COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 SEPTEMBRE 2022
N° RG 21/04096 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UTGZ
AFFAIRE :
Mme [P] [T]
C/
Mme [S] [K]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Mars 2021 par le Tribunal de proximité de SANNOIS
N° RG : 11-20-1028
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 06/09/22
à :
Me Virginie PELLETIER
Me Antonin PIBAULT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [P] [T]
née le 20 Avril 1970 à BEYROUTH LIBAN
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Maître Virginie PELLETIER, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 123 - N° du dossier 120581
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/008624 du 03/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANTE
****************
Madame [S] [K]
née le 16 décembre 1967 à KSAR EL BOUKHARI - ALGERIE
de nationalité algérienne
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Maître Antonin PIBAULT de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 13 - N° du dossier 2101311
Représentant : Maître Isabelle NADAL, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 253
S.C.I. BBS FOCH
N° SIRET : 820 228 302 RCS CRETEIL
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Antonin PIBAULT de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 13 - N° du dossier 2101311 -
Représentant : Maître Isabelle NADAL, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 253
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mai 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Phlippe JAVELAS, Président et Madame Agnès PACCIONI, vice présidente placée chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 18 juin 2003, la SCI Foch a donné à bail à M. [D] [H] et Mme [P] [T] un appartement à usage d'habitation situé [Adresse 2], lot n°2, à [Localité 3] (95), pour un loyer mensuel de 655,55 euros et un dépôt de garantie du même montant.
La SCI BBS Foch a acquis, suivant acte notarié du 16 octobre 2016, le bien immobilier loué à M. [H] et Mme [Y] [B].
Se prévalant de loyers impayés, Mme [S] [K], gérante de la société BBS Foch, a fait signifier le 3 février 2020 à M. [H] et Mme [Y] [B] un commandement de payer visant la clause résolutoire.
Par acte d'huissier de justice délivré le 29 septembre 2020, Mme [K] a assigné M. [H] et Mme [Y] [B] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Sannois aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- constater un impayé de loyers de M. [H] et Mme [Y] [B] d'un montant de 4 234 euros,
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail,
- ordonner, à défaut de départ volontaire, l'expulsion de M. [H] et Mme [Y] [B] et de tous occupants de leur chef, avec, si besoin le concours de la force publique et la séquestration des meubles,
- condamner M. [H] et Mme [Y] [B] au paiement des sommes suivantes :
- 4 234 euros au titre des loyers et charges impayés,
- une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer majoré de 10 % à compter du prononcé de la résiliation du bail,
- 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- les dépens.
La SCI BBS Foch est intervenue volontairement à l'instance.
Par jugement réputé contradictoire du 18 mars 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Sannois a :
- déclaré recevable l'intervention volontaire de la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K],
- rejeté l'exception de nullité de l'assignation,
- dit que Mme [K] avait qualité à agir au nom de la SCI BBS Foch,
- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de bail conclu le 18 juin 2003 entre la société Foch, aux droits de laquelle vient la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K] d'une part, et M. [H] et Mme [Y] [B], d'autre part, aux torts de ces derniers,
- ordonné à M. [H] et Mme [Y] [B] de libérer les lieux et de restituer les clés,
- dit qu'à défaut pour M. [H] et Mme [Y] [B] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K] pourrait, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de leur chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,
- autorisé la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K] à faire séquestrer les meubles éventuellement laissés sur place par les expulsés dans tel garde-meuble désigné par ces derniers ou à défaut par le bailleur,
- condamné M. [H] et Mme [Y] [B] à payer à la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K], une indemnité d'occupation mensuelle correspondant au montant du loyer et des charges dans les conditions prévues au contrat de bail, ce à compter de la résiliation du bail et jusqu'à libération effective des lieux caractérisée par la remise des clefs,
- condamné M. [H] et Mme [Y] [B] à verser à la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K] la somme de 6 262 euros au titre des loyers, provisions sur charges et indemnités d'occupation arrêtés au 1er janvier 2021, échéance de janvier 2021 incluse,
- rejeté la demande de délais de paiement,
- rappelé qu'en cas de mise en place d'un plan de surendettement ou de mesures recommandées ou imposées, la dette serait apurée conformément aux termes du plan ou des mesures recommandées ou imposées,
- dit que le jugement serait transmis par les soins du greffe au représentant de l'Etat dans le département en vue de la prise en compte de la demande de relogement de l'occupant dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées,
- débouté la SCI BBS Foch, représentée par Mme [K], de sa demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,
- condamné M. [H] et Mme [Y] [B] aux dépens,
- rappelé que la décision était exécutoire de droit.
Par déclaration reçue au greffe le 28 juin 2021, Mme [Y] [B] a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 15 avril 2022, elle demande à la cour de :
- débouter Mme [K] et la SCI BBS Foch de leurs demandes tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et son expulsion,
A titre subsidiaire :
- suspendre les effets de la clause résolutoire,
- lui accorder un délai de paiement sur 24 mois pour s'acquitter du règlement de la dette locative selon les modalités suivantes :
- 30 euros pendant six mois dans l'attente de la décision du tribunal sur la contestation soulevée par la SCI BBS Foch sur les recommandations de la commission de surendettement,
- le solde en 18 mensualités égales,
- dire que chaque partie conservera à sa charge les dépens dont elle a fait l'avance en première instance et en appel,
- confirmer le jugement du tribunal de proximité du 18 mars 2021 en ses autres dispositions,
- débouter la SCI BBS Foch et Mme [K] de ses demandes contraires.
Aux termes de leurs conclusions signifiées le 16 décembre 2021, Mme [K] et la SCI BBS Foch demandent à la cour de :
- déclarer les présentes écritures recevables et bien fondées,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 mars 2021 par le tribunal de proximité de Sannois,
- condamner Mme [Y] [B] à leur payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner également aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 21 avril 2022.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la résiliation du bail
Mme [Y] [B] soutient que la demande est irrecevable et que Mme [K] et la SCI BBS Foch doivent être déboutées de leur demande d'acquisition de la clause résolutoire et d'expulsion au motif que le commandement de payer et sa dénonciation à la Ccapex ont été signifiés par Mme [K] qui n'est pas bailleur et n'avait donc aucune qualité pour y procéder. Elle en déduit que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat.
De leur côté, Mme [K] et la SCI BBS Foch font valoir que Mme [K] avait qualité à agir étant gérante de la SCI BBS et disposant des pouvoirs les plus étendus pour engager la responsabilité de la société et engager une procédure d'expulsion, ainsi que l'a d'ailleurs décidé le premier juge.
Sur ce,
Aux termes de l'article 1184 du code civil applicable à l'espèce, le juge peut prononcer la résiliation de tout contrat synallagmatique en cas de manquement grave de l'une des parties à l'une de ses obligations.
En matière de bail d'habitation, il appartient au juge d'apprécier si les manquements imputés au locataire sont d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du bail.
Conformément aux dispositions de l'article 1728 du code civil et de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, à laquelle le bail est soumis, le locataire est tenu d'une obligation essentielle qui consiste au paiement de son loyer aux termes convenus en contrepartie de la mise à disposition des lieux loués.
En l'espèce, si Mme [Y] [B] sollicite, à l'appui de sa demande de voir rejeter la demande de résiliation, la nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire et de sa notification à la Ccapex, cette demande ne figure pas au dispositif de ses écritures, en sorte qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.
Cela étant, le premier juge n'a pas constaté l'acquisition de la clause résolutoire, mais a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de bail, conformément à la demande formulée par la SCI BBS Foch, au regard des manquements graves et répétés de Mme [Y] [B] qui ne réglait pas son loyer, en sorte que l'éventuelle nullité du commandement ou de sa notification à la Ccapex n'aurait aucun effet sur la résiliation judiciaire.
S'agissant de la résiliation telle que prononcée par le premier juge, Mme [Y] [B] ne la critique pas, ne contestant pas devoir les loyers réclamés ni dans leur principe ni dans leur quantum.
Le jugement sera dès lors confirmé.
Sur la demande de délais
Mme [Y] [B] sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire et des délais de paiement, faisant valoir qu'elle a repris le règlement de son loyer, qu'elle bénéficie d'une procédure de surendettement et qu'elle a été reconnue prioritaire par la commission de médiation DALO.
De leur côté, Mme [K] et la SCI BBS Foch s'opposent à la suspension des effets de la clause résolutoire et aux délais de paiement sollicités faisant valoir que Mme [K] a repris le règlement des loyers par opportunisme en raison de la procédure et qu'elle ne justifie pas avoir saisi le fonds de solidarité pour le logement.
Sur ce,
A titre préalable, il sera observé que Mme [Y] [B] ne sollicite que la suspension des effets de la clause résolutoire, demande sans objet puisqu'aucune acquisition de la clause résolutoire n'a été constatée ni sollicitée, seule la résiliation judiciaire du contrat de bail est poursuivie, outre qu'elle ne sollicite que des délais de paiement et non des délais à expulsion, sur lesquels il n'y a donc pas lieu non plus de se prononcer.
Aux termes de l'article 1244-1, devenu 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Il peut également ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Mme [Y] [B] à l'appui de sa demande ne produit aucun élément concret sur sa situation financière actuelle qui permettrait de faire droit à sa demande, étant observé qu'elle soutient à la fois être en procédure de surendettement et pouvoir apurer sa dette en plus du règlement de ses loyers, outre que de fait, cette dernière a déjà bénéficié de larges délais.
La demande à ce titre est rejetée.
Sur les demandes accessoires
Succombant, Mme [Y] [B] sera condamnée aux dépens d'appel.
En raison de la situation économique respective des parties, il n'y a pas lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles au profit de Mme [K] et de la SCI BBS Foch.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions critiquées,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Y ajoutant,
Condamne Mme [Y] [B] aux dépens d'appel lesquels pourront être recouvrés selon les dispositions concernant l'aide juridictionnelle.
- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,