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06/09/2022 | FRANCE | N°21/03984

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 06 septembre 2022, 21/03984


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51A



1re chambre 2e section



ARRET N°



PAR DEFAUT



DU 6 SEPTEMBRE 2022



N° RG 21/03984 - N° Portalis DBV3-V-B7F-US4N



AFFAIRE :



Fondation LOUIS LEPINE





C/



Mme [N], [P], [U] [T]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Juin 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Vanves



N° RG : 11-20-453

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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 06/09/22

à :



Me Marie-hélène DANCKAERT



Me Marie-pierre MEQUINION





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51A

1re chambre 2e section

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 6 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/03984 - N° Portalis DBV3-V-B7F-US4N

AFFAIRE :

Fondation LOUIS LEPINE

C/

Mme [N], [P], [U] [T]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Juin 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Vanves

N° RG : 11-20-453

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 06/09/22

à :

Me Marie-hélène DANCKAERT

Me Marie-pierre MEQUINION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Fondation LOUIS LEPINE,

ayant ses [Adresse 9]

Ayant son siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Marie-hélène DANCKAERT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 520

Représentant : Maître Dominique BOUTIERE de l'AARPI SKDB Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0168 -

APPELANTE

****************

Madame [N], [P], [U] [T]

née le 04 Avril 1958 à TOURLAVILLE

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Maître Marie-pierre MEQUINION, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 407 - N° du dossier 20210110

Représentant : Maître Sylvain LEBRETON de la SCP DE NARDI-JOLY ET LEBRETON, Plaidant, avocat au barreau de MEAUX, vestiaire : 54 -

INTIMEE

Monsieur [W] [D]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Assigné à personne

Madame [R] [M]

[Adresse 1]

[Localité 8]

Assignée par Procès-Verbal de recherches infructueuses (article 659 du code de procédure civile)

INTIMES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Mai 2022, Monsieur Philippe JAVELAS, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,

Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 1er décembre 2012, Mme [N] [T] a donné en location à M. [W] [D] et Mme [R] [M] un logement situé [Adresse 4] à [Localité 7] (92). Le bail contenait une clause prévoyant sa résiliation en cas de défaut de paiement des loyers après un commandement de payer resté sans effet.

Par acte du 1er décembre 2012, la fondation Louis Lépine s'est portée caution pour garantir les éventuels loyers impayés de M. [D], fonctionnaire de police.

Par acte d'huissier en date du 18 décembre 2019, Mme [T] a fait délivrer à M. [D] et Mme [M] un commandement de payer.

Par acte d'huissier de justice délivré le 15 décembre 2020, Mme [T] a assigné M. [D], Mme [M] et la fondation Louis Lépine devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire:

- la constatation de la résiliation du bail en cause,

- l'expulsion de M. [D] et Mme [M] et de tous les occupants de leur chef,

- la constatation de ce que M. [D] et Mme [M] sont occupants sans droit ni titre du logement sis [Adresse 4] à [Localité 7] (92),

- la condamnation des défendeurs au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 1 126,93 euros jusqu'à la complète libération des lieux,

- le transport et la séquestration du mobilier,

- la condamnation solidaire des défendeurs au paiement de la somme de 17 917,59 euros au titre des loyers impayés arrêtés à décembre 2020, d'une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts et d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

- subsidiairement et dans l'hypothèse où la juridiction ne retiendrait pas la caution de la fondation Louis Lépine et ferait droit à une éventuelle demande en restitution de l'indu, condamner M. [D] et Mme [M] à la garantir de toute répétition d'éventuel indu au profit de la fondation Louis Lépine entre décembre 2018 et août 2019 pour le montant sollicité de 9 949,03 euros.

M. [D] et Mme [M] ont quitté le logement le 28 décembre 2020.

Par jugement réputé contradictoire du 10 juin 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves a :

- condamné solidairement M. [D], Mme [M] et la fondation Louis Lépine à verser à Mme [T] la somme de 17 607,86 euros au titre de l'arriéré des loyers, charges et indemnités d'occupation au 28 décembre 2020 et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

- condamné M. [D] à payer à la fondation Louis Lépine la somme de 30 594,09 euros à titre de remboursement des loyers et charges pris en charge de mai 2017 à août 2019, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

- condamné in solidum M. [D] et Mme [M] à verser à Mme [T] la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. [D] et Mme [M] à verser à la fondation Louis Lépine la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [T] du surplus de ses demandes,

- débouté la fondation Louis Lépine de sa demande en dommages et intérêts formée à l'encontre de M. [D],

- débouté la fondation Louis Lépine de ses demandes reconventionnelles formées à l'encontre de Mme [T],

- condamné in solidum M. [D] et Mme [M] aux dépens, qui comprendraient notamment le coût du commandement de payer en date du 18 décembre 2019, de l'assignation du 15 décembre 2020 et de sa notification au Préfet,

- rappelé que l'exécution provisoire de la décision était de droit.

Par déclaration reçue au greffe le 23 juin 2021, la fondation Louis Lépine a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 2 février 2022, la fondation Louis Lépine, appelante, demande à la cour de:

- infirmer le jugement rendu le 10 juin 2020 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Vanves,

Statuant à nouveau :

- juger que son acte de caution prévoyait une durée déterminée, soit la durée du bail et son renouvellement,

En conséquence,

- fixer le terme de ses obligations issues de l'acte de caution au 30 novembre 2018, à la date de fin du renouvellement du contrat de bail,

- rejeter toute demande des intimés tendant à étendre ses obligations de caution au-delà de cette date,

- condamner solidairement M. [D], Mme [M] et Mme [T] à lui verser la somme de 9 949,03 euros au titre des loyers et charges payés par erreur du mois de novembre 2018 à août 2019 inclus,

- en tout état de cause, condamner solidairement M. [D] et Mme [M] à lui verser la somme de 20 645,06 euros, au titre de remboursement des loyers et charges du mois de mai 2017 à novembre 2018 inclus, payés par elle en leur lieu et place,

Subsidiairement, dans le cas où la cour jugerait que l'acte de caution de la fondation Louis Lépine prévoyait une durée au-delà du 30 novembre 2018 :

- fixer le terme des obligations issues de son engagement de caution à la date à laquelle la clause résolutoire du contrat de bail a été acquise, soit le 18 février 2020,

- ramener en conséquence son éventuelle condamnation au paiement des loyers et charges dus à cette date, soit 6 678,92 euros, arrêtés au 18 février 2020,

- condamner solidairement M. [D] et Mme [M] à lui verser la somme de 27 323,98 euros, au titre de remboursement des loyers et charges du mois de mai 2017 à février 2020 inclus,

En tout état de cause :

- condamner solidairement M. [D] et Mme [M] au paiement à son profit de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner Mme [T] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de dommages et intérêts,

- débouter Mme [T] de ses demandes de condamnation à son encontre au paiement de la somme de 6 678,92 euros au titre de dommages et intérêts,

- débouter Mme [T] de ses demandes de condamnation à son encontre au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais liés à la procédure devant de première instance, et aux dépens,

- débouter Mme [T] de ses demandes de condamnation à son encontre au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais liés à la procédure d'appel, et aux dépens,

- condamner solidairement Mme [T], M. [D] et Mme [M], au paiement à son profit de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 18 novembre 2021, Mme [T], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 10 juin 2021 en ce qu'il a considéré que l'acte de cautionnement signé le 1er décembre 2012 par la fondation Louis Lépine était de nature indéterminée,

- confirmer la décision du tribunal de proximité de Vanves en ce qu'il a condamné solidairement la fondation Louis Lépine avec M. [D] et Mme [M] à lui régler la somme de 17 607, 86 euros correspondant aux loyers arriérés à la date du 28 décembre 2020,

Subsidiairement :

- juger irrecevable au sens de l'article 564 du code de procédure civile le moyen nouveau soulevé par la fondation Louis Lépine visant à demander la limitation de la caution au 18 février 2020,

- si la cour devait estimer le moyen recevable, juger que le tribunal n'a pas été saisi d'une demande de résiliation du bail puisqu'en cours d'instance les demandes ont été modifiées au regard du congé donné par les locataires et de leur départ au 28 décembre 2020 avant l'audience et que par voie de conséquence, la résiliation ne peut s'apprécier qu'à la date de départ desdits locaux,

Plus subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour devrait accueillir le moyen subsidiaire de la fondation Louis Lépine :

- condamner la fondation Louis Lépine à lui régler la somme de 6 678, 92 euros à titre de dommages et intérêts, au visa de l'article 1231-1 du code civil, la fondation Louis Lépine ayant violé son acte de cautionnement dans lequel elle renonçait expressément au bénéfice de discussion,

- débouter la fondation Louis Lépine de sa demande de dommages et intérêts présentée à son encontre pour la même raison de sa renonciation au bénéfice de discussion et de poursuites préalables,

accueillir son appel incident en tout état de cause,

- en conséquence, condamner M. [D] et Mme [M] à lui verser la somme de 1 500 euros de dommages et intérêts,

- condamner la fondation Louis Lépine, M. [D] et Mme [M] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

- par ailleurs, condamner la fondation Louis Lépine à payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- condamner la fondation Louis Lépine aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Très subsidiairement dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement :

- condamner M. [D] et Mme [M] à la garantir indemne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elle en principal, intérêts, frais et indemnités en ce compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la présente instance.

M. [D], intimé, n'a pas constitué avocat. Par acte d'huissier de justice délivré le 21 juillet 2021, la déclaration d'appel lui a été signifiée par remise à personne physique. Par acte d'huissier de justice délivré le 16 février 2022, les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

Mme [M], intimée, n'a pas constitué avocat. Par acte d'huissier de justice délivré le 19 août 2021, la déclaration d'appel lui a été signifiée selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile. Par acte d'huissier de justice délivré le 16 février 2022, les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 7 avril 2022.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

Mme [M], intimée ne comparaissant pas et n'ayant pas été citée à personne, la cour statuera par défaut en application des dispositions de l'article 474, alinéa 2, du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur la durée de l'engagement de caution de la fondation Louis Lépine et les conséquences qu'elle emporte

La fondation Louis Lépine fait grief à la décision déférée d'avoir jugé que l'acte de caution ne stipulait aucune durée et portait, dès lors, sur une durée indéterminée.

Poursuivant l'infirmation du jugement querellé de ce chef, la fondation Louis Lépine, appelante, fait valoir que :

- Il se déduit de la clause figurant dans l'acte de caution que la durée de l'engagement était limitée à un seul renouvellement de l'acte de cautionnement, couvrant ainsi la période du bail triennal, soit du 1er décembre 2012 au 30 novembre 2015 et ' son renouvellement', soit du 1er décembre 2015 au 30 novembre 2018,

- la fondation Louis Lépine n'est pas un organisme de cautionnement professionnel et ne peut être considérée comme ' une caution avertie',

- il ne peut se déduire de la reproduction manuscrite de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, que la fondation Louis Lépine pouvait résilier unilatéralement le contrat de bail, la reproduction de cet article constituant, à la date de signature du bail (2012), une condition de validité de l'acte de cautionnement,

- le courrier électronique adressé par erreur, le 15 décembre 2018, par un membre du personnel de la fondation à la bailleresse, ne peut s'analyser comme un engagement de caution ou un prolongement de l'engagement au-delà de la durée initialement fixée,

A titre subsidiaire, et dans l'hypothèse où la cour jugerait que l'engagement de caution était à durée indéterminée, elle demande à la cour de limiter sa condamnation au paiement de la somme de 6 678, 92 euros, représentant le montant des loyers et charges impayés au 18 février 2020, date à laquelle le contrat de bail a pris fin, par suite de la délivrance d'un commandement de payer dont les causes n'ont pas été réglées dans les deux mois de sa délivrance.

Elle fait valoir, au soutien de cette demande subsidiaire, qu'elle dit être recevable en cause d'appel, au visa de l'article 565 du code de procédure civile, que l'engagement de caution ne couvrait pas les indemnités d'occupation qui se sont substituées aux loyers à compter de l'acquisition de la clause résolutoire et jusqu'au départ des locataires.

Mme [T], bailleresse intimée, poursuivant la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a considéré que la fondation Louis Lépine s'était portée caution pour une durée indéterminée, réplique que :

- la fondation Louis Lépine est une caution avertie au sens de la jurisprudence,

- le terme générique ' le bail et son renouvellement' est classiquement employé dans les actes de cautionnement à durée indéterminée et un cautionnement ne peut être déterminé que s'il comporte une indication de durée,

- l'engagement de la fondation courait sur l'ensemble de la troisième période triennale renouvelée par avenant dénoncé à la fondation Louis Lépine.

Mme [T] soulève, par ailleurs, l'irrecevabilité de la demande subsidiaire au visa de l'article 564 du code de procédure civile, avant que de conclure à son mal-fondé, motif pris de ce que Mme [T] a abandonné, devant le premier juge, sa demande de résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire, dès lors que cette demande n'avait plus d'objet en raison du départ des locataires avant l'audience de première instance.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 2292 du code civil, le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté.

En l'espèce, l'acte de cautionnement signé par les parties le 1er décembre 2012 stipule que la fondation Louis Lépine s'est engagée pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction et, en tout état de cause, pour la durée effective du bail prenant effet 1er décembre 2012 à régler à Mme [T], bailleresse, les sommes correspondant aux loyers échus au titre dudit bail que M. [D], fonctionnaire preneur, n'a pas réglées.

La fondation Lépine, qui a rédigé l'acte de cautionnement, a, en outre, rédigé une mention manuscrite, en page trois de l'acte de cautionnement, ainsi libellée :

' Bon pour caution solidaire pour la durée du bail ou son renouvellement pour le paiement du loyer et des charges dont le montant actuel est de mille cent euros et de sa révision chaque année selon l'indice de référence des loyers publié par l'INSEE ainsi que des charges récupérables, comme indiqué aux articles 10 et 11 du contrat de bail. Je confirme avoir une parfaite connaissance de la nature et de l'étendue de l'engagement.

La fondation Louis Lépine, représentée par le préfet de police, son président et représentant légal, reconnaît par ailleurs avoir connaissance des termes de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, ci-dessous reproduit ' lorsque le cautionnement d'obligations résultant d'un contrat de location conclu en application du présent titre ne comporte aucune indication de durée ou lorsque la durée du cautionnement est stipulée indéterminée, la caution peut le résilier unilatéralement. La résiliation prend effet au terme du contrat de location, qu'il s'agisse du contrat initial ou d'un contrat reconduit ou renouvelé au cours duquel le bailleur reçoit notification de la résiliation'.

Contrairement à ce que soutient la fondation appelante, le cautionnement donné pour la durée du contrat de bail et de son renouvellement éventuel, alors que le nombre de renouvellements possibles est inconnu, est souscrit pour une durée indéterminée.

C'est donc à bon droit que le premier juge, après avoir relevé que le cautionnement avait été donné pour une durée indéterminée, en a déduit que la fondation Lépine était tenue de régler à la bailleresse les loyers impayés, au-delà du 1er décembre 2018.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

La fondation appelante sollicite, à titre subsidiaire, que le terme de ses obligations soit fixée à la date d'acquisition de la clause résolutoire qui a mis un terme au bail d'habitation, soit le 18 février 2020.

Contrairement à ce que soutient la bailleresse intimée, cette demande n'est pas nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, dans la mesure où elle poursuit les mêmes fins que les demandes en paiement formées par la caution devant le premier juge, visant à obtenir la condamnation du débiteur principal - les locataires - et du créancier - la bailleresse - au remboursement des sommes cautionnées.

La demande doit, dès lors, être jugée recevable.

Elle est, en outre, bien fondée.

En effet, en vertu de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, le bail qui contient une clause résolutoire est résilié de plein droit en cas d'impayé locatif deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l'espèce, il est constant que Mme [T] a fait signifier, le 18 décembre 2019, à la fondation Lépine un commandement de payer visant la clause résolutoire et que, les causes de ce commandement n'ayant pas été réglées dans les deux mois de sa délivrance, la clause résolutoire s'est trouvée acquise de plein droit le 18 février 2020, en sorte que les locataires étaient occupants sans droit ni titre à compter de cette date et qu'ils étaient, dès lors, redevables d'indemnités d'occupation et non plus de loyers.

L'acte de cautionnement permet de constater que le cautionnement ne couvrait que les loyers et les charges impayées et pas les indemnités d'occupation.

Par ailleurs, il ressort de la décision déférée que Mme [T], la bailleresse, a bien sollicité du tribunal judiciaire de Vanves la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire et le fait que le premier juge n'ait point statué sur cette demande dont il n'est pas démontré à la lecture du jugement entrepris qu'elle aurait été abandonnée par la bailleresse, contrairement à ce que soutient cette dernière, ne fait point obstacle à la résiliation de plein droit du bail, qui est un effet du commandement demeuré infructueux.

Le fait que la fondation appelante, se méprenant sur la durée de son engagement, et sur l'étendue de ses droits, ait pu écrire à la bailleresse, après avoir renoncé au bénéfice de discussion, qu'il lui appartenait, en sa qualité de bailleresse, de diligenter toute action dont elle disposait à l'égard de ses locataires en faisant valoir la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail, demeure sans incidence sur les effets du commandement de payer délivré par Mme [T] à ses locataires. D'autant moins que l'acte de cautionnement litigieux rappelait que ' le présent engagement de caution n'interdisait pas au bailleur de demander, selon la législation en vigueur, la résiliation amiable ou judiciaire du bail envers le preneur ...'

Par suite, le jugement déféré sera émendé et la condamnation de la fondation Louis Lépine ramenée à la somme de 6 678, 92 euros, correspondant au montant des loyers et charges demeurés impayés au 18 février 2020, date d'acquisition de la clause résolutoire.

S'agissant de la demande de remboursement des sommes cautionnées par la fondation appelante, formée au visa de l'article 2306 du code civil, l'appelante conclut :

- dans le dispositif de ses dernières conclusions, à la condamnation solidaire de M. [D] et de Mme [M] à lui payer ' la somme de 27 323, 98 euros, au titre du remboursement des loyers et charges du mois de mai 2017 à février 2020 inclus'

- dans la discussion de ces mêmes conclusions (p.16), à la condamnation solidaire de M. [D] et de Mme [M] à lui payer 'la somme de 37 273, 01 euros, au titre de remboursement des loyers et charges du mois de mai 2017 à février 2020 inclus'.

En application de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties.

La cour n'est donc saisie que dans la limite de la demande de la fondation Louis Lépine, figurant au dispositif de ses dernières conclusions, tendant à la condamnation solidaire des fonctionnaires

preneurs à lui payer la somme de 27 323, 98 euros.

Par ailleurs, la fondation ne peut utilement solliciter la condamnation solidaire de Mme [M], dans la mesure où, ne s'étant portée caution que pour M. [D], elle n'est subrogée dans les droits de Mme [T] qu'à l'encontre de celui-ci.

Dès lors, et même si la demande, qui seule saisit la cour, omet le remboursement des sommes cautionnées entre le 1er novembre 2018 et le 1er août 2019, représentant la somme de 9 949, 03 euros, M. [D] sera condamné, sur le fondement de l'article 2306 du code civil, à payer à la fondation appelante la somme de 27 323, 98 euros, au titre du remboursement des loyers et charges impayés au mois de février 2020.

II) Sur les demandes de dommages et intérêts de la fondation Louis Lépine

La fondation Louis Lépine sollicite la condamnation de Mme [T] à lui payer une indemnité de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts, en raison du fait qu'elle n'a pas agi suffisamment tôt en justice à l'encontre de son locataire, laissant persister des impayés de loyers depuis le mois de mai 2017 et elle fait valoir que cette incurie a causé à la fondation un préjudice de près de 30000 euros.

Elle demande donc à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de cette demande de dommages et intérêts.

Elle sollicite, en outre, la condamnation solidaire des anciens locataires [D] et [M] à lui payer une indemnité de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en reprochant à M. [D] de n'avoir régularisé aucun des impayés de loyers couverts par la fondation depuis le mois de mai 2017.

Mme [T] réplique que la demande est mal fondée dans la mesure où la fondation, en renonçant au bénéfice de discussion, a renoncé à lui reprocher de ne pas agir contre M. [D], son locataire.

Réponse de la cour

La fondation Louis Lépine ne peut reprocher à la bailleresse de ne pas avoir préalablement poursuivi les locataires en paiement puisqu'elle a renoncé au bénéfice de discussion prévu à l'article 2298 du code civil.

En outre, non seulement, sauf abus de droit caractérisé, le bailleur n'est pas tenu, en vertu du contrat de location, d'agir en résiliation du bail pour non paiement des loyers mais les effets légaux du cautionnement ne lui imposent pas plus une quelconque obligation en ce sens.

La fondation Louis Lépine est mal fondée à solliciter le paiement de dommages et intérêts à l'encontre de Mme [M], dès lors qu'elle ne s'est pas portée caution pour cette dernière.

S'agissant, enfin, de la demande formée à l'encontre de M. [D], elle ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui résultant du retard dans le remboursement des loyers pris en charge, qui sera indemnisé par les intérêts moratoires.

Par suite, le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il a débouté la fondation de ses demandes de dommages et intérêts formées tant à l'encontre de Mme [T] que de M. [D].

La fondation sera, en outre, déboutée de sa demande en paiement dirigée contre Mme [M].

III) Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [T] à l'encontre de la fondation Louis Lépine (6 678,92 euros) et de ses anciens locataires (1500 euros)

Mme [T] fait grief à la fondation appelante d'avoir méconnu les obligations tirées de son acte de cautionnement en la contraignant à délivrer à ses locataires un commandement de payer alors même qu'elle avait renoncé au bénéfice de discussion.

Elle considère que cette violation de l'acte de cautionnement lui a causé un préjudice de 6678,92 euros.

Elle fait par ailleurs grief au premier juge d'avoir rejeté la demande de dommages et intérêts d'un montant de 1 500 euros qu'elle avait formée à l'encontre de ses anciens locataires et, formant appel incident du jugement déféré de ce chef, renouvelle cette demande devant la cour.

La fondation Louis Lépine conclut au débouté de Mme [T], motif pris de ce qu'elle s'est bornée à rappeler à cette dernière les actions judiciaires à sa disposition et ne l'a nullement contrainte à délivrer un commandement de payer.

Réponse de la cour

La fondation Louis Lépine a adressé un courrier recommandé à Mme [T], le 9 décembre 2019, dans lequel elle lui indiquait :

' Vous avez sollicité le paiement de la somme de 2 202, 28 euros auprès de la fondation Louis Lépine sur le fondement de l'acte de caution du 1er décembre 2012.

A ce titre, nous vous rappelons qu'il vous appartient de faire votre affaire personnelle du paiement des loyers auprès du locataire débiteur principal au besoin en faisant valoir la clause résolutoire de votre contrat de bail, ce qui peut être mis en oeuvre par tout bailleur dès la persistance d'impayés....'.

Ce seul courrier ne suffit pas à établir que la fondation appelante, même si elle s'est méprise sur la durée de son engagement, a contraint Mme [T] à délivrer un commandement de payer à ses locataires.

Par ailleurs et s'agissant de la demande en paiement dirigée contre ses anciens locataires, Mme [T] ne justifie d'un préjudice distinct de celui qui lui a été occasionné par les retards de paiement, qui sera indemnisé par les intérêts moratoires.

Mme [T] sera par suite débouté de ses demandes de dommages et intérêts.

IV) Sur la demande de garantie de Mme [T]

Mme [T] demande à être garantie par M. [D] et Mme [M] de toutes condamnations prononcées à son encontre.

Réponse de la cour

M. [D] et Mme [M], qui ont cessé tout paiement de leurs loyers à compter du mois de mai 2017, seront condamnés à garantir Mme [T] de la condamnation prononcée à son encontre au titre des dépens de la procédure d'appel.

V) Sur les demandes accessoires

Il sera fait masse des dépens de la procédure d'appel, qui seront partagés par moitié entre la fondation Louis Lépine et Mme [T].

Les dispositions du jugement querellé relatives aux dépens de première instance et aux frais irrépétibles non compris dans ces mêmes dépens seront, par ailleurs, confirmées.

Il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire ' du jugement à intervenir' comme le sollicite la fondation appelante, la cour statuant en dernier ressort.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par défaut et par mise à disposition au greffe

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celles ayant condamné:

- la fondation Louis Lépine à payer à Mme [N] [T] la somme de 17 607, 86 euros,

- M. [W] [D] à payer à la fondation Louis Lépine la somme de 30 594,09 euros,

Statuant à nouveau des chefs infirmés

Condamne la fondation Louis Lépine à payer à Mme [N] [T] la somme de 6 678 euros au titre des loyers et charges demeurés impayés au 18 février 2020,

Condamne M. [W] [D] à payer à la fondation Louis Lépine la somme de 27 323,98 euros en remboursement des loyers et charges cautionnés du mois de mai 2017 au mois de février 2020 inclus ;

Ajoutant au jugement déféré

Déboute la fondation Louis Lépine de sa demande de dommages et intérêts dirigée contre Mme [R] [M],

Déboute Mme [N] [T] de ses demandes de dommages et intérêts dirigées contre la fondation Louis Lépine et contre M. [W] [D] et Mme [R] [M],

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum M. [W] [D] et Mme [R] [M] à payer une indemnité de 2 500 euros à la fondation Louis Lépine,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute la fondation Louis Lépine de sa demande en paiement dirigée contre Mme [N] [T],

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute Mme [N] [T] de sa demande en paiement dirigée contre la fondation Louis Lépine,

Condamne M. [W] [D] et Mme [R] [M] à garantir Mme [N] [T] de la condamnation prononcée à son encontre au titre des dépens de la procédure d'appel,

Fait masse des dépens de la procédure d'appel, qui seront partagés par moitié entre, d'une part, la fondation Louis Lépine et Mme [N] [T], d'autre part.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 21/03984
Date de la décision : 06/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-06;21.03984 ?
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