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02/03/2023 | FRANCE | N°20/01980

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 02 mars 2023, 20/01980


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



15e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 02 MARS 2023



N° RG 20/01980 - N° Portalis DBV3-V-B7E-UB3O



AFFAIRE :



[I] [G]



C/



SASU H4H









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Août 2020 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 19/01576



Copies exécutoires et certifiées confor

mes délivrées à :



Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES



Me Laurent SALAAM







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DEUX MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,



La cour d'appel de Versailles a rendu l'arr...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 MARS 2023

N° RG 20/01980 - N° Portalis DBV3-V-B7E-UB3O

AFFAIRE :

[I] [G]

C/

SASU H4H

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Août 2020 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 19/01576

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

Me Laurent SALAAM

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, initialement fixée au 08 décembre 2022, puis prorogé au 26 janvier 2023, puis prorogé au 16 février 2023, puis prorogé au 02 mars 2023, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Monsieur [I] [G]

né le 31 Mars 1983 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - Représentant : Me Florence MANTOUX, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0296

APPELANT

****************

SASU H4H

N° SIRET : 818 383 093

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Laurent SALAAM, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0386

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Octobre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Régine CAPRA, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [I] [G], dit ci-après M. [N], a été engagé à compter du 2 janvier 2018, par contrat de travail à durée indéterminée, par la société H4H, en qualité de directeur de programme et du développement, statut cadre, position 3.1, coefficient 170 moyennant une rémunération mensuelle brute fixe de 9 583,33 euros et une rémunération variable annuelle fixée à un montant de 46 000 euros en cas de réalisation de la totalité des objectifs.

Les relations entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseils, dite syntec.

Par lettre simple et courrier électronique du 9 mai 2019, l'avocat de M. [N] a fait part à la société H4H de ce que son client considérait que son investissement et les efforts mis en oeuvre - malgré son importante charge de travail, qui n'aurait jamais été invoquée en entretien au cours de l'année 2018- avaient abouti à des résultats qui n'avaient pas été rétribué conformément à ce qui avait été convenu et l'a informée qu'à défaut de pouvoir s'entretenir avec son conseil sous huit jours des suites à donner à ce dossier, il reprendra sa liberté d'action pour faire valoir les droits de son client.

Par lettre en date du 14 mai 2019, remise en main propre le 15 mai 2019, la société H4H a notifié un avertissement à M. [N].

Par lettre recommandée avec avis de réception du 27 mai 2019, M. [N] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur.

Soutenant que sa prise d'acte devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu'il n'avait pas été rempli de ses droits à rémunération, il a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre, par requête reçue au greffe le 25 juin 2019, afin d'obtenir le paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire.

La société H4H a sollicité le rejet de ses prétentions et formé des demandes reconventionnelles en paiement d'indemnités.

Par jugement du 17 août 2020, auquel renvoie la cour pour l'exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail M. [N] produit les effets d'une démission ;

- condamné M. [N] à payer à la société H4H la somme de 28 750 euros en paiement de l'indemnité de brusque rupture ;

- débouté M. [N] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la société H4H de son autre demande reconventionnelle ;

- condamné M. [N] à payer à la société H4H la somme de 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [H] aux entiers dépens.

M. [N] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 23 septembre 2020.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 11 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [N] demande à la cour :

¿d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'une démission ;

- l'a condamné à payer à la société H4H la somme de 28 750 euros en paiement de l'indemnité de brusque rupture ;

- l'a débouté de l'ensemble de ses demandes ;

- l'a condamné à payer à la société H4H la somme de 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'a condamné aux entiers dépens ;

¿par conséquent, statuant à nouveau :

- déclarer le conseil de prud'hommes de Nanterre incompétent concernant les accusations de concurrence et de rupture abusive formulées par H4H à son encontre ;

- déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de H4H et en tout état de cause l'en débouter ;

- juger que sa prise d'acte était justifiée ;

- déclarer que la rupture de son contrat produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- en conséquence, condamner H4H à lui verser :

*7 877,03 euros à titre d'indemnité de licenciement,

*29 524 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

*2 952,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

*44 372,64 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*66 558,96 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral pour rupture brutale et vexatoire ou exécution loyale du contrat de travail,

*22 442 euros au titre de sa part variable pour l'exercice 2018,

*2 244,20 euros à titre de congés payés afférents,

*102 439,83 euros au titre de ses commissions pour l'exercice 2018,

*10 243,98 euros à titre de congés payés afférents,

*19 166,67 euros au titre de sa part variable pour l'exercice 2019,

*1 916,67 euros à titre de congés payés afférents,

*155 440,20 euros de rappel d'heures supplémentaires,

*15 544,02 euros à titre de congés payés afférents,

*133 117,92 euros à titre d'indemnité de travail dissimulé ou, à titre subsidiaire, de dommages et intérêts pour non-respect du droit au repos, absence de contrôle et de suivi de la charge de travail et violation du repos dominical,

- assortir ces condamnations des intérêts légaux à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, avec capitalisation des intérêts

- condamner H4H à lui délivrer des documents de fin de contrat rectifiés (attestation Pôle emploi, bulletin de salaire, certificat de travail, solde de tout compte), sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

- juger infondée la demande adverse d'indemnité pour brusque rupture ;

- juger infondée la demande adverse de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et procédure abusive ;

- juger infondée la demande adverse sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de règlement des dépens ;

- débouter H4H de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner H4H au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles, agissant par maître Martine Dupuis, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 19 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, la société H4H demande à la cour de :

- la dire et juger recevable et fondée en ses demandes, fins et écritures ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a qualifié la prise d'acte notifiée en date du 27 mai 2019 par M. [N] comme produisant les effets d'une démission avec toutes conséquences de droit et condamné M. [N] à lui payer la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- infirmer partiellement le jugement pour le surplus et statuant à nouveau, de :

- condamner M. [N] à lui payer les sommes suivantes :

*31 846,02 euros à titre d'indemnité pour brusque rupture,

*20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- débouter M. [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions comme étant mal fondées,

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 21 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'incompétence du conseil de prud'hommes pour connaître des demandes reconventionnelles de la société H4H

M. [N] demande à la cour de déclarer le conseil de prud'hommes de Nanterre incompétent concernant 'les accusations de concurrence et de rupture abusive formulées par la société H4H' à son encontre et de déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de celle-ci.

La société H4H, qui se réserve d'intenter toute action en réparation des actes de concurrence déloyale commis par la société HM Consult, n'a formé aucune demande de dommages-intérêts pour concurrence déloyale à l'encontre de M. [N] devant le conseil de prud'hommes de Nanterre, mais a formé une demande de dommages-intérêts pour brusque rupture et une demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

La prise d'acte de la rupture du contrat qui n'est pas justifiée produit les effets d'une démission, de sorte que le salarié doit à l'employeur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis résultant de l'application de l'article L. 1237-1 du code du travail. La rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée à l'initiative du salarié ouvre droit en outre, si elle est abusive, à des dommages-intérêts au profit de l'employeur en application de l'article L. 1237-2 du code du travail.

La juridiction prud'homale, étant compétente, en application de l'article L. 1411-1 du code du travail, pour connaître des différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail conclu entre un employeur et les salariés qu'il emploie, est compétente pour connaître de la demande de dommages-intérêts pour brusque rupture de la société H4H.

Elle est également compétente pour statuer sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour abus du droit d'agir en justice formée dans le cadre du litige dont elle est saisie.

M. [N] est en conséquence mal fondé à prétendre que le conseil de prud'hommes était incompétent pour connaître des demandes reconventionnelles formées par la société H4H à son encontre.

La cour relève en outre, d'une part, qu'étant investie de la plénitude de juridiction, elle est en tout état de cause compétente pour connaître de l'ensemble du litige dont elle est saisie par l'effet dévolutif de l'appel, en tant que juridiction d'appel tant du conseil de prud'hommes que de la juridiction qui eût été compétente, et, d'autre part, qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et qu'elle n'est donc pas saisie aux termes du dispositif des conclusions de l'intimée d'une demande de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et procédure abusive mais seulement d'une demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur la rémunération variable

Une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération dès lors qu'elle est fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur, qu'elle ne fait pas porter le risque d'entreprise sur le salarié et n'a pas pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima légaux et conventionnels.

Le contrat de travail stipule qu'à la rémunération fixe de M. [N] 's'ajoutera une part variable annuelle fonction de la réalisation par le salarié des objectifs définis par la direction lors d'un entretien annuel. Le montant de cette part variable est fixé pour l'année 2018 à un montant de 46 000 € en cas de la réalisation de la totalité des objectifs. Il sera revu à la hausse en cas de dépassement des objectifs convenus.'

- sur la rémunération variable pour l'année 2018

M. [N], a été engagé à compter du 2 janvier 2018. Par courrier électronique du 16 mai 2018, la directrice générale de la société H4H lui a adressé le fichier contenant ses objectifs détaillés et les modalités de paiement de sa part variable pour l'année 2018 en lui proposant d'en parler avec lui afin qu'elle le lui commente et puisse répondre à toutes les questions qu'il pourrait avoir.

Le salarié lui a retourné ces objectifs signés le 24 mai 2018.

Les objectifs communiqués à M. [N] lui permettant d'obtenir le paiement de 100% de la part variable étaient les suivants :

¿ objectif commun (30% du variable) :

- objectif chiffre d'affaires CA H4H : 3,3M€, variable et rates à 100% si CA H4H $gt; 85% ;

- snow Partnership (H4H doit être partner) :

*certification Sys Administrateur : FITEC et juniors certifiés Sys Admin

*certification Implémentation Specialiste (IS) : certification à faire passer à nos consultants si nécessaire ;

¿ objectif individuel (70% du variable) :

a) objectif professionnel (50% du variable) :

- Management :

*assurer le management et le suivi des collaborateurs à raison de 3 entretiens minimum par an et formaliser ces entretiens à travers x-mind (objectifs, mid-year, end-year) ;

*salaires :

proposition de versement des variables pour fin janvier au plus tard ;

proposition de revue salariale une fois par an avant fin décembre ;

*formations

proposition de planning des formations pour fin mars, suivi et mise à jour de ce planning ;

assurer le passage des certifications administrateurs et IS afin d'obtenir 15 administrateurs et 12 IS avant la fin de l'année pour obtenir le label Master ;

*recrutements

Fitec (2 sessions de formation par an)

Réseau Senior consultants + AMOA

AMOA entité pour accompagner nos clients CAC 40 (Renault, Orpéa, etc.)

- Pre-Sales : participation aux avant-ventes en fonction des besoins et dossiers ;

- Suivi clients/Projets :

*Projets

Budget suivi ;

Boond Manager ;

Expenses Validation à 2 niveaux des NDF (manger et N+2) ;

Respect des plannings ;

Copil client pour suivi si besoin;

Instanco Snow de TMM ;

Communication Fomalisation dans Basecamp ;

*Clients

Visiter chaque client au moins une fois par trimestre afin de générer le besoin. Toutes activités identifiées et concrétisées sous forme de PO générera une commission de 3% versée avec le variable.

Participation à la formalisation de la Roadmap auprès du client ;

- Technique

b) objectif personnel (20% du variable) : Attitude/Relationnel

- Tenue vestimentaire correcte et adaptée en clientèle ;

- Communication appropriée à l'égard du client ;

- Rester toujours pro.

La société H4H a versé à M. [N] en avril 2019, sous l'intitulé 'prime exceptionnelle annuelle', la somme de 23 258 euros à titre de part variable de rémunération pour l'exercice 2018, ce qui représente 50,56% de la rémunération variable à objectifs atteints en totalité.

M. [N], qui prétend à une part variable de rémunération de 45 700 euros pour l'exercice 2018, revendique le paiement d'un solde de part variable de rémunération sur objectifs de 22 442 euros au titre de cet exercice.

Il fait valoir que la société H4H a refusé de lui communiquer les éléments en sa possession lui permettant de calculer sa rémunération variable et qu'elle a nié les résultats réalisés. Il soutient que :

- l'objectif commun conditionnant 30% du variable, a été atteint à 100%, ce qui lui ouvrait droit à une part variable de 13 800 euros ;

- l'objectif individuel professionnel conditionnant 70% du variable, qui ouvrait droit à une part variable de 32 200 euros à objectifs atteints à 100%, a été atteint :

*concernant l'objectif professionnel conditionnant 50% du variable, à 99%, après neutralisation des objectifs inatteignables et compte-tenu d'un projet au sein de la société Suez, dont le budget a dérapé à partir de janvier 2019, ce qui lui ouvrait droit à une part variable de 22 700 euros sur 23 000 euros ;

* concernant l'objectif individuel personnel conditionnant 20% du variable, à 100%, ce qui lui ouvrait droit à une part variable de 9 200 euros.

La société H4H, qui indique avoir défini les objectifs du salarié pour l'année 2018 à l'issue de la période d'essai et les avoir arrêtés le 24 mai 2018, fait valoir que l'atteinte du premier objectif commun de réalisation d'un chiffre d'affaires annuel par M. [N], qui conditionne 30% de sa rémunération variable, a été de 0% pour l'année 2018, dès lors que le salarié n'a généré aucune facturation complémentaire dans le cadre de cet objectif commun et que c'est pour récompenser sa participation à l'élaboration des missions facturées aux clients qu'elle lui a accordé la rémunération variable de 13 800 euros correspondant à l'atteinte de cet objectif.

Contrairement à ce que la société H4H soutient, l'objectif commun fixé qui conditionnait le paiement de 30% de la part variable de la rémunération de M. [N] était le chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise et non le chiffre d'affaires réalisé par le salarié lui-même. M. [N] indique en pièce 19 qu'en 2018, le chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise a été supérieur à 4,5M€ et que H4H est devenu Technology Partner ServiceNow. La société H4H ne justifiant pas du chiffre d'affaires qu'elle a réalisé au cours de cet exercice, dont elle n'indique pas même le montant, et n'alléguant pas ne pas avoir obtenu les certifications nécessaires, il s'en déduit que l'objectif commun a été atteint. Il ne résulte par ailleurs d'aucun élément que M. [N] n'aurait pas atteint l'objectif individuel personnel relatif à l'attitude et au relationnel (tenue vestimentaire correcte et adaptée en clientèle, communication appropriée à l'égard du client, rester toujours pro) fixé qui conditionnait le paiement de 30% de la part variable de la rémunération. Le paiement de 50% de la part variable convenue, soit 23 000 euros, était donc dû.

S'agissant de la réalisation des objectifs personnels professionnels fixés qui conditionnait le paiement de l'autre moitié de la part variable de la rémunération de M. [N], soit 23 000 euros, le salarié est bien fondé, à soutenir, au regard, pour certains d'entre eux, de leur fixation a posteriori et, pour les autres, de l'absence de tout élément contraire produit par la société H4H, que les objectifs de management suivants étaient inatteignables :

- assurer le management (3 entretiens individuels par an), inatteignable compte-tenu du nombre de consultants, 30, et de sa charge de travail ;

- proposer le versement des variables pour fin janvier au plus tard, cet objectif ayant été fixé a posteriori, en mai 2018 ;

- proposer une revue salariale une fois par an avant décembre, la direction ayant demandé à ce qu'il n'y ait pas de revue salariale la 1er année d'activité du salarié et tous les consultants ayant été embauchés en 2018 ;

- proposer le planning de formations pour fin mars, cet objectif ayant été fixé a posteriori, en mai 2018 et aucun budget de formation n'ayant été alloué ;

- assurer le passage des certifications administrateurs et IS afin d'obtenir 15 administrateurs et 12 IS avant la fin de l'année, en l'absence de budget.

Le salarié détaille en pièce 19 les actions menées à bien qu'il invoque pour justifier de la réalisation des objectifs individuels professionnels fixés qui étaient atteignables et produit de nombreuses pièces justifiant de ses allégations.

La société H4H ne produisant pas d'éléments justifiant de la non atteinte par M. [N] des objectifs personnels professionnels fixés qui étaient atteignables et le salarié n'ayant pas accepté la proposition de celle-ci de reporter sur l'année 2019, selon l'atteinte des objectifs de cette année-là, 23 000 euros de la part variable de rémunération convenue au titre de l'année 2018, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société H4H à payer à M. [N] le solde de part variable de rémunération sur objectifs de 22 442 euros pour l'année 2018 qu'il revendique ainsi que la somme de 2 244,20 euros au titre des congés payés afférents.

- sur la rémunération variable pour l'année 2019

Lorsque les objectifs sont fixés unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.

M. [N], qui revendique le paiement des 5/12ème de la part de sa rémunération variable pour l'exercice 2019, soit 19 166,67 euros, fait valoir que la société H4H n'a pas organisé l'entretien annuel prévu à cette fin, ne lui a fixé aucun objectif conditionnant le paiement de sa rémunération variable pour le premier trimestre 2019 et lui a fixé, pour la période d'avril 2019 à mars 2020, des objectifs inatteignables, tant dans leur version de mars 2019 que dans leur version modifiée de fin mai 2019.

La société H4H soutient qu'il était impossible de fixer les objectifs de M. [N] pour l'année 2019 avant que les comptes de l'exercice 2018 soient arrêtés, soit à la fin du mois de mars 2019, de sorte que les discussions n'ont pu débuter qu'au mois d'avril, parallèlement à la détermination du montant de la rémunération variable du salarié pour l'année 2018, que sa rémunération variable étant annuelle, couvrait nécessairement le premier trimestre de l'année ; qu'elle lui a proposé des objectifs pour l'année 2019 ; que compte-tenu des négociations en cours sur la rémunération variable du salarié pour l'année 2018, les objectifs pour l'année 2019 n'étaient pas encore définitivement arrêtés ; que l'intéressé n'a travaillé que cinq mois sur l'année 2019, qu'il est plus que probable, au regard des difficultés rencontrées par l'entreprise pour obtenir le règlement de ses factures par la société Sanofi et de la baisse de chiffres d'affaires constatée, qu'il a oeuvré à compter du mois de mars 2019 dans la perspective de rompre son contrat de travail et de monter une société concurrente et qu'il serait inique qu'il perçoive la moindre rémunération variable pour cette année, alors que par l'intermédiaire de la société qu'il a créée, il a détourné la clientèle de son employeur à son profit.

La société H4H a adressé à M. [N] par mail du 11 mars 2019 un projet intitulé 'Objectifs individuels-période du 1er avril 2019 au 31 mars 2020" indiquant que le collaborateur bénéficie d'une rémunération variable d'un montant annuel de 46 000 euros payable en avril 2020, versée en totalité ou partiellement, selon atteinte des objectifs quantitatifs et qualitatifs définis ci-dessous (CA généré par M. [N] sur le compte Sanofi hors ressources déjà placées pour 60% du variable, Rôle de TeamLeader sur le périmètre ServiceNow Sanofi pour 30% du variable et transfert/accompagnement des fonctions vers [B] [U] pour 10%), puis par mail du 21 mai 2019 un projet intitulé 'Objectifs individuels-période du 1er avril 2019 au 31 mars 2020" indiquant que le collaborateur bénéficie d'une rémunération variable d'un montant annuel de 46 000 euros payable en avril 2020, versée en totalité ou partiellement, selon atteinte des objectifs quantitatifs et qualitatifs définis ci-dessous (CA généré par M. [N] sur le compte Sanofi hors ressources déjà placées pour 35% du variable, CA généré par M. [N] sur le compte Natixis/BPCE IT hors ressources déjà placées pour 35% du variable et rôle de TeamLeader sur les ressources internes et externes adossées aux comptes Sanofi et Natixis/BPCE IT pour 30%) et précisant que les objectifs du salarié seront recalculés au prorata, à la date de mise en place de la nouvelle organisation envisagée, dont le mail d'accompagnement envisageait l'attribution d'une prime de 11 500 euros pour le 1er trimestre et de 11 500 euros pour le 2ème trimestre en fonction de l'atteinte des objectifs 2019.

Ni l'absence d'établissement des comptes définitifs de l'exercice 2018, clos le 31 décembre 2018, ni le désaccord entre les parties sur la part variable de rémunération due au salarié pour l'exercice 2018, ni la proposition faite par l'employeur de reporter sur l'année 2019, selon l'atteinte des objectifs de cette année-là, 23 000 euros de la part variable de rémunération convenue au titre de l'année 2018, ne justifient l'absence de fixation par l'employeur des objectifs du salarié pour l'année 2019. La société H4H ne justifie pas au surplus, ainsi qu'il lui incombe, que les objectifs communiqués au salarié le 11 mars 2019 ou ceux communiqués le 21 mai 2019 étaient atteignables.

Les faits de concurrence déloyale imputés par la société H4H à M. [N], à les supposer établis, ne sont pas de nature à affecter la rémunération variable due au salarié pour la prestation de travail qu'il a accomplie au cours de sa période d'emploi.

Lorsque la partie variable de la rémunération contractuelle du salarié dépend de la réalisation d'objectifs fixés chaque année unilatéralement par l'employeur et que celui-ci n'a pas précisé au salarié les objectifs à réaliser, ni les conditions de calcul vérifiables de sa part variable, pour l'exercice en cause, cet élément de rémunération doit être versé intégralement pour cet exercice.

Le contrat de travail de M. [N] ayant pris fin le 27 mai 2019, par la prise d'acte du salarié, celui-ci est fondé à revendiquer le paiement de l'intégralité de la part variable de sa rémunération calculé prorata temporis pour 4 mois et 18/23 ème de mois. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société H4H à payer à M. [N] la somme de 18 333,33 euros à ce titre, ainsi que la somme de 1 833,33 euros au titre des congés payés afférents.

Sur les commissions

Le contrat de travail conclu entre les parties à effet au 2 janvier 2018 stipule qu'à la rémunération fixe du salarié 's'ajoutera une part variable annuelle fonction de la réalisation par le salarié des objectifs définis par la direction lors d'un entretien annuel. Le montant de cette part variable est fixé pour l'année 2018 à un montant de 46 000 € en cas de la réalisation de la totalité des objectifs. Il sera revu à la hausse en cas de dépassement des objectifs convenus.'

Aux termes du courrier électronique adressé à M. [N] le 24 mai 2018, la société H4H lui a adressé les objectifs qui lui étaient fixés pour 2018 ainsi que les modalités de calcul de sa rémunération variable et l'a informé que 'Toutes activités identifiées et concrétisées sous forme de PO génère une commission de 3% versée avec le variable.'

Il en résulte qu'au-delà de la part variable de rémunération sur objectifs contractuellement stipulée, la société H4H s'est engagée à régler à M. [N] des commissions sur les prestations commandées.

La société H4H est dès lors mal fondée à prétendre que le variable de 46 000 euros à objectifs atteints en totalité inclut la commission de 3% qu'elle s'est engagée à payer au salarié.

La société H4H est également mal fondée à faire valoir que M. [N] n'a réclamé pour la première fois le paiement de commissions que par le courrier de son avocat du 9 mai 2019, l'absence de réclamation ne valant pas renonciation à se prévaloir d'un droit.

M. [N] revendique, à titre de commissions pour 2018, le paiement de la somme de 102 439,83 euros calculée sur la base de 3% du montant des Purchase Order (PO), dont il revendique être à l'origine, dont le montant s'élève au total à 3 415 661,03 euros.

Le salarié doit pouvoir vérifier que le calcul de sa rémunération a été effectué conformément aux modalités prévues par le contrat de travail. Lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire. Il lui appartient de justifier des faits générateurs de commissions et du calcul de celles-ci.

La société H4H soutient que M. [N] n'a été à l'origine d'aucune commande de mission supplémentaire ou complémentaire par les clients de la société. Elle fait valoir qu'il n'est pas à l'origine des missions sur lesquelles il demande à être commissionné et qu'il n'est d'ailleurs pas mentionné comme tel sur les factures produites, les vendeurs qui y sont mentionnés étant Mme [M], M. [Z], Mme [V], Mme [E] et M. [S].

M. [N] fait valoir que dans l'entreprise, dans la pratique, il démarchait les clients, négociait avec eux et parvenait à un accord, tandis que la direction, en la personne de Mme [M] ou de M. [Z], adressait au client la proposition financière finale, de sorte qu'ils étaient seuls à recevoir les bons de commande et à suivre la facturation, le cas échéant avec une assistante.

M. [N] produit la liste des affaires sur lesquelles il revendique le paiement d'une commission, des factures justifiant du chiffre d'affaires réalisé et des pièces justifiant de ses interventions.

La société H4H produit des échanges de mail relatifs à partie seulement des prestations qui lui ont été commandées par la société Sanofi et par la société Orpéa, sans démontrer qu'elles correspondent à celles sur lesquelles le salarié demande à être commissionné, et ne produit aucun élément concernant les prestations commandées par les autres clients cités par l'intéressé.

Il est établi par les pièces produites par M. [N], que les pièces invoquées par la société H4H ne permettent pas de contredire, qu'au-delà de sa participation aux avant-ventes, le salarié a fait émerger, chez les clients avec lesquels il a été en relation, des besoins de prestations, qui ont été concrétisées sous forme de PO, qui lui ouvrent droit à une commission de 3% en sus de la part variable prévue par son contrat de travail, peu important que l'offre commerciale précédant l'envoi du bon de commande ait été établie par un autre salarié ou collaborateur de l'entreprise, dont le nom est mentionné sur la facture.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société H4H à payer à M. [N] la somme de 102 439,83 euros que celui-ci revendique au titre de ses commissions pour l'exercice 2018 ainsi que la somme de 10 243,98 euros au titre des congés payés afférents.

Sur les heures supplémentaires

Le contrat de travail stipule que la durée du travail du salarié est fixée à 218 jours travaillés, journée de solidarité comprise, par année civile complète sur la base d'un droit intégral à congés payés.

Selon l'article 4.8.3 relatif au forfait annuel en jours de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail dans sa rédaction résultant de l'avenant du 1er avril 2014, annexé à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseils, dite syntec, :

'Afin de se conformer aux dispositions légales et de veiller à la santé et à la sécurité des salariés, l'employeur convoque au minimum deux fois par an le salarié, ainsi qu'en cas de difficulté inhabituelle, à un entretien individuel spécifique.

Au cours de ces entretiens seront évoquées la charge individuelle de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre la vie professionnelle et la vie privée et, enfin la rémunération du salarié.

Lors de ces entretiens, le salarié et son employeur font le bilan sur les modalités d'organisation du travail du salarié, la durée des trajets professionnels, sa charge individuelle de travail, l'amplitude des journées de travail, l'état des jours non travaillés pris et non pris à la date des entretiens et l'équilibre entre vie privée et vie professionnelle.

Une liste indicative des éléments devant être abordés lors de ces entretiens est également transmise au salarié.

Au regard des constats effectués, le salarié et son responsable hiérarchique arrêtent ensemble les mesures de prévention et de règlement des difficultés (lissage sur une plus grande période, répartition de la charge, etc.). Les solutions et mesures sont alors consignées dans le compte-rendu de ces entretiens annuels.

Le salarié et le responsable hiérarchique examinent si possible également à l'occasion de ces entretiens la charge de travail prévisible sur la période à venir et les adaptations éventuellement nécessaires en termes d'organisation du travail.'

L'article 5 du contrat de travail du salarié rappelait que conformément aux dispositions conventionnelles en vigueur, M. [N] bénéficiera tous les 6 mois d'un entretien individuel avec son supérieur hiérarchique, qui permettra notamment d'évoquer la charge individuelle de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise et l'articulation entre activité professionnelle et vie privée.

La société H4H allègue qu'elle a eu le 11 mars 2019 un entretien avec M. [N] portant non seulement sur sa rémunération variable, mais également sur sa charge de travail, que cet entretien a été suivi par plusieurs autres entretiens formels dont le dernier en date a eu lieu le 18 avril 2019 et qu'à cette occasion, ils ont discuté de l'organisation de ses fonctions au titre de l'année 2019 et fait valoir que la méconnaissance par l'employeur de ses obligations en matière d'entretien ne saurait en tout état de cause entraîner la nullité de la convention de forfait conclue en application d'un accord collectif répondant aux exigences légales.

La société H4H ne justifie pas avoir respecté les obligations conventionnelles mises à sa charge par l'article 4.8.3 relatif au forfait annuel en jours de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail dans sa rédaction résultant de l'avenant du 1er avril 2014.

Lorsque l'employeur ne respecte pas les stipulations de l'accord collectif qui a pour objet d'assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié et de son droit au repos, la convention de forfait en jours est privée d'effet de sorte que le salarié peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l'existence et le nombre.

Selon l'article L. 3121-22 du code du travail, constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée hebdomadaire du travail fixée par l'article L. 3121-10 du code du travail ou de la durée considérée comme équivalente. Cette durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés.

Les jours fériés ne peuvent, en l'absence de dispositions légales ou conventionnelles, être assimilées à du temps de travail effectif, de sorte qu'ils ne sauraient être pris en compte dans la détermination de l'assiette de calcul des droits à majoration pour heures supplémentaires. Les heures correspondant à la période de congé annuel payé pris par le salarié doivent en revanche être prises en compte en tant qu'heures de travail accomplies pour déterminer si le seuil des heures travaillées au cours de la semaine civile donnant droit à majoration pour heures supplémentaires est atteint.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée du travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1, les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Ni l'autonomie du salarié, ni la tardiveté de sa réclamation ne sont de nature à empêcher l'employeur de répondre à la demande du salarié, qui présente en pièce 53 un tableau récapitulatif de nombre d'heures de travail qu'il prétend avoir accomplies semaine civile par semaine civile, qui est suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies pour permettre à la société H4H d'y répondre. Celle-ci, tenue d'assurer le contrôle des heures de travail effectuées, s'est abstenue, en violation de l'obligation qui lui était faite, de procéder à l'enregistrement de l'horaire accompli par le salarié et ne verse aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par celui-ci. Il s'en déduit que la preuve de l'accomplissement d'heures supplémentaires est rapportée.

Il résulte des pièces produites par le salarié que l'ampleur des tâches qui lui étaient confiées rendait nécessaire la réalisation d'heures supplémentaires.

Les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

Les éléments de rémunération dont les modalités de fixation permettent leur rattachement direct à l'activité personnelle du salarié doivent être intégrés dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires. Il en est ainsi de la part variable de la rémunération et des commissions dues à M. [N].

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société H4H à payer à M. [N] la somme de 81 776,62 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ainsi que la somme de 8 177,66 euros au titre des congés payés afférents.

Sur l'avertissement en date du 14 mai 2019

La société H4H a notifié à M. [N] un avertissement motivé comme suit :

'Je suis au regret de devoir vous adresser un avertissement pour manquement à vos obligations managériales et de communication dans le cadre du projet Sanofi dont vous portez la responsabilité.

En effet le samedi 11 mai et le dimanche 12 mai, vous-même et 4 collaborateurs de votre équipe avez participé aux opérations de 'merge d'instances ServiceNow' chez notre client Sanofi.

La direction générale de l'entreprise n'a eu connaissance de ce dispositif, par le client lui-même, que le vendredi 10 mai, veille du démarrage des opérations.

De surcroît ce n'est que le samedi 11 mai que le client a confirmé sa validation écrite pour la facturation supplémentaire engendrée pour les 5 ressources impliquées, alors que l'opération était déjà en cours.

Compte-tenu de votre fonction de Directeur de programme et développement et de votre rôle central dans ce projet, il est de votre responsabilité de tenir informée la direction générale de tels dispositifs et de vous assurer de la bonne communication entre la direction de l'entreprise et le client dans un délai raisonnable.

Un tel dispositif nécessitant l'aval écrit du client et de la société car engendrant notamment pour le client une facturation supplémentaire pour le client, et pour la Société car nécessitant une organisation en interne pour la planification des jours de récupération.'

Il est établi :

- que par mail du 9 mai 2019 à 16h03, M. [N] a informé la directrice des ressources humaines de la société H4H que le client Sanofi leur demande de travailler le samedi 11 mai et le dimanche 12 mai pour effectuer une mise en production, lui a communiqué la liste des personnels concernés, en précisant qu'ils travailleront à partir de leur domicile, les locaux clients étant fermés et lui a précisé que le client est au courant de la politique tarifaire appliquée en horaires exceptionnels, 150% du TJM les samedis et 200% du TJM les dimanches et jours fériés ;

- que la décision a été définitivement arrêtée à l'issue d'une réunion, dont le compte-rendu a été adressé à M. [N] le 9 mai 2019 à 18h00 ;

- que par mail du vendredi 10 mai 2019 à 9 h17, la directrice générale de la société H4H a fait part à M. [N] de son étonnement d'apprendre par le client lui-même que le merge de Sanofi est prévu ce week-end, sans qu'elle ait été informée par M. [N], qui joue un rôle central dans ce projet de merge, du dispositif mis en place, qui va impliquer du temps week-end des collaborateurs (internes et externes) de la société et en conséquence une compensation de ce temps de travail, et de ce qu'il n'est pas acceptable pour le bon fonctionnement de l'entreprise qu'elle n'ait pas été prévenue à un jour de l'opération ;

- que par mail du vendredi 10 mai à 10h56, M. [N] lui a répondu que le go pour le merge a été donné la veille à 17 heures, qu'il a averti le client des personnels nécessaires et de la surfacturation engendrée et a averti le service ressources humaines des personnes sollicitées, que ce travail exceptionnel est facturé à 150% le samedi et à 200% le dimanche, engendrant une augmentation de la marge et que si elle ne souhaite pas qu'ils travaillent ce week-end, il lui laisse le soin de faire une communication directement au client ;

- que par mail du vendredi 10 mai à 21h09, la directrice générale a répliqué qu'elle pense que l'information du merge était connue bien avant 17h00 la veille et souligné qu'aucun accord n'a été acté avec Sanofi pour les collaborateurs de la société qui vont travailler ce week-end, qu'elle n'a pas fait d'action commerciale ou reçu d'accord de Sanofi pour lui facturer le samedi et le dimanche ;

- que par mail du samedi 11 mai 2010 à 10h10, M. [N] a répondu que Sanofi a été avertie le jeudi de l'équipe nécessaire, qu'ils n'avaient pas eu plus tôt la confirmation de l'équipe nécessaire ni le go pour ce merge et que M. [X] [ le chef de service Migration & C2R de Sanofi] est parfaitement au courant et aligné sur la facture qui en découlera ;

- que par mail du samedi 11 mai 2019 à 10h15, M. [N] a demandé à M. [X] de confirmer à la directrice générale de la société H4H le nom des collaborateurs de la société, dont lui, qui sont identifiées pour la réalisation du merge de ce week-end et qu'il est au courant des surfacturations ;

- que par mail du samedi 11 mai 2019 à 11h00, M. [X] a confirmé à la directrice générale de la société H4H le nom des collaborateurs de la société H4H qui sont prévues comme ressources pour mener à bien les opérations de merge d'instances ServiceNow ce week-end (11 et 12 mai) et son accord pour la facturation supplémentaire que cela engendrera et qu'il est conscient qu'il faudra que ces personnes puissent prendre des jours de récupération suivant cette opération afin de se reposer ;

- que par mail du samedi 11 mai 2019 à 13h24, la directrice générale de la société H4H a demandé à la responsable ressources humaines de veiller à imposer les jours de récupération des trois salariés de la société, qui vont travailler ce week-end en indiquant que la direction souhaite privilégier les jours de récupération par rapport au paiement en numéraire.

Alors qu'à propos d'une précédente opération effectuée pour le compte de Sanofi les samedi 9 et dimanche 10 février 2019, sans bon de commande préalable, M. [N] a adressé à la société H4H le 21 février 2919 un mail indiquant qu'il n'y a pas besoin de bon de commande supplémentaire, qu'il s'agit de faire un add-in sur la facture pour exercice particulier, qu'on a toujours fait comme cela avec Sanofi, que c'est [T] [M. [X] le chef de service Migration & C2R de Sanofi] qui réceptionne, qu'il faut avertir avant que la facture arrive et qu'il appelle [K] [M. [Z], account manager de la société H4H, qui demandait l'établissement d'un bon de commande] pour s'aligner, il n'est pas établi que la direction de la société H4H ait contesté cette pratique et demandé au salarié de ne plus procéder ainsi.

Eu égard aux fonctions de directeur de programme et du développement confiées à M. [N] et en l'absence de directives contraires données, il n'est pas établi que l'intéressé ait commis une faute en n'informant pas en amont la directrice générale de l'opération de merge projeté un week-end et en n'exigeant pas avant le début de l'opération un accord écrit du client sur la facturation supplémentaire engendrée. L'avertissement dont M. [N] a fait l'objet pour ce motif est dès lors injustifié. Il s'ensuit que la société H4H a abusé ainsi de son pouvoir disciplinaire.

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en date du 27 mai 2019

Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission, étant observé que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture ne fixe pas les limites du litige et qu'il convient d'examiner les manquements de l'employeur invoqués par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

En matière de prise d'acte de la rupture du contrat de travail, le doute ne profite pas au salarié, sur qui pèse la charge de la preuve des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

A l'appui de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail, M. [N] impute à la société H4H les manquements suivants qu'il estime suffisamment graves pour empêcher la poursuite des relations contractuelles :

- la modification unilatérale du contrat de travail ;

- le non-respect de l'obligation de sécurité ;

- le non-respect du repos dominical ;

- le non-paiement de la part variable de sa rémunération et de ses commissions ;

- l'usage abusif du pouvoir disciplinaire.

La société H4H soutient que M. [N] a pris acte de la rupture de son contrat de travail avec comme unique objectif de détourner la clientèle de son ancien employeur en proposant à celle-ci, et spécialement à la société Sanofi, des prestations par l'intermédiaire de sa propre société, HM Consult.

Elle fait valoir :

- que M. [N] a provoqué délibérément en mars et avril 2019 un conflit avec elle dans la perspective de quitter l'entreprise tout en négociant ses prestations futures avec la société Sanofi pour reprendre, à compter du 14 juin 2019, les fonctions de M. [X], salarié de cette dernière ;

- qu'il a attendu la fin du mois d'avril afin de percevoir sa rémunération variable, laquelle a probablement financé le capital de la société qu'il a créée ;

- qu'il a consulté son avocat au début du mois de mai 2019 afin de formuler sa prise d'acte à la fin du même mois ;

- qu'il a déposé le 10 juin 2019 les statuts de sa société pour poursuivre ses fonctions en qualité de prestataire indépendant pour la société Sanofi sans aucune interruption.

Le juge n'est pas tenu, s'agissant d'une prise d'acte, de rechercher si, comme l'invoque la société H4H, M. [N] a rompu son contrat de travail avec comme unique objectif de détourner la clientèle de son ancien employeur. Il lui appartient seulement de rechercher si les faits invoqués par le salarié justifiaient sa prise d'acte à la date du 27 mai 2019, peu important son comportement postérieur.

La société H4H fait valoir :

- que les objectifs de M. [N] pour l'année 2018 ont été fixés, qu'ils étaient atteignables, que M. [N] disposait de l'ensemble des éléments de facturation de ses interventions et de ceux de son équipe, qu'il a perçu une rémunération variable supérieure à celle qu'il aurait dû percevoir, que M. [N] lui ayant fait part de son désaccord sur le calcul de sa rémunération variable, un entretien a eu lieu le 11 mars 2019 entre le salarié et la direction, suivi d'échanges de courriers électroniques et d'entretiens, dont le dernier en date du 18 avril 2019, qu'elle lui a proposé de lui octroyer la moitié de sa rémunération variable, au-delà de ce qui lui était réellement dû, et de reporter la seconde partie ce celle-ci sur ses objectifs pour l'année 2019, ce que M. [N] semblait avoir finalement accepté, et que des négociations étaient encore en cours au moment où le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail ;

- qu'il était impossible de fixer les objectifs de M. [N] pour l'année 2019 avant que les comptes de l'exercice 2018 soient arrêtés, soit à la fin du mois de mars 2019, de sorte que les discussions n'ont pu débuter qu'au mois d'avril, parallèlement à la fixation de sa rémunération variable pour l'année 2018 et que sa rémunération variable étant annuelle, couvrait nécessairement le premier trimestre de l'année ; qu'elle lui a proposé d'augmenter sa rémunération variable de 23 000 euros pour l'année 2019 et lui a proposé des objectifs pour l'année 2019 ; que compte-tenu des négociations en cours sur la rémunération variable du salarié pour l'année 2018, les objectifs pour l'année 2019 n'étaient pas encore définitivement arrêtés ;

- qu'aucune commission n'était due au salarié, qui n'a généré aucune facturation supplémentaire ou complémentaire ;

- qu'aucune modification de son contrat de travail n'a été imposée au salarié ;

- que l'avertissement notifié au salarié était justifié ;

- que compte-rendu des contacts réguliers que M. [N] entretenait avec la direction de l'entreprise, la seule absence d'un entretien formel d'évaluation de sa charge de travail à l'issue de l'année 2018, qui n'est pas de nature à entraîner la nullité de la convention de forfait et n'a causé aucun préjudice au salarié ne saurait justifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail.

S'il n'est pas démontré que la société H4H a imposé à M. [N] des tâches qui ne relevaient pas de sa qualification et modifié ainsi unilatéralement le contrat de travail de celui-ci, il est établi :

- que la société H4H n'a pas respecté les obligations conventionnelles mises à sa charge par l'article 4.8.3 relatif au forfait annuel en jours de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail dans sa rédaction résultant de l'avenant du 1er avril 2014, manquant ainsi à son obligation de sécurité, et lui a fait supporter, en dépit des alertes qu'il lui a adressées à plusieurs reprises, une charge de travail l'obligeant à effectuer des durées de travail excessives pour parvenir à mener ses tâches à bien ;

- qu'elle n'a pas respecté ses obligations contractuelles concernant le paiement de la part variable de la rémunération pour l'année 2018, de sorte qu'elle est mal fondée à prétendre que M. [N] a délibérément provoqué un conflit concernant sa rémunération variable ;

- qu'elle n'a pas respecté son engagement de verser des commissions au salarié ;

- qu'elle a fait un usage abusif de son pouvoir disciplinaire à son encontre.

Ces manquements pris isolément comme en leur ensemble sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier en conséquence la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié aux torts de l'employeur. Celle-ci produit dès lors les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission et a débouté le salarié de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail.

En application de l'article L. 1234-5 du code du travail, l'indemnité de préavis correspond aux salaires et avantages qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période, fixée à trois mois par la convention collective. Si la rémunération de l'intéressé est composée d'une rémunération fixe et d'une rémunération variable, il convient de se référer à la moyenne annuelle de la rémunération pour calculer le montant de cette indemnité. M. [N] est dès lors bien fondé à prétendre, compte-tenu de la part variable sur objectifs et des commissions qui lui étaient dues, à la somme de 29 524 euros qu'il revendique à titre d'indemnité de préavis ainsi qu'à la somme de 2 952,40 euros au titre des congés payés afférents.

M. [N] qui comptait plus de huit mois d'ancienneté à la date de la rupture de son contrat de travail, a droit à une indemnité de licenciement égale à un quart de mois de salaire par année de service dans l'entreprise et tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines, soit en l'espèce une durée de service de un an et quatre mois. Il est en conséquence bien fondé à prétendre à une indemnité de licenciement de 7 877,03 euros.

Comptant une année complète d'ancienneté et la société H4H employant habituellement au moins onze salariés, ainsi qu'elle l'a mentionné sur l'attestation Pôle emploi, qu'aucun élément contraire ne vient contredire, M. [N] a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont le montant est compris entre le montant minimal d'un mois de salaire brut et le montant maximal de deux mois de salaire brut. Le salaire brut à prendre en compte comprend non seulement le salaire versé au salarié, mais également les rappels de salaire qui lui sont dus. Eu égard au préjudice subi par le salarié, il convient de condamner la société H4H à lui payer la somme de 44 372,64 euros qu'il revendique.

Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé

Le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule constatation de l'inexécution par l'employeur de ses obligations conventionnelles de contrôle de l'amplitude et de la charge de travail privant d'effet de la convention individuelle de forfait.

Il n'est pas établi en l'espèce que la société H4H a, de manière intentionnelle, omis de mentionner sur les bulletins de salaire les heures réellement effectuées par M. [N]. Ce dernier sera en conséquence débouté de sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé sur le fondement de l'article L. 8223-1 du code du travail.

Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos, absence de contrôle et de suivi de la charge de travail et violation du repos dominical

La société H4H ne justifie pas avoir pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail de M. [N] restaient raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail et donc à assurer la protection de la santé du salarié, ce dont il résulte que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.

Il ressort du tableau présenté par M. [N] récapitulant le nombre d'heures qu'il a effectué par semaine civile qu'il a travaillé certaines semaines plus de 48 heures par semaine et n'a pas toujours bénéficié du droit au repos minimal et du droit au repos dominical.

La société H4H ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'elle a respecté ses obligations légales concernant les durées maximales de travail.

Le seul constat du dépassement de la durée maximale du travail ouvre droit à réparation.

La cour fixe le préjudice subi par le salarié, du fait de la fatigue en résultant pour lui, à la somme de 3  000 euros. La société H4H sera en conséquence condamnée à payer ladite somme à M. [N] à titre de dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos, absence de contrôle et de suivi de la charge de travail et violation du repos dominical. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de l'intégralité de sa demande de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral pour rupture brutale et vexatoire ou exécution loyale du contrat de travail

Il n'est pas établi l'existence de circonstances brutales et vexatoires de la rupture ayant causé à M. [N] un préjudice distinct de celui résultant de la perte injustifiée de son emploi ci-dessus déjà réparée par l'allocation d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire.

Aux termes de l'article 1231-6, alinéa 3 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant du retard de paiement de ses créances, peut obtenir des dommages-intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

M. [N] n'établit pas que la société H4H lui a causé, par les manquements qu'elle a commis au cours de l'exécution du contrat de travail, un préjudice distinct du retard de paiement de ses créances et de celui déjà ci-dessus réparé par l'allocation de dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos, absence de contrôle et de suivi de la charge de travail et violation du repos dominical. Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Sur les intérêts

Les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur la remise des documents sociaux

Il convient d'ordonner à la société H4H de remettre à M. [N] un bulletin de paie récapitulatif et des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt. Il n'est pas nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur la demande de dommages-intérêts pour brusque rupture

La société H4H fait valoir que M. [N], dont la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est injustifiée, lui doit en application de l'article L. 1237-1 du code du travail une indemnité égale à trois mois de salaire pour le préavis qu'il n'a pas exécuté, de sorte que l'indemnité pour brusque rupture ne saurait être inférieure à la somme de 31 846,02 euros, calculée sur la base du salaire mensuel brut moyen qui lui a été versé au cours des trois derniers mois.

En l'espèce, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par M. [N], qui a entraîné la cessation immédiate de la relation contractuelle étant justifiée, ne produit pas les effets d'une démission mais celles d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle n'ouvre donc pas droit au profit de l'employeur à l'indemnité prévue par l'article L. 1237-1 du code du travail. La société H4H est dès lors mal fondée à prétendre à l'indemnité pour brusque rupture qu'elle revendique.

Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné M. [N] à verser à celle-ci la somme de 28 750 euros à titre d'indemnité de brusque rupture et l'intimée déboutée de sa demande en paiement de la somme de 31 846,02 euros à ce titre.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

L'action en justice constitue un droit qui ne dégénère en abus qu'en cas de faute. M. [N] voyant ses prétentions pour partie accueillies, la société H4H sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et l'indemnité de procédure

La société H4H, qui succombe pour l'essentiel, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de la condamner, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à M. [N] la somme de 4 000 euros pour les frais irrépétibles qu'il a exposés.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme partiellement le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 17 août 2020 et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant :

Dit que la prise d'acte par M. [I] [G] de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société H4H est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société H4H à payer à M. [I] [G] les sommes suivantes :

*22 442 euros au titre de sa part variable pour l'exercice 2018,

*2 244,20 euros à titre de congés payés afférents,

*102 439,83 euros au titre de ses commissions pour l'exercice 2018,

*10 243,98 euros à titre de congés payés afférents,

*18 333,33 euros au titre de sa part variable pour l'exercice 2019,

*1 833,33 euros à titre de congés payés afférents,

*81 776,62 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

*8 177,66 à titre de congés payés afférents,

*29 524 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

*2 952,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

*7 877,03 euros à titre d'indemnité de licenciement,

*44 372,64 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit au repos, absence de contrôle et de suivi de la charge de travail et violation du repos dominical ;

Déboute M. [I] [G] de sa demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral pour rupture brutale et vexatoire ou exécution loyale du contrat de travail ainsi que de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé ;

Dit que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à la société H4H de la lettre la convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Dit que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

Ordonne à la société H4H de remettre à M. [I] [G] un bulletin récapitulatif, une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un solde de tout compte rectifiés conformes au présent arrêt ;

Dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte ;

Déboute la société H4H de sa demande d'indemnité pour brusque rupture ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Déboute la société H4H de sa demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société H4H à payer à M. [I] [G] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société H4H aux dépens de première instance et d'appel et autorise la Selarl Lexavoue Paris-Versailles, agissant par Maître Martine Dupuis, avocat de M. [I] [G], à recouvrer directement contre la société H4H ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01980
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;20.01980 ?
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