COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53I
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 23 FEVRIER 2023
N° RG 22/00043 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U5TU
Jonction avec le dossier RG 22/00207 par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 18 Octobre 2022
AFFAIRE :
[C] [B]
[N] [Z]
[K] [P] [J] épouse [B]
C/
S.A. BPCE LEASE IMMO
SA NATIOCREDITBAIL
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Juin 2021 par le Tribunal judiciaire de VERSAILLES
N° RG : 17/01396
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 23.02.2023
à :
Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES,
Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT TROIS FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [C] [B]
Né le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 15]
Madame [K] [P] [J] épouse [B]
Née le [Date naissance 8] 1954 à [Localité 19]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 15]
Appelants RG22/00043
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 2166912 - Représentant : Me Jérémie PAJEOT de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, Plaidant, avocat au barreau de CAEN, vestiaire : 125
Monsieur [N] [Z]
né le [Date naissance 7] 1939 à [Localité 14]
de nationalité Française
[Adresse 10]
[Localité 16]
Appelant RG 22/00207
Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 25630 - Représentant : Me Alexandra LEVY-DRUON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G683
APPELANTS
****************
S.A. BPCE LEASE IMMO
Anciennement dénommée NATIXIS LEASE IMMO puis FRUCTICOMI
N° Siret : 333 384 311 (RCS Paris)
[Adresse 13]
[Localité 14]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
S.A. NATIOCREDIBAIL
N° Siret : 998 630 206 (RCS Nanterre)
[Adresse 4]
[Localité 18]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Intimées RG 22/00043 et RG 22/00207
Représentant : Me Laurence TURPIN de la SCP SCP SENTEX - NOIRMONT- TURPIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R036 - Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20220026
INTIMÉES
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Janvier 2023, Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant acte du 10 janvier 2008, la SCI de l'Epi - créée en 1994 avec pour objet la gestion, la location et l'acquisition de tous immeubles et terrains et dont le capital social était alors réparti entre 4 associés, à savoir : [C], [K], [V] [B] et [N] [Z] - a acquis un terrain situé à [Localité 20] (28) afin d'y construire un hôtel-restaurant dont la gestion et l'exploitation devaient être assurées par une société constituée à cet effet.
Dans cette perspective, une opération de crédit-bail immobilier a été mise en place avec, notamment, l'intervention de deux crédits-bailleresses, la société Fructicomi (devenue Natixis Lease Immo et désormais la société BPCE Lease Immo) ainsi que la société Natiocreditbail et un contrat de crédit-bail a été signé entre ces deux sociétés et la SCI de l'Epi par acte authentique reçu le 29 avril 2009.
Il portait sur le terrain précité, racheté par ces deux entités, et la construction d'un ensemble immobilier à usage d'hôtel-restaurant.
L'investissement était fixé à la somme de 2.700.000 euros (en ce compris l'avance preneuse de 520.000 euros) pour une durée de 12 ans, prenant effet à l'issue d'une phase préliminaire de travaux d'édification avec pré-loyers, le loyer , objet d'un tableau d'amortissement indicatif étant évalué par les époux [B] (page 3/19 de leurs conclusions à 'la somme annuelle de 255.000 euros majorée de la TVA au taux légal payable trimestriellement au terme à échoir et pour la première fois en avril 2010".
Le loyer mensuel annuel dû à la SCI de l'Epi par la société d'exploitation qui, dûment autorisée, lui sous-louait l'immeuble (l'Eurl Hôtel Epi créée en 2007), fixé à ce montant annuel de 255.000 euros, devait permettre à la SCI d'assurer la charge financière du contrat.
Par ailleurs, en garantie des échéances du crédit-bail, monsieur [C] [B], madame [K] [J], son épouse, et monsieur [N] [Z], tous associés de la SCI, se sont personnellement portés cautions solidaires, chacun à hauteur de 722.839 euros, ceci selon l'article B13 de l'acte du 29 avril 2009.
Selon avenant du 24 mars 2011 les crédit-bailleresses ont consenti un complément d'investissement à hauteur de 50.000 euros.
A la suite d'impayés, la SCI a vainement sollicité, en 2013, le réaménagement du contrat de crédit-bail et, par ordonnance de référé rendue le 15 novembre 2013 confirmée par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 octobre 2014, le contrat de crédit-bail a été résilié, la SCI de l'Epi, les époux [B] et monsieur [Z] étant solidairement condamnés à payer à titre provisionnel aux crédit-bailleurs la somme de 174.695,26 euros outre intérêts au titre des loyers échus impayés.
Sur saisine au fond de la SCI de l'Epi et des cautions, par jugement rendu le 18 février 2015, le tribunal de grande instance de Chartres a confirmé la résiliation de ce contrat, à effet au 07 juin 2013, en condamnant solidairement les requérants à payer la somme de 204.609,36 euros TTC (selon décompte arrêté au 07 mai 2014) outre une indemnité d'occupation au montant mensuel de 47.228,08 euros à compter du 08 juin 2013 jusqu'à libération des lieux.
Et par jugement rendu le 1er avril 2016, le juge de l'exécution de ce tribunal a rejeté une demande de délais pour quitter les lieux ; il a été procédé à l'expulsion de la SCI selon procès-verbal du 21 juin 2016.
La liquidation judiciaire de l'Eurl l'Epi Hôtel puis de la SCI de l'Epi a été prononcée, respectivement, le 07 juillet puis le 07 novembre 2016.
Les créances des crédit-bailleresses en cause déclarées au passif de la liquidation de cette SCI ont été admises à hauteur des sommes déclarées, soit celle de 2.080.594, 13 euros (pour Natixis Lease) et de 2.083.876 euros (pour Natiocreditbail) après rejet des contestations de la SCI et des trois associés précités.
C'est dans ce contexte que par acte du 27 janvier 2017 les deux sociétés crédit-bailleresses ont assigné ces trois associés en paiement, principalement en leur qualité de cautions solidaires, subsidiairement en leur qualité d'associés au titre de leur obligation aux dettes.
Par jugement contradictoire rendu le 03 juin 2021 le tribunal judiciaire de Versailles a :
déchargé monsieur [C] [B], madame [K] [J] épouse [B] et monsieur [N] [Z] de leurs engagements de caution souscrits le 29 avril 2009,
débouté, en conséquence, les sociétés de leurs demandes fondées sur les cautionnements consentis par monsieur [C] [B], madame [K] [J] épouse [B] et monsieur [N] [Z],
déclaré recevable la demande subsidiaire présentée par les sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail au titre de l'obligation aux dettes des associés, sur le fondement de l'article 1857 du code civil,
condamné monsieur [C] [B] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, en sa qualité d'associé de la SCI de l'Epi, la somme de 631.790,65 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
condamné madame [K] [J] épouse [B] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, en sa qualité d'associée de la SCI de l'Epi, la somme de 505.432,52 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
condamné monsieur [N] [Z] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail ensemble, en sa qualité d'associé de la SCI de l'Epi, la somme de 1.263.581,30 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
ordonné la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite par les sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail sur la résidence principale de monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] sise à [Adresse 21],
débouté monsieur [C] [B], madame [K] [J] épouse [B] et monsieur [N] [Z] de leurs demandes de dommages et intérêts,
condamné monsieur [C] [B], madame [K] [J] épouse [B] et monsieur [N] [Z] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Minault-Teriitehau agissant par maître Stéphanie Teriitehau, avocat postulant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties du surplus de leurs demandes,
dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Monsieur [C] [B] et madame [K] [J], son épouse, ont relevé appel de cette décision selon déclaration reçue au greffe le 03 janvier 2022.
L'affaire a été inscrite au répertoire général sous le numéro RG 22/00043.
Dans cette procédure et par dernières conclusions notifiées le 30 septembre 2022, monsieur [C] [B] et madame [K] [J], son épouse, demandent à la cour, au visa de l'article 1147 en sa rédaction applicable en la cause :
d'infirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a : déclaré recevable la demande subsidiaire présentée par les sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail au titre de l'obligation aux dettes des associés, sur le fondement de l'article 1857 du code civil // condamné monsieur [C] [B] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, en sa qualité d'associé de la SCI de l'Epi, la somme de 631.790,65 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017 // condamné madame [K] [J] épouse [B] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, en sa qualité d'associée de la SCI de l'Epi, la somme de 505.432,52 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017 // débouté monsieur [C] [B], madame [K] [J] épouse [B] de leurs demandes de dommages et intérêts // condamné monsieur [C] [B], madame [K] [J] épouse [B] et monsieur [N] [Z] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Minault-Teriitehau agissant par maître Stéphanie Teriitehau, avocat postulant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile // (les a) déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que du surplus de leurs demandes,
statuant à nouveau
de débouter la société BPCE Lease Immo et la société Natiocreditbail de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
de condamner la société BPCE Lease Immo et la société Natiocreditbail in solidum à (leur) payer la somme de 1.200.000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice subi,
de condamner la société BPCE Lease Immo et la société Natiocreditbail in solidum à (leur) payer la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
de les condamner aux entiers dépens et de faire application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions (n° 1) notifiées le 1er juillet 2022, la société anonyme BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo puis Fructicomi) et la société anonyme Natiocréditbail prient la cour :
de recevoir la société BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et la société Natiocreditbail en leurs conclusions,
les dire bien fondées et y faisant droit,
de réformer le jugement du 3 juin 2021, en ce qu'il a : déchargé monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] et de leurs engagements de caution souscrits le 29 avril 2009 // débouté, en conséquence, les concluantes de leurs demandes fondées sur les cautionnements consentis par monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B],
et, statuant à nouveau,
de condamner monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] à payer solidairement aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail la somme de 722.839 euros, et ce avec intérêts au taux contractuel à compter de l'assignation, en application de leur engagement de cautions solidaires de la SCI de l'Epi prévu à l'article B13 du contrat de crédit-bail du 29 avril 2009 et en application de l'article 1134 ancien du code civil,
à titre subsidiaire
de confirmer le jugement du 3 juin 2021, en ce qu'il a déclaré recevable la demande subsidiaire présentée par les sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail au titre de l'obligation aux dettes des associés, sur le fondement de l'article 1857 du code civil, dans l'hypothèse où monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] seraient déchargés de leur engagement de caution résultant du contrat de crédit-bail immobilier du 29 avril 2009,
de confirmer le jugement du 3 juin 2021, en ce qu'il a : condamné monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] en leur qualité d'associés de la SCI de l'Epi, sur le fondement de l'article 1857 du code civil, mais l'infirmer du chef du quantum des sommes allouées,
et, statuant à nouveau
de porter la condamnation de monsieur [C] [B] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo Natiocreditbail, ensemble, la somme de 631.790,65 euros, à la somme de 1.019.290,64 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
de porter la condamnation de madame [K] [J] épouse [B] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, en sa qualité d'associée de la SCI de l'Epi, la somme de 505.432,52 euros, à la somme de 815.432,51euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
et, ce faisant
de condamner à titre subsidiaire monsieur [C] [B] à payer aux concluantes, en application des dispositions de l'article 1857 du code civil, la somme de 1.019.290,64 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
de condamner à titre subsidiaire madame [K] [J] épouse [B] à payer aux concluantes, en application des dispositions de l'article 1857 du code civil, la somme de 815.432,51euros et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
en tout état de cause
de débouter monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] de leurs demandes de dommages-intérêts d'un montant de 1.200.000 euros en raison du préjudice subi,
de débouter monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,
et y ajoutant
de condamner monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] à payer aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles,
de condamner monsieur [C] [B] et madame [K] [J] épouse [B] aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la Selarl Minault-Teriitehau agissant par maître Stéphanie Teriitehau, avocat postulant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Monsieur [N] [Z] a, par ailleurs, relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe le 12 janvier 2022.
L'affaire a été inscrite au répertoire général sous le numéro RG 22/00207.
Dans cette procédure, par dernières conclusions (n° 2) notifiées le 12 octobre 2022, monsieur [N] [Z] demande à la cour, visant les anciens articles 1101, 1134, 1382 et 1383 du code civil, de :
débouter les sociétés Naxitis Lease Immo et Natiocreditbail de l'intégralité de leurs demandes et notamment de leur appel incident particulièrement mal fondé,
d'infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 3 juin 2021 en ce qu'il condamne monsieur [N] [Z] à verser aux sociétés Naxitis Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, en sa qualité d'associé de la SCI de l'Epi, la somme de 1.263.581,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017 // en ce qu'il déboute monsieur [N] [Z] de sa demande de dommages et intérêts // en ce qu'il condamne monsieur [N] [Z] aux entiers dépens,
de confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 3 juin 2021 en ce qu'il décharge monsieur [N] [Z] de ses engagements de caution solidaire de la société SCI de l'Epi // en ce qu'il déboute les sociétés Naxitis Lease Immo et Natiocreditbail de leurs demandes fondées sur le cautionnement de Monsieur [Z],
de condamner les sociétés Naxitis Lease Immo et Natiocreditbail à verser, ensemble, à monsieur [N] [Z], la somme de 780.000 euros en réparation du préjudice subi,
de condamner les sociétés Naxitis Lease Immo et Natiocreditbail à (lui) verser, ensemble, la somme 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par maître Mélina Pedroletti, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions (n° 1) notifiées le 12 juillet 2022, la société anonyme BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo puis Fructicomi) et la société anonyme Natiocréditbail prient la cour :
de recevoir la société BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et la société Natiocreditbail en leurs conclusions,
les dire bien fondées et y faisant droit,
de réformer le jugement du 3 juin 2021, en ce qu'il a : déchargé monsieur [N] [Z] de son engagement de caution souscrits le 29 avril 2009 // débouté, en conséquence, les concluantes de leurs demandes fondées sur les cautionnements consentis par monsieur [N] [Z],
et, statuant à nouveau,
de condamner monsieur [N] [Z] à payer solidairement aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail la somme de 722.839 euros, et ce, avec intérêts au taux contractuel à compter de l'assignation, en application de son engagement de caution solidaire de la SCI de l'Epi prévu à l'article B13 du contrat de crédit-bail du 29 avril 2009 et en application de l'article 1134 ancien et 1103 nouveau du code civil,
à titre subsidiaire
de confirmer le jugement du 3 juin 2021, en ce qu'il a déclaré recevable la demande subsidiaire présentée par les sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail au titre de l'obligation aux dettes des associés, sur le fondement de l'article 1857 du code civil, dans l'hypothèse où monsieur [N] [Z] serait déchargé de son engagement de caution résultant du contrat de crédit-bail immobilier du 29 avril 2009,
de confirmer le jugement du 3 juin 2021, en ce qu'il a : condamné monsieur [N] [Z] en sa qualité d'associés de la SCI de l'Epi, sur le fondement de l'article 1857 du code civil, mais de l'infirmer du chef du quantum des sommes allouées,
et, statuant à nouveau
de porter la condamnation de monsieur [N] [Z] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail, ensemble, la somme de 1.263.581,30 euros, à la somme de 2.038.581,27 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
et, ce faisant
de condamner à titre subsidiaire monsieur [N] [Z] à payer aux concluantes, en application des dispositions de l'article 1857 du code civil, la somme de 2.038.581,27 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
en tout état de cause
de débouter monsieur [N] [Z] de sa demande de dommages-intérêts d'un montant de 780.000 euros en raison du préjudice subi,
de débouter monsieur [N] [Z] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,
et y ajoutant
de condamner monsieur [N] [Z] à payer aux sociétés BPCE Lease Immo anciennement dénommée Natixis Lease Immo et Natiocreditbail la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles,
de condamner monsieur [N] [Z] aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la Selarl Minault-Teriitehau agissant par maître Stéphanie Teriitehau, avocat postulant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Selon ordonnance rendue le 18 octobre 2022, le juge de la mise en état désigné de la présente chambre de la cour a ordonné, pour une bonne administration de la justice, la jonction de ces deux procédures appelées à se poursuivre sous le n° RG 22/00043.
Les parties n'ont pas conclu ultérieurement.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la validité de l'engagement de caution des époux [B]
Rappelant les termes de l'article B-13 du contrat de crédit-bail immobilier selon lequel ceux-ci ainsi que monsieur [N] [Z], agissant solidairement entre eux, ont déclaré : 'se rendre et constituer caution solidaire du preneur envers le bailleur, ce qui est accepté par son représentant, pour garantir le paiement et le remboursement de toutes les sommes que le preneur peut ou pourra devoir en intérêts, frais, indemnités, commissions et accessoires au bailleur au titre des engagements du preneur vis-à-vis du bailleur, tels qu'ils résultent des présentes conventions sus-énoncées à compter de ce jour. Et pendant toute leur durée et pour un montant limité à sept cent vingt deux mille cent trente neuf euros (722.838 euros) globalement.', les sociétés intimées, formant appel incident, soutiennent qu'à tort le tribunal a déchargé les époux [B] de leur engagement de caution de la SCI de l'Epi.
Les premiers juges, se fondant sur les dispositions de l'article L 341-1 du code de la consommation applicable et en évoquant dans le détail l'application prétorienne qui en a été faite, ont en effet considéré que leur cautionnement était manifestement disproportionné lors de leur engagement.
De manière circonstanciée, ils ont opposé aux époux [B] les informations fournies dans leurs fiches de renseignements les 03 et 12 décembre 2007 (soit un revenu annuel de 21.000 euros et un patrimoine immobilier et mobilier de 1.050.000 euros), écarté leur argumentation tendant à voir apprécier la disproportion en regard d'un cautionnement postérieur à leur engagement ou à voir minorer la valeur déclarée de leur bien immobilier selon une évaluation unique et postérieure aux informations fournies.
Néanmoins, le tribunal a pris en compte, pour le déduire de leur patrimoine net déclaré à hauteur de 510.000 euros, un engagement de caution concomitant envers la société Oseo que les crédit-bailleresses ne pouvaient ignorer car il figurait à l'article B-15 de l'acte de crédit-bail.
Au soutien de leur appel incident les crédit-bailleresses intimées approuvent le tribunal en ce qu'il s'en est tenu aux informations fournies au moment de l'engagement des époux [B] quant aux revenus et biens dont ils pouvaient disposer mais le critique en sa prise en compte de cette contre-garantie Oseo qui ne bénéficiait pourtant, affirment-elles, qu'à la seule société Natiocreditbail.
Elles en reprennent précisément la nature et les conditions de mise en oeuvre en se prévalant de leur satisfaction dans le cadre du contrat litigieux et concluent qu'il n'y avait aucune caution existante au profit d'Oseo Garantie consentie par monsieur et madame [B], lors de l'engagement du 29 avril 2009, qu'il y aurait lieu de déduire de l'estimation de leur patrimoine, si bien que l'engagement souscrit avec monsieur [Z] à hauteur, globalement, de 722.839 euros n'était pas disproportionné à la situation financière et patrimoniale déclarée de ceux-ci.
Elles ne remettent cependant pas en cause l'appréciation du tribunal relative à la situation des cautions au moment où elles étaient appelées en ce qu'il a exclu leur retour à meilleure fortune.
Les époux [B] sur qui repose la charge de la preuve de la disproportion manifeste poursuivent, quant à eux, la confirmation du jugement en faisant valoir qu'en aucun cas la clause relative aux conditions d'octroi de la garantie Oseo - à savoir : 'cautionnement solidaire de monsieur et madame [B] à concurrence de deux années de loyers TTC' - ne stipule qu'elle doit bénéficier au crédit-bailleur, qu'au contraire sa lecture permet de comprendre que le bénéficiaire en est Oseo et qu'il s'agit par conséquent d'un engagement supplémentaire, connu par les bailleurs, et qui doit être pris en compte dans l'appréciation de la disproportion, comme l'a fait le tribunal. Ils observent, en outre, que leur engagement de caution porte sur plus de deux années.
De plus, ajoutent-ils, il est constant que la proportionnalité de l'engagement de la caution par rapport à son patrimoine et ses revenus s'apprécie pour chaque caution, nonobstant son statut matrimonial et que leurs engagements cumulés s'élèvent à près de 1.500.000 euros.
Ceci étant exposé et s'agissant de l'appréciation de la garantie Oseo qui divise pour l'essentiel les parties dans le dernier état de la procédure, il convient de rappeler qu'il s'agit d'une garantie destinée à inciter les établissements financiers à consentir des crédits en leur garantissant qu'elle entrera en jeu à titre subsidiaire, ceci après d'infructueuses poursuites en recouvrement à l'encontre du débiteur et des cautions. Elle est d'ailleurs désignée dans l'acte de crédit-bail en cause comme 'une contre garantie en risque pour un taux de garantie de 35%'.
La proportionnalité de l'engagement de caution doit, certes, être appréciée en tenant compte de l'endettement global de la caution à sa date, y compris celui résultant d'engagements antérieurs ou concomitants.
Cependant, les stipulations de la garantie Oseo en cause, telle que reprise et analysée, conduisent à considérer qu'une telle garantie ne bénéficie qu'à l'organisme dispensateur de crédit et non point à l'emprunteur ou aux cautions qui ne peuvent se prévaloir d'un cautionnement à leur profit.
Elles ne sont donc pas de nature à modifier la consistance du patrimoine des époux [B] à prendre en considération pour l'appréciation de leur capacité à faire face à leurs engagements à leur date, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal pour déduire de leur patrimoine déclaré la somme de 510.000 euros.
Par ailleurs, si les appelants ne débattent pas des autres engagements dont ils se prévalaient en première instance et dont le tribunal a jugé qu'ils ne devaient pas être pris en considération mais entendent tirer argument du cumul de leurs engagements du fait de leur situation matrimoniale, il y a lieu de considérer que la disproportion manifeste prévue par le code de la consommation s'apprécie au regard des biens de la caution sans distinction.
De sorte que les biens dépendant de la communauté doivent être pris en considération, quand bien même ils ne pourraient être engagés pour l'exécution de la condamnation éventuelle de la caution en l'absence du consentement exprès du conjoint donné conformément aux dispositions de l'article 1415 du code civil (Cass com, 15 novembre 2017, pourvoi n° 16-10504, publié au bulletin).
Enfin, afin de se prévaloir d'une absence de disproportion qui se doit d'être manifeste et en réponse à l'argument des époux [B] évoquant la disproportion de leur engagement en ces termes 'si le patrimoine des époux [B] retenu par les premiers juges l'a été pour un montant d'un peu plus d'un million d'euros, leur engagement de caution cumulé s'élève à près d'1.500.000 euros' (page 8/19 de leurs écritures) les crédit-bailleresses font valoir (en page 19/35) 'que l'engagement souscrit par monsieur et madame [B] avec monsieur [Z] à hauteur de 722.838 euros globalement (soulignement des intimées) n'était donc pas disproportionné à la situation financière et patrimoniale déclarée par ceux-ci'.
A se reporter aux termes( typographiquement accentués par des majuscules et un soulignement) de la convention liant les parties, que, s'engageant dans le même acte notarié, les trois cautions étaient présentées comme 'agissant solidairement entre eux' (renonçant ainsi au bénéfice de division) et que, désignées sous le terme générique de 'la caution', elles s'engageaient 'pour un montant limité à sept cent vingt deux mille huit cent trente neuf euros (722 839 euros' globalement'.
Etant rappelé qu'aux termes de l'article 1162 (devenu 1190) du code civil, dans le doute le contrat s'interprète contre le créancier et en faveur du débiteur et relevé que le terme 'chacun', contraire à l'adverbe 'globalement' stipulé, ne figure ni dans cette convention ni dans le dispositif des conclusions des intimées qui, selon l'article 954 du code de procédure civile, saisit la cour, il convient de juger que ce cautionnement n'était pas disproportionné en regard de leurs facultés financières.
Par suite, le jugement sera infirmé en ce qu'il retient la disproportion des engagements de ces deux cautions à leurs biens et revenus au moment de la souscription et, par voie de conséquence, déboute les crédit-bailleresses de leurs demandes à l'encontre des époux [B] pris en leurs qualités de cautions.
Sur la validité du cautionnement de monsieur [Z]
Semblablement, les crédit-bailleresses se prévalent des dispositions de l'article B-13 du contrat sus-repris pour solliciter l'infirmation du jugement qui les a déboutées de leur action à l'égard de monsieur [Z] pris en sa qualité de caution en retenant que son patrimoine mobilier et immobilier net pouvait, au mieux, s'évaluer à la somme de 348.822 euros, soit un montant inférieur au montant du cautionnement et qu'il est manifeste que ses revenus ne pouvaient lui permettre de faire face à son engagement de caution dès lors que le différentiel entre le cautionnement et le patrimoine net qu'il retenait correspondait à plus de neuf années de ses revenus.
Il convient de rappeler que pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a considéré que n'était produite aucune fiche de renseignements remplie par monsieur [Z] à la date de son engagement de caution (soit le 29 avril 2009), que celle qu'il a établie en juin 2010, à l'occasion d'une demande de financement complémentaire ayant fait l'objet d'un avenant du 24 mars 2011, gardait sa valeur probante en dépit d'imperfections formelles dès lors que monsieur [Z] ne contestait pas l'avoir complétée ni ne déniait sa signature mais que faute d'une fiche complétée à la date du cautionnement, monsieur [Z] pouvait rapporter par tous moyens la preuve de la disproportion qu'il invoquait.
C'est ainsi que le tribunal a pris en considération son avis d'imposition pour l'exercice 2009 (faisant état de revenus annuels de 29.000 euros) outre la moitié des revenus locatifs et fonciers mentionnés 'pour le couple' (soit : 16.928 euros) dans la fiche de renseignements de 2010, déduisant de cette mention que le patrimoine immobilier de celui-ci, marié sous le régime de la séparation de biens et ayant biffé sur la fiche la mention 'indivision' pour lui substituer celle de 'SCI', pouvait être retenue, 'au mieux à hauteur de 672.500 euros'. Il a également retenu le montant total de son compte-épargne et d'une assurance-vie (soit : 388.322 euros).
Pour déterminer le montant de son patrimoine net, il a déduit du cumul de ces sommes le montant de son cautionnement solidaire de deux prêts consentis à la SCI [T], antérieurs au cautionnement litigieux, pour un montant de 712.000 euros.
Formant appel incident, les crédit-bailleresses évoquent liminairement la doctrine de la Cour de cassation pour rappeler qu'elle impose aux cautions, sur qui pèse la charge de la preuve de la disproportion manifeste à nouveau invoquée par l'appelant, un devoir de loyauté et d'honnêteté qui conduit à exclure qu'elles puissent se prévaloir d'une fausse déclaration ou encore qu'elle n'oblige pas le créancier, sauf anomalie apparente, à contrôler le contenu des éléments mentionnés dans la fiche de renseignements que la caution a approuvés en la signant.
Elles se prévalent des déclarations de monsieur [Z] dans l'acte authentique du 29 avril 2009, à savoir [pièce n° 4, page 60] : 'La caution personne physique déclare disposer d'un patrimoine et de revenus suffisants afin de faire face au présent engagement et s'oblige à faire connaître au bailleur dans les trois mois toutes modifications ou événements pouvant apparaître ultérieurement dans son régime matrimonial, dans son patrimoine et de tous engagements ultérieurs.' et des termes de leur réitération à l'article 13-bis pour dire que les renseignements fournis par celui-ci en juin 2010 (selon la copie parfaitement exploitable qu'elles produisent et qui supporte la signature non contestée de monsieur [Z]) valent aussi bien pour le contrat de crédit-bail initial que pour l'avenant qui forment un tout indissociable.
Elles ajoutent que ce dernier ne fait pas la démonstration d'une modification de son patrimoine entre avril 2009 et juin 2010 et lui reproche d'avoir trompé le tribunal en prétendant que les biens figurant dans cette fiche ne lui appartenaient pas, lui faisant, de surcroît, grief de s'être prévalu de son caractère incomplet au motif que n'y figuraient pas des engagements de caution antérieurs au profit de la Caisse d'épargne Ile-de-France.
Les sociétés intimées reprennent ainsi le détail de cette fiche datée de juin 2010 pour affirmer, notamment, que sa lecture ne permettait pas de retenir, comme l'a fait le tribunal, que monsieur [Z] n'était propriétaire que de la moitié du patrimoine immobilier déclaré (selon des montants qui ne pouvaient concerner, à leur sens, que la valeur des parts sociales).
En outre, alors que monsieur [Z] prétend n'être propriétaire d'aucun des biens déclarés, elles lui opposent son absence de preuve et entendent, quant à elles, en administrer la preuve contraire
Ajoutant qu'en tout état de cause, monsieur [Z] ne peut invoquer la disproportionnalité de son engagement après avoir accompli une fausse déclaration si les informations données se révèlent erronées, elles concluent qu'au moment de l'engagement litigieux du 29 avril 2009 réitéré à l'occasion de l'avenant du 24 mars 2011, monsieur [Z] a déclaré un patrimoine mobilier et immobilier d'un montant global de 1.733.322 euros qui s'impose aux parties, qu'il n'est pas établi que son engagement de caution ait été disproportionné en regard de son patrimoine et de ses revenus si bien qu'il doit être condamné solidairement avec les époux [B] à hauteur de la somme globale de 722.839 euros.
En réplique, monsieur [Z] soutient que les clauses du contrat de crédit-bail authentique qui lui sont opposées, non négociables et qu'il a signées pour obtenir le financement, ne l'empêchent pas de prouver la disproportion de son engagement dont il se prévaut.
Il estime que le recueil d'informations dans une fiche de renseignements de juin 2010 ne peut pallier à la carence des intimées au moment du cautionnement d'avril 2009 sauf à 'préjuger a posteriori' de ses ressources lors de son cautionnement, ceci pour en déduire qu'à bon droit le tribunal a jugé qu'il pouvait prouver par tous moyens la disproportion invoquée.
Il poursuit en affirmant qu''en l'espèce les renseignements fournis étaient effectivement erronés' (page 8/16 de ses dernières conclusions), que les six biens immobiliers par lui mentionnés et évalués dans la fiche de renseignements de juin 2010 ne lui appartenaient pas mais étaient la propriété de la SCI Claudal dont il n'était pas détenteur de parts sociales au moment de son engagement si bien qu'à tort le tribunal a considéré que son patrimoine immobilier pouvait être évalué à 50% des valeurs déclarées (soit : 1.345.000 euros /2, soit encore : 672.500 euros).
Il incrimine incidemment la mauvaise foi des sociétés crédit-bailleresses qui auraient dû éclaircir la contradiction entre deux mentions de cette fiche, à savoir : 'pour le couple' et 'régime de séparation de biens' et pour ce qui est de ses autres engagements de caution que les intimées lui reprochent de ne pas avoir déclarés, il leur oppose l'absence d'établissement d'une fiche de renseignements au moment de son engagement.
Il en conclut que son patrimoine réel au moment de son engagement était négatif à hauteur de moins 323.678 euros (soit, selon les chiffres ci-avant explicités : 388.322 - 712.000 euros) de sorte que les intimées doivent être déboutées de leur action fondée sur son cautionnement.
Ceci étant exposé, si la disproportion manifeste de l'engagement de caution visée à l'article L 341-4 (applicable) du code de la consommation doit s'apprécier 'lors de sa conclusion', il n'est pas exclu que son appréciation puisse résulter d'une fiche de renseignements qui ne lui serait pas concomitante, ainsi qu'a pu en juger la Cour de cassation, statuant certes dans une espèce où était produite une fiche de renseignements antérieure et non point postérieure à l'engagement litigieux mais dans laquelle, outre l'absence de démonstration d'une situation inchangée, était rapportée la preuve de divers autres éléments permettant la prise en compte de ces renseignements non concomitants (Cass com, 24 novembre 2021, pourvoi n° 20-12313).
Le défaut de production d'une fiche de renseignements contemporaine de l'engagement de caution ne permet donc pas d'écarter purement et simplement, comme le voudrait monsieur [Z], une autre fiche de renseignements dont il a attesté de la sincérité par l'apposition d'une signature, comme se présente la fiche de renseignements de juin 2010.
Sur le contenu des informations relatives à ses revenus, son patrimoine et ses charges figurant dans ce document, monsieur [Z] ne démontre ni même ne prétend que la situation qui était la sienne 14 mois après son engagement de caution a subi des modifications mais affirme simplement que les diverses informations certifiées en 2010 étaient erronées, qu'en fait il n'avait aucun patrimoine hormis le montant total de son compte-épargne et de son assurance-vie et qu'en outre il pouvait se prévaloir, au titre de son endettement, d'autres engagements de caution si bien que son patrimoine réel était négatif.
Il y a lieu de rappeler que le principe de bonne foi s'impose dans toute relation contractuelle et qu'il ne peut qu'être constaté ici que, lors de la conclusion de son engagement de caution dans l'acte authentique qui fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties, monsieur [Z], qui prétend aujourd'hui être déchargé de son engagement de caution du fait de son insolvabilité d'alors, a manqué au devoir de loyauté et d'honnêteté auquel il était tenu en approuvant les termes de l'acte de crédit-bail sus-repris, à savoir : 'La caution personne physique déclare disposer d'un patrimoine et de revenus suffisants afin de faire face au présent engagement '.
Il a, de plus, réitéré les termes de cette déclaration à l'article B-13bis de l'avenant du 24 mars 2011.
Par ailleurs, s'il prétend qu'à cette date, comme lors de l'établissement de la fiche de renseignements signée en juin 2010 dans le cadre de l'avenant au contrat, il ne pouvait se prévaloir que d'un 'patrimoine réel négatif' et qu'il a donc fait une fausse déclaration, il doit être tiré toutes conséquences juridiques utiles de cette turpitude, objet d'un aveu judiciaire.
En réponse à l'argumentation des crédit-bailleresses qui se prévalent des valeurs par lui déclarées (pour un total de 1.345.000 euros) des parts de cinq SCI précisément identifiées dans cette déclaration (pièce n° 47 des intimées) sans que ne soient cochées les colonnes 'conjoint', 'couple' et 'indivision' (barrée pour cette dernière) à savoir: 420.000 euros pour le bien sis [Adresse 3]), 330.000 euros pour le bien sis [Adresse 5], 370.000 euros pour le bien sis [Adresse 11], 135.000 euros pour le bien sis [Adresse 17], 90.000 euros pour le bien sis [Adresse 12], monsieur [Z] se prévaut du fait que ces immeubles appartenaient tous à la SCI Claudal dont il ne détenait pas lui-même les parts lors de son engagement de caution.
La production par les crédit-bailleresses (en pièce n° 69) des statuts de cette SCI Claudal (enregistrés le 03 novembre 2008) vient cependant contredire cette affirmation puisqu'il en ressort que monsieur [Z] en détient les parts sociales (à hauteur de 3.635/3640), qu'il a apporté en nature un bien immobilier évalué à 363.500 euros [soit une maison à usage d'hôtel-café-restaurant situé [Adresse 6] (78) dont il est démontré (en pièce n° 39) qu'il en a seul fait l'acquisition le 05 mai 2008] et que le capital social de cette SCI Claudal a été fixé à 364.000 euros.
L'extrait Kbis de la SCI Claudal à jour au 02 février 2018 que versent les intimées (pièce n° 40) indique qu'il en était toujours l'associé à cette date.
Deux autres extraits Kbis du 1er février 2018 (pièces n° 41 et 42) viennent de plus établir qu'à ces dates, monsieur [Z] était gérant-associé des SCI Estal (dont le siège est [Adresse 9]) et [T] (dont le siège social est situé [Adresse 6]).
Par delà ses dénégations lapidaires , monsieur [Z] ne consacre aucun développement relatif aux pièces de ses adversaires, portant en particulier sur la modification de la détention des parts sociales de ces SCI postérieurement à son engagement de caution.
L'ensemble de ces éléments conduit à considérer que la mauvaise foi contractuelle de monsieur [Z] ne lui permet pas bénéficier des dispositions protectrices de l'article L 341-4 du code de la consommation ouvrant faculté de sanctionner les crédit-bailleresses en déchargeant totalement la caution de son engagement et qu'il le peut d'autant moins que la disproportion alléguée n'est que prétendue.
Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu'il en décide autrement.
Sur la créance des crédit-bailleresses
Il s'induit de ce qui précède que les sociétés intimées sont fondées à agir à l'encontre des époux [B] et de monsieur [Z], pris en leur qualité de cautions solidaires de la SCI de l'Epi.
Dans la limite de leur engagement dont les termes sont repris plus avant, il seront condamnés 'solidairement entre eux' au paiement de la somme globale de 722.839 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017, date de l'assignation valant mise en demeure.
Il convient en effet d'observer, s'agissant de la demande en paiement d'intérêts conventionnels des intimées présentée sans plus d'indications tant les motifs que dans le dispositif de leurs conclusions quant à leur taux et par conséquent non chiffrés, qu'une stipulation d'intérêts figure, certes, au § B13 (en page 60/70) du contrat de crédit-bail conclu le 29 avril 2019 par les sociétés Fructicomi et Natiocreditbail.
Toutefois, ils sont définis comme étant 'le taux de base bancaire Natixis pratiqué le jour de l'échéance impayée majoré de quatre points et décomptés depuis le jour de l'échéance impayée' et se révèlent n'être ni clairs ni lisibles tant pour leurs adversaires que pour la cour, faute de précisions concernant tant l'échéance visée par les intimées que le taux visé eu égard en particulier à la diversité des entités comportant le nom de Natixis et leur évolution, si bien qu'indéterminables tels que présentés, il ne peut y être fait droit.
Sur les demandes indemnitaires présentées par les appelants
Tant les époux [B] (au visa de l'article 1147) que monsieur [Z] (visant la responsabilité délictuelle) reprochent aux crédit-bailleresses différents manquements et poursuivent l'infirmation du jugement qui les a entièrement déboutés de leurs prétentions, le tribunal jugeant, en se fondant sur l'article 1147 du code civil, que les crédit-bailleresses n'étaient pas intervenues dans l'initiative et le choix de l'opération de sorte qu'elles n'étaient pas débitrices d'un devoir de conseil, que par ailleurs la décharge de la caution et des dommages-intérêts ne peuvent se cumuler, qu'en outre si les associés pouvaient être qualifiés de profanes un rapport d'expertise relatif à l'hôtel et un compte-rendu sur l'origine des difficultés de mars 2005 produits aux débats tendaient à imputer ces difficultés davantage à des circonstances indépendantes du financement lui-même qu'à un loyer relativement élevé, d'ailleurs payé durant deux ans.
Sur le devoir de conseil
Les appelants qui développent une argumentation indistinctement sur les manquements des sociétés intimées à leurs devoirs de conseil et de mise en garde font valoir, s'agissant du premier de ceux-ci, que monsieur [B] - qui n'a jamais fait d'études dans le domaine de la finance, n'a exercé que dans celui de la vente automobile pendant plusieurs années et est totalement néophyte - a réalisé un business plan sans le recours d'un professionnel ; qu'aucune des deux crédit-bailleresses n'a cependant pris la précaution d'établir, avec les outils de calcul nécessaires dont elles disposaient, un document qui aurait permis de déterminer si le projet de financement était réalisable, compte tenu des loyers envisagés tirés des revenus d'exploitation de l'Eurl.
Monsieur [Z] ajoute que le crédit-bail immobilier est une opération économique complexe pour des acteurs n'appartenant pas au monde des affaires.
Il convient de rappeler que le devoir de conseil proprement dit, distinct du devoir de mise en garde, a pour objectif d'informer le cocontractant sur l'opportunité de contracter, ce qui présuppose l'apport d'une orientation sur ce qu'il convient de faire afin de prendre une décision.
En considération du principe de non-immixtion, les crédit-bailleresses, prestataires d'un service d'investissement, n'étaient pas tenues, en cette seule qualité, à un devoir de conseil à l'égard de la SCI de l'Epi, fût-elle légalement représentée par des personnes non averties, sauf engagement contractuel en ce sens ou disposition légales contraires, ainsi qu'a pu en juger la Cour de cassation (Cass com, 08 mars 2017, pourvoi n° 15-10246).
La preuve d'un tel engagement n'est pas ici rapportée, comme le soutiennent les sociétés intimées qui se prévalent du fait qu'elles n'ont pas été consultées pour réaliser le plan de financement et qu'il n'est pas établi qu'elles auraient fourni à la SCI un conseil inadapté à sa situation dont elles avaient connaissance.
Le grief des appelants de ce chef ne peut donc prospérer, ainsi que jugé par le tribunal.
Sur de devoir de mise en garde
Poursuivant la confirmation du jugement leur reconnaissant la qualité de 'clients non avertis', les époux [B] comme monsieur [Z] concluent à son infirmation en ce qu'il n'a pas retenu un tel manquement.
Ils soutiennent, pour les premiers, que le ratio entre le remboursement de l'investissement et le chiffre d'affaires en matière d'hôtellerie-restauration se situe entre 10 et 12% du chiffre d'affaires (ainsi que rappelé dans le rapport, de juin 2016, d'un expert-comptable qu'ils ont mandaté) et non à 40% tel qu'indiqué dans le business plan, qu'aux termes de ce rapport il est indiqué qu''en procédant par capitalisation de la valeur locative estimée, la société Epi Hôtel aurait dû s'acquitter d'un loyer bien inférieur à celui qui est loué actuellement', que le projet était donc irréalisable dès le départ et que, de plus, la société Natixis Lease, après avoir laissé croire à un accord et sans explications, a refusé, en 2013, un projet de réaménagement des conditions du prêt qui était destiné à éviter la déconfiture.
Ils caractérisent leur préjudice directement imputable à la faute des intimées (évalué à 1.200.000 euros correspondant, exposent-ils, au montant de leur condamnation en première instance) en évoquant leur situation de retraités percevant en 2020 des pensions de l'ordre de 2.000 euros, leurs faibles revenus, la perte des économies de toute une vie de travail ou encore les répercussions de cette faute sur leurs états de santé respectifs.
Monsieur [Z] soutient, quant à lui, qu'en raison de leurs compétences spécifiques en matière de financement de projet, les 'sociétés prêteuses' (qui se targuent de leur expertise dans leur communication) auraient dû, a minima, mettre en garde la SCI de l'Epi sur les risques de l'opération économique qu'il qualifie de complexe, et, notamment, sur une durée du crédit-bail immobilier relativement courte (soit 12 ans) en regard des pratiques du marché ainsi que sur des mensualités de remboursement trop élevées compte tenu des prévisions du chiffre d'affaires.
Il critique, en particulier, le comportement des sociétés intimées qui auraient dû s'interroger sur la viabilité du plan de financement et, par delà les événements extrinsèques au contrat crédit-bail à l'origine des difficultés dont elles se prévalent, sur le poste 'loyer', nécessairement important à son sens puisqu'il était le corollaire des mensualités, trop lourdes, du crédit-bail.
Il caractérise son préjudice (évalué à 780.000 euros, soit la moitié de la valeur de l'établissement hôtelier saisi et vendu alors qu'il aurait dû en devenir in fine propriétaire) en faisant valoir que ce manquement est à l'origine de sa condamnation, en tant qu'associé, à apurer une partie du passif social au prorata de sa participation au capital de le SCI.
Ceci étant dit et s'agissant, d'abord, de la qualité de l'emprunteur, il est patent que le caractère averti de celui-ci dispense le crédit-bailleur de toute obligation de mise en garde à son égard puisqu'il n'en a, de ce fait, nul besoin, sauf à démontrer que l'établissement de crédit disposait, au moment de l'octroi de son concours financier, d'informations sur sa situation patrimoniale ou ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles dont il n'avait pas connaissance, ce qui n'est pas démontré en l'espèce.
Il est, par ailleurs, constant que lorsque l'emprunteur est une société civile immobilière, seule celle-ci est créancière de l'obligation de mise en garde et non ses associés, même si ceux-ci sont tenus indéfiniment des dettes sociales, et que le caractère averti de cet emprunteur s'apprécie en la seule personne de son représentant légal et non en celle de ses associés, comme cela résulte de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ 3ème, 19 septembre 2019, pourvoi n° 18-15398, publié au bulletin).
Il résulte, au cas particulier, de l'extrait Kbis de la SCI de l'Epi et de ses statuts que monsieur [B] et monsieur [Z] étaient cogérants de cette SCI depuis le 17 décembre 2007.
L'appréciation du caractère non averti revendiqué par ces deux représentants légaux doit être effectuée in concreto en regard de leur niveau de qualification, de leur expérience des affaires mais aussi de la complexité de l'opération envisagée et de leur aptitude particulière à en mesurer les enjeux et les risques à la faveur d'un consentement éclairé sur la portée de leur engagement Par ailleurs, la seule circonstance qu'ils étaient les dirigeants sociaux de la SCI en cause ne permet pas de présumer qu'ils étaient avertis..
En regard de ces critères d'appréciation, force est de considérer que les crédit-bailleresses échouent à démontrer que monsieur [B] peut être regardé comme un emprunteur averti en se bornant à invoquer sa qualité de gérant de la SCI et de la société l'Epi Hôtel ainsi que sa compétence en matière de commerce et de management ressortant de son curriculum vitae, d'autant que monsieur [B], né en 1951, peut utilement se prévaloir, sur ce dernier point, de son absence de formation ou de compétence en matière financière et de son défaut d'expérience dans le domaine de l'hôtellerie dès lors que ses seules compétences portent sur l'activité de concessionnaire automobile antérieurement exercée.
Semblablement, les intimées ne peuvent être suivies dans leur argumentation tendant à voir reconnaître à monsieur [Z] la qualité d'emprunteur averti en faisant état de sa qualité de dirigeant social.
Si elles se prévalent également du fait, comme elles le démontrent, qu'il était déjà propriétaire d'un hôtel situé à Meulan, en mai 2008, acquis au prix de 363.500 euros puis cédé en nature lors de la constitution de la SCI [T] en septembre 2008 et qu'il importe peu que l'activité de cet hôtel n'ait débuté qu'en septembre 2011, à l'issue de travaux, il apparaît que cette autre activité, quasi-concomitante de l'opération litigieuse et menée par un retraité né en 1939 dont l'activité antérieure n'est pas explicitée, ne suffit pas pour leur permettre d'affirmer, de manière quelque peu hypothétique et sans pièces à l'appui, qu'il 'avait donc dû mener une étude sur l'hôtellerie en amont de l'achat (de son premier hôtel en mai 2008)' ou que peu importe le différé de son exploitation motivé par la réalisation de travaux car 'il avait déjà étudié ce secteur d'activité de l'hôtellerie'.
Il en résulte que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés financières intimées, la qualité de profanes doit être reconnue à ces deux dirigeants légaux.
S'agissant, ensuite, du manquement au devoir de mise en garde tel qu'incriminé par les appelants, il échet de rappeler que cette obligation porte sur l'inadaptation du prêt, ici le financement résultant du contrat de crédit-bail, aux capacités financières de son bénéficiaire et au risque d'endettement excessif résultant de son octroi et non point sur les risques de l'opération financée, ainsi que cela résulte de la doctrine de la Cour de cassation (Cass com, 11 avril 2018, pourvoi n° 15-27133 (...), publié au bulletin // 26 septembre 2018, pourvoi n° 17-20604).
L'obligation de l'établissement de crédit relativement aux risques de l'opération financée ressortirait d'ailleurs de son devoir de conseil dans le cadre d'un engagement convenu sur ce point, lequel devoir se distingue, comme il a été dit, de celui de mise en garde.
Il appartient, par conséquent, au bénéficiaire du financement litigieux qui se prévaut du manquement au devoir de mise en garde de son dispensateur de crédit de démontrer, conformément, ici aussi, à ce qu'a été amené à énoncer la Cour de cassation (Cass com 13 mai 2014, pourvoi n° 13-13843) l'existence, au moment de l'octroi de ce financement, d'une disproportion de son engagement à ses capacités financières et le risque d'endettement excessif né de cet octroi.
Au cas particulier, l'argumentation des appelants, comme d'ailleurs celle des sociétés intimées qui s'approprie la motivation inopérante des premiers juges sur ce point, ne permet pas à la cour de retenir le manquement au devoir de mise en garde tel qu'incriminé des établissements de crédit intimés, dès lors qu'elles portent sur les risques de l'opération financée en s'appuyant, notamment, sur le compte-rendu d'une réunion des protagonistes (pièces n° 20 et 80 des parties) ayant pour finalité, conformément à la mission donnée au mandataire ad hoc désigné par ordonnance du 15 janvier 2015, de 'favoriser la conclusion entre le requérant et ses principaux créanciers d'un accord amiable destiné à mettre un terme à la résiliation du contrat de crédit-bail (...) dans le sens d'une renégociation'.
En l'absence de démonstration, par les appelants, du risque d'endettement excessif résultant de l'octroi de ce financement, il peut de plus être retenu, comme le relève 'd'ailleurs' in fine le tribunal et comme le reprennent à nouveau les sociétés intimées, que cet endettement excessif se trouve contredit par le fait que les loyers ont été payés pendant deux années environ (le début des impayés se situant au second semestre de l'année 2012, a-t-il été précisé par le conseil des crédit-bailleresses lors de la réunion de mars 2015 sus-évoquée) et que les défendeurs à l'action, convaincus de la viabilité du projet, ont sollicité en 2013 le réaménagement du crédit-bail.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les appelants ne sont pas fondés à se prévaloir de cet autre manquement.
Sur le manquement au devoir de bonne foi 'dans l'exécution du contrat' et la rupture abusive des pourparlers tels qu'invoqués par monsieur [Z]
Se prévalant de la création prétorienne selon laquelle un tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement délictuel, un manquement contractuel dès lors qu'il lui a été dommageable, cet appelant incrimine, d'abord, le comportement dommageable des crédit-bailleresses, exclusif, à son sens, de bonne foi, de loyauté et de la volonté de coopérer, en faisant état de la proposition de réaménagement du contrat faite par ces dernières en janvier 2013, à la demande de la SCI, puis de la remise en cause brutale de ces négociations en mai 2013 par la délivrance sans mise en demeure préalable d'un commandement de payer.
Il leur impute distinctement à faute une brutale rupture des pourparlers qui ont duré trois mois en reprenant les circonstances de la rupture des négociations et en ajoutant qu'elle est intervenue au seul motif du non-paiement à bonne date des intérêts et que la société Natio Lease Immo a entretenu la SCI dans la croyance 'certaine' de la conclusion d'un accord , ceci à la suite d'un accord de principe simplement soumis aux réserves d'usage dans le domaine bancaire.
Sur cette demande de réaménagement du contrat, les sociétés intimées se contentent d'indiquer, dans leur exposé factuel du litige, que leur accord de principe avait été donné sous réserve d'un certain nombre de décisions ou de conditions et que le projet est devenu caduc faute de satisfaction à ces conditions.
Elles illustrent leurs échanges par la production des courriels alors échangés (pièces n° 8 à 13).
Ceci étant dit, il convient de considérer que doit être déclarée recevable la demande indemnitaire de monsieur [Z] telle qu'il la fonde dans la mesure où les associés d'une société civile immobilière dotée d'une personnalité juridique et qui sont légalement débiteurs d'une obligation aux dettes subsidiaire et non point accessoire, ne sont pas contractuellement liés à ceux avec lesquels la SCI a contracté (Cass com, 02 juin 2015, pourvoi n° 13-25337, publié au bulletin).
Sur le fond, le principe de l'opposabilité du contrat aux tiers crée une situation de fait et elle induit la faculté qui leur est ouverte de rechercher la sanction d'une inexécution de ce contrat en lien de causalité avec le préjudice invoqué.
Mais telle n'est pas la situation de la présente espèce dès lors que la faute incriminée, à supposer qu'elle ait un lien direct et certain avec le dommage dont monsieur [Z] poursuit la réparation sans toutefois en faire la démonstration, ne peut être rattachée à 'l'exécution du contrat' de crédit-bail comme présenté de manière erronée dans ses écritures..
Sont, en effet, ici concernées des négociations précontractuelles menées en marge du contrat de crédit-bail et soumises à la liberté contractuelle qui avaient pour finalité de redéfinir la relation contractuelle à la faveur de la conclusion d'un avenant voire d'une autre convention, mais sans nulle obligation de conclure.
Seule, d'ailleurs, une action en responsabilité délictuelle aurait pu être introduite, en son temps, par la SCI se prévalant du caractère fautif de cette rupture à l'encontre des sociétés financières, étant ajouté qu'elle n'aurait pu prétendre qu'à l'indemnisation des frais de négociation et d'étude préalable (ce qu'indique d'ailleurs monsieur [Z] dans ses conclusions) et non point à la perte de chance de réaliser les gains espérés.
Par suite, monsieur [Z] doit être déclaré recevable mais mal fondé en cette ultime prétention.
Sur les autres demandes
L'équité conduit à condamner les époux [B] et monsieur [Z] à verser aux sociétés crédit-bailleresses la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboutés de ce dernier chef, ils supporteront les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe.
INFIRME le jugement entrepris hormis en ses dispositions relatives à la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire (non déférée) et en ce qu'il déboute les époux [B] ainsi que monsieur [Z] de leurs demandes indemnitaires respectives et dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure en condamnant les défendeurs à l'action aux dépens et, statuant à nouveau ;
Condamne solidairement monsieur [C] [B], madame [K] [J], son épouse, et monsieur [N] [Z], pris en leurs qualités de cautions solidaires selon leurs engagements prévus à l'article B-13 de l'acte notarié reçu le 29 avril 2009, à verser aux sociétés BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo puis Fructicomi) SA et Natiocreditbail SA, ensemble, la somme globale de 722.839 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2017,
Déboute les appelants du surplus de leurs demandes ;
Condamne monsieur [C] [B], madame [K] [J], son épouse, et monsieur [N] [Z] à verser aux sociétés BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo puis Fructicomi) SA et Natiocreditbail SA, ensemble, la somme globale de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens d'appel avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,