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23/06/2022 | FRANCE | N°19/03920

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 23 juin 2022, 19/03920


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 JUIN 2022



N° RG 19/03920

N° Portalis DBV3-V-B7D-TQ5F



AFFAIRE :



[E] [K]



C/



SAS SEGULA MATRA AUTOMOTIVE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : E

N° RG : F 17/03236


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Me Stéphanie ZAKS



Me Avi BITTON



le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT TROIS JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'a...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 JUIN 2022

N° RG 19/03920

N° Portalis DBV3-V-B7D-TQ5F

AFFAIRE :

[E] [K]

C/

SAS SEGULA MATRA AUTOMOTIVE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : E

N° RG : F 17/03236

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Stéphanie ZAKS

Me Avi BITTON

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant,fixé au 16 juin 2022, puis prorogé au 23 juin 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Monsieur [E] [K]

né le 18 septembre 1970 à [Localité 6]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par : Me Avi BITTON de la SELARL AVI BITTON, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0339

APPELANT

****************

SAS SEGULA MATRA AUTOMOTIVE

N° SIRET : 844 926 311

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par : Me Stéphanie ZAKS de la SELEURL Cabinet ZAKS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0277,substituée par Me LEPERLIER Amélie,avocate au barreau de Paris.

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie

DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT,

Greffier lors de la mise à disposition: Mme Dorothée MARCINEK

Rappel des faits constants

La SASU Segula Matra Automotive, dont le siège social est situé à [Localité 5] dans les Hauts- de-Seine, est spécialisée dans l'automobile. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec.

M. [E] [K], né le 8 septembre 1970, a initialement été engagé par la société AAA Industries le 29 avril 2008, selon contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d'ingénieur développement.

Le 1er janvier 2016, consécutivement au rachat de la société AAA Industries par la société Segula Matra Automotive dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, le contrat de travail de M. [K] a été transféré à cette dernière.

En mars 2017, M. [K] a été affecté au sein du service recrutement de la société Segula Matra Automotive.

Par courrier du 14 juin 2017, la société Segula Matra Automotive a convoqué M. [K] à un entretien préalable qui s'est déroulé le 22 juin 2017. Cette convocation était assortie d'une mise à pied à titre conservatoire.

Puis, la société Segula Matra Automotive a notifié à M. [K] son licenciement pour faute grave, par courrier du 27 juin 2017.

M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre en contestation de son licenciement, par requête reçue au greffe le 25 octobre 2017.

La décision contestée

Par jugement contradictoire rendu le 16 septembre 2019, la section encadrement du conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- écarté les pièces numérotées 18 et 19 de l'employeur en raison du non-respect des formes prescrites par l'article 202 du code de procédure civile,

- dit et jugé que le licenciement pour faute grave de M. [K] opéré par la SASU Segula Matra Automotive est bien fondé,

en conséquence,

- débouté M. [K] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles,

- condamné M. [K] aux entiers dépens,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

M. [K] avait demandé au conseil de prud'hommes :

- à titre liminaire écarter les pièces adverses n°18 et 19 des débats en raison du non-respect des formes prescrites par l'article 202 du code de procédure civile,

d'autre part,

- requalifier le licenciement de M. [K] en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- indemnité conventionnelle de licenciement : 12 916,26 euros,

- indemnité de préavis : 12 663 euros,

- congés payés afférents :1 266,30 euros,

- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (équivalent à 18 mois de salaire) : 75 978 euros,

- dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire :10 000 euros,

- dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 10 000 euros,

- annuler la mise à pied conservatoire prononcée à son encontre,

- rappel de salaire en raison de la mise à pied conservatoire : l 970,54 euros,

- congés payés afférents : 197,05 euros,

- dommages-intérêts équivalant à 22 jours de congés payés : 4 285,84 euros,

- remboursement des tickets restaurant :45,90 euros,

- article 700 du code de procédure civile :3 660 euros,

- intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance et capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

- exécution provisoire de la décision à intervenir,

- dépens, en ce compris les frais de signification et d'exécution.

La société Segula Matra Automotive avait, quant à elle, conclu au débouté du salarié et avait sollicité sa condamnation à lui verser une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure d'appel

M. [K] a interjeté appel du jugement par déclaration du 25 octobre 2019 enregistrée sous le numéro de procédure 19/03920.

Prétentions de M. [K], appelant

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 24 janvier 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [K] conclut à l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la cour d'appel, statuant de nouveau, de :

- requalifier son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 12 916,26 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 12 663 euros (3 mois de salaire) au titre de l'indemnité de préavis, ainsi que la somme de 1 266,30 euros au titre des congés payés afférents,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 75 978 euros nets (équivalant à 18 mois de salaire) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette indemnité ne pouvant être inférieure à 25 326 euros nets (6 mois),

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 10 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 10 000 euros nets au titre des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- annuler la mise à pied conservatoire prononcée à son encontre,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 1 970,54 euros à titre de rappel de salaire en raison de la mise à pied conservatoire ainsi que la somme de 197,05 euros au titre des congés payés afférents,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 4 285,84 euros nets à titre de dommages-intérêts équivalant à 22 jours de congés payés,

- condamner Segula Matra Automotive à lui verser la somme de 45,90 euros nets au titre du remboursement des tickets restaurant.

L'appelant sollicite en outre les intérêts de retard au taux légal à compter de la saisine du bureau de conciliation et d'orientation, leur capitalisation et une somme de 3 660 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Prétentions de la société Segula Matra Automotive, intimée

Par conclusions adressées par voie électronique le 22 avril 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Segula Matra Automotive demande à la cour d'appel de :

sur la recevabilité des pièces numérotées 18 et 19

- dire que les pièces numérotées 18 et 19 qu'elle a communiquées sont conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile,

- dire en tout état de cause que M. [K] ne démontre aucun grief,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a écarté des débats les pièces numérotées 18 et 19 qu'elle a communiquées,

- débouter M. [K] de sa demande de voir écarter les pièces numérotées 18 et 19 qu'elle a communiquées,

sur l'exécution loyale du contrat de travail

- dire qu'aucune modification unilatérale de son contrat de travail n'a été imposée à M. [K],

- dire qu'aucune dégradation des conditions de travail de M. [K] ne saurait lui être reprochée,

- dire qu'elle a exécuté loyalement le contrat de travail de M. [K],

- dire en tout état de cause que M. [K] ne rapporte pas la preuve du préjudice allégué,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de sa demande de dommages-intérêts infondée,

sur le bien-fondé de la procédure disciplinaire engagée à l'encontre de M. [K],

- dire que la mise à pied à titre conservatoire qui a été notifiée à M. [K] est bien fondée,

- dire que le licenciement notifié à M. [K] est fondé sur une faute grave,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de ses demandes formées à titre d'annulation de la mise à pied conservatoire et de rappel de salaire et de congés payés afférents,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le licenciement notifié à M. [K] était fondé sur une faute grave,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de ses demandes formées à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis outre de congés payés afférents et d'indemnité conventionnelle de licenciement,

sur l'absence de circonstances brutales et vexatoires

- dire que le licenciement de M. [K] n'a pas été notifié dans des circonstances brutales ou vexatoires,

- dire en tout état de cause que M. [K] ne démontre pas l'existence d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte d'emploi,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de sa demande de dommages-intérêts infondée,

sur les demandes infondées au titre des congés payés et des tickets restaurant

- dire que l'ensemble des congés payés dus à M. [K] lui ont été réglés,

- dire que l'ensemble des tickets restaurant dus à M. [K] lui ont été réglés,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de sa demande de dommages-intérêts infondée au titre d'un reliquat de congés payés,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de sa demande de remboursement de tickets restaurant.

La société intimée demande en outre que soit confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [K] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et que le salarié soit condamné aux entiers dépens d'appel.

Par ordonnance rendue le 16 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 14 avril 2022.

À l'issue des débats, il a été proposé aux parties de recourir à la médiation, ce qu'elles ont décliné.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, s'agissant des pièces numérotées 18 et 19 communiquées par la société Segula Automotive, tandis que l'appelant ne mentionne aucune demande en ce sens dans le dispositif de ses écritures, la cour fera droit à la demande de l'intimée portant sur la recevabilité de ces pièces, par infirmation du jugement entrepris.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

A l'appui de sa demande tendant à l'allocation d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, M. [K] prétend que, depuis le transfert de son contrat de travail, il a subi une forte dégradation de ses conditions de travail, notamment du fait qu'il ne se voyait plus confier aucune tâche par son employeur mais également parce que la société Segula lui a imposé une modification unilatérale de son contrat de travail.

La société Segula Matra Automotive conteste avoir imposé une modification de son contrat de travail à M. [K], et que ses conditions de travail se soient dégradées à compter du 1er juillet 2016.

Il est rappelé que, conformément aux dispositions de l'article 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Concernant la dégradation des conditions de travail du salarié à compter du rachat le 1er juillet 2016

M. [K] reproche à la société Segula Matra Automotive de ne pas lui avoir fourni de travail à compter du rachat de son ancienne entreprise, qu'il a participé de façon spontanée au projet SAIPA à partir de septembre 2016, qu'on l'a privé de matériel informatique et qu'on l'a changé de bureau en mars 2017.

M. [K] expose qu'à son arrivée dans les locaux de la société Segula, il a constaté qu'avec ses anciens collègues, ils avaient été isolés dans un même open space, que dans les mois qui ont suivi, cet isolement s'est révélé être une véritable mise au placard puisqu'il ne s'est vu confier aucune mission à réaliser, qu'entre le 1er juillet 2016 et son licenciement notifié le 27 juin 2017, la société Segula ne l'a jamais affecté à des fonctions correspondant à son poste de chef de projet, qu'il est resté en inter-contrat entre juillet et septembre 2016, qu'il s'est volontairement impliqué dans un projet dit SAIPA, en lien avec des constructeurs iraniens, en septembre 2016, avec des fonctions de responsable technique et non de chef de projet, que cette brève reprise d'activité a été de courte durée, puisque le projet s'est terminé en fin d'année 2016, qu'il est immédiatement retourné à sa situation précédente, la société Segula le privant à nouveau de toute activité entre fin 2016 et mars 2017, et ce malgré la réussite du projet SAIPA à laquelle il a contribué.

La société Segula Matra Automotive répond qu'au moment du rachat de la société AAA Industries, M. [K] était, à l'instar de certains de ses collègues, en inter-contrat, qu'elle a immédiatement procédé à l'affectation des salariés sur différentes missions en fonction de leurs compétences, que dès le 6 juillet 2016, M. [Z], directeur de projet, a ainsi envisagé d'affecter M. [K] au projet SAIPA, que le salarié a cependant répondu qu'il n'était pas intéressé par ce projet, qu'en vertu de son pouvoir de direction, elle a néanmoins affecté M. [K] sur ce projet en septembre 2016. Elle prétend qu'elle a donc fourni du travail au salarié.

La société Segula Matra Automotive produit une attestation de M. [Z], directeur de projet, en ces termes : « J'atteste qu'avant le rachat de AAA Industries, M. [K] était en intercontrat, aucune mission ne lui était attribuée. Immédiatement après le rachat, j'ai proposé de l'intégrer au projet SAIPA, dont le chef de projet était [A] [P]. J'ai organisé avec M. [K] le 7 juillet 2016 une réunion téléphonique durant laquelle je lui ai demandé d'intégrer ce projet. A l'occasion de cet échange, il a tenu un discours très explicitée pour me convaincre de ne pas le solliciter pour cette mission, en tentant de me démontrer qu'il n'était pas l'homme de la situation et qu'il était préférable de solliciter quelqu'un d'autre. Pourtant cette mission était en adéquation avec ses compétences. Nous l'avons donc intégré sur ce projet. » (pièce 21 de l'employeur).

Aux termes de cette attestation, qui n'est contredite par aucune pièce utile, il sera retenu que la société Segula Matra Automotive a bien fourni du travail au salarié, les diligences de l'employeur devant être appréciées au regard des spécificités de l'emploi impliquant des périodes d'inter-contrat.

Il sera également retenu que c'est l'entreprise qui a imposé la mission SAIPA au salarié et non le salarié qui s'est spontanément proposé pour prendre part à cette mission, comme il le soutient pourtant aux termes de ses écritures, page 8, celui-ci s'étant même dans un premier temps montré réticent.

Ce manquement n'est donc pas établi.

M. [K] prétend qu'à son arrivée dans les locaux de Segula, il a constaté qu'il ne bénéficiait pas d'un ordinateur portable, ni d'un téléphone portable professionnels, outils pourtant indispensables à sa mission de chef de projet, alors que les salariés de Segula qui exerçaient les fonctions de chef de projet bénéficiaient d'un tel matériel, ce qu'il a signalé par courriel du 27 octobre 2016.

La société Segula Matra Automotive justifie toutefois que dès son arrivée dans ses locaux, M. [K] a bénéficié d'un ordinateur avec station fixe ainsi que d'une ligne téléphonique fixe. Elle justifie par ailleurs avoir commandé le 28 septembre 2016 un ordinateur portable pour M. [K] (sa pièce 15).

Ce manquement n'est pas établi.

M. [K] reproche à son employeur de lui avoir imposé de changer de bureau en mars 2017. Il expose que la seule activité qui lui a été réellement proposée a consisté en des missions de recrutement, soit des tâches sans rapport avec ce que prévoyait son contrat de travail mais également sans rapport avec son parcours professionnel, qu'à compter de mars 2017, il s'est vu ainsi imposer des fonctions de recrutement , qu'il s'est exécuté, souhaitant à tout prix sortir de cette inactivité qu'il subissait depuis quasiment huit mois, qu'il fut alors intégré dans un bureau très exigu comprenant le poste de M. [S] et le poste de sa stagiaire, Mme [N], qu'il a été sommé de s'installer à l'extrémité du bureau de Mme [N] et ce durant plusieurs semaines, avant de changer de bureau le 6 juin 2017, pour s'installer sur la plateforme de recrutement. Il indique avoir vécu, de façon difficile, cette mesure particulièrement humiliante, la société ne lui laissant que peu de doute quant à son souhait de le voir quitter l'entreprise.

Comme le fait valoir toutefois la société Segula Matra Automotive, M. [K] ne démontre pas avoir été contraint d'occuper un bureau exigu, ainsi qu'il le décrit, l'employeur expliquant que le salarié a d'abord été affecté au sein du bâtiment A, composé de grands espaces et d'importants open spaces puis, à compter du 6 juin 2017, au sein du pôle équipementier dans le bâtiment B entièrement rénové en open space.

Au vu de ces éléments, M. [K] ne démontre pas avoir souffert d'une dégradation de ses conditions de travail à compter de la reprise de son ancienne entreprise par la société Segula Matra Automotive.

Concernant la modification unilatérale du contrat de travail

M. [K] expose qu'à compter du mois de mars 2017, la société Segula Matra Automotive lui a imposé d'occuper le poste de recruteur au sein du service recrutement, consistant à prospecter des candidats et à rendre compte de l'avancement de ses recherches par l'envoi d'un tableau de suivi chaque semaine. Il soutient que cette mission de recrutement était d'un niveau de responsabilité très inférieur à celui de chef de projet, qu'en réalité ses fonctions de management des équipes ont été supprimées. Il oppose qu'il n'a jamais accepté cette nouvelle fonction de manière libre et éclairée et qu'il n'a jamais été question de l'affecter définitivement à des fonctions de recrutement. Il prétend qu'il a été privé de l'essentiel de ses fonctions, tenant notamment au pilotage de projets, à la coordination et au management des équipes techniques.

La société Segula Matra Automotive prétend pour sa part que l'évolution des fonctions de M. [K] résulte d'un accord entre les parties. Elle expose qu'au cours de la relation contractuelle, le salarié a indiqué à plusieurs reprises à sa hiérarchie qu'il souhaitait se réorienter sur un poste de recruteur et que son supérieur hiérarchique a accepté cette demande d'évolution. Elle fait valoir qu'aucune disposition légale ou conventionnelle n'impose que l'acceptation du salarié à une modification de son contrat de travail soit matérialisée par la signature d'un avenant au contrat initial.

La société Segula Matra Automotive ne remet pas en cause la modification du contrat de travail de M. [K], celui-ci s'étant vu attribuer de nouvelles fonctions mais prétend que cette évolution résulte d'un accord entre les parties.

Pour démontrer que M. [K] souhaitait se réorienter sur un poste de recruteur, la société Segula Matra Automotive produit le compte-rendu d'entretien professionnel du salarié de mars 2017, duquel il résulte que le salarié a indiqué vouloir « évoluer vers une fonction support » et « mon expérience projet et responsable études va me permettre de recruter les personnes adéquates » (pièce 3 de l'employeur).

Par ailleurs, l'employeur justifie que M. [K] avait indiqué dans la rubrique « Domaine de compétences » de son bilan de compétences, mis à jour le 15 janvier 2017, « recrutement, formation et évaluation du personnel. » (pièce 7 du salarié).

M. [O], responsable business unit, a indiqué dans l'évaluation professionnelle de mars 2017 : « L'intégration sur une fonction support tel que le recrutement, permettra à [E] de se réorienter sur un poste plus en adéquation avec le souhait du moment ».

Il a ajouté « plan d'action : détachement dans le service de M. [S], prise de connaissance avec les job boards », ce à quoi le salarié a répondu « orientation motivante ».

L'employeur démontre que M. [K] a validé sans réserve le compte-rendu de son entretien professionnel.

Il se déduit de ces éléments que M. [K] a sollicité et a accepté, de façon claire et non équivoque, la modification de son contrat de travail, aucun avenant écrit n'étant nécessaire à la matérialisation de cet accord.

Au demeurant, il est justifié que M. [K] a intégré le service recrutement avec enthousiasme, ce que M. [S] confirme en ces termes : « En mars 2017, j'ai intégré [E] [K] au sein du service recrutement que je dirige, conformément à son choix d'évolution. Il était très satisfait d'avoir pu obtenir une opportunité de travailler dans le service recrutement avec l'ensemble des charges de recrutement et s'est très vite investi dans ses nouvelles fonctions. » (pièce 9 de l'employeur). M. [K] a modifié sa signature électronique afin d'y faire figurer ses nouvelles attributions. Il a ouvert un compte professionnel sur le site CAO emploi afin de bénéficier de CVthèques et il a accompli ses nouvelles missions sans faire état de difficultés aux mois de mars, avril et mai 2017.

Ainsi, le salarié ne démontre aucun manquement de son employeur à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, de sorte que M. [K] doit être débouté de cette demande, par confirmation du jugement entrepris.

Sur le licenciement

L'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.

La faute grave se définit comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir d'une faute grave du salarié d'en apporter seul la preuve. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Par courrier du 27 juin 2017, la société Segula Matra Automotive a notifié à M. [K] son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :

" Pour mémoire, votre contrat de travail a été transféré au sein de la société Segula Matra Automotive le 1er juillet 2016 suite à la liquidation judiciaire de votre ancienne entreprise 3A.

Votre ancienneté a été reprise au 29 avril 2008.

Depuis ce transfert, vous occupiez des fonctions de chef de projet au sein du pôle Equipementiers basé à [Localité 7], sous la responsabilité de M. [J] [O], responsable de BU Equipements.

Vous avez travaillé dernièrement sur le projet XFB phase 2.

A l'occasion de votre entretien annuel d'évaluation qui a mis en évidence des aptitudes relationnelles et au management répondant partiellement aux attentes, et de votre entretien professionnel réalisés tous deux le 21 mars 2017, il a été formalisé votre souhait d'intégrer une fonction support plus en adéquation avec votre souhait du moment, tel que le recrutement.

Selon vous, votre expérience projet et de responsable études vous auraient permis de « recruter les personnes adéquates ».

Satisfaction vous a été donnée et vous avez été détaché auprès du service recrutement dirigé par M. [R] [S] au même moment et dont les locaux sont situés sur le site de [Localité 7], au bâtiment A.

Vous avez ainsi pu prendre connaissance des différents outils (job boards) et process utilisés au sein du service.

Nous avons d'ailleurs sur vos conseils, souscrit un abonnement CAO emploi, une CVthèque spécialisée.

Votre signature électronique indiquait que vous étiez rattaché au service recrutement.

Dans le cadre de l'amélioration de sa structuration commerciale, le pôle équipementiers a initié un projet dans lequel était prévue la synergie des ingénieurs d'affaires et des recruteurs dédiés.

Appartenant au service recrutement et compte tenu de votre expérience, vous avez été pressenti pour intégrer le projet et avez assisté à sa présentation le 11 mai 2017 par M. [F] [W], KAM équipementiers en charge du projet, et M. [R] [S].

Après avoir pris connaissance du rôle et des missions attendus des recruteurs en collaboration avec les ingénieurs d'affaires, et suite à un entretien réalisé le 22 mai avec M. [Y] [G], directeur de branche, vous avez accepté de participer à ce projet.

Vous avez ainsi intégré le 6 juin 2017, le plateau Equipementiers spécifiquement aménagé à cet effet sur le site de [Localité 7], au bâtiment B. Vous aviez alors en charge la partie mécanique et plasturgie en collaboration directe avec un ingénieur d'affaires.

Quelle n'a pas été notre surprise lorsqu'après seulement trois jours passés au sein de ce plateau, vous êtes revenu le vendredi 9 juin matin au bâtiment A, dans un état d'énervement très palpable.

Vous vous êtes présenté au bureau de votre responsable M. [R] [S] pour indiquer que vous souhaitiez quitter le service recrutement et ne plus aller sur le plateau équipementiers.

En sortant du bureau, vous vous êtes exprimé à forte voix au milieu du service, où potentiellement des candidats, des salariés ou des clients peuvent être présents, pour réaffirmer ces propos et indiquer que vous vouliez quitter l'entreprise « avec un chèque » et que « c'était fini Segula ».

Votre ancien responsable, M. [J] [O], a tenté de discuter avec vous après que vous ayez retrouvé votre calme.

Vous lui avez précisé que vous ne vouliez plus « être en face d'un bouffon » et que vous ne remettriez plus les pieds sur le plateau pour « ne plus voir sa tronche en face ».

Vous êtes resté sur place pour effectuer un entretien avec un candidat et adresser le compte-rendu puis avez quitté les locaux en milieu d'après-midi, à la demande de votre responsable qui souhaitait que vous vous calmiez.

Le lundi 12 juin 2017, vous ne vous êtes pas présenté sur le plateau Equipementiers mais êtes revenu sur le plateau du service recrutement ou vous avez réitéré auprès de M. [R] [S] votre souhait de « quitter l'entreprise » et de « ne plus travailler avec des bouffons ».

Le lendemain, nous avons constaté que vous étiez revenu sur le plateau du service recrutement à partir duquel vous avez adressé à M. [O] par courrier électronique, un fichier relatif à une candidature à compléter.

Le 14 juin, accompagné de M. [R] [S] et à sa demande, vous avez été reçu par la directrice des ressources humaines pour faire part de cette situation. Vous avez adopté une attitude désinvolte lorsqu'il vous a été demandé de réintégrer le plateau et signifié que dans l'entreprise chacun ne décidait pas où il voulait travailler.

Vous avez également réitéré votre volonté de quitter l'entreprise mais sans démissionner et en revendiquant le versement d'un « chèque »

Vous avez adopté un comportement d'insubordination et de désinvolture à l'égard de votre hiérarchie en décidant de votre propre chef, de quitter le plateau sur lequel vous aviez accepté d'être affecté et refusant de vouloir y retourner.

Vous avez revendiqué une contrepartie financière pour (...) quitter l'entreprise.

Or, vous n'ignorez pas qu'il s'agissait d'un manquement caractérisé à vos obligations contractuelles que nous ne pouvions tolérer.

Vous avez tenu en public des propos véhéments sur le plateau où sont potentiellement présents des candidats, des salariés ou des clients, ce que vous ne pouviez ignorer ayant travaillé plusieurs mois dans ces locaux.

Vous avez également tenu des propos outrageants à l'égard de votre binôme ingénieur d'affaires en particulier et des salariés de l'entreprise en général.

Cette attitude véhémente laisse à penser que vous représentez une menace pour les collaborateurs de la société pour lesquelles il lui revient d'assurer leur sécurité physique et mentale.

Par conséquent, un tel comportement est pleinement fautif et s'analyse en une faute grave qui rend votre maintien dans l'entreprise impossible, même pendant la durée du préavis."

Aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, il est reproché à M. [K] d'avoir adopté, à plusieurs reprises, un comportement particulièrement agressif et menaçant dans le cadre de l'exécution de ses fonctions, et ce devant témoins d'une part et d'avoir fait preuve d'insubordination caractérisée en refusant de se présenter à son poste de travail d'autre part.

S'agissant du comportement agressif et menaçant

La société Segula Matra Automotive fait grief à M. [K] d'avoir adopté, les 9 et 12 juin 2017, un comportement agressif dans l'exercice de ses fonctions en dénigrant, de manière injustifiée et devant témoins, la société ainsi qu'en injuriant l'un de ses collègues de travail.

Elle produit une attestation de M. [O], responsable business unit, laquelle décline les éléments suivants : « Le vendredi 9 juin 2017 vers 10h, [E] [K] est entré dans le bâtiment A énormément énervé.

Dans le hall où étaient présents des collaborateurs et des candidats, il s'est volontairement exclamé très fort en tenant des propos dénigrants puis s'est dirigé vers le bureau de M. [S] avec lequel j'étais.

Il nous a indiqué qu'il revenait et qu'il ne voulait plus aller de l'autre côté (à savoir le plateau R+1 Bat C1 recrutement équipementiers), qu'il voulait « se barrer », que pour lui « c'était fini Segula » et qu'il « allait partir avec son chèque ».

Puis, il est parti sur le plateau Adélaide (pôle équipementiers) où étaient présents les collaborateurs du pôle où il a continuer à parler volontairement fort et avec énervement.

J'ai demandé à [R] [S] d'attendre que [E] [K] soit revenu à un énervement moindre avant d'échanger avec lui. A l'instant présent aucune discussion n'aurait été constructive.

Après avoir attendu qu'il se calme, j'ai réussi à discuter avec lui. Il m'a redit qu'il ne voulait plus « être en face d'un bouffon » et qu'il ne « remettrait plus les pieds sur le plateau recrutement équipementiers pour ne plus voir sa « tronche en face ».

J'ai essayé de comprendre pourquoi il était dans un tel état d'énervement mais il ne me l'a pas dit.

Il m'a informé qu'il ferait l'entretien de recrutement planifié le vendredi après-midi, mais que par la suite, il arrêterait de travailler pour le recrutement.

Il s'est donc installé sur son ancienne place en continuant de grogner, le vendredi, il a donc effectué l'entretien puis m'a transmis le résumé et a quitté les locaux.

Lundi 12 juin 2017, [E] est revenu au bâtiment A (plateau Adélaïde) où il s'est installé et ne semble n'avoir pas travaillé à ma connaissance.

[R] [S] a essayé de parler avec lui mais celui-ci a réitéré les propos du vendredi. Il a continué à affirmer qu'il ne voulait plus travailler avec des bouffons et qu'il souhaitait partir. » (pièce 8 de l'employeur).

Ce témoignage est corroboré par l'attestation de M. [S], responsable recrutement (pièce 9 de l'employeur).

Pour remettre en cause ces témoignages, M. [K] se limite à contester les propos de l'employeur et la valeur probante des attestations produites, sans produire aucun élément de preuve utile, ni donner aucune explication sur le contexte des faits dénoncés.

Le grief est matériellement établi.

S'agissant de l'insubordination

La société Segula Matra Automotive fait grief à M. [K] d'avoir fait preuve d'insubordination en refusant de se présenter à son poste de travail sur le plateau équipementier du bâtiment B où il était pourtant affecté.

Dans le cadre de leurs attestations respectives, MM. [O] et [S] ont attesté de ce fait.

De son côté, Mme [I], DRH, a attesté en ces termes : « Suite à une alerte de l'un de mes collaborateurs, M. A. [S], responsable du recrutement, concernant le comportement de M. [E] [K], j'ai organisé un RDV le 14 juin 2017 avec les deux salariés pour comprendre la situation. M. [K] a aussitôt exprimé sa volonté de ne plus travailler, ni sur ses nouvelles fonctions, ni sur ses anciennes, et a affirmé vouloir quitter l'entreprise. J'ai donc demandé à en connaître les raisons et avoir des explications sur son comportement injurieux du 9 juin 2017. M. [K] était particulièrement désinvolte et n'a pas fourni d'explication à son attitude. Je lui ai donc demandé de retourner sur le plateau sur lequel il était affecté et de reprendre son travail. M. [K] m'a alors dit qu'il ne reprendrait aucun travail et a exprimé sa volonté de quitter l'entreprise.

Je lui ai dit qu'il était libre de mettre fin à son contrat de travail. Il m'a répondu qu'il voulait partir avec un « chèque » et qu'il n'entendait pas démissionner, ni reprendre le travail. » (pièce 10 de l'employeur).

M. [K] fait, quant à lui, valoir que ce qui a déclenché son licenciement est un entretien qu'il a sollicité auprès du service RH, qui a eu lieu le 14 juin 2017 avec Mme [I]. Il ne démontre cependant pas avoir fait une telle démarche.

Il indique encore que lorsqu'il a été affecté au plateau équipementiers, le 6 juin 2017, il a compris que la société Segula n'avait aucune intention de lui confier des missions conformes au poste de chef de projet et que ce déménagement était en réalité synonyme d'affectation définitive au poste de recruteur, qu'il n'avait aucune intention d'abandonner le poste de chef de projet mais il ne produit aucune pièce utile à l'appui de son allégation, de sorte que celle-ci ne peut qu'être écartée.

Il y a dès lors lieu de retenir que ce grief est matériellement établi.

Pour apprécier la gravité de la faute, la cour retient que l'incident du 9 juin 2017 ne peut être considéré comme isolé, puisque l'attitude d'opposition du salarié a perduré le 12 juin suivant, et qu'elle impliquait une absence de tout dialogue possible rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Le licenciement pour faute grave prononcé par la société Segula Matra Automotive à l'égard de M. [K] est en conséquence justifié.

Le salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes subséquentes, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les circonstances vexatoires du licenciement

M. [K] sollicite l'allocation d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts. Il invoque différentes circonstances vexatoires, selon lui, comme la volonté manifeste de la société Segula Matra Automotive d'évincer les anciens collaborateurs à la suite du rachat de la société AAA Industries, son ancienneté de 9 ans, l'absence d'antécédent disciplinaire, la soudaineté et la brutalité de la mesure de licenciement et le caractère fantaisiste des faits qui lui sont reprochés.

La société Segula Matra Automotive s'oppose à la demande.

Il est constant qu'un licenciement pour autant fondé peut néanmoins ouvrir droit à une indemnisation au profit du salarié du fait des circonstances brutales et vexatoires ayant accompagné ce licenciement, à la condition de justifier d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement.

M. [K] ne rapporte cependant pas la preuve qui lui incombe ici, ni de circonstances brutales et vexatoires entourant son licenciement imputables à l'employeur, ni d'un préjudice spécifique.

M. [K] sera débouté de cette demande, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les congés payés

M. [K] sollicite le paiement d'une somme de 4 285,84 euros à titre de dommages-intérêts équivalant à 22 jours de congés payés.

Il invoque les dispositions de l'article L. 1224-2 du code du travail, qui prévoient qu'en cas de transfert du contrat de travail, le nouvel employeur est tenu à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification.

Il prétend que lors du transfert de son contrat de travail, tous ses jours de congés ne lui ont pas été payés par AAA Industries, qu'il disposait ainsi d'un reliquat de 22 jours de congés pour l'année 2015.

La société Segula Matra Automotive oppose cependant, de façon pertinente, que l'article L. 1224-2 du code du travail prévoit plusieurs exceptions, notamment l'hypothèse d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, qu'en l'espèce, le contrat de travail de M. [K] a été transféré dans le cadre d'un plan de redressement judiciaire, qu'elle n'est donc nullement tenue de régler au salarié les congés payés qu'il avait acquis auprès de son précédent employeur.

M. [K] sera débouté de cette demande, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les tickets restaurant

M. [K] sollicite le paiement d'une somme de 45,90 euros en remboursement de tickets restaurant, indiquant qu'il a travaillé 9 jours en juin 2017 et qu'il aurait dû recevoir en juillet les tickets restaurant correspondants, lesquels ne lui ont jamais été délivrés.

La société Segula Matra Automotive oppose que le bulletin de salaire du mois de juin 2017 confirme que M. [K] a perçu la somme de 64,60 euros au titre de 19 tickets restaurant qui lui étaient dus.

La cour constate, à la lecture des bulletins de paie, que le salarié se voyait remettre un certain nombre de tickets restaurant chaque mois et qu'il lui était retenu une part contributive.

L'employeur ne rapportant pas la preuve, qui lui incombe, de la remise des tickets restaurant sollicités, il sera fait droit à la demande de M. [K] à ce titre, par infirmation du jugement.

Sur les intérêts moratoires et leur capitalisation

Le créancier peut prétendre aux intérêts de retard calculés au taux légal, en réparation du préjudice subi en raison du retard de paiement de sa créance par le débiteur. Les condamnations prononcées produisent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation pour les créances contractuelles et à compter de l'arrêt pour les créances indemnitaires.

En application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de préciser que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure

M. [K], qui succombe pour l'essentiel dans ses prétentions, supportera les dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

M. [K] sera débouté de sa demande présentée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, étant noté que société Segula Matra Automotive ne formule pas de demande sur ce même fondement.

Le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions concernant les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 16 septembre 2019, excepté en ce qu'il a écarté les pièces numérotées 18 et 19 communiquées par la société Segula Matra Automotive et en ce qu'il a débouté M. [E] [K] de sa demande au titre du remboursement des tickets restaurant,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT recevables les pièces numérotées 18 et 19 communiquées par la société Segula Matra Automotive,

CONDAMNE la société Segula Matra Automotive à payer à M. [E] [K] la somme de 45,90 euros au titre du remboursement des tickets restaurant,

CONDAMNE la société Segula Matra Automotive à payer à M. [E] [K] les intérêts de retard au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation sur les créances contractuelles et à compter de l'arrêt sur les créances indemnitaires,

DIT que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt,

DÉBOUTE M. [E] [K] de sa demande présentée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [E] [K] au paiement des entiers dépens.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Isabelle Vendryes, présidente, et par Mme Dorothée Marcinek, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03920
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;19.03920 ?
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