COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 35A
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 14 FEVRIER 2023
N° RG 21/06372 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UZLQ
AFFAIRE :
S.A.S. LE GROUPE NOVA
....
C/
[Z] [J]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Septembre 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 2019F01945
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Christophe DEBRAY
Me Franck LAFON
TC NANTERRE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.S. LE GROUPE NOVA
[Adresse 3]
[Localité 5]
S.A.R.L. MILLENIUM INVESTISSEMENT
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 21409
Représentant : Me Marc ATINIAN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
APPELANTES
****************
Madame [Z] [J]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20220074
Représentant : Me Nolwenn HADET-KAZIRAS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Décembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,
Le capital de la holding SARL Millenium investissement (société Millenium) est intégralement détenu par son dirigeant M. [N] [O]. La société Millenium est actionnaire majoritaire (84,27%) de la SAS Le Groupe Nova (société Nova), société d'exploitation exerçant une activité de conseil en système d'information et d'expertise en nouvelles technologies, dont le président est également M. [O].
Le 8 septembre 2011, la société Nova a embauché Mme [Z] [J] en contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable de la communication et du marketing et elle a exercé son activité en télétravail.
Le 3 octobre 2013, Mme [J] a acquis 230 actions sur les 5 100 actions de la société Nova, soit 4,51% du capital pour un prix de 50 140 euros et elle a signé le même jour un pacte d'actionnaires avec la société Millenium en présence de la société Nova. Ce pacte contenait notamment une promesse de cession des titres au profit de la société Millenium, en cas de démission ou licenciement de Mme [J].
Mme [J] a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude médicale le 2 juillet 2015. Elle a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande d'annulation de ce licenciement, estimant avoir la qualité de salariée protégée et reprochant à son employeur de ne pas avoir sollicité une autorisation de l'inspection du travail.
Le 10 novembre 2015, la société Millenium a levé l'option de la promesse de cession de titres consentie par Mme [J] pour les 230 actions dont elle était titulaire, au prix de 15 253,14 euros.
Face au refus de Mme [J], la société Millenium l'a faite assigner devant le président du tribunal de commerce de Nanterre statuant en référé pour voir ordonner sous astreinte la formalisation forcée de la vente des 230 actions au prix de 15 253,14 euros, ordonner en conséquence à Mme [J] de parfaire la signature de l'ordre de mouvement, signer les exemplaires du formulaire CERFA et pour qu'il lui soit donné acte de son engagement à remettre à réception le chèque de 15 253,14 euros.
Par ordonnance du 7 avril 2016, le juge des référés a constaté l'existence d'une contestation sérieuse, décision confirmée le 13 avril 2017 par la cour d'appel de Versailles.
Par jugement du 9 novembre 2017, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a dit le licenciement sans cause réelle ni sérieuse. Par arrêt du 17 septembre 2020 devenu définitif, la présente cour d'appel a annulé le licenciement de Mme [J] (licenciement d'un salarié protégé sans autorisation préalable de l'inspection du travail).
Par actes du 30 octobre 2019, Mme [J] a assigné les sociétés Nova et Millenium devant le tribunal de commerce de Nanterre lequel, par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 14 septembre 2021 a :
- débouté Mme [J] de sa demande de nullité de la promesse de cession de titre prévue dans le pacte d'actionnaires du 3 octobre 2013 ;
- débouté Mme [J] de sa demande de nullité de la levée de l'option de la promesse de cession ;
- ordonné à Mme [J] de céder à la société Millenium les 230 actions qu'elle détient dans le capital de la société Nova et de signer le formulaire CERFA y afférent;
- dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte ;
- condamné la société Millenium à payer à Mme [J] la somme forfaitaire de 44 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamné solidairement la société Millenium et la société Nova aux dépens.
Par déclaration du 18 octobre 2021, les sociétés Nova et Millenium ont interjeté appel du jugement.
Par acte du 16 décembre 2021, la société Millenium a assigné Mme [J] devant le premier président de la cour d'appel de Versailles, lequel, par ordonnance de référé du 10 mars 2022 a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire et condamné la société Millenium au paiement d'une amende civile de 5 000 euros au profit du Trésor public, outre la somme de 2 500 euros à Mme [J] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la condamnant enfin aux dépens.
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 14 novembre 2022, les sociétés Nova et Millenium demandent à la cour de :
- dire irrecevables les demandes suivantes formulées par Mme [J] :
* 'constater que la répartition du capital social de la société Nova est actuellement comme suit:
* Millenium : 84%
* Mme [J] : 4,5%
* Autres actionnaires salariés : 11,5% ;
* condamner solidairement les sociétés Millenium et Nova à payer à Mme [J] la somme de 50 140 euros à titre de dommages et intérêts ;
* condamner la société Nova à la somme de 3 000 euros par assemblée générale tenue en l'absence de Mme [J] à compter du 10 novembre 2015 ;
* ordonner à la société Nova de délivrer à Mme [J] la copie de tous les registres des assemblées générales intervenues depuis le 30 novembre 2015 ;
* ordonner à la société Nova de délivrer à Mme [J] copie des comptes annuels établis depuis le 31 décembre 2015'
- A défaut, les rejeter,
- confirmer le jugement en ses dispositions non critiquées, c'est-à-dire en ce qu'il a :
* ordonné à Mme [J] de céder à la société Millenium les 230 actions qu'elle détient dans le capital de la société Nova et de signer le formulaire CERFA y afférent ;
* débouté Mme [J] de sa demande de nullité de la promesse de cession de titre prévue dans le pacte d'actionnaires du 3 octobre 2013 conclu avec la société Millenium ;
* débouté Mme [J] de sa demande de dire et juger qu'aucune décote de prix ne peut être appliquée au rachat, par la société Millenium, des titres détenus ;
* débouté Mme [J] de sa demande de condamnation de la société Millenium au paiement de la somme de 44 746,86 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la décote appliquée par la société Millenium pour le rachat des titres, augmentée de 10 000 euros au titre de la mauvaise foi,
* débouté Mme [J] de sa demande de condamnation à leur encontre au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
* dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte à l'injonction faite à Mme [J] de céder à la société Millenium les 230 actions qu'elle détient dans le capital de la société Nova et de signer le formulaire CERFA y afférent ;
* condamné la société Millenium à payer à Mme [J] la somme forfaitaire de 44 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
* débouté la société Millenium de ses demandes plus amples ou contraires ;
* dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
* ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie ;
* condamné les sociétés Millenium et Nova aux dépens ;
Statuant à nouveau,
- constater la réalisation de la vente des 230 actions détenues par Mme [J] dans le capital de la société Nova au profit de la société Millenium pour un prix de 15 253,14 euros ;
- ordonner à Mme [J] de signer le formulaire CERFA et céder à la société Millenium les 230 actions qu'elle détient dans le capital de la société Nova, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;
- se réserver la liquidation de l'astreinte ;
- condamner Mme [J] à verser à la société Millenium la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- condamner Mme [J] à leur verser à chacune la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance ;
- condamner Mme [J] aux entiers dépens de première instance ;
- confirmer, pour le surplus, le jugement ;
Y ajoutant,
- condamner Mme [J] à leur verser à chacune la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
- condamner Mme [J] aux entiers dépens d'appel.
Mme [J], dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 24 novembre 2022, demande à la cour de :
A titre liminaire,
A titre principal,
- juger que ne sont pas nouvelles, et sont en tout état de cause recevables, les demandes suivantes formulées par Mme [J] devant la cour :
* 'constater que la répartition du capital social de la société groupe Nova est actuellement comme suit :
* Millenium : 84%
* Mme [J] : 4,5%
* Autres actionnaires salariés : 11,5% ;
* condamner solidairement les sociétés Millenium et Nova à payer à Mme [J] la somme de 50 140 euros à titre de dommages et intérêts ;
* condamner la société Nova à la somme de 3 000 euros par assemblée générale tenue en l'absence de Mme [J] à compter du 10 novembre 2015 ;
* ordonner à la société Nova de délivrer à Mme [J] la copie de tous les registres des assemblées générales intervenues depuis le 30 novembre 2015 ;
* ordonner à la société Nova de délivrer à Mme [J] copie des comptes annuels établis depuis le 31 décembre 2015 ;
* juger que le prix de rachat des actions détenues par Mme [J] dans la société Millenium interviendra au jour de la signature des formulaires CERFA afférents au prix de 21 790,20 euros ;
En tout état de cause,
- juger recevable sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile la demande tendant à ce que la cour ajoute au jugement entrepris en jugeant, à titre subsidiaire, qu'aucune décote ne doit s'appliquer sur le prix de cession si la cour venait à rejeter sa demande de nullité de la levée d'option exercée par Millenium ;
- constater qu'en demandant à titre principal à la cour d'annuler la levée d'option exercée par la société Millenium le 10 novembre 2015, elle n'a pas acquiescé au jugement entrepris en ce qu'il lui a ordonné de céder les parts qu'elle détient dans la société Nova ;
A titre principal,
- réformer le jugement en ce qu'il a refusé de constater la nullité de la levée d'option exercée par la société Millenium le 10 novembre 2015 ;
Statuant à nouveau,
- annuler la levée d'option exercée par la société Millenium le 10 novembre 2015 ;
- juger par conséquent qu'elle a toujours la qualité d'actionnaire de la société Nova et de constater que la répartition du capital social de la société Nova est actuellement comme suit :
* Millenium : 84%
* Mme [J] : 4,5%
* Autres actionnaires salariés : 11,5%
- condamner solidairement les sociétés Millenium et Nova à lui payer la somme de 50 140 euros à titre de dommages et intérêts ;
- annuler par conséquent les assemblées générales de la société Nova qui se sont tenues depuis le 10 novembre 2015, à savoir :
* l'assemblée générale ordinaire du 28 juin 2019 ;
* toute autre assemblée générale de la société Nova dont elle n'a pu avoir connaissance ;
- condamner la société Nova à la somme de 3 000 euros par assemblée générale tenue en son absence à compter du 10 novembre 2015
- ordonner à la société Nova de lui délivrer la copie de tous les registres des assemblées générales intervenues depuis le 10 novembre 2015 ;
- ordonner à la société Nova de lui délivrer copie des comptes annuels établis depuis le 31 décembre 2015; - condamner solidairement les sociétés Nova et Millenium à lui verser la part de distributions de dividendes lui revenant depuis le 31 décembre 2015, soit la somme de 29 900 euros à parfaire ;
A titre subsidiaire;
- juger que le prix de rachat des actions détenues par elle dans la société Millenium interviendra au jour de la signature des formulaires CERFA afférents au prix de 21 790,20 euros ;
En tout état de cause,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Millenium à la somme de 44 000 euros ;
A titre principal et en tout état de cause,
- rejeter la demande de condamnation à une astreinte de 100 euros par jour de retard en cas de condamnation à intervenir ;
- rejeter la demande de condamnation pour procédure abusive formulée par les sociétés Millenium et Nova à hauteur de 10 000 euros ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande des appelants tendant à la voir condamner à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
- débouter les appelants de leur demande de condamnation à son encontre à la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner les appelants à la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de maître Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er décembre 2022.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
1 - sur la recevabilité de certaines demandes formées par Mme [J]
Les sociétés Millenium et Nova soutiennent que certaines 'demandes', formulées par Mme [J] pour la première fois en cause d'appel, sont irrecevables comme étant nouvelles, à savoir les demandes suivantes :
* constater que la répartition du capital social de la société Nova est actuellement comme suit :
* Millenium : 84%
* Mme [J] : 4,5%
* Autres actionnaires salariés : 11,5% ;
* condamner solidairement les sociétés Millenium et Nova à payer à Mme [J] la somme de 50 140 euros à titre de dommages et intérêts ;
* condamner la société Nova à la somme de 3 000 euros par assemblée générale tenue en l'absence de Mme [J] à compter du 10 novembre 2015 ;
* ordonner à la société Nova de délivrer à Mme [J] la copie de tous les registres des assemblées générales intervenues depuis le 30 novembre 2015 ;
* ordonner à la société Nova de délivrer à Mme [J] copie des comptes annuels établis depuis le 31 décembre 2015'.
Les sociétés Millenium et Nova soutiennent également, dans les motifs de leurs conclusions que la demande tendant à : juger que le prix de rachat des actions détenues par Mme [J] dans la société Millenium interviendra au jour de la signature des formulaires CERFA afférents au prix de 21 790,20 euros, serait une demande nouvelle irrecevable en appel.
En application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue toutefois que sur les prétentions énoncées au dispositif. Cette prétention n'étant pas reprise au dispositif des conclusions de la société Millenium, la cour ne statuera pas sur la recevabilité de cette demande, étant précisé qu'elle n'entend pas soulever d'office l'irrecevabilité.
Mme [J] soutient que les demandes évoquées plus avant ne sont pas nouvelles, la première étant l'accessoire de sa demande d'annulation de la levée d'option, la seconde ne résultant que d'une erreur de plume (écart de 140 euros sur la demande de dommages et intérêts), la troisième étant l'accessoire de sa demande de nullité des assemblées générales faute de convocation, les 4ème et 5ème demandes de communication de documents sociaux constituant le complément nécessaire de la demande en nullité des assemblées.
Il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Les articles 565 et 566 du même code disposent que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En l'espèce, la première demande tendant au simple 'constat' de la répartition actuelle du capital de la société Nova, ne constitue pas une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile, de sorte qu'il ne sera pas statué sur ce point et qu'il n'y a donc pas lieu de s'interroger sur la recevabilité de cette simple demande de constat. La cour observe, en tant que de besoin, que les appelantes ne soulèvent pas l'irrecevabilité de la prétention annexe formée par Mme [J] tendant à 'juger qu'elle a toujours la qualité d'actionnaire de la société Nova'.
En première instance, Mme [J] avait sollicité paiement d'une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la nullité alléguée de la levée d'option. En appel, Mme [J] a porté cette demande à 50 140 euros (montant investi dans l'acquisition des titres). La différence de 140 euros doit être considérée comme le complément nécessaire de la prétention soumise au premier juge, de sorte que la nouvelle prétention est recevable.
S'agissant de la demande d'indemnisation pour l'absence de convocation aux assemblées générales de la société Nova, Mme [J] ne peut soutenir qu'elle est l'accessoire de la demande en nullité de ces assemblées. En effet, et comme le relève la société Nova, Mme [J] ne justifie pas que la nullité des assemblées entraînerait pour elle un préjudice 'accessoire' puisque la société Nova serait alors contrainte de convoquer une nouvelle assemblée à laquelle elle convoquerait Mme [J]. La demande indemnitaire n'est donc pas accessoire de la demande de nullité des assemblées, de sorte qu'il s'agit d'une prétention nouvelle, irrecevable en appel.
S'agissant des deux autres prétentions relatives à la communication des comptes annuels et des registres d'assemblées, elle seront considérées comme le complément nécessaire des demandes de nullité des assemblées et de paiement des dividendes, peu important que les demandes de communication soient intervenues postérieurement aux demandes de nullité et de paiement. Ces prétentions seront donc déclarées recevables.
2- sur les demandes de confirmation formées par les sociétés Millenium et Nova quant aux dispositions du jugement non critiquées par Mme [J]
Les sociétés Millenium et Nova soutiennent que Mme [J] ne critique pas certaines dispositions du jugement, de sorte que la cour ne peut que les confirmer, à savoir les dispositions suivantes :
- débouté de la demande de nullité de la promesse de cession de titre,
- refus de dire qu'aucune décôte de prix ne peut être appliquée au rachat des titres,
- refus de condamner la société Millenium au paiement de la somme de 44 746,86 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la décôte, outre 10 000 euros au titre de la mauvaise foi,
- refus de condamner les sociétés Nova et Millenium au paiement de la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
- injonction à Mme [J] de céder les 230 actions qu'elle détient et de signer le formulaire Cerfa y afférent.
Mme [J] admet que seuls les chefs de jugement expressément critiqués dans les conclusions d'appel incident fixent l'objet de l'appel, soutenant toutefois que l'appel est étendu aux chefs de jugement qui, bien que non expressément critiqués, en dépendent. Elle fait notamment valoir :
- qu'elle n'a pas acquiescé au jugement en ce qu'il lui ordonne de céder ses actions,
- qu'elle a bien relevé appel incident du jugement en ce qu'il refuse de prononcer la nullité de la levée d'option, ajoutant que cette nullité aurait un effet rétroactif si elle était prononcée, ce qui aboutirait à replacer les parties dans la situation initiale avant levée de l'option, empêchant alors la société Millenium de poursuivre la cession forcée des titres. Elle soutient donc que la critique du jugement qu'elle formule, en ce qu'il a ordonné la cession des titres, est nécessairement comprise dans la demande de nullité de la levée d'option. Elle ajoute que ce n'est qu'à titre subsidiaire qu'elle demande la fixation du prix de rachat des titres.
Il résulte de l'article 562 du code de procédure civile que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément, et de ceux qui en dépendent.
Il résulte des articles 542 et 954 du même code que lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions, ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement.
L'appel incident n'est pas différent de l'appel principal par sa nature ou son objet, de sorte que les conclusions de l'appelant, que l'appel soit principal ou incident, doivent déterminer l'objet du litige porté devant la cour d'appel en sollicitant l'infirmation ou à la réformation du jugement attaqué. A défaut, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement.
Il convient de revenir sur les différentes dispositions du jugement dont l'infirmation ou la réformation ne serait pas sollicitée par Mme [J], pouvant ainsi aboutir à une confirmation du jugement.
- sur le débouté de la demande de nullité de la promesse de cession de titre
Le tribunal a débouté Mme [J] de sa demande de nullité de la promesse de cession de titre. Dans le dispositif de ses conclusions d'intimé, Mme [J] ne reprend pas cette prétention, et ne forme aucune observation sur la demande de confirmation formée par les appelantes. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [J] de sa demande de nullité de la promesse de cession de titre.
- sur le refus du tribunal de 'dire et juger' qu'aucune décôte de prix ne peut être appliquée au rachat des titres
Contrairement à ce que soutient la société Millenium, le tribunal n'a pas refusé de dire qu'aucune décote de prix ne pouvait être appliquée, puisqu'il indique au contraire, dans sa motivation (page 8) : 'il n'y a pas lieu d'appliquer la décote de 70% contractuellement prévue dans le pacte en cas de licenciement', de sorte qu'il a ainsi fait droit à la demande de dire qu'aucune décote ne peut être appliquée. Mme [J] demande confirmation du jugement sur ce point, tandis que la société Nova sollicite elle-même l'infirmation puisqu'elle demande à la cour de 'constater la réalisation de la vente des 230 actions pour un prix de 15 253,14 euros (c'est-à-dire : après décote).
- sur le refus de condamner la société Millenium au paiement de la somme de 44 746,86 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la décote, outre 10 000 euros au titre de la mauvaise foi,
Le tribunal a partiellement fait droit, à hauteur de 44 000 euros, à la demande en paiement formée par Mme [J] à hauteur de 44 746,86 euros.
La demande de la société Nova, tendant à la fois à la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire de 44 746,76 euros et l'infirmation du jugement sur la condamnation à hauteur de la somme de 44 000 euros incluse dans le premier montant s'analyse en fait en une demande d'infirmation du jugement sur ce chef de préjudice, sans qu'il y ait lieu à confirmation du rejet de la demande en paiement de 44 746,76 euros.
S'agissant de la demande indemnitaire au titre de la mauvaise foi (10 000 euros), rejetée par le premier juge, Mme [J] ne sollicite pas l'infirmation ou l'annulation du jugement sur ce point. Elle ne forme, en tout état de cause, dans le dispositif de ses écritures, qui seul saisit la cour, aucune prétention à ce titre. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire à hauteur de 10 000 euros du fait de la mauvaise foi alléguée de la société Nova.
- refus de condamner les sociétés Nova et Millenium au paiement de la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
Le tribunal a dit n'y avoir lieu à paiement de frais irrépétibles en première instance. Mme [J] ne forme aucune prétention à ce titre devant la cour. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [J] de sa demande en paiement de frais irrépétibles de première instance.
- injonction à Mme [J] de céder les 230 actions qu'elle détient et de signer le formulaire Cerfa y afférent.
Le tribunal a ordonné à Mme [J] de céder à la société Millenium les 230 actions qu'elle détient dans le capital de la société Nova et de signer le formulaire Cerfa y afférent. Mme [J] ne sollicite ni l'infirmation ni la réformation du jugement sur ce point.
S'il est exact que Mme [J] ne critique pas expressément le chef du jugement lui ordonnant de céder ses actions, il apparaît que ce dernier dépend du chef du dispositif la déboutant de sa demande de nullité de la levée d'option dont elle demande l'infirmation. L'injonction de céder les actions est en effet la conséquence directe du rejet de sa demande de nullité de la levée d'option, en ce sens que si la nullité avait été prononcée, il ne pouvait y avoir lieu à cession des actions.
Mme [J] demande d'ailleurs à la cour de : 'juger qu'elle a toujours la qualité d'actionnaire de la société Groupe Nova (...)'.
Il apparaît ainsi que, si Mme [J] ne sollicite pas expressément l'infirmation ou la réformation du jugement en ce qu'il lui ordonne de céder les actions détenues, ce chef de jugement dépend de celui - relatif au rejet de sa demande de nullité de la levée d'option - qui est expressément critiqué. La cour est donc bien saisie du chef de jugement relatif à l'injonction de céder les actions.
3 - sur la demande principale de Mme [J] relative à la nullité de la levée d'option de la promesse de cession exercée par la société Millenium
Mme [J] sollicite la réformation du jugement en ce qu'il a refusé de faire droit à sa demande de nullité de la levée d'option exercée par la société Millenium. Elle soutient que les conditions de la levée d'option n'étaient pas remplies dès lors que son licenciement a été annulé. Elle soutient que, contrairement à l'argumentation de son employeur, il n'est pas établi qu'elle aurait été licenciée si la procédure avait été respectée, les parties ne pouvant préjuger de la position qu'aurait pris l'inspection du travail quant à une autorisation de licenciement. Elle fait ainsi valoir que son licenciement était incertain au jour de la levée d'option de la société Millenium, de sorte que la condition fixée au pacte d'actionnaire n'était pas réalisée, la levée d'option devant être annulée.
Les sociétés Millenium et Nova soutiennent en premier lieu que Mme [J] ne peut formuler cette demande de nullité de la levée d'option dès lors qu'elle est en contradiction avec le chef de jugement non critiqué lui ayant ordonné de céder ses actions, impliquant qu'elle n'a plus la qualité d'actionnaire. Elles font ensuite valoir que la nullité d'un licenciement est sans effet sur l'exercice de la promesse de cession des titres, précisant que Mme [J] n'exerce plus de 'fonctions salariées effectives' au sens de l'article 7.1 du pacte d'actionnaires et qu'elle n'a pas sollicité sa réintégration, de sorte qu'elle doit être déboutée de sa demande de nullité de la levée d'option.
Il a été démontré que le chef de jugement visant à ordonner à Mme [J] de céder ses titres était bien critiqué, de sorte qu'il n'existe aucune contradiction quant à sa demande de nullité de la levée d'option.
L'article 7.1 du pacte d'actionnaires dispose que : 'il est expressément convenu entre les parties que, dans l'hypothèse où l'actionnaire n'exercerait plus de fonctions salariées effectives au sein de la société Novalliance [devenue société Nova], quelles que soient la date et la cause de la rupture de son contrat de travail, il pourra être procédé, à la demande expresse de Millenium et au bénéfice exclusif de Millenium, à la cession de la totalité des titres que l'actionnaire détient dans le capital de la société Novalliance (...).' (Soulignement ajouté par la cour)
Les articles 7.2 à 7.6 du pacte prévoient les modalités de fixation du prix des titres en fonction des motifs de la rupture (démission, licenciement économique, motif réel et sérieux, faute grave...).
Les articles 7.7 et suivants prévoient les modalités de levée de la promesse de cession des titres, notamment par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai maximum de 18 mois suivant l'événement permettant la levée d'option.
L'article 7.3 du pacte dispose : ' dans l'hypothèse où il serait mis fin aux fonctions salariées de l'actionnaire à l'initiative de la société ou d'un commun accord entre l'actionnaire et la société, et pour des motifs autres que ceux assimilables à un motif économique ou à une faute grave ou lourde en matière de droit du travail, l'actionnaire s'oblige à céder la totalité des titres qu'il détient dans le capital de la société à Millenium, si elle en fait expressément la demande, à un prix égal au pourcentage que représentent ces titres dans le capital de la société, appliqué à 70% de la valeur de la société Novalliance, celle-ci étant calculée selon la formule suivante (...).'
Il résulte des dispositions précitées que la condition principale pour la levée d'option est précisée à l'article 7.1, à savoir que l'actionnaire n'exerce plus de fonctions salariées effectives au sein de la société Nova, et ce 'quelles que soient la date et la cause de la rupture du contrat de travail.'
Au jour de la levée d'option, soit le 10 novembre 2015, Mme [J] n'exerçait plus de fonctions salariées effectives dans la société Nova (depuis son licenciement prononcé le 2 juillet 2015), de sorte que cette dernière était, à cette date, en droit de lever l'option de la promesse de cession des titres.
La nullité du licenciement de Mme [J], prononcée par arrêt de cette cour du 17 septembre 2020, a eu pour effet de remettre les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant ce licenciement, Mme [J] ne pouvant alors être considérée comme salariée qu'à condition qu'elle sollicite sa réintégration, ce qui constituait une condition sine qua non pour admettre un exercice effectif de fonctions salariées.
Faute pour Mme [J] d'avoir sollicité une telle réintégration, la condition tenant à l'absence d'exercice de fonctions salariées effectives est bien remplie et la levée d'option exercée par la société Nova est ainsi régulière, de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a débouté Mme [J] de sa demande de nullité de la levée d'option, le jugement étant confirmé de ce chef.
La levée d'option opérée par la société Nova en novembre 2015 étant régulière, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à Mme [J] de céder à la société Millenium les 230 actions qu'elle détient dans le capital de la société Nova et de signer le formulaire Cerfa y afférent. Il n'y a pas lieu à fixation d'une astreinte dès lors que Mme [J] avait proposé, au titre de l'exécution provisoire du jugement, de céder les titres contre versement des sommes fixées par le premier juge, ce à quoi la société Millenium s'était opposée.
Compte tenu de la solution donnée au litige, les demandes relatives à la qualité d'actionnaire de Mme [J], aux annulations d'assemblées générales, à la communication de copies de registres d'assemblées et de comptes annuels, et au versement de dividendes seront rejetées.
4 - sur les demandes subsidiaires de Mme [J] relatives à la fixation du prix de rachat des actions, et au paiement de dommages et intérêts
Si la levée d'option de la promesse de cession des titres était jugée valide, Mme [J] forme une demande subsidiaire tendant à la fixation du prix de rachat des actions, considérant que le premier juge a omis de statuer sur ce point. Elle sollicite à ce titre paiement d'une somme de 21 790 euros, sans application de décote, du fait de la mauvaise foi de la société Nova qui ne pouvait ignorer la nécessité d'une autorisation de l'inspecteur du travail pour procéder à son licenciement, ajoutant que son employeur a anticipé ce licenciement dans le seul but de provoquer la décote de 70% de la valeur des titres. Elle ajoute que la licéité du licenciement conditionne la décote prévue au pacte d'actionnaire, peu important que le salarié sollicite ou non sa réintégration. Elle sollicite enfin la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Nova à lui régler la somme de 44 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la mauvaise foi dans l'exercice de la levée d'option.
Les sociétés Millenium et Nova contestent avoir agi de mauvaise foi dans l'exercice de la levée d'option, rappelant que le licenciement reposait sur une décision d'inaptitude du médecin du travail à laquelle elles étaient totalement étrangères. Elles ajoutent que le statut de salariée protégée de Mme [J] n'était pas évident à établir, rappelant que le conseil de prud'hommes l'avait écarté, ce qui a toutefois donné lieu à infirmation par la cour d'appel. Elles soutiennent avoir agi en toute bonne foi compte tenu de la déclaration d'inaptitude du médecin du travail. Elles soulignent que le tribunal ne s'est pas prononcé sur le prix de cession des titres, et 'qu'à la place', il a condamné la société Millenium au paiement de dommages et intérêts à hauteur de 44 000 euros. Elles sollicitent la fixation du prix de cession à hauteur de 15 253,14 euros, et le rejet de toute autre demande financière.
Devant le premier juge, et dans l'hypothèse ou le tribunal jugeait valide l'exercice de la levée d'option par la société Millenium, Mme [J] formait principalement deux demandes subsidiaires :
- paiement de la somme de '44 746,86 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la décote appliquée par Millenium pour le rachat des titres',
- paiement de 10 000 euros au titre de la mauvaise foi.
Mme [J] n'explicitait pas clairement sa demande en paiement à hauteur de 44 746,86 euros, sauf à indiquer que - selon la formule de calcul du prix des actions contenue dans le pacte d'associé - elle devait obtenir un prix de 15 253,14 euros, qu'elle comparait au prix d'acquisition des titres à hauteur de 50 000 euros (en réalité 50 140 euros), concluant ainsi à une 'moins value de 34 746,86 euros'. Elle semblait ainsi considérer que cette moins-value équivalait à une décote de 44 746,86 euros, incluant une différence de 10 000 euros.
En tout état de cause, Mme [J] ne sollicitait pas le paiement d'un prix de cession (de son côté, la société Millenium sollicitait le constat de la réalisation de la vente pour un prix de 15 253,14 euros), mais le paiement de dommages et intérêts 'correspondant à la décote' (44 746,86 euros) appliquée par la société Millenium.
Devant la cour, Mme [J] sollicite, d'une part la fixation du prix de cession des actions à hauteur de 21 790,20 euros, d'autre part la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué la somme de 44 000 euros à titre de dommages et intérêts 'au titre de la mauvaise foi dans l'exercice de la levée d'option'.
S'agissant de la fixation du prix de rachat des titres, Mme [J] soutient qu'au regard de la nullité du licenciement, il n'y a pas lieu d'appliquer la décote prévue au pacte d'actionnaires.
Les articles 7.2 à 7.6 du pacte prévoient les modalités de fixation du prix des titres en fonction des motifs de la rupture (démission, licenciement économique, motif réel et sérieux, faute grave...). Ces dispositions prévoient une décote de la valeur des titres dans les conditions suivantes :
- cas de départ en retraite : rachat des titres à un prix égal au pourcentage de ces titres dans le capital de la société Nova, appliqué à 100% de la valeur de cette société (calculée selon une formule prédéfinie), (article 7.5 du pacte)
- cas de licenciement autres que motif économique, faute grave ou faute lourde : rachat des titres à un prix égal au pourcentage de ces titres dans le capital de la société Nova, appliqué à 70 % de la valeur de cette société (calculée selon la même formule), (article 7.3)
- cas de licenciement pour faute grave ou faute lourde : rachat des titres à un prix égal au pourcentage de ces titres dans le capital de la société Nova, appliqué à 35 % de la valeur de cette société (calculée selon la même formule),
- cas de démission : rachat des titres à un prix égal au pourcentage de ces titres dans le capital de la société Nova, appliqué à 35 % de la valeur de cette société (calculée selon la même formule),
- cas de licenciement pour motif économique : rachat des titres à un prix égal au montant d'acquisition.
La cour observe en premier lieu que les requêtes déposées par Mme [J] et visant à la rectification de l'erreur matérielle du jugement - en ce qu'il aurait omis de fixer le prix de vente des titres à hauteur de 15 253,14 euros - ne font pas obstacle à ce qu'elle porte sa demande en appel à la somme de 21 790,20 euros, la cour ayant indiqué précédemment qu'elle n'était pas régulièrement saisie de l'irrecevabilité de cette demande.
Aucun licenciement de Mme [J] n'ayant été validé, il n'est pas possible, contrairement à ce que soutient la société Nova, de considérer qu'un licenciement est intervenu pour inaptitude médicale entraînant l'application de l'article 7.3 du pacte aboutissant à un prix des titres de 15.253,14 euros.
En l'absence de démission ou de licenciement régulier, les clauses relatives à ces différents cas sont inapplicables, le prix de cession des titres ne pouvant dès lors être calculé que par assimilation à la clause 'départ en retraite', sans décote, 'à un prix égal au pourcentage de ces titres dans le capital de la société Nova, appliqué à 100% de la valeur de cette société', conformément à l'article 7.5 du pacte.
En application de ces dispositions, Mme [J] sollicite la fixation du prix de rachat des titres à la somme de 21 790,20 euros, le mode de calcul ainsi utilisé n'étant pas discuté, de sorte qu'il convient de faire droit à cette demande. Le jugement sera infirmé de ce chef.
S'agissant de la demande indemnitaire à hauteur de 44 000 euros, la cour observe que le tribunal ne motive pas cette indemnisation sur la mauvaise foi de la société Millenium (qu'il considère insuffisamment caractérisée) mais sur le fait qu'il n'y a pas lieu de faire application d'une décote.
Devant la cour, Mme [J] motive sa demande de confirmation de cette indemnité en indiquant que la décote aurait été appliquée de mauvaise foi.
La cour vient de statuer sur la non-application de la décote dans le calcul du prix des titres, la seule question restant en débat étant celle d'une éventuelle application de cette décote de mauvaise foi.
Ainsi que le fait observer la société Millenium, le conseil de prud'hommes, bien que familier de l'application du statut de travailleur protégé, a estimé que Mme [J] ne pouvait bénéficier d'un tel statut au regard des conditions de son élection (candidature hors délai, saisine du tribunal d'instance puis désistement...). Il a fallu attendre l'arrêt de cette cour, en septembre 2020, pour qu'il soit établi que Mme [J] devait bénéficier du statut de salariée protégée, son licenciement étant alors soumis à autorisation de l'inspection du travail. Au regard des incertitudes quant au statut de Mme [J], il ne peut être reproché à son employeur d'avoir procédé à son licenciement de mauvaise foi, sans solliciter l'autorisation requise, ni d'avoir appliqué la décote - résultant du pacte d'actionnaires librement accepté par les parties - de mauvaise foi.
La demande indemnitaire formée par Mme [J] sera donc rejetée, le jugement étant infirmé de ce chef.
5 - sur la demande reconventionnelle formée par les sociétés Nova et Millenium au titre de la résistance abusive
La société Millenium reprend en appel la demande que le premier juge avait rejetée visant à obtenir paiement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive. Elle soutient que le refus de Mme [J] de régulariser les actes de cession relève, à l'évidence, d'une volonté de nuire, rappelant que le tribunal a jugé que ce refus n'était pas fondé.
Le seul fait que le refus de régulariser les actes de cession ne soit pas juridiquement fondé est insuffisant à caractériser un abus, ou une volonté de nuire, dans la résistance manifestée par Mme [J], de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande ainsi formée.
6 - sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles, mais infirmé quant aux dépens.
Chacune des parties succombant partiellement, elles conserveront la charge de leurs propres dépens de première instance et d'appel. Il n'y a pas lieu à paiement de frais irrépétibles en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déclare irrecevable, comme constituant une prétention nouvelle en appel, la demande formée par Mme [Z] [J] tendant à :
* condamner la société Le Groupe nova à la somme de 3 000 euros par assemblée générale tenue en son absence à compter du 10 novembre 2015 ;
Déclare recevables les autres prétentions formées en appel par Mme [Z] [J] ;
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 14 septembre 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :
- condamné la société Millenium investissement au paiement de la somme de 44 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné solidairement les sociétés Millenium investissement et Le Groupe Nova aux dépens de première instance,
Y ajoutant et statuant à nouveau,
Déboute Mme [Z] [J] de sa demande indemnitaire et de ses demandes relatives à sa qualité d'actionnaire, aux annulations d'assemblées générales, à la communication de copies de registres d'assemblées et de comptes annuels, ainsi qu'au versement de dividendes,
Fixe le prix de rachat des actions détenues par Mme [Z] [J] dans la société Millenium investissement à 21 790,20 euros, et dit qu'il sera réglé le jour de la signature des formulaires de cession,
Rejette toutes autres demandes,
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens exposés en première instance et en appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,