiers juges n'ont pas statué au fond sur cette demande qu'ils ont jugé irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt précité du 18 août 2015, Mme [J] sollicitant subsidiairement qu'un expert soit désigné pour évaluer cette indemnité si son principe était retenu.
Pour les motifs déjà développés à propos de la demande d'expulsion, la SCI Fa ne peut se voir opposer l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 18 août 2015, tout au moins pour les demandes postérieures au jugement du 14 juin 2016 qui a pris acte de l'accord des parties sur le retrait de Mme [J] de la SCI.
Cependant, pour les indemnités d'occupation réclamées antérieurement au 14 juin 2016, l'arrêt du 18 août 2015 qui a débouté la SCI Fa de toute demande d'indemnité d'occupation fondée sur l'occupation sans droit ni titre de Mme [J] est définitif de sorte que pour ces demandes il a autorité de la chose jugée, peu important les motifs qui ont fondé la décision de ce chef ; il convient de juger la SCI Fa irrecevable en ses demandes relatives aux indemnités d'occupation antérieures au 14 juin 2016.
Pour la période postérieure, il est constant, comme jugé à propos de l'expulsion que Mme [J], qui a accepté son retrait de la SCI, n'a aucun droit à se maintenir gratuitement dans les lieux qu'elle occupe toujours.
S'agissant de la valeur locative du bien loué que la SCI Fa demande de fixer à 1 000 euros, il n'en est pas suffisamment justifié par l'attestation du 22 février 2011 fournie par les appelants, dans laquelle l'agence immobilière qui l'évalue entre 1 000 et 1 100 euros ne précise pas si elle a préalablement visité le bien immobilier.
S'agissant d'un bien construit en 1981, d'une surface de 92 m² dont 30 m² correspondent à deux chambres créées au sous-sol de l'habitation et éclairées par des soupiraux, situé dans un quartier pavillonnaire et dans un état d'usage normal quand l'expert l'a visité, il convient de fixer l'indemnité d'occupation à compter du 14 juin 2016 à la somme mensuelle de 800 euros et de condamner Mme [J] au paiement de cette somme jusqu'à complète libération des lieux.
Il convient par conséquent de condamner Mme [J] à payer à la SCI Fa la somme de 48 400 euros correspondant aux indemnités d'occupation entre le 14 juin 2016 et le 30 juin 2021 avec intérêts au taux légal à compter du 24 juin 2021, date de ses écritures en appel.
Sur la demande de dommages et intérêts de M. [U] :
M. [U] fonde cette demande sur l'article 1240 du code civil et l'attitude incohérente de Mme [J] qui a demandé son retrait de la SCI mais bloque toutes les visites et empêche ainsi la vente
du bien ; il considère que cette résistance est abusive et observe que ce refus d'accepter ces visites en vue de la vente est constitutif d'une faute qui lui cause un préjudice constitué par l'absence de tout revenu locatif, l'impossibilité d'accès à la maison étant directement à l'origine de l'impossibilité de vendre. Il ajoute que compte tenu d'un taux de rendement locatif moyen d'environ 5 % il aurait pu percevoir des revenus locatifs d'environ 6 000 euros par an, soit 30 000 euros depuis 2016.
Dès lors que les premiers juges ont déclaré irrecevables les demandes de la SCI Fa et de M. [U] tendant à voir ordonner l'expulsion de Mme [J] et condamner celle-ci au paiement d'une indemnité d'occupation, M. [U] ne peut valablement soutenir que la résistance de Mme [J] était abusive, un débat juridique existant sur l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 18 août 2015. Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt par défaut, dans les limites de l'appel,
Infirme le jugement du 10 décembre 2020 sauf en ce qu'il débouté M. [V] [U] de sa demande de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau,
Evalue à la somme de 105 018 euros la valeur des parts détenues par Mme [Z] [J] à hauteur de 49 % du capital social de la SCI Fa, sous réserve des indemnités d'occupation mises à la charge de cette dernière ;
Dit que le prix de cession lui sera versé postérieurement à la vente du bien immobilier situé [Adresse 2] ;
Ordonne l'expulsion de Mme [Z] [J] et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;
Ordonne le transport et la séquestration des meubles, objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meuble qu'il désignera ou dans tout autre lieu, et ce en garantie de toutes sommes qui pourront être dues ;
Dit la SCI Fa irrecevable en sa demande au titre des indemnités d'occupation antérieurement au 14 juin 2016 ;
Condamne Mme [Z] [J] au paiement d'une indemnité d'occupation de 800 euros à compter du 14 juin 2016 et jusqu'à la complète libération des lieux ;
Condamne Mme [Z] [J] à payer à la SCI Fa la somme de 48 400 euros correspondant aux indemnités d'occupation sur la période du 14 juin 2016 au 30 juin 2021 avec intérêts au taux légal à compter du 24 juin 2021 ;
Déboute la SCI Fa de toute autre demande ;
Condamne Mme [Z] [J] à payer à la SCI Fa une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [Z] [J] aux dépens de première instance qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire et d'appel ;
Dit qu'ils seront recouvrés, s'agissant des dépens de première instance et des frais d'expertise, conformément aux règles de l'aide juridictionnelle dont bénéficiait Mme [J] en première instance, tant en 2016 qu'en 2020.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le conseiller,