COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 56B
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 05 JUILLET 2022
N° RG 21/01199
N° Portalis DBV3-V-B7F-UKTG
AFFAIRE :
S.A.S. DATAREX
...
C/
S.A.S. ATELIERS [F]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Janvier 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 2013F00486
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Stéphanie TERIITEHAU
Me Clément GAMBIN
TC VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.S. DATAREX
[Adresse 2]
[Localité 3]
S.A.S. DATACONSEIL
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELARL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 619 - N° du dossier 20210072
Représentant : Me Pierre CALLET de la SCP SCP MONNOT - CALLET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0144
APPELANTES
****************
S.A.S. ATELIERS [F]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Clément GAMBIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 589
Représentant : Me Pierre-Louis ROUYER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1508
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,
La SAS Ateliers [F] (la société [F]) et la SA Datarex sont respectivement spécialisées dans la conception, la fabrication et la réalisation de prototypes et de produits à composantes mécaniques et électroniques pour la première et dans la fourniture de matériels électroniques et informatiques, notamment dans le secteur des officines pharmaceutiques, pour la seconde ; cette dernière a en particulier conçu un système de distribution automatique de produits, pour lequel des brevets ont été déposés, s'appliquant notamment aux médicaments, à destination des pharmacies.
Enfin, la SAS Dataconseil édite et développe des logiciels applicatifs pour tous types de secteurs d'activité.
Par contrat du 11 septembre 2006, la société Datarex, représentée par son président directeur général M. [U] [E], a confié à la société [F], en la personne de son président M. [Z] [F], l'étude détaillée et la réalisation d'un prototype de distributeur automatique de produits, pour un prix global de 94 200 euros HT, le contrat prévoyant une livraison quatre mois et demi après la commande.
Le prototype n'a pas été livré dans les délais convenus, les premiers tests ayant été effectués en octobre 2007.
Au cours de l'année 2009, il a été envisagé la fabrication d'un second prototype selon devis établi le 23 décembre 2009 par la société [F] à hauteur de 55 000 euros HT ; la société Datarex l'a accepté par courrier daté du 11 février 2010, la société [F] ayant accusé réception de la commande le 19 février 2010.
Ce second prototype a été transporté et installé dans les locaux de la pharmacie de M. [W] au cours du dernier trimestre de l'année 2012 afin d'effectuer des tests, la société [F] ayant établi un bon de livraison le 5 décembre 2012.
Après cette livraison, la société [F] a adressé les factures afférentes aux prestations réalisées pour un montant total de 38 021,21 euros.
En l'absence de règlement, par lettre recommandée datée du 5 juin 2013, elle a vainement mis en demeure la société Datarex de lui régler la somme de 38 021,21 euros au titre des prestations réalisées.
Par acte d'huissier du 17 juin 2013, la société [F] a assigné la société Datarex en paiement de ses factures impayées devant le tribunal de commerce de Versailles puis, le 2 décembre 2014, elle a assigné en intervention forcée la société Dataconseil afin de la voir condamnée à l'indemniser du fait du retard dans la livraison du logiciel de pilotage du prototype de distributeur automatique.
Afin notamment que soient déterminées l'origine et la responsabilité du retard dans la livraison du produit, la conformité du produit au regard des demandes de la société Datarex, les diligences fournies par la société [F], la responsabilité de chaque société et les conséquences de l'échec du projet, le tribunal de commerce de Versailles, par jugement en date du 25 mars 2015, a ordonné une expertise confiée à M. [K] [B] qui a rendu son rapport le 10 septembre 2019.
Puis par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 20 janvier 2021, le tribunal de commerce de Versailles a :
- condamné la société Datarex à payer à la société [F] la somme de 37 584,47 euros au titre des factures impayées ;
- débouté la société [F] de ses autres demandes ;
- débouté la société Datarex de ses demandes reconventionnelles ;
- condamné la société Datarex à payer à la société [F] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne la société Datarex aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise d'un montant de 13 838,86 euros.
Par déclaration du 22 février 2021, les sociétés Datarex et Dataconseil ont interjeté appel du jugement.
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 8 mars 2022, elles demandent à la cour de :
- déclarer la société Datarex recevable et bien fondée en son appel et infirmer le jugement en toutes les condamnations prononcées à son encontre ;
- infirmer ce même jugement en ce qu'il a débouté la société Datarex de sa demande reconventionnelle tendant à :
* débouter la société [F] de toutes ses demandes ;
* prononcer aux torts exclusifs de cette dernière la résolution des deux commandes passées les 11 septembre 2006 et 11 février 2010 ;
* condamner la société [F] à lui :
- restituer les acomptes de 161 718,82 euros ;
- payer 561 693 euros de dommages et intérêts pour préjudice et 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamner la société [F] aux dépens dont les frais d'expertise ;
Statuant à nouveau,
- prononcer, aux torts exclusifs de la société [F], la résolution des deux commandes passées les 11 septembre 2006 et 11 février 2010 ;
- condamner la société [F] à restituer à la société Datarex la somme de 161 718,82 euros TTC que celle-ci lui a versée à titre d'acomptes sur ces commandes ;
- condamner la société [F] à payer à la société Datarex la somme de 561 593 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice commercial et débouter l'intimée de toutes ses demandes ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société [F] de ses demandes en paiement de :
* 436,54 euros : facture n° FA2012-1419 ;
*117 520 euros : mobilisation d'un ingénieur pour le distributeur n° 1 ;
* 234 520 euros : mobilisation d'un ingénieur pour le distributeur n° 2 ;
* 11 900 euros : frais de stockage du distributeur n° 1 ;
* 4 800 euros : frais de stockage du distributeur n° 2 ;
* 25 000 euros : démontage, transport et remontage du distributeur ;
* 15 000 euros : « clause particulière » ;
- subsidiairement, pour le cas où la cour écarterait la demande d'une réformation intégrale du jugement, confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le principe d'un partage de responsabilité des deux parties dans les retards ;
- l'infirmer sur l'application de ce principe ;
En conséquence,
- condamner la société [F] à restituer à la société Datarex :
* 80 859,41 euros, soit la moitié des acomptes que cette dernière lui a versés ;
* 27 955,74 euros, soit la moitié des sommes qu'elle lui a réglées au titre de l'exécution provisoire du jugement pour les factures (37 584,47 euros), l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile (4 000 euros), les frais d'expertise (13 838,86 euros) et les frais de greffe (488,14 euros) ;
- débouter la société [F] de toutes ses demandes en paiement contre la société Datarex et de son appel incident ;
- condamner la société [F] à payer à la société Datarex 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter la société [F] de sa demande en paiement d'une indemnité de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société [F] aux entiers dépens, de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise, dont distraction au profit de la Selarl Minault Teriitehau agissant par maître Stéphanie Teriitehau avocat et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- subsidiairement, partager par moitié entre les parties les dépens de première distance et d'appel et les frais d'expertise.
La société [F], dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 14 février 2022, demande à la cour de :
- confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a déboutée de ses autres demandes ;
- la recevoir en son appel incident ;
Statuant de nouveau,
- condamner la société Datarex à lui verser la somme de 436,54 euros au titre de la facture n°FA2012-1419 du 4 janvier 2013 pour l'achat de panneau d'habillage pour le prototype n°2 ;
- condamner la société Datarex à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis ;
- rejeter toutes les demandes de la société Datarex ;
En tout état de cause;
- condamner la société Datarex à lui verser la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts au taux légal, ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mars 2022.
A la demande de la cour, il a été transmis après l'audience, sous une clé USB, l'ensemble des comptes-rendus des réunions d'expertise, des dires des parties et des divers échanges avec l'expert.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
Aucun moyen n'étant soulevé ou susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer recevables les appels principal de la société Datarex et incident de la société [F].
Il sera relevé en préalable qu'aucune demande n'est formée ni au nom ni à l'encontre de la société Dataconseil.
Pour s'opposer à la demande en paiement dont le tribunal a été saisi par la société [F], la société Datarex fait état des défaillances de cette dernière dans l'exécution des contrats pour en solliciter la résolution, demande qui devra être examinée en préalable à toutes les autres.
Sur la demande de résolution des contrats :
Après avoir présenté dans le rappel des faits les obligations contractuelles de chacune des parties ainsi qu'un historique chronologique détaillé de 2006 à 2013 puis critiqué la présentation des faits opérée par la société [F], la société Datarex soutient en premier lieu qu'il est patent, au regard de cet historique, que cette dernière a doublement failli à ses obligations contractuelles dès lors qu'elle a été incapable de respecter ses délais de livraison et ce, par deux fois, avec des retards se chiffrant en années et qu'elle n'a pas livré des matériels d'une part conformes au cahier des charges puisque quatre de ses spécifications n'ont pas été respectées, dont l'une pourtant qualifiée d'indispensable et d'autre part en état de bon fonctionnement comme on pouvait l'attendre d'une société qui se présente pourtant comme spécialisée notamment dans 'la conception, la fabrication et la réalisation de produits à fortes valeurs ajoutées technologiques'.
Elle se livre en deuxième lieu, sur plus de dix pages, à une critique générale du déroulement de la mesure d'instruction et du rapport d'expertise, se référant également sur ce point à l'analyse critique et 'très détaillée' qu'elle en a faite dans sa pièce 170 ; elle reproche pour l'essentiel au rapport de n'être ni technique ni factuel, celui-ci étant rédigé en termes généraux sans référence précise à des dates, aux pièces communiquées par les parties et aux problèmes techniques qu'elle a évoqués et de s'appuyer sur des spéculations, en particulier sur la mise en cause du sol de l'officine, sans référence aux obligations des parties ; elle lui reproche aussi des 'confusions regrettables', des 'raisonnements spécieux et peu rigoureux' et d'énoncer 'parfois des contre-vérités flagrantes' avant de critiquer plus en détail les réponses de l'expert sur chacun des chefs de mission qui lui ont été confiés.
En troisième lieu, après avoir procédé à une rapide 'critique liminaire et générale' du jugement auquel elle reproche la brièveté de sa motivation et son silence 'discriminatoire' en particulier en ce qu'il a ignoré totalement ses critiques sur le rapport et n'a pas analysé ses arguments au soutien de sa demande en résolution des contrats, la société appelante demande à la cour, réformant le jugement, de prononcer la résolution des deux commandes aux torts exclusifs de la société [F] dès lors qu'elle n'a respecté ni son engagement de livrer les distributeurs aux dates fixées, respectivement les 19 janvier 2007 et 26 février 2010, ni celui de les livrer en parfait état de fonctionnement après recette provisoire et définitive.
S'agissant d'une part des retards, elle observe que l'installation en 'pharmacie-pilote', sans pour autant que tous les problèmes techniques aient été éliminés, est finalement intervenue le 23 octobre 2012 pour se terminer en décembre 2012 avec un retard de près de six ans par rapport à la commande initiale et de près de trois ans par rapport à l'engagement portant sur le second distributeur, considérant que la raison en est la suite ininterrompue des dysfonctionnements, attestés par de nombreuses pièces, sur les deux matériels et encore plus nombreux sur le second ; elle soutient que la responsabilité de la société [F] dans ces retards inacceptables est totale et qu'en raison de ces retards, la cour prononcera la résolution des deux commandes aux torts exclusifs de l'intimée par application des dispositions de l'article 1610 du code civil.
Pour répondre aux trois griefs que celle-ci lui oppose à cet égard, la société Datarex conclut à l'absence de problème affectant le logiciel de gestion après avoir rappelé qu'elle n'avait aucune obligation contractuelle de fournir ce logiciel à sa cocontractante durant la phase de réalisation mais uniquement pour la recette définitive en officine qui n'est intervenue que fin 2012 ; rappelant le contrat sur ce point, elle soutient que les termes en étaient parfaitement clairs quant à la répartition des rôles, reprochant à l'expert de ne pas l'avoir pris en compte et soutenant que l'intimée n'avait pas besoin de ce logiciel puisqu'elle n'était responsable que du bon fonctionnement 'des ordres élémentaires' qui pouvaient être testés indépendamment du logiciel. Elle ajoute au demeurant que celui-ci existait bien puisqu'il a servi dès la première présentation du distributeur le 10 octobre 2007, son développement ayant été effectué en 2006 et 2007.
A propos des modifications invoquées par l'intimée et relevées par l'expert, elle prétend qu'il s'agit d'un prétexte fallacieux et qu'aucune modification par rapport au cahier des charges ne lui est imputable et ne peut en tout état de cause justifier le 'retard colossal' de la société [F] dans la production des deux distributeurs.
Elle conteste enfin le troisième grief tenant à son prétendu manque de diligence dans la recherche d'une pharmacie pilote dès lors que concernant le premier distributeur, elle a immédiatement présenté M. [W] le 15 juin 2009 à la société [F] une fois que les tests ont été 'à peu près satisfaisants', celle-ci ayant déjà deux ans et demi de retard ; elle ajoute que le retard de l'installation du second distributeur chez le pharmacien pilote résulte du retard de finalisation de la commande par la société [F], du retard de sa fabrication et surtout de l'apparition de quantité de problèmes techniques inattendus qui ont 'pulvérisé' le délai prévu. S'agissant d'autre part de l'inexécution des commandes et de la livraison non conforme, la société Datarex explique que le distributeur réalisé par la société [F] est incapable de fonctionner de manière fiable et durable du seul fait de cette dernière, que ce soit en atelier ou en pharmacie où il n'a jamais été possible de démarrer la phase de recette du fait des 'innombrables problèmes techniques intervenus' tant sur le premier distributeur que sur le second, qu'elle rappelle notamment aux pages 34 et 35 de ses écritures. Elle estime que ces problèmes ne peuvent être considérés comme de simples mises au point, compte tenu de leur durée anormalement longue s'étendant sur des années et ce, d'autant que certains sont apparus sur le second distributeur alors qu'ils n'existaient pas sur le premier.
Elle ajoute que ces distributeurs qui n'ont été soumis ni à la recette provisoire ni à la recette définitive se trouvent toujours dans les locaux de la société [F] qui n'a pas demandé à l'expert qu'il soit procédé à ces deux réceptions pour vérifier la qualité de leur fonctionnement.
Elle souligne que contrairement à ce que la société [F] soutient, elle n'était pas responsable de l'installation et du fonctionnement du distributeur chez le pharmacien, lesquels incombaient à l'intimée selon le contrat ; elle ajoute que celle-ci n'a fourni 'spontanément' aucune préconisation s'agissant du poids de la machine et considère que les dysfonctionnements observés, dès le lendemain de l'installation et les jours suivants, montrent qu'ils n'ont aucun rapport avec le sol de l'officine, contestant fermement la conclusion de l'expert sur ce point dont elle estime qu'elle relève de la pure spéculation.
Elle invoque enfin, au titre d'une troisième série de manquements, le non respect de quatre spécifications prévues au cahier des charges, énumérées en page 36 de ses conclusions.
La société [F] qui fait part à la cour de son étonnement sur la virulence des propos de la société Datarex à l'égard de l'expert judiciaire, observe que si le rapport d'expertise ne s'impose nullement à la cour, il n'en demeure pas moins qu'il ne peut pas pour autant être écarté des débats, soulignant que contrairement à ce que l'appelante prétend, il a été établi dans le respect du contradictoire malgré la difficulté de la mission attribuée à l'expert, évoquant les nombreuses pièces communiquées par chacune des parties (respectivement, 164 et 140) et les différents dires adressés pendant ces quatre ans d'expertise, en particulier par l'appelante dont elle relève qu'elle n'a pas sollicité la réalisation d'une contre-expertise depuis le dépôt du rapport en septembre 2019. Elle rappelle les conclusions de l'expert sur chacun des points de sa mission en citant quelques échanges de mails extraits de son dire récapitulatif.
Pour répondre ensuite à la demande de résolution des contrats à ses torts exclusifs, la société [F], qui a également présenté dans le rappel des faits de ses écritures la chronologie des relations contractuelles quant à la réalisation des deux prototypes et les obligations des parties définies au contrat, conclut en premier lieu à l'absence de retard qui lui soit imputable dans l'exécution de ses obligations.
Elle fait valoir à cet égard que le retard dans la livraison des distributeurs est dû à la combinaison de plusieurs facteurs :
- des problèmes rencontrés dans le développement du logiciel par les sociétés Datarex et Dataconseil, estimant que comme l'expert l'a souligné, le fonctionnement du distributeur de médicaments était dépendant du bon fonctionnement du logiciel de gestion des stocks et des emplacements et qu'au regard des factures communiquées par la société Dataconseil, celle-ci était encore en charge de la conception du logiciel en 2010 ; elle en déduit que celui-ci n'était nullement opérationnel de 2007 à 2009, ce qui a prolongé les délais de développement du matériel, comme retenu par l'expert et bloqué la livraison effective du prototype dès lors qu'elle-même ne pouvait pas avancer sur la fabrication du distributeur et tester les différents modules afférents ; elle explique avoir procédé elle-même à des tests à partir d'un logiciel interne qu'elle avait développé pour finaliser les mises au point et procéder aux modifications des pièces litigieuses ;
- l'incapacité de la société Datarex à trouver une pharmacie pilote pour accueillir la machine, ce qui a retardé la phase de test ; elle précise que celle-ci a trouvé un premier pharmacien intéressé, la pharmacie [W], en juin 2009 mais que souhaitant conserver le prototype pour ses propres expérimentations, elle lui a commandé un nouveau distributeur, ce qui a repoussé son installation dans cette pharmacie ; elle fait état de nouvelles demandes de modifications qui ont retardé le projet, abandonné par le pharmacien le 13 janvier 2011, précisant que finalement c'est ce pharmacien qui acceptera en avril 2012 d'être pilote du projet qui sera finalisé dans ses locaux, après des travaux d'aménagement, en décembre 2012 ;
- de nombreuses modifications du cahier des charges et demandes additionnelles sollicitées au cours des développements par la société Datarex, se référant au rapport d'expertise qui a indiqué que ces modifications constituaient des additifs au cahier des charges et des modifications sur le distributeur n°2 et à la pièce 55 qu'elle communique ; elle en déduit qu'elle n'a ainsi cessé de s'adapter en fonction des différentes demandes formulées par la société Datarex qui ne peut ignorer que ces changements ont nécessité des études complémentaires et entraîné la prolongation des délais de réalisation.
Elle invoque en second lieu le bon fonctionnement des distributeurs qu'elle a développés et installés. Après avoir rappelé qu'elle avait pris le soin d'informer la société Datarex des caractéristiques de la machine en particulier sur son poids et sur la nécessité de prendre des mesures adaptées à son installation, elle expose que dès la survenance des premiers dysfonctionnements, elle a immédiatement identifié leur cause liée à la nature du sol, laquelle incombait directement à la société Datarex, relevant que l'expert a confirmé cette analyse.
Elle en conclut que les conditions de l'article 1184 du code civil ne sont en aucun cas réunies dès lors qu'il ne peut lui être reproché aucun manquement puisqu'elle a livré le premier prototype, accepté le développement d'un second, procédé à la livraison et à l'installation de la machine chez le pharmacien proposé par la société Datarex et ce, malgré les nombreuses modifications sollicitées par cette dernière. Elle sollicite par conséquent la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes de la société Datarex tendant à la résolution des contrats, au remboursement des sommes déjà versées et au règlement d'une indemnité en réparation de son préjudice.
Il convient de relever au préalable que la cour, qui n'est saisie par le dispositif des conclusions de l'appelante d'aucune demande d'annulation ou de rejet des débats du rapport d'expertise, appréciera la portée de ses conclusions par lesquelles elle n'est pas liée au regard des éléments fournis par les parties, étant observé qu'il n'est fait état d'aucune demande des parties aux fins de saisine du juge des expertises tenant en particulier à la durée de la mesure d'instruction et qu'il ressort des nombreux dires qui ont été soumis à l'expert que les parties ont mis celle-ci à profit pour échanger leurs arguments et communiquer de très nombreuses pièces.
Conformément à l'ancien article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des parties ne satisferait pas à son engagement. Dans ce cas le contrat n'est pas résolu de plein droit, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté devant demander la résolution en justice.
Lorsque le contrat ne contient aucune clause expresse de résolution, il appartient alors à la juridiction d'apprécier souverainement en cas d'inexécution partielle, si celle-ci a assez d'importance pour que la résolution soit prononcée ou si elle ne sera pas suffisamment réparée par une condamnation à des dommages et intérêts ; en particulier en cas de retard dans l'exécution, il doit être déterminé s'il est d'une gravité suffisante pour justifier la résolution.
La gravité des manquements allégués doit être appréciée au regard des obligations contractuellement fixées à chacune des parties tout en tenant compte des conditions dans lesquelles celles-ci ont exécuté le contrat et de la portée qu'elles ont ainsi entendu donner à leurs engagements.
Sur les éléments contractuels concernant le premier distributeur :
Le prototype du distributeur automatique de produits (DAP) dont 'l'étude détaillée et la réalisation' ont été confiées par la société Datarex à la société [F], est constitué, d'après le descriptif joint en annexe du contrat et les explications des parties, d'une part de deux armoires parallèles, simples rayonnages munis d'étagères horizontales en verres sur lesquelles sont rangées les boîtes de produits par référence et d'autre part d'un 'système d'extraction-rangement (SER)', mobile et motorisé entre les deux armoires, pouvant se déplacer verticalement et horizontalement pour se positionner au regard de n'importe quel point de l'armoire ; le SER est constitué d'un plateau destiné à recevoir les produits à déplacer avant leur rangement ou après leur extraction et de deux spatules parallèles guidées linéairement à écartement variable, se déplaçant solidairement uniquement dans un plan horizontal dans le sens de la profondeur des armoires, ces spatules devant être équipées d'une pièce faisant crochet à chaque extrémité pour pincer individuellement les boîtes ou pour tirer une rangée.
Cette annexe précise les contraintes et performances du prototype, s'agissant notamment du fonctionnement détaillé des opérations de chargement et d'extraction, étant précisé qu'il a été retenu un système d'introduction automatique composé d'un tapis roulant, intégré dans l'une des armoires et dont une partie dépasse pour permettre d'y poser manuellement la rangée de boîtes d'une même référence, identifiée par code-barres, à charger.
Il est précisé au contrat:
- que le prototype comprend la définition et la réalisation du SER mais aussi des armatures des armoires et du système d'ancrage des étagères permettant un montage simple et souple ainsi que l'habillage extérieur, lequel devra présenter 'une esthétique convenable mais aussi une porte d'accès à l'intérieur et tous mécanismes de sécurité pour les personnes' ;
- que le prototype sera fourni avec son boîtier de commande des automatismes et les logiciels correspondants ;
- outre les dimensions du prototype (3 mètres de longueur utile et une hauteur utile de 2 mètres avec des étagères de 40 centimètres de profondeur utile), que les moteurs et leur conduite doivent être déterminés pour pouvoir fonctionner avec la performance voulue (1,5m/s) ;
- que 'le distributeur est piloté par un système informatique de gestion des stocks et des emplacements qui n'entre pas dans le périmètre du prototype à réaliser lequel ne comprend que l'informatique de commande des automatismes afin d'obternir les bons positionnements verticaux et horizontaux du SER et les avancées, reculées, resserrements, écartements des spatules. La liaison entre le système informatique de gestion et le boîtier de commande se fera par liaison RS232C ou réseau, à définir';
- sous un paragraphe intitulé 'modalités, délais et recettes', que 'le prototype sera livré, après validation par AL, quatre mois et demi après la commande ; pendant la période d'étude et de mise au point, une communication sera établie entre AL et DX sous forme d'une réunion, au moins une fois par mois. La livraison du prototype sera faite sur plate forme dans les locaux AL et fera l'objet de tests approfondis par DX. (...) A l'issue de cette phase, en l'absence de problèmes de fonctionnements particuliers, la recette provisoire sera prononcée. Il sera ensuite monté sur site par AL dans une pharmacie test ( le logiciel de gestion fait par DX devra être opérationnel) afin de tester le prototype en mode opérationnel. En l'absence de problèmes pendant une période de trois mois consécutifs sur le site opérationnel, la recette définitive sera prononcée ;
- le prix total de 94 200 euros HT qui correspond 'aux études, comprenant étude détaillée, réalisation des plans de fabrication, nomenclatures de pièces standard et spécifiques, programmes informatiques de conduite des automatismes (le programme de gestion des stocks et emplacements est exclu de la prestation)', à hauteur de 66 000 euros HT pour l'étude du système de base', de 3 000 euros pour 'l'étude option tapis', de 20 200 euros correspondant au matériel en vue de la fabrication du prototype et 5 000 euros pour le matériel et la main d'oeuvre pour l'option tapis 3,5 m ;
- les conditions de paiement, à savoir un acompte par chèque à la commande de 30 % du montant total HT, un acompte de 20 % du montant total HT à la remise des plans de fabrication et des nomenclatures ; un troisième acompte de 30 % du montant total HT à la recette provisoire et enfin le solde et la TVA à la recette définitive ;
- qu' 'en cas de succès de l'opération, et donc de décision de fabrication en série du distributeur automatique, Datarex s'engage à faire fabriquer les dix premiers exemplaires du SER par AL', au prix unitaire maximum HT de 28 000 euros sans tapis ou 32 000 euros avec tapis ; ' (...) Il sera néanmoins possible pour DX de se délier de son engagement précédent de faire fabriquer par AL les dix premiers exemplaires du SER à tout moment, à condition de verser à AL une somme de 1 500 x (10-N) euros HT, N étant le nombre de machines de séries fabriquées lors de la rupture de l'engagement. Au delà des dix premiers exemplaires, et après consultation d'autres fabricants, Ateliers [F] aura la préférence de fabrication à prix égal par rapport au moins disant pendant au moins un an.'
La pièce 124 de l'appelante, non discutée par l'intimée, explique le principe général de fonctionnement du distributeur sur le plan informatique : une carte électonique intégrée au distributeur, gérée par la société [F], reçoit les 'ordres élémentaires' de l'ordinateur de gestion du distributeur géré par la société Datarex et actionne les différents moteurs du distributeur, notamment pour le déplacement du chariot, des spatules ou du tapis ; l'ordinateur de gestion du distributeur gère les emplacements et les stocks des médicaments dans le distributeur et fait le lien avec l'ordinateur de gestion de la pharmacie ; après réception des demandes de médicaments de la pharmacie, il élabore notamment les ordres élémentaires et les envoie sur la carte électronique du distributeur et reçoit les résultats du distributeur.
Sur le retard concernant le premier distributeur :
Il est certain que le premier prototype n'a pas été livré dans les délais contractuellement prévus par la commande dont la société [F] a accusé réception le 13 septembre 2006.
Il ressort des pièces communiquées, consistant pour une grande part en des échanges de mails, qu'à compter du mois de janvier 2007, les ingénieurs/concepteurs de la société [F], par l'intermédiaire de leur dirigeant ou directement, ont collaboré avec M. [E], dirigeant de la société Datarex, sur la conception du prototype, par exemple sur les chemins de courroie ou sur le système de fixation des étagères ou selon mail du 6 février 2007, sur le 'projet de protocole communication', M. [E] adressant alors à la société [F] 'un premier jet' sur le dialogue entre l'ordinateur de la société Datarex et le calculateur de commande d'automatismes suite à ce qu'ils s'étaient dit quelques jours avant.
Si ce dialogue a été momentanément suspendu entre les parties, M. [E] ayant adressé plusieurs mails du 2 mars au 14 mai 2007 en indiquant souhaiter 'avoir des nouvelles', une réunion a pu être organisée à sa demande en mai 2007 comme en justifie la lettre du 13 juin 2007 ; celui-ci, s'y plaignant du retard en observant que 'si la partie mécanique paraît quasi terminée (sous réserve des essais) en mai 2007, il semble que l'on piétine depuis plusieurs mois sur la partie électronique de commande', a incité la société [F] 'à prendre des mesures énergiques' pour avancer dans le projet et débuter les essais après l'été.
A la suite de ce courrier, les travaux ont progressé puisque les premiers essais ont été effectués sur ce premier prototype le 10 octobre 2007, M. [E] écrivant le lendemain à la société [F] en ces termes : 'Notre expérience d'hier est encourageante mais il ya encore un peu de boulot. J'ai noté les points suivants à régler (...)', au moins sept points étant énumérés par ce dernier.
A la suite de ce premier essai, une communication régulière, telle que prévue au contrat, s'est poursuivie par mails ou par des réunions entre M. [E] et les ingénieurs en charge de la fabrication de ce prototype au sein de la société [F] ou directement avec M. [Z] [F], remplacé par son fils [P] au cours de l'année 2009.
L'évolution des travaux a été positive puisque dans un mail du 18 janvier 2008 (pièce 75 de l'appelante), le dirigeant de la société Datarex écrit ainsi à M. [Z] [F] 'Nous progressons régulièrement et sommes près d'atteindre le fonctionnement tel qu'il a été prévu (sauf sur le point de la rapidité où l'objectif n'est pas atteint, plus pour des raisons de bonne utilisation que de possibilités techniques de la machine)'.
Des difficultés ont néanmoins été relevées en particulier sur les spatules au cours de l'année 2008 selon mails des 12 mars (problème de déformation), 7 avril ( réparation des spatules), 11 juin 2008 ('installation de deux nouvelles spatules, plus larges, se déforment moins') 23 juin (modification de leur épaisseur) et 2 septembre 2008 ; M. [E] y évoque encore dans ce dernier mail un problème d'alignement des spatules outre quatre autres points ; des réparations ont dû être effectuées sur 'la machine', l'ingénieur de la société [F] écrivant dans un mail du 26 novembre 2008, qu'elle avait été réparée la veille.
En parallèle, les parties qui ont continué de collaborer ont procédé à des modifications et à des ajustements du prototype, le dirigeant de la société Datarex s'impliquant activement dans la conception et l'adaptation de celui-ci, ce qui justifie, même si l'appelante le conteste, que l'expert ait considéré que sur ces points il était intervenu comme maître d'oeuvre ; par exemple, dans un mail du 30 novembre 2017, sous la pièce 154 de l'appelante, M. [E] demande au dirigeant de la société [F] de faire fabriquer quatre 'ergots' dont il précise toutes les dimensions à visser aux deux extrémités des spatules ' afin de tester l'autre méthode dont je vous ai parlé' ; dans un mail du 4 décembre 2007, l'ingénieur de la société [F] évoque les modifications effectuées à la suite des remarques du dirigeant de la société Datarex, notamment concernant 'les capteurs en bout de plateau du SER' ; dans le mail précité sous la pièce 75 de l'appelante, M. [E] y évoque l'installation de nouvelles étagères nécessitant la fabrication de crémaillères manquantes et indique aussi vouloir 'pour tenter d'améliorer la vitesse, essayer une nouvelle façon de procéder' en demandant à la société [F] de fabriquer des 'ergots' supplémentaires tout en profitant pour 'refaire les ergots centraux' ; dans un mail du 30 avril 2008, il est indiqué qu' 'un nouveau système de détection des boîtes en bout de plateau a été conçu et installé' ; dans un mail du 8 juin 2008 dans lequel M. [E] précise s'apercevoir '( un peu tard!!!) qu'il y a un point très gênant dans la conception de notre protocole de communication entre mon Pc et votre système', il conclut ce message en indiquant que 'l'idéal serait qu'il y ait 2 ports RS 232, un pour la conduite générale (extraction, rangement), l'autre pour la conduite au tapis', s'inquiétant de savoir si c'est 'encore faisable sans tout bouleverser''. Ce système a finalement été modifié bien que la société [F] ait observé, dès le 11 juin, que cela impliquait ' beaucoup de modifications électroniques'.
Certaines de ces modifications ont été relevées par l'expert et comme il l'a indiqué, il doit être considéré que ces spécifications supplémentaires ou ces modifications sont significatives par rapport à ce qui était prévu à l'origine et qu'en tout état de cause, ces ajustements ont nécessairement rallongé le temps de fabrication de la machine. Ainsi s'il est constant que les délais d'études et de fabrication du prototype ont été largement dépassés, cet allongement des délais ne peut être reproché exclusivement à la société [F] quand bien même il ressort de certains échanges qu'au moins à certaines périodes, l'intimée n'a pas consacré des moyens toujours suffisants, notamment en personnel, sur la poursuite de ce projet, l'ingénieur de la société [F] évoquant par exemple, dans un mail du 27 mars 2008 son manque de disponibilités sur le prototype en raison de son travail 'sur d'autres affaires' .
S'agissant par ailleurs de la question de la mise au point par la société Datarex du logiciel de gestion, si le contrat rappelle effectivement que celle-ci n'entre pas dans le périmètre du prototype à réaliser, il n'en demeure pas moins, au vu de l'explication rappelée ci-dessus à propos de la pièce 124 de la société Datarex et comme l'expert a pu le relever, que le fonctionnement du distributeur de médicaments est dépendant du bon fonctionnement du logiciel de gestion des stocks et des emplacements. Si la société Datarex conteste également les conclusions de l'expert sur ce point, il ressort cependant des pièces communiquées par les parties, en particulier des factures émises par la société Data conseil au nom de la société Datarex, que de 2007 à 2009 la mise au point du logiciel n'était pas finalisée, ces factures datées des 8 décembre 2008, 5 décembre 2007 et 21 décembre 2009, correspondant à 'la réalisation du logiciel de gestion pour le distributeur', aux 'tests et mise au point sur site logiciel robot'et enfin, à la 'suite du développement gestion robot' ainsi qu'au 'développement protocole CD-API interface'. Il est également communiqué une facture datée du 21 décembre 2010, établie pour un montant moindre, pour ' la poursuite du développement du logiciel robot et tests sur site'.
Ainsi, comme relevé par l'expert, le logiciel a été développé en même temps et dans le prolongement de l'étude et de la réalisation du matériel. Les mails datés du 4 décembre 2007 démontrent que les essais ont nécessité qu'ils soient opérés en utilisant le programme du logiciel élaboré par la société Datarex. D'ailleurs celle-ci était consciente de la nécessité d'opérer cette liaison entre le logiciel qu'elle était chargée de mettre au point au travers de la société Dataconseil et le prototype puisqu'elle a fourni à la société [F], au cours du premier trimestre 2008, un programme dénommé Endurance ; celui-ci était encore en cours de finalisation en mars 2008 , M. [E] évoquant dans un mail du 12 mars 2008 un programme 'un peu brut de fonderie' en précisant qu'il allait ' faire quelques modifs pour le rendre plus simple à utiliser et envoyer une nouvelle version'. Le mail adressé par M. [E] à la société [F] le 8 juin 2008 démontre l'importance et la nécessité de tester le prototype en faisant le lien avec le logiciel, ce dernier écrivant s'apercevoir à cette date '(un peu tard!!!)qu'il y a un point très gênant dans la conception de notre protocole de communication entre mon PC et votre système (...)'. Un mail du 19 mars 2009 dans lequel M. [E] évoque 'une erreur' de son programme confirme l'utilité, pour la bonne fin des essais, du programme de la société Datarex, de même que les mails échangés le 1er juillet 2010 entre le directeur commercial de la société [F] et M. [E]. A l'occasion d'essais réalisés en octobre 2010, ce dernier indiquait d'ailleurs faire 'également la chasse aux améliorations' dans ses programmes.
Il est ainsi certain, comme relevé par l'expert, que l'absence de 'terminaison du développement du logiciel a contribué à rallonger les délais de développement de ce matériel, non seulement pour le premier prototype mais également d'ailleurs pour le second.
Il a été de nouveau procédé à des essais au cours du premier semestre 2009, les 26 janvier 2009 et 24 mars 2009 selon mails des 28 janvier et 25 mars 2009 qui, selon M. [E], 'semblaient satisfaisants' pour le premier et pour le second, était 'globalement satisfaisant sur six grands cycles, cad 54 déplacements de contenu d'étagères' avec cependant 'des perturbations' ou des réserves énumérées par ce dernier.
Sur la décision de fabriquer un second distributeur et les éléments contractuels le concernant :
Dans deux mails des 12 et 15 juin 2009, M. [E] évoque la démonstration effectuée auprès d'un pharmacien à [Localité 5] en expliquant 'qu'elle s'est bien passée' et que celui-ci est d'accord pour être 'pilote' et 'qu'en conséquence, il va falloir terminer le produit et construire certainement une première nouvelle machine car je garderai le proto pour des essais dans mes locaux' et 'pour les tests de modification' comme précisé dans son second mail.
C'est dans ces conditions qu'il a été envisagé, à l'initiative de la société Datarex et non de la société [F], la fabrication d'un second distributeur et que la première, par mail du 22 juin 2009 communiqué par l'intimée, a demandé à la société [F] une 'proposition chiffrée pour la machine (entière y compris vitres et habillage)' qu'elle entendait lui commander.
Cette demande démontre la confiance que la société Datarex mettait toujours dans le travail de la société [F] dont elle n'a pas ainsi souhaité dénoncer le contrat initial malgré le dépassement important des délais, ce qui établit que le travail en parfaite collaboration se poursuivait entre les deux sociétés quand bien même le premier prototype n'était pas totalement terminé, les parties ayant convenu le 23 décembre 2009 que celui-ci resterait 'définitivement en l'état' sans être équipé de ses habillages et de toutes ses vitres selon compte-rendu dont la société Datarex ne conteste pas les termes puisqu'elle le cite en page 49 de ses écritures, à l'appui de la contestation opposée au paiement de la facture soldant le premier contrat.
Dès le lendemain du 22 juin 2009, le dirigeant de la société [F] a répondu au dirigeant de la société Datarex en lui indiquant qu'il 'n'était pas évident de lui communiquer un prix par retour, sans entrer dans tous les détails des composants' et en lui signalant les délais incompressibles de fabrication compte tenu notamment des congés d'été et les délais d'approvisionnement. Les parties ayant décidé de se rencontrer dans les jours qui ont suivi, le dirigeant de la société [F] a proposé un prix à hauteur de 66 600 euros HT par mail du 9 juillet 2009, lequel a été négocié par M. [E] par mail du 15 juillet 2009 ; les parties ont de nouveau échangé par mails des 27 et 28 août 2009, le nouveau dirigeant de la société [F] faisant notamment état d'une erreur de chiffrage dans le devis puis de nouveau les 16 et 17 septembre 2009 et à la fin du mois de septembre ; le 30 septembre 2009, la société [F] a proposé un devis au prix de 55 000 euros HT, comme annoncé par son courrier du 17 septembre 2009.
Après avoir indiqué par mail du même jour qu'il passait commande 'dès aujourd'hui' et qu'il renverrait le devis signé avec le chèque d'acompte tout en observant que le devis était 'quelquefois difficilement lisible à cause de la répétition systématique de la lettre t', M. [E] n'a pas procédé au règlement annoncé.
Finalement, à la suite de l'envoi d'un nouveau devis le 23 décembre 2009 et de nouvelles discussions, les parties s'étant rencontrées le 25 janvier 2010, le dirigeant de la société Datarex a accepté ce dernier devis et l'a renvoyé signé, avec la mention 'bon pour accord', à la société [F] le 12 février 2010. Dans son mail daté du 26 janvier 2010, M. [E] indique avoir bien noté que la livraison de ce second distributeur 'interviendra d'ici 3 semaines (...) ce qui nous permettra d'envisager l'installation chez le pharmacien-pilote première quinzaine de mars.' Cette dernière précision a été acceptée par la société [F] par courrier du 28 janvier 2010, le dirigeant de la société Datarex ayant conditionné son paiement de l'acompte à cette confirmation.
Aucun retard n'est imputable à la société [F] dans l'établissement de ce devis qui a été soumis à la libre discussion des parties, ce délai de négociation ayant également participé au retard de la fabrication du prototype
Ce devis accepté par la société Datarex, prévoit que le prix de 55 000 euros HT correspond aux conditions de fournitures suivantes :
- les vitres, comprises dans la fourniture, sont livrées chez le client pharmacien désigné par la société Datarex,
- la livraison est franco de port en Ile de France,
- le prix comprend la fourniture par la société [F] des prestations de montage et de mise en route électro-mécanique du distributeur sur site en Ile de France,
- le distributeur est garanti un an en pièce et main d'oeuvre. Cette garantie est une 'garantie usine',
- le prix comprend la fourniture par la société [F] pendant les trois premiers mois suivant l'installation, de prestations d'intervention à la demande expresse de Datarex, sur le site du distributeur en Ile de France dans les délais suivants :
* un jour ouvré pendant la première semaine à partir de la date d'installation du distributeur,
* deux jours ouvrés les semaines suivantes,
le devis prévoyant qu'un acompte de 20 % conditionne l'acceptation de la commande par la société [F].
Sur le retard affectant le second distributeur :
Le 30 mars 2010, comme constaté par mail de M. [E], la construction du second distributeur n'était pas terminée. Par mail du 22 avril, la société [F] a cependant informé ce dernier de la réalisation le lendemain 'des opérations de finalisation de réglages mécaniques' et que la machine serait disponible pour les essais de la société Datarex à partir du mercredi suivant, planning qui a été respecté ; M. [E], ayant noté par mail du 27 avril 2010 que les 'tests de mise au point sont terminés' et indiqué n'être disponible pour 'venir tester à son tour' qu'à compter du 4 mai 2010, s'est rendu à cette date dans les locaux de la société [F].
Les mails échangés entre la société [F] et M. [E] entre le 10 mai 2010 et le mois de juillet 2010 ont cependant révélé de nouveaux dysfonctionnements qui ont nécessité de nouvelles interventions, notamment en mai 2010 sur les spatules qui ont dû être réparées, renforcées et remontées avant d'être de nouveau 'opérationnelles' après de nouveaux tests le lendemain (mail du 11 mai 2010), un 'problème de positionnement vertical' ou encore l'apparition de limaille ; des réglages étaient également à revoir ; dans un mail du 27 mai 2010, il était évoqué par M. [E] 'un bruit vibrant parasite', celui-ci demandant à ce qu'il faille 'absolument éliminer ce bruit qui n'existait pas sur le numéro 1'.
Par mail du 17 juin 2010, la société [F] a indiqué que la machine était en état pour que M. [E] puisse continuer ses essais.
A l'occasion de tests pratiqués le 28 juin 2010, il a été constaté que 'les spatules avaient un problème' et que la porte à l'entrée du tapis se bloquait comme précisé par M. [E] qui déplore dans ce mail du 29 juin 2010 adressé à l'ingénieur de la société [F], que 'ce distributeur n° 2 marche beaucoup moins bien que le numéro 1 ', relevant que 'des tas de pbs (problèmes) dont les pbs de positionnement qui n'existaient pas sur le n°1 sont apparus sur le n°2 et ne sont toujours pas réglés' et déplorant d'avoir été décrédibilisé auprès de 'deux pharmaciens cobayes'. Attendant ' des nouvelles' pour savoir quelles mesures seraient prises par la société [F], M. [E] a doublé son mail d'une lettre recommandée dans laquelle il détaille les 'problèmes' affectant le distributeur en demandant à la société [F] qui en a signé l'avis de réception le 2 juillet 2010 si elle allait ' mettre enfin les moyens pour aboutir positivement dans cette affaire '' et lui expliquant le 'préjudice certain' que lui causaient tous ces problèmes.
Des tests ont repris à la rentrée de septembre et ont été positifs, M. [E] évoquant, dans deux mails du 13 octobre 2010 à propos de sa visite de la veille dans les locaux de la société [F], que 'globalement le bon fonctionnement du distributeur a été confirmé au cours des essais de la journée' tout en notant qu'il restait à 'optimiser la rapidité', qu'il y avait 'encore des améliorations à rechercher' et qu'il était également important de penser à 'la carrosserie' du distributeur dès lors qu'il paraissait ' difficile d'installer le pharmacien pilote avec un habillage de pacotille car il aurait tout de suite mauvaise impression et il serait gêné par le bruit' ; il y écrit aussi faire de son côté 'également la chasse aux améliorations' dans ses programmes ; par mail du 22 novembre 2020, la société Datarex a demandé à la société [F], à la demande du 'pharmacien pilote' de lui confirmer la date d'installation en fonction de 'l'avancement habillage et tapis de sortie', son dirigeant insistant sur l'urgence à indiquer à ce professionnel la date prévisionnelle de livraison.
La société Datarex a commandé, selon accusé de réception de commande par l'intimée du 21 décembre 2010, l'étude et la fabrication de l'habillage du distributeur avec une date de livraison prévue le 28 janvier 2011 d'après le devis, l'étude et la fabrication d'un tapis roulant de récupération outre diverses études et pièces, toutes répertoriées sous la mention 'évolutions distributeur décembre' dont la livraison était prévue le 28 janvier 2011 ou le 15 avril 2011 selon les pièces, pour un montant total de 16 506,55 euros HT.
Dans un mail du 5 janvier 2011, la société [F] a répondu à la société Datarex, qui lui demandait la veille si l'installation pouvait débuter le 17 janvier suivant chez le pharmacien, qu'il pouvait planifier le début de l'installation du distributeur à partir du 24 janvier, ajoutant que 'plus tôt serait trop risqué.' Cependant huit jours plus tard, M. [E] a informé sa partenaire que ce qu'il craignait était arrivé et que 'le pharmacien pilote s'est lassé d'attendre (...) et ne veut plus rien savoir pour le moment,' ajoutant qu'il allait 'en chercher un autre mais que ça allait prendre du temps (...) Mais que pour avancer il fallait 'finaliser l'habillage. '
Dans la suite de ce mail, les équipes de la société [F] ont travaillé sur cet habillage, M. [E], dans un mail du 16 mars 2011, qui avait pu voir le distributeur la veille félicitant les ingénieurs en ces termes 'Bravo d'abord pour le résultat. C'est pas mal du tout ! L'ensemble est assez esthétique ; l'intégration est intelligemment pensée', même s'il restait 'des points de détail à améliorer'. Il se disait cependant un peu déçu du résultat au niveau du bruit qui avait 'certes légèrement diminué' mais restait 'important', M. [E] formulant des propositions pour y remédier.
Par mail du 29 août 2011, ce dernier, encore en vacances, a informé la société [F] qu'il avait 'peut-être trouvé un candidat pharmacien pilote et qu'il l'emmènerait ' voir une démo du robot vers le 15 septembre' et qu'en attentant, il faudrait 'mettre à profit l'intervalle pour accélérer au maximum le tapis d'éjection des produits (changement de roue d'entraînement)' ; il y écrivait également que dès son retour, il s'occuperait du règlement des factures de la société [F].
Etant souligné que ce pharmacien n'a pas donné suite, de nouveaux essais ont eu lieu puisque par mail du 26 octobre 2011, M. [E] qui indiquait poursuivre les tests le lendemain rappelait qu' 'au cours des derniers essais, il semble que le SER accroche qque (quelque) chose (le profilé vertical') en se déplaçant d'un module à l'autre ; peut-être est-ce dû à la légère surépaisseur causée par la tige rajoutée pour le maintien des étagères''
Le 31 octobre 2011, celui-ci a adressé un nouveau 'mail pour servir de pense-bête' suite aux essais du 27 octobre, relevant que 'LES VITRES NE SONT PAS TENUES!!! les pièces qui les maintiennent ne sont pas assez larges. C'est cela qui provoque les heurts du SER lorsqu'il se déplace (et non ce que j'avais indiqué dans mon mail précédent)' ; 'les spatules heurtent' les panneaux d'habillages ; 'les commandes d'arrêt et de mise en route du tapis d'éjection doivent pouvoir se faire par la sortie RS principale (...)'
Par mail du 1er février 2012, communiqué par l'intimé, M. [E] a informé la société [F] s'être renseigné pour participer au stand Pharmagora organisé du 24 au 26 mars 2012, demandant si cela convenait à l'intimée ; il a finalement renoncé à cette participation bien que le dirigeant de la société [F] ait donné son accord, par mail du 12 février 2012, pour y participer.
A cette période, au vu des mails des 7,9 et 12 février 2012, les parties étaient encore en discussion sur la fourniture des baguettes destinées à tenir les vitres du distributeur que le dirigeant de la société Datarex a proposé de régler.
Un mail du 2 mars 2012 de M. [E] mentionne encore le constat à l'occasion de ces tests d''un problème de spatules' dont l'origine est ignorée ; cependant comme l'admet la société Datarex en page 9 de ses écritures, le distributeur 'semblait provoquer moins d'incidents', ce qui a conduit son dirigeant à reprendre contact avec le pharmacien pilote initial, M. [W] à [Localité 5], lequel a accepté l'installation du distributeur dans ses locaux, ce qu'il a annoncé à la société [F] par mai du 2 avril 2012 dans lequel il évoque une installation fin mai en lui demandant d'évaluer le coût de cette installation.
A la suite d'une réunion organisée le 3 mai 2012 dont le compte-rendu a été effectué dans un mail du lendemain par la société [F], diffusé notamment au dirigeant de la société Datarex qui ne l'a pas contesté au vu des mails qui ont ensuite été échangés entre les parties, en particulier entre les 16 et 31 mai 2022, il a été décidé d'un commun accord :
- de la livraison du distributeur 2 dans les locaux de la pharmacie 'avant la fin de la semaine 23', c'est-à-dire du 4 au 10 juin 2012, étant toutefois précisé que 'des travaux d'aménagement du site-pilote, préalables indispensables à l'installation de ce prototype, sont en cours' ;
- dans un paragraphe intitulé 'IMPORTANT' que 'Datarex était responsable de l'installation et du fonctionnement de son prototype chez le pharmacien-pilote avec lequel elle s'est entendue, tout comme des conséquences de ces opérations pour le pharmacien-pilote. L'ordre de livraison/installation donné à ARL implique, en particulier, que Datarex s'est assurée, par tous les moyens qu'elle juge appropriés, que le site-pilote remplit les conditions nécessaires et suffisantes pour recevoir sans risque cette machine compte tenu de ses caractéristiques (dimensions, poids,etc) (...)';
- les actions confiées à la société Datarex qui devait notamment confirmer à la société [F] 'la date limite d'installation (achèvement des travaux du site-pilote)' ;
- les points techniques à revoir avant l'installation, les quatre actions énumérées étant confiées à la société [F].
Il y a en outre été rappelé la demande, par mail de M. [E] du 2 mars 2012, de la fourniture de la documentation technique du distributeur, la société [F] devant s'en occuper ; celle-ci a également confirmé 'le remplacement des baguettes actuelles'.
Il convient d'ores et déjà de relever, au vu de ce compte-rendu et des mails ensuite échangés, que contrairement à ce que prétend la société Datarex qui se prévaut du contrat d'origine portant sur le second distributeur dans lequel il est mentionné que 'le prix comprend la fourniture par la société [F] des prestations de montage et de mise en route électro-mécanique' sur site, les parties ont convenu que l'appelante qui était en charge des travaux nécessaires pour que les locaux puissent recevoir sans difficulté le distributeur et supporter notamment le poids et les éventuelles vibrations induites par la machine en fonctionnement, serait ainsi responsable de son installation. Elle ne justifie pas avoir contesté la teneur de ce compte-rendu lorsqu'il lui a été transmis.
Au cours du mois de mai, les parties ont discuté de la date d'installation ; par mail du 31 mai 2012, M. [E] a indiqué 'avoir pensé utile de renforcer le plancher, le poids étant élevé (essentiellement à cause des étagères en verre : il faudra qu'on étudie la possibilité d'un autre matériau par la suite)' et attendre 'le délai de livraison de poutres et dalles métalliques de renfort', espérant avoir la réponse 'sous quelques jours'. Par un second mail du même jour, il a demandé à la société [F] de faire une estimation du poids du distributeur à vide (sans vitres) ; par mail du 4 juin 2012, le directeur commercial de l'intimée a fait état d'un poids à vide 'de l'ordre de 800 kgs' en engageant M. [E], 'par précaution, à prendre une sécurité de 15 %' et en joignant à ce mail un plan du distributeur localisant les pieds sur lesquelles il repose avec leur dimension.
Finalement, ce n'est que le 16 octobre 2012 qu'il a été confirmé à la société [F] que la pharmacie était en état pour l'installation qui a commencé le 22 octobre suivant ; elle a établi un devis le même jour pour la prestation de déménagement du distributeur à hauteur de 1 500 euros.
Après différents tests et interventions, notamment en novembre 2012 sur les spatules et les derniers réglages, l'installation a été complètement finalisée le 5 décembre 2012 selon procès-verbal de livraison signé avec la mention 'installation terminée, produit opérationnel'.
Il se déduit de ce rappel chronologique depuis l'acceptation du devis concernant le second distributeur que si le retard apporté à la livraison est indéniable, plusieurs facteurs y ont contribué; celui-ci résulte non seulement de défaillances de la société [F], notamment dans la fabrication mécanique du distributeur, la société Datarex profitant de ces délais pour améliorer les programmes de son logiciel, comme indiqué précédemment à propos de l'examen des interactions entre la conception du prototype et celle des logiciels, mais aussi par des modifications qui ont été apportées sur ce distributeur, constatées par l'expert en page 33 de son rapport, à savoir la réalisation d'un tapis roulant de récupération, le nombre d'étagères de 25 à 240, la pose d'un nouvel habillage, la conception d'un éclairage intérieur et le remplacement de la porte battante par un volet roulant. Outre que la société Datarex ne discute que des modifications concernant cette 'porte battante' et l'habillage du distributeur, il ressort de l'analyse précédemment détaillée que ce n'est qu'en octobre 2010 que la société Datarex a sollicité une évolution du projet sur l'habillage du distributeur, celui-ci étant au demeurant décrit sommairement dans le cahier des charges initial qui mentionne 'une esthétique convenable' ; le mail communiqué sous la pièce 55-84 de l'intimée prouve qu'effectivement il avait été demandé par la société Datarex de remplacer la porte battante par un volet.
Il est certain, comme relevé par l'expert et par la cour à propos du premier distributeur, que ces modifications ont entraîné un allongement des délais et des retards, ce qui a eu nécessairement une
incidence dans le fait que la société [F] n'est pas parvenue à finaliser le distributeur suffisamment tôt de sorte que le pharmacien initialement choisi a renoncé, temporairement, à être 'pilote' de ce projet. Si les différents problèmes mécaniques rencontrés sur ce second distributeur, certains étant récurrents par rapport au premier prototype, sont imputables à la société [F] et ont perturbé l'avancement du projet, ils ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résolution du contrat, la société Datarex ayant d'ailleurs entendu poursuivre les relations contractuelles et la collaboration technique avec la société [F], son dirigeant s'étant employé à rechercher, à la suite du désistement du premier pharmacien, une nouvelle pharmacie pour y implanter le distributeur.
Les difficultés de M. [E] pour trouver un pharmacien 'pilote', ses recherches ayant duré plus d'un an et ensuite le délai des travaux entrepris pour aménager les locaux destinés à accueillir le distributeur ont également contribué à retarder la finalisation de l'installation du distributeur de sorte que la cour considère, comme d'ailleurs l'expert l'a retenu dans la conclusion générale de son rapport, que les différents retards sur les développements du premier comme du second prototype sont imputables à l'une et à l'autre des sociétés [F] et Datarex qui ont de part et d'autre géré la fabrication, la conception puis l'installation de la partie mécanique et de la partie 'logiciel' de ces matériels.
La résolution de ces deux contrats ne peut donc être prononcée aux torts exclusifs de la société [F] sur le fondement du retard dans la fabrication et l'installation des distributeurs.
Sur le grief tenant au fonctionnement des distributeurs :
Les dysfonctionnements techniques constatés à l'occasion de l'étude relative au retard de la livraison des deux distributeurs et imputables à la société [F] ne peuvent pas plus justifier le prononcé d'une résolution de l'un ou l'autre de ces contrats dans la mesure où, comme relevé précédemment, la société Datarex n'a pas remis en cause la poursuite de la relation contractuelle qu'elle a maintenue jusqu'à la mise en service du second distributeur dans les locaux de la pharmacie 'pilote', étant en outre souligné que la fabrication d'un prototype nécessite par essence des études préalables et des tâtonnements dans la conception puis dans la réalisation de celui-ci.
S'agissant des dysfonctionnements constatés après la livraison du distributeur dans les locaux de la pharmacie 'pilote', les parties s'opposent sur leur origine, la société [F] soutenant qu'ils sont dus à des déformations de la structure, ce que conteste formellement la société Datarex.
Il doit être relevé en préalable qu'il a pu être remédié rapidement, après intervention des ingénieurs de la société [F], à deux des dysfonctionnements signalés en page 47 des écritures de la société Datarex, l'un d'eux au demeurant, qui concerne un mauvais positionnement des spatules, était antérieur à la livraison du matériel puisque constaté le 15 novembre 2012 et réparé le 20 novembre 2012. Le second, signalé le 19 décembre 2012, a été rectifié le 8 janvier 2013 ; il concernait 'un problème de communication' entre l'ordinateur de commande de la société Datarex et le dispositif électronique du fournisseur et n'était dû qu'au positionnement de cette carte électronique dont un 'sous-ensemble s'était délogé lors des opérations de démontage/ transport/remontage de la machine' à l'occasion de sa livraison.
Il n'est fait état d'aucun autre dysfonctionnement signalé par le dirigeant de la société Datarex jusqu'au cours du mois de mars 2013 et l'envoi d'un premier mail du 5 mars 2013 puis d'un second, le 20 mars 2013, ce dernier alertant la société [F] d'un 'blocage complet et définitif du chariot dans un déplacement horizontal' depuis la veille.
Par lettre recommandée du 11 avril 2013, la société Datarex a mis en demeure la société [F] de réparer ce matériel après avoir rappelé l'historique du dossier et en lui reprochant de refuser d'intervenir en exigeant le paiement d'une somme de 22 835,55 euros alors que la recette définitive n'était pas prononcée puisque le distributeur était en arrêt total.
Les équipes de la société [F] qui sont intervenues les 2 et 14 mai 2013 ont constaté d'une part ce blocage dû à un amas de matière provoqué par 'un frottement du haut du chariot sous le rail de guidage' et d'autre part que 'le sol où repose la structure est fait de plaques d'acier qui reposent sur des IPN et parfois sur des cales en bois' et que 'ces plaques se déforment facilement', relevant que 'la mise en place des étagères en verre a ajouté un poids considérable qui a affaissé le sol déformant ainsi la structure.'
Il ressort des compte-rendus des réunions d'expertise que l'expert, lors de la réunion du 8 juillet 2015, a pu constater l'état du sol sur lequel repose le système, à savoir un sol béton avec carrelage sur lequel ont été mis en place des fers IPN dans le sens transversal et scellés en extrémité au niveau du mur avec des espacements de 40 centimètres, sur lesquels ont été positionnées des plaques métalliques 'avec calage par des éléments bois des jonctions entre les plaques' ; 'l'ensemble du système repose ensuite sur ce plancher avec des piétements réglables'.
Les essais de fonctionnement de la machine, encore installée dans la pharmacie [W], lors de la réunion du 30 novembre 2015 n'ont pas pu être effectués d'une part pour des problèmes concernant les débrayages de motorisation dont l'origine n'a pas pu être déterminée et d'autre part pour des problèmes relatifs à des défauts de positionnement ayant entraîné des chocs sur les spatules et son défaut de fonctionnement. L'expert a cependant observé que ces désordres ne sont pas systématiquement liés à la conception même du matériel et peuvent être imputés au fait que ce matériel était en stockage sans fonctionnement et nécessitait une remise en tests de l'ensemble de ses fonctions, ce qui est effectivement cohérent ; la société Datarex ne verse pas aux débats un avis technique contraire.
Des travaux importants étant prévus au niveau de la pharmacie qui a demandé à ce que le matériel soit retiré, l'expert a convenu, en accord avec l'ensemble des parties comme il le confirme expressément pour répondre à la contestation émise par la société Datarex dans son dire n° 13, de le faire démonter et remonter par la société [F] dans ses locaux ; c'est dans ces circonstances qu'une nouvelle réunion a eu lieu le 5 septembre 2016 pour procéder aux constatation sur le remontage du 'robot' et à des tests de déplacement ; il a été convenu de différents tests de simulation, définis avec les parties, lesquels ont été réalisés lors de la réunion du 17 novembre 2016, l'expert ayant repris sur un tableau les différents déplacements du cycle de tests qui ont été réalisés sur vingt cycles, 'sans problème particulier de fonctionnement' ; les mesures de contrôles des déplacements effectués montrent des déplacements et des cycles de fonctionnement conformes par rapport aux tolérances dans les divers déplacements, au vu des relevés figurant dans le tableau; s'il est observé par la société Datarex qu'une mesure présente une anomalie (de 21 mm), l'expert a expliqué que celle-ci, réalisée pratiquement à deux mètres de hauteur, pouvait laisser envisager une erreur du relevé ; cette seule erreur n'est donc pas significative d'un dysfonctionnement. De plus, si la société Datarex évoque encore, comme au cours de l'expertise, le changement de pièces par la société [F], l'expert a notamment 'constaté' à la fin de cette réunion avec le conseil de la société Datarex que 'le profil existant au niveau de la pharmacie était bien celui remonté actuellement sur le robot'.
A l'occasion de cette réunion, l'expert a précisé que si effectivement il avait été constaté, comme le souligne la société Datarex, que le plancher de la pharmacie était horizontal, le montage qui avait été mis en place (plaques métalliques placées sur les profilés IPN) ne correspondait pas techniquement à une bonne stabilité pour ce type de robot qui est composé d'un assemblage de profilés aluminium ne permettant pas d'avoir une rigidité globale dans sa conception et pour lequel le sol sur lequel il est mis en place doit permettre d'assurer, après réglage, une surface stable sur l'ensemble des piétements et une absence totale de mouvement ; que ce n'était pas le cas sur les plaques métalliques non soutenues de manière rigide qui peuvent entraîner des déformations globales de la structure d'assemblage du robot, l'expert ajoutant en outre en page 40 de son rapport que les IPN, scellés au niveau des murs latéraux, ne reportent pas leur charge sur le plancher mais sur les murs latéraux du bâtiment et que les plaques reposent directement sur les IPN sans liaison entre elles.
Il a considéré qu'il était ainsi 'évident qu'avec ce type de mise en place d'IPN et de plaques métalliques, les vibrations de fonctionnement d'automate ne sont pas reprises correctement par les piétements et le sol et peuvent entraîner les dysfonctionnements qui ont été constatés lors des essais réalisés au niveau de la pharmacie'. La société Datarex ne peut valablement s'opposer à cet avis de l'expert en arguant qu'il n'a jamais constaté de vibrations du sol et que sa conclusion 'est de la pure spéculation' alors même que celui-ci donne une explication technique fondée tant sur la structure du sol que sur celle du distributeur et que là encore la société Datarex n'apporte aucun avis technique contraire.
Les tests organisés après démontage puis le remontage du distributeur dans les locaux de la société [F], sur une dalle en béton, ont d'ailleurs permis de montrer que son fonctionnement global était normal et correct, ce qui démontre, comme relevé par l'expert, que les problèmes de fonctionnement au niveau de la pharmacie étaient en relation avec les vibrations en rapport avec le sol qui, bien que pouvant supporter la charge de cet appareil, ne permettait pas d'obtenir l'absence de vibrations entre le sol et le robot.
Dans ces circonstances, la société Datarex ayant accepté en mai 2012 de s'assurer de l'adaptation des travaux dans les locaux de la pharmacie au poids et au fonctionnement du distributeur, la société [F] l'ayant informée du poids de celui-ci en l'invitant à prendre 'une marge de sécurité', la résolution des contrats ne peut être fondée sur les dysfonctionnements allégués à l'encontre des appareils fabriqués par la société [F], étant observé que la société Datarex a considéré que le premier distributeur était suffisamment performant lorsqu'elle a sollicité la réalisation d'un second.
Le troisième grief invoqué par la société Datarex :
Enfin, le non respect de différentes spécifications prévues au cahier des charges ne constitue pas un manquement suffisamment grave empêchant le fonctionnement du distributeur pouvant justifier la résolution des contrats.
Il se déduit de l'ensemble de cette analyse que comme l'expert l'indique en conclusion générale de son rapport, les différents retards et difficultés sur les développements des prototypes ayant fait l'objet d'un contrat entre les sociétés Datarex et [F] sont imputables à l'une et l'autre des parties, toutes deux ayant commis des manquements dans l'exécution de leurs relations contractuelles.
Par conséquent, la société Datarex sera déboutée de sa demande de résolution, aux torts exclusifs de la société [F], des deux contrats convenus entre elles, le jugement étant confirmé de ce chef.
Sur les demandes en paiement de la société [F] :
La société Datarex conteste les factures retenues par le tribunal en développant pour chacune les motifs de sa contestation pour le cas où la cour examinerait les demandes en paiement de l'intimée. A titre subsidiaire, elle estime que le jugement est empreint d'une incontestable contradiction dès lors qu'ayant retenu un partage de responsabilité entre les parties sur les retards, il ne pouvait pas la condamner à lui payer l'intégralité des sommes demandées mais seulement la moitié.
S'agissant de l'appel incident de la société [F], elle fait valoir que cette demande revient à vouloir lui faire payer les conséquences de son retard dû à ses propres insuffisances de sorte que la cour devra confirmer le jugement de ce chef, d'autant plus qu'en appel, la société [F] a considérablement réduit l'évaluation de son préjudice. Elle examine ensuite chacun des postes de demande de l'intimée.
La société [F] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Datarex à lui payer la somme de 37 584,47 euros correspondant à diverses factures sur le prototype n° 1 à hauteur de 14 067,20 euros et sur le second prototype pour les autres, en répondant aux arguments de la société Datarex pour chacune de ces factures.
Elle demande à la cour d'infirmer en revanche le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande en paiement de la facture relative à un panneau d'habillage d'un montant de 436,54 euros ainsi que ses demandes indemnitaires, qu'elle limite en appel en sollicitant la condamnation de la société Datarex à lui verser une indemnité globale et forfaitaire de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi.
Sur les factures correspondant au montant de la condamnation prononcée par le tribunal à hauteur de la somme de 37 584,47 euros :
Il convient d'examiner le bien fondé de cette demande facture par facture.
* facture 711059 du 28 novembre 2007 relative au solde restant dû au titre du prototype n° 1 :
La société Datarex qui rappelle dans quelles conditions les parties avaient convenu du paiement du solde restant dû sur le premier prototype bien que la recette provisoire puis définitive n'aient pas été établies, fait valoir que la société [F] n'ayant rempli aucune de ces conditions, elle lui a demandé d'établir un avoir le 9 décembre 2011 ; elle souligne que le fait qu'elle ait commandé le distributeur n°2 ne vaut pas reconnaissance que le premier distributeur fonctionnait normalement, rappelant à cet égard l'accord des deux parties le 23 décembre 2009 pour que celui-ci reste 'chez la société [F]' pour y faire les mises au point nécessaires.
La société [F] souligne que malgré ses promesses la société Datarex n'a pas réglé cette facture, qu'elle a même 'osé' demandé un avoir correspondant au montant de cette facture et que le paiement n'en est jamais intervenu puisque cette dernière a unilatéralement décidé de le conditionner à la réinstallation du distributeur dans d'autres locaux alors qu'elle a été incapable d'en trouver un ; elle se prévaut également des conclusions de l'expert selon lequel le distributeur n° 1 a été livré entièrement et sans contestation sur sa fonctionnalité puisque la société Datarex a commandé le distributeur n°2.
Il est constant que :
- d'après le contrat initial, le solde du paiement du premier distributeur devait intervenir à la recette définitive, celle-ci intervenant lorsqu'il serait 'monté sur site par la société [F] dans une pharmacie test' ;
- la recette définitive n'est jamais intervenue dès lors qu'il a été décidé en juin 2009 de la construction d'un second distributeur destiné à être installé dans la pharmacie ;
- selon compte-rendu du 23 décembre 2009 établi par la société [F] et non contesté par la société Datarex, les parties ont convenu que 'le distributeur n° 1 reste définitivement en l'état, c'est-à-dire, notamment, qu'il n'est pas équipé de ses habillages ni de toutes ses vitres et reste dans les locaux d'ARL pendant le temps nécessaire aux mises au point qui se révéleraient indispensables à l'occasion de l'installation des trois premiers mois de fonctionnement du distributeur n°2' ; les parties n'ont pas alors précisé si cet accord avait une influence sur le paiement du solde de la facture correspondant à ce prototype ;
- le 21 avril 2011, toujours selon compte-rendu effectué par la société [F], la société Datarex s'est dite prête d'une part à régler le solde restant dû sur le premier prototype (14 067,20 euros TTC) sous réserve de la mise à niveau technique de celui-ci, identique au second prototype et incluant 'un habillage (à définir)' et a accepté d'autre part que la société [F] démonte dès maintenant ce distributeur dans l'attente de sa livraison la société Datarex ;
- selon mail du 9 décembre 2011, la société Datarex a sollicité l'établissement d'un avoir pour ce solde litigieux.
Contrairement à ce qu'indique la société [F], le paiement du solde de la facture par la société Datarex n'était pas conditionné au déplacement du prototype dans d'autres locaux mais à sa finition, notamment pour ce qui est de l'habillage.
Il n'est pas démontré par la société [F] qu'elle s'en soit acquitté, les parties s'étant effectivement accordées dans un premier temps sur le fait que le premier distributeur reste en l'état.
Dès lors que ce premier prototype n'a pas été finalisé, la société Datarex est légitime à s'opposer au solde restant dû sur la facture initiale de sorte qu'infirmant le jugement, la société [F] sera déboutée de sa demande à hauteur de la somme 14 067,20 euros.
* solde de la facture n° 10579 du 4 septembre 2011 à hauteur de 3 861,01 euros :
La société Datarex refuse de payer l'autre moitié de cette facture relative au coût de l'habillage dans la mesure où il n'est toujours pas conforme comme l'établit sa pièce 56, les vitres n'étant pas tenues.
La société [F], après avoir rappelé les conditions posées discrétionnairement par la société Datarex pour le paiement de ses factures relatives au second distributeur, explique que dès le mois de novembre 2009 elle a informé M. [E] qu'avec les paramétrages qu'il avait décidé de programmer les spatules pouvaient heurter l'habillage, de sorte que la société Datarex n'est pas fondée à s'opposer au paiement de cette facture pour le motif allégué.
La somme de 3 861,01 euros correspond à la moitié de la facture relative à l'étude et à la fabrication de l'habillage réalisé par la société [F] et dont la société Datarex n'a réglé que la moitié le 13 septembre 2011 en indiquant qu'il n'était 'pas achevé (côté sortie)' ; le motif opposé au paiement du solde dans ses écritures, tel qu'il ressort également d'un de ses mails en date du 31 octobre 2011, tient au fait que 'les vitres ne sont pas tenues! Les pièces qui les maintiennent ne sont pas assez larges. C'est cela qui provoque les heurts du SER' et au fait que suite à la mise en place des panneaux d'habillage, les spatules heurtent ces derniers.
Cependant ces motifs ne sauraient justifier le non paiement du solde de cette facture dès lors que d'une part il ressort de l'étude précédemment effectuée des mails entre les parties que celles-ci se sont mises d'accord, en février 2012, sur la fabrication et la fourniture de nouvelles baguettes pour tenir les vitres dont rien ne démontre qu'elles n'ont pas été menées à bien et que d'autre part, la société [F] justifie avoir averti la société Datarex, par mail du 17 novembre 2009, que les baguettes (spatules) allaient 'cogner contre l'habillage' lorsqu'il y en aurait un, ce qui s'est produit avec le second distributeur.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a retenu le montant de cette facture de 3 861,01 euros TTC.
* facture n° 10577 du 30 septembre 2011 d'un montant de 6 578 euros :
La société Datarex qui précise avoir payé la moitié de cette facture le 13 septembre 2011 refuse d'en payer l'autre moitié car la nomenclature livrée le 29 juin 2011, avec plus de quatre ans de retard, est incomplète, présente des incohérences et ne respecte pas, dès lors que sa valorisation est partielle, les engagements pris par la société [F], notamment par sa lettre du 29 janvier 2010 dont l'expert a omis de tenir compte.
La société [F] soutient que la société Datarex est mal fondée à prétendre que la nomenclature est inexploitable et incomplète au regard des conclusions du rapport d'expertise à cet égard.
Cette facture correspond à 'la livraison, effectuée en réunion le 29 juin 2011, des plans et de la nomenclature détaillée du distributeur', la société [F] y précisant qu'elle communiquait ' tous les éléments de valorisation disponibles, en particulier les achats', facture dont la société Datarex a réglé la moitié.
Il est exact qu'au cours de l'exécution du contrat, comme l'a confirmé par écrit la société [F] dans une lettre datée du 28 janvier 2010, celle-ci s'est engagée à faire parvenir à la société Datarex 'une nomenclature résumée du distributeur schématiquement définie dans ce courrier' avec notamment pour chaque élément 'l'indication des prix correspondant et de la sensibilité du prix à la quantité'; ainsi l'établissement d'une nomenclature prévoyant la valorisation des différents éléments du prototype, si elle n'était pas initialement prévue en ces termes, est devenue une obligation contractuelle en 2010. Cette nomenclature ayant été remise à la société Datarex en juin 2011, celle-ci n'est pas fondée à déplorer un retard de quatre ans et demi.
L'expert qui a examiné les pièces transmises par la société [F], précise en page 39 de son rapport qu'elles 'correspondent, dans leur globalité, à la nomenclature et aux différentes pièces relatives à ce matériel' et aussi que la société [F] a procédé à la 'valorisation sur une partie des éléments' ; ce faisant, il admet que tous les éléments n'ont pas été valorisés comme la société [F] s'y était engagée.
Le caractère partiellement incomplet de la nomenclature ne saurait cependant justifier que la société Datarex s'exonère intégralement du solde restant dû sur cette facture d'autant que la valorisation des éléments était surtout utile à la société Datarex sur le plan commercial, après réalisation des prototypes.
Par conséquent, il convient, infirmant le jugement, de fixer le solde au paiement duquel la société Datarex sera tenue à la somme de 5 778 euros TTC.
* facture n° FA2012-1420 du 31 janvier 2013 d'un montant de 11 960 euros :
La société Datarex, pour contester le jugement de ce chef, expose que le cahier des charges n'avait pas à spécifier sur quel type de sol le distributeur doit fonctionner dès lors qu'il s'agissait d'un sol aux normes standard, que le tribunal a renversé la charge de la preuve en considérant qu'elle ne démontrait pas ' ne pas avoir été informée des contraintes liées à l'installation du prototype', que la société [F] n'est pas fondée à solliciter le paiement d'un matériel non opérationnel qui n'a fait l'objet ni de la recette provisoire ni de la recette définitive, le retard de plusieurs années et les dysfonctionnements étant incontestables.
La société [F] sollicite le paiement de cette facture qui correspond à la livraison et à l'installation du second distributeur dans la pharmacie 'pilote' dès lors que selon les constatations de l'expert, le distributeur était en parfait état de fonctionnement, se référant à ses observations précédentes sur l'installation du distributeur sur un dispositif non adapté.
Si la recette définitive du second distributeur n'a pas eu lieu, il n'en demeure pas moins que la livraison est intervenue le 5 décembre 2012, étant alors noté que le distributeur était opérationnel.
Après quelques réglages supplémentaires, il n'est pas démontré que l'appareil aurait dysfonctionné jusqu'au mois de mars 2013, date à laquelle sont survenus les désordres dont l'origine est imputable, comme explicité précédemment au vu de l'avis de l'expert auquel la société Datarex n'apporte pas de contradiction technique, à la nature du sol sur lequel le distributeur a été installé.
Le cahier des charges ne contenant aucune précision relative au sol sur lequel poser le prototype et les parties ayant convenu que les installations préalables à la livraison de celui-ci étaient exécutées sous la seule responsabilité de la société Datarex, comme relevé précédemment, cette dernière n'est pas fondée à s'opposer au paiement de cette facture.
Par conséquent, il convient, confirmant le jugement de ce chef, de retenir cette facture à hauteur de la somme de 11 960 euros TTC.
* factures FA2013-0688 et FA2013-687 du 21 mai 2013 correspondant aux frais d'intervention des salariés de la société [F] les 2 et 14 mai 2013 suite au blocage du second prototype :
La société Datarex s'oppose au paiement de ces interventions qui font suite à une mise en demeure d'intervenir sous huit jours, faite le 11 avril 2013, pour régler les dysfonctionnements signalés depuis plusieurs mois, la société [F] n'ayant pas respecté le délai contractuel de deux jours, ce qui suffit à justifier le défaut de paiement ; elle rappelle avoir signalé un problème de positionnement le 5 mars 2013, dans le délai de trois mois de l'installation, ajoutant que 'installation ne signifie pas mise en fonction', que la date de départ de l'engagement de délai est la mise en fonction opérationnelle qui n'a jamais eu lieu et que l'installation n'était pas finie.
La société [F] soutient en revanche que ces factures lui sont dues dès lors que celles-ci, réalisées à la demande de M. [E] et ayant fait l'objet d'un compte-rendu qui n'a fait l'objet d'aucune contestation de la société Datarex, n'entrent pas dans le champ de la garantie prévue au contrat puisqu'elles ne visaient ni le défaut d'une pièce ni un défaut de fonctionnement ; elle estime que le tribunal a justement précisé que contrairement à ce que la société Datarex soutient, la commande ne prévoyait la gratuité des interventions dans un délai de deux jours uniquement pendant la période de trois mois suivant l'installation.
Il est constant, selon le compte-rendu qui en a été fait à l'attention du dirigeant de la société Datarex, que le motif des deux interventions de la société [F] des 2 et 14 mai 2013 concernait 'la panne mécanique' signalée par M. [E] en ces termes 'le chariot se bloque en plein milieu en faisant un gros bruit et on sent qu'il bute sur quelque chose' ; ce désordre a été signalé par mail du 20 mars 2013, le mail du 5 mars 2013 concernant une autre difficulté relative à une question de 'positionnement' horizontal et de nouveau signalée le 20 mars suivant, laquelle n'a pas fait l'objet d'une intervention facturée par la société [F].
La commande du distributeur ne prévoyait la gratuité des interventions et un délai d'intervention de deux jours ouvrés que ' pendant les trois premiers mois suivant l'installation du distributeur'.
Cette installation, sans autre précision indiquée au contrat, est intervenue le 5 décembre 2012, le procès-verbal de livraison mentionnant 'installation terminée, produit opérationnel'.
Par conséquent, la société [F], à la date du 20 mars 2013, n'était plus tenue par le délai et la gratuité des interventions de sorte que les factures relatives aux prestations en lien avec cette panne, quand bien même elles n'en ont pas permis la résolution au regard de la difficulté affectant le plancher sur lequel le distributeur a été installé, sont dues par la société Datarex à hauteur de 328,90 euros TTC et 789,36 euros TTC, le jugement étant confirmé de ce chef.
Dès lors que la résolution des contrats n'est pas prononcée, la cour ne peut pas écarter, à hauteur de la moitié, la demande en paiement de la société [F] comme le sollicite l'appelante quand bien même il ne peut être considéré que cette dernière n'a pas commis de faute dans l'exécution du contrat. Il convient, ajoutant au jugement, de débouter la société Datarex de sa demande subsidiaire en paiement de la moitié de la somme de 37 584,47 euros.
Il convient, infirmant le jugement, de condamner la société Datarex à payer à la société [F], au titre des factures restées impayées, la somme de 22 717,27 euros (3 861,01+5 778+11 960+328,90+789,36 euros TTC)
Sur les sommes écartées par le tribunal :
La facture n° FA2012-1419 correspond à la fourniture d'un panneau d'habillage d'un montant de 436,54 euros TTC, la société Datarex qui sollicite le rejet de l'appel incident de la société [F] ne présentant aucune observation à cet égard en appel.
S'il est exact, d'après le compte-rendu qui en est fourni sous la pièce 43 de l'intimée, que la société Datarex, au cours de la réunion du 3 mai 2012, a demandé un panneau en plexiglas pour le panneau d'habillage du système d'éjection, il est aussi indiqué au compte-rendu que la société [F] devait fournir un devis, ce qu'elle ne démontre pas avoir fait. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
A l'appui de sa demande indemnitaire réduite à 50 000 euros, la société [F] invoque :
- la mobilisation d'un ingénieur à temps plein pour les deux distributeurs en expliquant qu'elle avait initialement prévu de consacrer un maximum de cinq mois de mobilisation de ses équipes en vue de la fabrication du premier distributeur et de trois mois pour le second alors qu'en raison des seules fautes et négligences de la société Datarex, la fabrication du prototype a duré plus de deux ans, évaluant ce préjudice à 276 978 euros,
- les frais de stockage, évalués à 100 euros par mois, pour chacun des distributeurs dans ses locaux alors que la société Datarex s'était engagée à récupérer le premier distributeur et que le second distributeur est également dans ses locaux depuis le mois d'octobre 2015,
- les frais de démontage, transport et remontage du distributeur exposés pendant l'expertise qu'elle évalue forfaitairement à la somme de 25 000 euros dès lors qu'elle est intervenue en urgence, précisant avoir versé 13 754 euros pour les frais facturés au titre de la livraison et de l'installation du distributeur dans la pharmacie,
- la clause particulière du contrat prévoyant qu''en cas de succès de l'opération et donc de fabrication en série du distributeur automatique', la société Datarex s'engageait à lui faire fabriquer les dix premiers exemplaires du SER au prix contractuellement prévu ; exposant que le non aboutissement du projet relève exclusivement des manquements de la société Datarex, elle sollicite la réparation du préjudice subi en conséquence qu'elle évalue à 15 000 euros et qui résulte du fait qu'elle n'a pas fabriqué dix distributeurs au prix unitaire de 50 000 euros.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu'elle approuve, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties sur cette demande indemnitaire de la société [F] dans la mesure notamment où l'opération n'a pas été un succès ; de plus l'intimée, pas davantage en appel qu'en première instance, ne fournit de facture justifiant des frais exposés pour le démontage, transport et remontage du second distributeur et ne démontre pas avoir mis en demeure la société Datarex de procéder à l'enlèvement des distributeurs se trouvant dans ses locaux et de l'informer du coût du stockage éventuel.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les demandes en paiement de la société Datarex :
La société Datarex sollicite en réparation de son préjudice la condamnation de la société [F] à lui payer, à titre de dommages et intérêts, d'une part la somme de 161 593 euros qu'elle estime avoir versée en pure perte à la société Dataconseil, pour la création et la mise au point du logiciel de gestion, dès lors que le projet est abandonné et d'autre part celle de 400 000 euros au titre de son préjudice commercial constitué par sa perte de marge nette résultant de la perte du marché qu'elle a subie du fait des années de retard par rapport à la date initialement espérée de réalisation de son prototype.
A titre subsidiaire, pour le cas où la cour confirmerait le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de résolution des contrats aux torts exclusifs de la société [F], la société Datarex expose que si le principe d'un partage de responsabilité est retenu, elle est fondée à solliciter la condamnation de la société [F] à lui restituer la moitié des acomptes qu'elle a perçus à hauteur de 161 718,82 euros, soit la somme de 80 859,41 euros et demande à la cour 'de partager par moitié entre les deux parties la responsabilité du retard du projet'.
La société [F] demande à la cour, dès lors qu'aucun manquement ne peut lui être reproché et que le jugement est confirmé sur le rejet des demandes tendant à la résolution des contrats, de le confirmer également en ce qu'il a rejeté les demandes tendant au remboursement des sommes déjà versées et au règlement d'une indemnité en réparation de ce préjudice.
Les demandes de la société Datarex en remboursement des sommes versées à la société Dataconseil et de sa perte de marge nette sont en lien direct avec sa demande de résolution des contrats dont elles sont la conséquence dès lors qu'elle les formule 'dans la mesure où la résolution est prononcée aux torts exclusifs de la société [F]' de sorte qu'elle ne pourra qu'en être déboutée, la cour confirmant le jugement de ce chef.
S'agissant de la demande en remboursement de la moitié des acomptes versés à la société [F] fondée sur le partage de responsabilité admis par l'expert et retenu par le tribunal, la cour ne peut que la rejeter dès lors que les prestations correspondant au paiement de ces acomptes ont été exécutées par la société [F]. Il sera par conséquent ajouté au jugement de ce chef, étant observé au demeurant que la société Datarex, outre qu'elle ne sollicite pas le versement de dommages et intérêts indépendamment de ceux réclamés en conséquence de la résolution des contrats, a contribué à la survenue de son propre dommage.
Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, des dépens et des frais d'expertise :
Dès lors que les parties ont chacune contribué notamment au retard de fabrication et de mise en fonctionnement des prototypes, chacune supportera par moitié le coût des frais d'expertise ; la société Datarex qui ne s'est pas acquittée, avant la procédure, du paiement des factures dont elle a été jugée pour partie débitrice supportera le coût des dépens de première instance, en ce non compris les frais d'expertise et d'appel.
Si l'appel de la société Datarex n'est que très partiellement fondé dans la mesure où le jugement est confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes, la cour, outre qu'elle a accueilli pour partie
les contestations de la société Datarex sur deux factures, constate également le caractère particulièrement succinct de la motivation des premiers juges relativement à l'appréciation de la demande de résolution des contrats. Par conséquent, la demande de la société [F], au titre des frais irrépétibles qu'elle justifie avoir exposés en versant aux débats les factures de son conseil, sera accueillie dans la limite de 5 000 euros, toute autre demande de ce chef étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire,
Déclare recevables les appels principal de la société Datarex et incident de la société Ateliers [F] ;
Confirme le jugement du 20 janvier 2021 en ce qu'il a débouté la société Datarex de toutes ses demandes reconventionnelles, en particulier de celle en résolution des contrats aux torts exclusifs de la société Ateliers [F], a débouté la société Ateliers [F] de ses autres demandes et en ce qu'il a condamné la société Datarex à payer à la société Ateliers [F] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
Condamne la société Datarex à payer à la société Ateliers [F] la somme de 22 717,27 euros au titre des factures impayées ;
Condamne la société Datarex et la société Ateliers [F] à payer chacune la moitié des frais d'expertise d'un montant de 13 838,86 euros ;
Ajoutant au jugement,
Déboute la société Datarex de ses demandes subsidiaires de condamnation de la société Ateliers [F] au paiement de la somme de 80 859,41 euros et de la moitié de la somme de 37 584,47 euros ;
Condamne la société Datarex à payer à la société Ateliers [F] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la société Datarex aux dépens de première instance ne comprenant pas les frais d'expertise et de la procédure d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le Conseiller,