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24/11/2022 | FRANCE | N°19/03726

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 24 novembre 2022, 19/03726


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 24 NOVEMBRE 2022



N° RG 19/03726

N° Portalis DBV3-V-B7D-TPZQ



AFFAIRE :



[V] [F]



C/



SAS COVENTYA









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F17/02480









Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Raphaël CABRAL



Me Audrey GOMEZ DE MIRANDA



le :



Expédition numérique délivrée à Pôle Emploi



le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT QUATRE NOVEMB...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 NOVEMBRE 2022

N° RG 19/03726

N° Portalis DBV3-V-B7D-TPZQ

AFFAIRE :

[V] [F]

C/

SAS COVENTYA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F17/02480

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Raphaël CABRAL

Me Audrey GOMEZ DE MIRANDA

le :

Expédition numérique délivrée à Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [V] [F]

né le 06 octobre 1975 à [Localité 5] (VIET-NAM)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Raphaël CABRAL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 101

APPELANT

****************

SAS COVENTYA

N° SIRET : 433 420 577

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Me Audrey GOMEZ DE MIRANDA, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 octobre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier placé lors des débats : Madame Virginie BARCZUK

Greffier en pré-affectation lors du prononcé : Madame [B] [D]

Rappel des faits constants

La société Coventya, dont le siège social est situé à [Localité 6] dans les Hauts-de-Seine, est spécialisée dans le commerce de gros de produits chimiques. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952.

M. [V] [F], né le 6 octobre 1975, a été engagé par cette société, selon contrat de travail à durée indéterminée à effet au 1er mars 2016, en qualité de chef de produit POP/ décoration.

Après un entretien préalable fixé au 4 janvier 2017, M. [F] s'est vu notifier son licenciement pour insuffisance professionnelle par courrier du 9 janvier 2017.

M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre en contestation de son licenciement par requête reçue au greffe le 20 septembre 2017.

La décision contestée

Par jugement contradictoire rendu le 5 septembre 2019, la section encadrement du conseil de prud'hommes de Nanterre a':

- dit et jugé que M. [F] avait exécuté de mauvaise foi son contrat de travail avec la société Coventya,

- dit et jugé que le licenciement de M. [F] par la société Coventya était fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- dit et jugé que M. [F] avait bien été valablement libéré de sa clause de non-concurrence par la société Coventya,

- fait droit à la demande de la société Coventya en procédure abusive,

- débouté M. [F] de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts en exécution du contrat de travail,

- débouté M. [F] de sa demande tendant à voir déclarer nul et de nul effet l'avenant du 29 septembre 2016,

- débouté M. [F] de sa demande en fixation de salaire,

- débouté M. [F] de ses demandes en paiement d'indemnités,

- condamné M. [F] à payer à la société Coventya, à titre de dommages-intérêts, la somme de 1 000 euros,

- condamné M. [F] à payer à la société Coventya la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû engager,

- débouté M. [F] de sa demande d'exécution provisoire,

- condamné M. [F] aux entiers dépens de l'instance.

M. [F] avait demandé au conseil de prud'hommes'de :

- dire et juger son licenciement abusif,

- fixer son salaire brut moyen à 4 150 euros,

- rappel de commissions pour la période du 1er mars 2016 au 28 février 2017 : 1 582,29 euros,

- congés payés : 800 euros,

- réparation du préjudice matériel : 3 398,33 euros,

- réparation du préjudice moral : 8 300 euros,

- indemnisation de la clause contractuelle de non-concurrence : 99 600 euros,

- congés payés afférents : 9 960 euros,

- dommages-intérêts pour exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail : 12'450'euros,

- article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros,

- remise de documents, solde de tout compte modifié, attestation Pôle emploi modifiée, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir le conseil se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte,

- exécution provisoire de la décision à intervenir,

- entiers dépens en ce compris le coût de la signification et de l'exécution de la décision à intervenir.

La société Coventya avait conclu quant à elle au débouté du salarié et avait sollicité sa condamnation à lui verser les sommes suivantes :

. 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

La procédure d'appel

M. [F] a interjeté appel du jugement par déclaration du 10 octobre 2019 enregistrée sous le numéro de procédure 19/03726.

Par ordonnance rendue le 5 octobre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 13 octobre 2022.

Aux termes de ses conclusions adressées par voie électronique le 4 octobre 2022, la société Coventya a demandé à la cour d'écarter des débats les pièces numérotées 57 à 63 visées par M. [F] dans ses conclusions du 27 septembre 2022 au motif qu'elles n'avaient pas été communiquées à la société Coventya dans le cadre de la mise en état.

M. [F] a alors adressé de nouvelles conclusions par voie électronique le 12 octobre 2022 pour demander à la cour de rabattre l'ordonnance de clôture, d'accueillir ses pièces 57 à 63 et de prononcer à nouveau la clôture de la procédure.

Lors des débats, la société Coventya a cependant indiqué renoncer à sa demande de sorte que les conclusions de l'appelant à ce titre doivent être considérées sans objet, ce dont les parties ont convenu.

Prétentions de M. [F], appelant

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 27 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [F] conclut à l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la cour d'appel, statuant de nouveau, de':

- juger que son licenciement pour insuffisance professionnelle est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner en conséquence la société Coventya à lui verser les sommes suivantes :

. 3 950 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 8 300 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi,

par ailleurs,

- ordonner à la société Coventya de produire l'original de l'avenant du 29 septembre 2016 en possession de l'entreprise,

- juger que cet avenant est nul et de nul effet,

- condamner en conséquence la société Coventya à lui verser la somme de 92 682,50 euros à titre de rappel de salaires correspondant à l'application de la clause de non-concurrence prévue au contrat de travail outre 9 268,25 euros de congés payés afférents,

par ailleurs,

- juger que la société Coventya a manqué à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

- condamner en conséquence la société Coventya à lui verser la somme de 12 450 euros à titre de dommages-intérêts,

par ailleurs,

- condamner la société Coventya à lui verser la somme de 2 982,29 euros à titre de rappel de salaire correspondant à des commissions dues pour la période entre le 1er mars 2016 et le 28 février 2017 outre 298,22 euros de congés payés afférents,

par ailleurs,

- juger que M. [F] n'a pas manqué à son obligation d'exécution de bonne foi de son contrat de travail, ni engagé une procédure de manière abusive,

- débouter la société Coventya de sa demande de dommages-intérêts présentée à ce titre,

en tout état de cause,

- débouter la société Coventya de l'ensemble de ses demandes, fins ou conclusions.

Le salarié appelant sollicite en outre à titre accessoire les intérêts de retard au taux légal à compter de la saisine du bureau de conciliation et d'orientation, leur capitalisation et une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Prétentions de la société Coventya, intimée

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 4 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Coventya demande à la cour d'appel de :

- écarter des débats les pièces numérotées 57 à 63 visées par M. [F] dans ses conclusions du 27 septembre 2022 au motif qu'elles ne lui ont pas été communiquées dans le cadre de la mise en état (demande abandonnée comme indiqué ci-dessus),

sur les commissions

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande en rappels de commissions,

- débouter M. [F] à ce titre de sa demande en rappel de commissions,

sur le licenciement

- déclarer la lettre de licenciement valide,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le licenciement de M. [F] fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [F] de ses demandes en paiement d'indemnités,

sur l'exécution du contrat de travail et sur la mauvaise foi de M. [F]

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que M. [F] a exécuté de mauvaise foi son contrat de travail,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [F] de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts en exécution du contrat de travail,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de la société en procédure abusive,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [F] à lui payer des dommages-intérêts à ce titre,

mais réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé ces dommages-intérêts à la somme de 1 000 euros,

et statuant à nouveau,

- fixer à la somme de 5 000 euros la condamnation à dommages-intérêts prononcée à l'encontre de M. [F] en application des articles 1240 du code civil et 32-1 du code de procédure civile en raison d'une procédure abusive,

sur la clause de non-concurrence

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que M. [F] a bien été valablement libéré de sa clause de non-concurrence,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande tendant à voir déclarer nul et de nul effet l'avenant du 29 septembre 2016,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [F] de ses demandes en paiement de rappels de salaire en application de la clause de non-concurrence,

- débouter M. [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

sur les frais irrépétibles et les dépens

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [F] à lui payer une somme au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû engager mais réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé cette somme à 1 200 euros,

et statuant à nouveau,

- fixer à la somme de 8 000 euros la condamnation prononcée à l'encontre de M. [F] au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [F] aux entiers dépens de l'instance.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur le licenciement pour insuffisance professionnelle

Il est rappelé que l'insuffisance professionnelle est caractérisée par l'incapacité du salarié à remplir correctement ses missions du fait d'une inadaptation à l'emploi ou d'une incompétence. Elle constitue, en tant que telle, une cause réelle et sérieuse de licenciement.

L'appréciation des aptitudes professionnelles du salarié et de son adaptation à l'emploi relève du pouvoir de l'employeur. Néanmoins, l'insuffisance professionnelle alléguée à son encontre pour fonder un licenciement doit être justifiée par des éléments précis et concrets de nature à perturber la bonne marche de l'entreprise ou le fonctionnement du service.

M. [F] s'est vu notifier son licenciement pour insuffisance professionnelle par courrier du 9 janvier 2017 dans les termes suivants':

«'Nous vous avons convoqué le 21 décembre 2016 à un entretien préalable au licenciement 'xé le 4 janvier 2017 au cours duquel nous vous avons exposé les motifs nous conduisant à envisager votre licenciement.

Nous faisons suite à cet entretien au cours duquel vous étiez assisté de M. [C] [I] et sommes au regret de vous noti'er votre licenciement pour insuffisance professionnelle.

Nous vous avons embauché le 1er mars 2016 en qualité de chef de produits POP/Décoration.

Les principales missions de ce poste étant les suivantes :

- participer au développement de la gamme de produit POP/Décoration et à la mise en place de nouveaux procédés,

- analyser et identifier le marché, étudier les prix, orienter la recherche en fonction des évolutions technologiques,

- intervenir techniquement chez les clients en soutien des attachés technico-commerciaux [ATC] et chefs de région,

- former les équipes ATC à la gamme et créer la documentation technique et commerciale nécessaire,

- assister le client dans les phases de démarrage de chaînes de traitement,

- effectuer des diagnostics chez les clients.

Nous vous avons embauché pour vos compétences en chimie car vous êtes diplômé d'un DEA en chimie organique 'ne et avez de solides expériences à votre actif. La galvanoplastie, qui est notre c'ur de métier, n'est ni plus ni moins de la chimie. D'autant que lors de votre expérience chez votre dernier employeur (une PME spécialisée dans les revêtements et les colles), vous avez occupé un poste d'ingénieur R&D et avez certi'é avoir effectué, entre autres, les missions suivantes :

- mener des projets techniques dans sa globalité,

- participer à l'industrialisation des produits,

- contribuer à l'optimisation du service rendu aux clients (résolution des problèmes industriels).

Sur votre CV vous avez même précisé « quelques succès » :

- mise sur le marché de plusieurs colles par an,

- soutien technique pour les commerciaux, visite chez les clients.

La présentation de vos expériences qui correspondaient au poste que nous proposions, votre niveau d'études et vos années d'expérience en tant qu'ingénieur en recherche et développement, ont donc naturellement porté le choix quant à notre recrutement sur votre profil.

Nous vous avons con'é le développement du cuivre chimique sans formaldéhyde, développement dans le cadre duquel vous avez passé du temps en laboratoire, mais aussi chez notre société s'ur en Italie, et parallèlement à cela, vous vous êtes rendu chez notre client Auriplast. Cependant, nous sommes au regret de constater après dix mois passés au sein de Coventya, que le contenu de votre travail ne nous donne toujours pas satisfaction et ne répond pas aux attentes de l'entreprise : vous ne nous fournissez pas de rapport justi'ant la nature de vos recherches et travaux.

Lors de votre réunion de présentation lundi 12 septembre 2016 chez le client Auriplast, accompagné de [P] [J], président, [N] [X], directeur technique, [L] [T], Attaché technico-commercial, vous aviez à présenter l'avancée de vos travaux à notre client et à répondre à ses problématiques techniques.

Suite à cette présentation vous n'avez fourni aucun rapport ayant un contenu utilisable pour l'entreprise et le client. Aucune solution n'a été proposée aux problématiques techniques du client.

A l'issue de cette réunion, [P] [J] vous a convoqué le 13 septembre 2016 dans son bureau a'n de vous signaler ce qui ne convenait pas et en vous demandant, entre autre, d'avoir une présentation plus soigneuse de vos pièces et de vos travaux, et de fournir un travail plus complet.

Du 3 au 7 octobre 2016 vous vous êtes de nouveau rendu chez ce client, et avez fait un rapport de visite envoyé le 12 octobre (après relance de [N] [X]), rapport qui contenait seulement 13 lignes pour une semaine passée chez ce client. Ce maigre rapport ne permet pas aux clients de répondre à ses problématiques et est ici encore inutilisable pour l'entreprise et le client. Là encore, aucune solution n'a été proposée aux problématiques techniques du client.

[P] [J] et [N] [X] vous ont reçu le 8 novembre 2016 en vous rappelant encore les points à améliorer et les attentes que nous avons de vos travaux, à savoir':

- de nous proposer des campagnes d'essai,

- de nous communiquer des éléments chiffrés sur l'avancée de vos travaux,

- d'argumenter vos travaux avec des chiffres, des valeurs, des courbes,

Nous attendions une démarche scienti'que et vous l'avions clairement exprimé.

[P] [J] et [N] [X] vous ont laissé un mois pour réagir et vous ont sollicité pour une présentation de vos travaux le 12 décembre 2016 et le 14 décembre 2016. Lors de ces présentations vous n'avez tenu compte d'aucune remarque qui vous avez (sic) été faite au préalable et n'avez pas été en mesure, cette fois encore, de montrer votre démarche scientifique. En conséquence, les travaux que vous avez effectués en laboratoire ne sont pas utilisables, et ne fournissent aucune avancée pour l'entreprise.

Lors de l'entretien préalable du 4 janvier 2017, nous vous avons rappelé que nous vous avions rencontré à différentes reprises, nous vous avons réitéré que nous attendions des rapports de qualité à la fois pour vous orienter dans vos recherches scientifiques mais également pour démontrer à nos clients notre état d'avancement.

Enfin, nous vous avons demandé si vous pouviez améliorer les choses, ce à quoi vous nous avez répondu : « je n'ai pas de réponse ».

En conclusion, lors de cet entretien, vous n'avez fourni aucun élément de nature à nous faire espérer un changement.

Nous avons donc décidé de cesser notre collaboration en vous notifiant par la présente votre licenciement au motif de votre insuffisance professionnelle dans l'exercice de vos fonctions.'»

Il est rappelé que M. [F] a été engagé par la société Coventya en qualité de chef de produits/POP, le terme POP signifiant «'métallisation des plastiques'» («'Plating On Plastics'»).

En cette qualité, M. [F] s'est vu confier, aux termes de son contrat de travail, les missions suivantes':

- participer au développement de la gamme de produit POP/décoration,

- participer à la mise en place de nouveaux procédés,

- analyser et identifier le marché, étudier les prix, orienter la recherche en fonction des évolutions technologiques,

- intervenir techniquement chez les clients en soutien des attachés technico-commerciaux et chefs de région,

- former les équipes ATC à la gamme et créer la documentation technique et commerciale nécessaire,

- assister le client dans les phases de démarrage de chaînes de traitement,

- effectuer des diagnostics chez les clients.

(pièce 2 de l'employeur).

M. [F] avait la responsabilité de deux gammes (décoration et métallisation des plastiques) sur les dix développées et commercialisées par Coventya et était notamment chargé du développement du procédé de cuivre chimique sans formaldéhyde pour le compte du client Auriplast, filiale du pôle Qualipac du groupe Pochet, qui fabrique des bouchons de parfum en plastique.

Aux termes de ses écritures, la société Coventya reproche à M. [F], l'absence de résultats probants sur le projet Auriplast malgré dix mois de travail, mais aussi ses manques de rigueur, de démarche scientifique, de pragmatisme, d'implication et des difficultés de communication.

S'agissant de l'absence de résultats sur le projet Auriplast, la société Coventya justifie avoir perdu le marché du client Auriplast, lequel atteste dans les termes suivants':

«'Le 21 novembre 2018, A l'intention de M. [P] [J], société Coventya.

Dans le cadre de la mise en place d'une nouvelle ligne de galvanoplastie sur le site Qualipac à [Localité 4], nous avons engagé dès 2016 des consultations auprès de nos fournisseurs pour le développement d'une gamme chimique sans chrome et sans nickel chimique.

Bien qu'étant un de nos partenaires privilégiés, nous n'avons pu retenir la société Coventya suite aux nombreux essais réalisés sur notre ligne pilote principalement parce que le procédé de cuivre chimique proposé en remplacement du nickel chimique nous a paru insuffisamment stable et performant. Par conséquent, la solution globale proposée comprenait deux points durs majeurs en termes de développement (Etching sans chrome et cuivre chimique).

Nous avons donc choisi la sécurité en retenant la solution d'un autre fournisseur dont seule la maîtrise de l'Etching sans chrome était à parfaire.

A ce jour, notre nouvelle ligne est installée et la gamme choisie est fonctionnelle, puisque nous produisons en 3X8 avec un taux de qualité conforme à nos objectifs'» (pièce 29 de l'employeur).

Contrairement à ce que soutient l'employeur, il ne se déduit pas des termes de ce document que M. [F] serait à l'origine de la perte du marché mais uniquement que le client a été amené à faire un choix au mieux de ses intérêts entre plusieurs prestataires.

La société Coventya reconnaît elle-même que l'activité de R&D sur le cuivre chimique, et précisément sur le cuivre chimique sans formaldéhyde animait l'industrie du traitement de surfaces depuis plusieurs années.

Elle explique que les procédés de cuivre chimique ne sont habituellement pas utilisés industriellement sur plastique pour l'automobile ou pour les bouchons de parfum, qui correspond à l'activité d'Auriplast, qu'en revanche, ils sont très utilisés (avec du formaldéhyde) en connectique sur des plastiques dits composites ou en électronique sur des circuits imprimés, que les travaux menés internationalement montreront en juin 2019 que le procédé de cuivre chimique sans formaldéhyde fonctionne, que c'est sa stabilité qui doit être améliorée pour pouvoir passer à une industrialisation du procédé sur des chaînes de traitement du plastique comme celles du client Auriplast.

Dans ces conditions, au regard des enjeux du projet confié au salarié, étant admis que les chimistes étaient confrontés depuis plusieurs années à la difficulté de stabiliser le cuivre chimique, il ne pouvait être mis à la charge de M. [F] une obligation de résultat.

La société Coventya prétend toutefois que les travaux de M. [F] n'ont absolument pas permis d'envisager un résultat à ce sujet, en raison de l'accumulation de lacunes au plan technique, en matière d'organisation du travail, de communication et d'implication.

Elle produit d'abord un courriel adressé par Mme [O], responsable labo expert chez Coventya, aux membres de la direction de la société, le 25 octobre 2016 en ces termes':

«'Bonjour, je viens d'avoir un appel téléphonique de [M] qui est chez Auriplast. La méthode d'analyse client de la part C ne pourra pas fonctionner car le client n'a pas d'acide sulfurique RP mais seulement du technique (couleur jaune marron).

J'avais demandé à [A] qui avait déjà eu ce souci de méthode chez le client la première fois (l'indicateur coloré n'avait pas la bonne couleur dans la sulfurique) de me dire si tous les produits utilisés étaient bien RP (j'avais insisté sur le fait que c'est important pour faire les analyses d'avoir des produits de haute pureté). Il m'avait répondu ne pas avoir fait attention.

Depuis, en prévision de sa nouvelle visite, il n'a pas eu «'l'intelligence'» soit de demander au client soit de faire envoyer de l'acide sulfurique RP chez le client.

En conséquence, [M] qui est venu pour l'aider ne peut pas mettre en place le suivi de la part C qui est important pour vérifier la stabilité du bain.

Est-ce l'image que nous souhaitons donner de Coventya à l'extérieur'' Incompétence et tourisme''

Cordialement'»' (pièce 16 de l'employeur).

La cour considère que ce courriel, qui se limite à refléter l'insatisfaction de la responsable labo expert quant aux méthodes de travail de M. [F] sur un point précis, n'est pas de nature à établir les manquements reprochés au salarié, faute de force probante suffisante.

La société Coventya allègue par ailleurs que les présentations effectuées par M. [F] chez le client Auriplast, les 12 septembre 2016, 12 et 14 décembre 2016, ont été très insuffisantes malgré le fait que le salarié a été reçu à plusieurs reprises, les 13 septembre 2016 et 8 novembre 2016, par M. [J], directeur, et par M. [X], directeur technique, pour lui préciser les attentes de la société et les points à améliorer, lui demandant de fournir des présentations plus soignées de ses pièces et travaux ainsi qu'un travail plus complet.

Elle ne produit cependant aucune pièce utile de nature à établir la mauvaise qualité des interventions du salarié, ni ne justifie du contenu des entretiens de recadrage qu'elle allègue, ce qui est pourtant l'essentiel des faits reprochés au salarié, de sorte que ces faits ne sont pas matériellement établis et ne peuvent donc venir à l'appui de la thèse de l'employeur.

La société Coventya reproche encore au salarié de s'être contenté, le 12 octobre 2016, de communiquer un rapport d'activité de treize lignes pour rendre compte d'une semaine entière passée chez le client Auriplast du 3 au 7 octobre 2016 (pièce 15 de l'employeur).

La cour constate cependant que ce courriel valant rapport comporte principalement des termes techniques qui ne permettent pas d'en apprécier la pertinence, alors que le nombre de lignes ne peut, à lui seul, caractériser une insuffisance.

M. [F] prétend de son côté avoir travaillé sur le développement du cuivre chimique sans formaldéhyde et avoir justifié de l'avancement de ses travaux. Il produit en effet différents comptes-rendus de visites chez Auriplast, des rapports d'activité mensuels et de sa participation à une réunion de régions, des rapports du laboratoire expert, plusieurs courriels sur le suivi du projet et plus particulièrement un rapport de test chez RPC Beauté de juillet 2016 (sa pièce 28) et une étude de stabilité du cuivre chimique de juin 2016 (sa pièce 29). Il fait par ailleurs valoir à juste titre que, compte tenu des explications données précédemment, les objectifs qui lui ont été fixés en matière de développement du cuivre chimique sans formaldéhyde étaient irréalistes dans un délai aussi court.

Enfin, l'entretien de progrès du 29 septembre 2016 mentionne en synthèse': «'Arrivée au 1er mars 2016, soit 6 mois chez Coventya. Doit impérativement développer curiosité/méthode et contenu dans ses travaux R&D. Connaissance de la galvanoplastie en acquisition, bonne intégration dans l'équipe, continuer ainsi en tenant compte de nos envies d'aller plus loin, de notre besoin de réussir, de nos équipements mis en service du R&D'», M. [F] ayant apporté le commentaire suivant': «'Arrivée au 1er mars 2016, soit 6 mois chez Coventya. J'ai eu peu de temps d'adaptation et d'outils efficaces (équipements, R&D, informatique) pour m' «'imprégner'» des conditions de travail chez Coventya. On m'a demandé de travailler à la paillasse sur un projet important pour Auriplast laissé un peu en «'stand by'» .

Au terme de cet entretien, le travail du salarié a été évalué à «'moyen'» pour l'adaptation au poste et le relationnel et à «'peu satisfaisant'» pour les performances réalisées et la capacité d'initiative (pièce 17 de l'employeur).

Il se déduit de ce document une évaluation certes mitigée, mais sans alerte significative compte tenu de la nécessaire adaptation au poste dans le cadre d'une prise de fonction, et même des encouragements.

Au total, au regard des éléments en présence, en l'absence d'éléments suffisamment probants, il sera retenu que l'insuffisance professionnelle que la société Coventya reproche à M. [F] n'est pas établie.

Le licenciement doit être dès lors dit dépourvu de cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement entrepris, sans qu'il n'y ait lieu d'examiner le moyen tiré de l'absence d'identification de l'auteur de la lettre de licenciement conduisant à dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse également, le salarié n'ayant pas formulé de demande spécifique à ce titre.

Conformément aux dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce, M. [F], qui avait moins de deux ans d'ancienneté, peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.

M. [F] justifie qu'il a retrouvé un emploi en avril 2017 avec toutefois un salaire inférieur de 400 euros (sa pièce 21).

Il sollicite l'allocation d'une somme de 3 950 euros à titre d'indemnisation. Au regard de l'ancienneté du salarié, du salaire qui lui était versé, de son âge au moment du licenciement et des conséquences de la rupture injustifiée de son contrat de travail, cette somme correspond au préjudice subi par M. [F] et sera donc entérinée.

Sur le préjudice moral subi

M. [F] sollicite en outre une somme de 8 300 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral qu'il prétend avoir subi. Il expose qu'il a été particulièrement meurtri des conditions de rupture de son contrat de travail, avec une remise en cause de ses compétences professionnelles, le dépôt d'une plainte et un constat d'huissier après que l'employeur ait découvert des documents dans son véhicule de service.

La société Coventya conteste cette demande, exposant qu'elle a découvert des matériels et des documents appartenant à la société dans le coffre de la voiture de fonction du salarié ainsi que le transfert par celui-ci de nombreux documents professionnels sur sa messagerie personnelle.

Il est rappelé que le salarié licencié peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et cumuler une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, à la condition de justifier d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement de nature brutale ou vexatoire.

La société Coventya explique ici que le 13 janvier 2017, alors que M. [F] était venu restituer le matériel mis à sa disposition par son employeur à l'exception de la voiture de fonction qu'il allait conserver pendant son préavis, elle a découvert que le salarié stockait dans le coffre de sa voiture de fonction un très grand nombre d'objets et de matériels lui appartenant, comme des flacons de produits chimiques, des notices techniques, des rapports de tests, des pièces de flaconnage ou des échantillons. Elle ajoute qu'elle a par ailleurs découvert dans la nuit du 12 au 13 janvier 2017 que M. [F] avait consulté 273 documents techniques de la société, effectué 154 transferts de documents de sa messagerie professionnelle vers sa messagerie personnelle, dont, selon elle, de nombreux documents sans rapport avec ses fonctions. Elle indique que ces constatations l'ont amenée à déposer plainte au commissariat de police de [Localité 6] le 9 février 2017, ce qui a conduit à l'encontre du salarié à un rappel à la loi décidé par le procureur de la République du 10 avril 2017 après destruction des données informatiques saisies.

L'employeur justifie de la remise du matériel du 13 janvier 2017 avec en annexe «'documents retrouvés après ouverture du coffre au moment du départ du salarié'» (sa pièce 8), de la plainte déposée le 9 février 2017 (sa pièce 9), de différents procès-verbaux de constat d'huissier, du rappel à la loi (sa pièce 21) et du compte-rendu de l'enquête (pièce 22).

De son côté, M. [F] fait valoir à ce sujet que les documents et échantillons retrouvés dans son véhicule de service provenaient de ses présentations auprès de différents clients et étaient restés dans son véhicule par simple commodité, qu'il ne peut être soutenu qu'il souhaitait soustraire ces différents éléments, ceux-ci ayant été découverts au moment où il procédait à la restitution des affaires appartenant à son employeur.

Le salarié ajoute, s'agissant des documents qu'il se serait appropriés sur le réseau informatique de l'entreprise, que ceux-ci ont été consultés et enregistrés dans le seul but de contester les motifs de son licenciement. Il précise que l'opération s'est déroulée la veille de la restitution de son ordinateur portable et que les documents étaient rédigés en anglais, qu'ils concernaient la chimie et qu'il en avait à l'évidence eu connaissance à l'occasion de ses fonctions.

Au regard des circonstances ainsi décrites et des explications respectives des parties, il sera retenu que c'est sans abus que l'employeur a déposé plainte et a fait établir un constat d'huissier.

Enfin, le salarié fait état de la remise en cause de ses compétences professionnelles mais celle-ci a déjà été prise en compte au titre de l'indemnisation de la rupture fautive du contrat de travail.

Ainsi, M. [F] ne justifie pas de circonstances, de nature brutale ou vexatoire, ayant entouré son licenciement.

Il sera débouté de cette demande par confirmation du jugement entrepris.

Sur les indemnités de chômage versées au salarié

L'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version résultant de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, énonce : «'Dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L.'1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.'»

En application de ces dispositions, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités.

Sur la clause de non-concurrence

M. [F] conteste avoir été valablement libéré de la clause de non-concurrence. Il demande à son employeur de produire l'original de l'avenant en date du 29 septembre 2016 et entend démontrer que cet avenant est dépourvu de valeur probante, au motif que l'employeur lui aurait imposé de conclure cet avenant dans la perspective de se séparer de son salarié à court terme. Il prétend qu'il a été victime de violence pour l'obliger à signer le document.

La société Coventya s'oppose à la demande, faisant valoir que la renonciation conjointe et d'un commun accord à l'obligation de non-concurrence prévue initialement au contrat de travail de M. [F] était effective et parfaitement opposable au salarié, du fait de la signature de l'avenant du 29 septembre 2016.

S'agissant en premier lieu de la production de l'original de l'avenant du 29 septembre 2016, M. [F] expose que la version informatique du document a subi des modifications, ce qui le conduit à demander la production de l'original du document mais n'explicite pas davantage son argumentation à ce sujet.

En toute hypothèse, la société Coventya a remis à la cour l'original du document lors de l'audience de plaidoiries du 13 octobre 2022. Celui-ci est signé par M. [F], par Mme [W] et par M.'[J] et indique':

«'[Localité 6], le 29 septembre 2016.

Monsieur [F],

Conformément à l'article 16 de l'avenant III de notre convention collective nous dénonçons d'un commun accord la clause de non-concurrence prévue à l'article XII de votre contrat de travail daté du 1er mars 2015.

Les autres articles de votre contrat de travail demeurent inchangés.

La présente constituant un avenant à votre contrat de travail, nous vous remercions de nous retourner un exemplaire de la présente revêtu de votre signature et de la mention manuscrite «'lu et approuvé'».

Veuillez agréer, Monsieur [F], l'expression de nos salutations distinguées'».

Ce moyen sera écarté, comme étant sans objet.

S'agissant de la force probante de l'avenant,

M. [F] conteste en premier lieu que Mme [W], chargée des ressources humaines, ait eu qualité pour engager l'entreprise, cet argument devant être rejeté car l'avenant est également signé par M. [J], directeur de la société, qui à ce titre, avait qualité pour représenter la société.

M. [F] soutient en deuxième lieu que la société Coventya n'a pas hésité à utiliser la violence pour obtenir la conclusion de l'avenant.

Il dit pourtant lui-même que Mme [W] lui a laissé sur son bureau le 29 septembre 2016 une note sur laquelle elle lui demandait de signer l'avenant, ce qui lui laissait le temps de se renseigner sur les conséquences de son engagement. De fait, il n'a pas signé cet avenant dans la précipitation puisqu'il produit un courriel de Mme [W] du 5 octobre 2016 lui demandant s'il avait pu signer son avenant, celui-ci répondant « je suis en déplacement jusqu'à aujourd'hui. Je reviendrai lundi et te remettrai tous les documents. Bonne journée.'» (pièce 53 du salarié). Après cette période de réflexion d'une semaine environ, il a finalement signé l'avenant, ce qu'il reconnaît.

Ainsi que lui reproche son employeur, qui prétend qu'il a produit une pièce falsifiée, il a certes produit un exemplaire de cet avenant qu'il avait en sa possession, non encore signé par M. [J], et sur lequel il a ajouté une réserve «'sous réserve que M. [J] signe l'avenant'». Il répond toutefois justement qu'il n'a jamais produit de document surchargé, - ce qui doit au demeurant conduire à rejeter l'allégation de l'employeur selon laquelle il a produit un faux en justice - mais la copie d'un exemplaire qu'il a bien eu en sa possession et que, quoi qu'il en soit, la réserve n'était pas de nature à remettre en cause son engagement.

Dès lors, le salarié ne démontrant pas l'existence des man'uvres dolosives qu'il allègue, sera débouté de sa demande tendant à voir déclarer nul l'avenant du 29 septembre 2016, par confirmation du jugement entrepris.

M. [F] sera en conséquence débouté de sa demande principale de nullité de l'avenant et de ses demandes subséquentes de rappel de salaires au titre d'une clause à laquelle il a renoncée, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les commissions

M. [F] expose qu'il était prévu dans son offre d'emploi, un commissionnement de 9 000 euros bruts sur les douze premiers mois d'activité et que c'est sur cette base qu'il a accepté de démissionner de ses précédentes fonctions pour intégrer la société Coventya, que la garantie de commissionnement n'a jamais été intégrée dans le contrat de travail et n'a jamais été appliquée. Il sollicite un rappel de 2 982,29 euros, outre congés payés, reconnaissant avoir perçu une somme de 6'017,71 euros pour la période allant du 1er mars 2016 jusqu'au 28 février 2017.

La société Coventya ne remet pas en cause son engagement de garantir à M. [F] un commissionnement de 9 000 euros brut au cours des douze premiers mois d'activité mais prétend avoir versé la somme totale de 9 738,30 euros sur la période travaillée, soit plus que l'engagement pris.

L'examen des bulletins de salaire montre que M. [F] percevait des avances mensuelles de 500 euros brut et qu'une régularisation était effectuée au trimestre échu, qu'il a ainsi perçu la somme totale de 9 738,30 euros, conformément au décompte proposé par l'employeur, sur l'ensemble de la relation contractuelle, soit du 1er mars 2016 au 10 avril 2017.

Pour autant, s'agissant de la période correspondant aux douze premiers mois, telle que prévue par l'engagement, il a été versé à M. [F], selon le tableau établi par l'employeur, 12 X 500 euros (les avances), 250 euros au titre de la régularisation de juin 2016, 750 euros au titre de la régularisation de septembre 2016 et 417,71 euros au titre de la régularisation de décembre 2016, ce qui porte à la somme de 7'417,71 euros la somme totale que le salarié a perçue.

M. [F] est donc bien fondé à solliciter le paiement de la différence avec le montant garanti, à hauteur de 1 582,29 euros outre les congés payés afférents, par infirmation du jugement entrepris.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Pour soutenir que la société Coventya n'a pas exécuté de bonne foi le contrat de travail, M. [F] allègue que l'employeur lui a proposé une offre d'embauche sans qu'il soit prévu l'existence d'une clause de non-concurrence, qu'il a envisagé d'intégrer au contrat de travail une clause de non-concurrence et ce, plus d'un mois après que le salarié a démissionné de son précédent emploi, qu'il lui a attribué des fonctions totalement différentes de celles contenues dans la fiche de poste et le contrat de travail, qu'il a refusé de lui accorder une équipe, une formation initiale, un soutien logistique et pédagogique pendant l'exécution de son contrat de travail et qu'il a fait pression pour que la clause de non-concurrence soit supprimée ce, dans la perspective d'un licenciement à court terme. Il réclame l'allocation d'une somme de 12'450'euros à ce titre.

La société Coventya conclut au débouté du salarié et soutient que, s'il y a eu exécution déloyale du contrat de travail, elle a indéniablement été commise par M. [F] compte tenu de l'attitude qu'il a adoptée lors de la restitution du matériel appartenant à la société et de sa tentative de tromper la cour au moyen d'une pièce falsifiée pour obtenir une indemnisation indue.

Il est rappelé que, conformément aux dispositions de l'article L.'1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Concernant la proposition d'une offre d'embauche sans qu'il soit prévu l'existence d'une clause de non-concurrence et le fait d'avoir envisagé d'intégrer au contrat de travail une clause de non-concurrence plus d'un mois après sa démission de son précédent emploi, la cour retient que ces questions relèvent de la négociation contractuelle sans qu'un abus ne soit caractérisé en l'espèce, ni un préjudice puisque cette proposition n'a pas été retenue en définitive.

Concernant l'attribution de fonctions totalement différentes de celles contenues dans la fiche de poste et le contrat de travail, cette allégation est démentie par le descriptif de fonctions (pièce 2 de l'employeur) et l'entretien annuel, qui montrent une concordance entre les fonctions contractuellement convenues et les fonctions réellement exercées.

Concernant le refus de lui accorder une équipe, une formation initiale, un soutien logistique et pédagogique pendant l'exécution de son contrat de travail, ce fait n'est pas utilement démontré.

Concernant enfin la pression que l'employeur aurait exercé sur lui afin que la clause de non-concurrence soit supprimée, cet argument a été précédemment rejeté.

M. [F] sera débouté de cette demande, par confirmation du jugement entrepris.

Sur l'abus de procédure

La société Coventya soutient, à l'appui de sa demande tendant à l'allocation d'une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions des articles 1240 du code civil et 32-1 du code de procédure civile, que M. [F] a fait preuve de mauvaise foi et de malhonnêteté dans la rupture de son contrat de travail. Elle prétend que cette mauvaise foi se retrouve à la fois dans son argumentation, tant en première instance qu'en appel, et dans son action en justice elle-même.

M. [F] conteste cette demande.

Il est rappelé qu'aux termes de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

L'article 1240 du code civil dispose quant à lui que «'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'».

L'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus de droit que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ou de légèreté blâmable.

L'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute.

A l'appui de sa demande, la société Coventya se limite à rappeler différentes circonstances du litige, sans caractériser un abus du droit d'ester en justice, ni de celui d'interjeter appel.

Elle sera déboutée de sa demande par infirmation du jugement entrepris.

Sur les intérêts moratoires et leur capitalisation

Il est de principe que le créancier peut prétendre aux intérêts de retard calculés au taux légal, en réparation du préjudice subi en raison du retard de paiement de sa créance par le débiteur.

Les condamnations prononcées produisent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation pour la créance contractuelle et à compter de l'arrêt, qui en fixe le principe et le montant, pour la créance indemnitaire.

En application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de préciser que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure

Compte tenu de la teneur de la décision rendue, le jugement de première instance, qui a condamné M. [F] aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 1 200 euros au profit de son employeur en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, sera infirmé de ces chefs de demande.

La société Coventya, tenue à indemnisation, supportera les dépens, de première instance et d'appel, en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Elle sera en outre condamné à payer à M. [F] une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 3 000'euros.

Elle sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 5 septembre 2019, excepté en ce qu'il a':

- dit et jugé que le licenciement de M. [V] [F] par la SAS Coventya était fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- fait droit à la demande de la société Coventya pour procédure abusive,

- débouté M. [V] [F] de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [V] [F] de sa demande en paiement d'un rappel de commission,

- condamné M. [V] [F] à payer à la SAS Coventya, à titre de dommages-intérêts, la somme de 1'000 euros,

- condamné M. [V] [F] à payer à la SAS Coventya la somme de 1 200 euros en application de 1'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [V] [F] aux entiers dépens de l'instance,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT abusif le licenciement prononcé par la SAS Coventya à l'égard de M. [V] [F],

CONDAMNE la SAS Coventya à payer à M. [V] [F] la somme de 3 950 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SAS Coventya à payer à M. [V] [F] la somme de 1 582,29 euros à titre de rappel de salaire sur ses commissions, outre celle de 158,22 euros au titre des congés payés afférents,

DÉBOUTE la SAS Coventya de sa demande pour procédure abusive,

CONDAMNE la SAS Coventya à payer à M. [V] [F] les intérêts de retard au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de sa convocation devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation sur la créance contractuelle et à compter de l'arrêt sur la créance indemnitaire,

DIT que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt,

ORDONNE le remboursement par la SAS Coventya aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à M. [V] [F] dans la limite de trois mois d'indemnités,

DIT qu'une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée par le greffe par lettre simple à la direction générale de Pôle emploi conformément aux dispositions de l'article R.'1235-2 du code du travail,

CONDAMNE la SAS Coventya au paiement des entiers dépens,

CONDAMNE la SAS Coventya à payer à M. [V] [F] une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la SAS Coventya de sa demande présentée sur le même fondement.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine BOLTEAU-SERRE, président, et par Mme [B] [D], greffier en pré-affectation, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER en pré-affectation, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03726
Date de la décision : 24/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-24;19.03726 ?
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