COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53I
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 04 MAI 2023
N° RG 22/00444 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U6ZG
AFFAIRE :
[X] [H]
C/
CAIXA GERAL DE DEPOSITOS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Décembre 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Versailles
N° RG : 20/04084
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 04.05.2023
à :
Me Benoît MONIN, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [X] [H]
né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentant : Me Benoît MONIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 397 - N° du dossier 21190
APPELANT
****************
SOCIÉTÉ CAIXA GERAL DE DEPOSITOS
Société anonyme de droit Portugais, prise en sa succursale située [Adresse 2] à [Localité 7]
N° Siret : 306 927 393 (RCS Paris)
[Adresse 6]
LISBONNE (Portugal)
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 022213 - Représentant : Me Francis BONNET DES TUVES de l'AARPI INFINITY AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne PAGES, Président entendu en son rapport et Madame Florence MICHON, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon convention d'ouverture de compte du 8 janvier 2016, la SAS ERA SIB bénéficiait d'un compte courant n° [XXXXXXXXXX03] dans les livres de la société CAIXA Geral de Depositos (appelée la SA CAIXA).
Ce compte courant était assorti d'une autorisation de découvert à durée indéterminée d'un montant de 50.000 euros, selon convention du 15 décembre 2017 et par acte du 12 décembre 2017 M [X] [H] , en sa qualité de représentant légal de la SARL Mirabelle, elle même présidente de la SAS ERA SIB se portait caution de tous les engagements de la société ERA SIB dans la limite de 65.000 euros en principal, commissions, frais et accessoires, pour une durée de 60 mois.
Le 17 décembre 2018, la SAS ERA SIB remettait un billet à ordre à l'escompte d'un montant de 100.000 euros à échéance au 17 mars 2019, devant être débité sur le compte courant de la SAS ERA SIB.
Le billet à ordre était revêtu de la double signature de M [X] [H] , complété pour chacune du tampon de la ERA SIB, une première apposée en partie droite sur l'emplacement désigné 'signature du souscripteur', et une deuxième en partie gauche, précédée de la mention manuscrite 'bon pour aval'.
Le billet à ordre non réglé à échéance, était débité du compte courant le 17 mars 2019 pour la somme de 100.000 euros.
Par jugement du 1er avril 2019, le tribunal de commerce de Pontoise prononçait la liquidation judiciaire de la SAS ERA SIB.
Par courrier recommandé en date du 17 mai 2019, la SA CAIXA déclarait sa créance à la procédure collective de la SAS ERA SIB pour la somme de 146.501,49 euros au titre du solde débiteur du compte courant et le même jour mettait M [X] [H] en sa qualité de caution en demeure de payer cette somme.
Faute de paiement, la SA CAIXA faisait citer par assignation en date 24 juin 2020 M [X] [H] devant le tribunal judiciaire de Versailles en paiement de différentes sommes en sa qualité de caution et au titre du billet à ordre.
Le jugement contradictoire du tribunal judiciaire de Versailles en date du 9 décembre 2021 a:
Condamné M [X] [H] à verser à la SA Caixa Geral de Depositos la somme de 100.000 euros au titre du billet à ordre, outre intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2019
Débouté M. [X] [H] de sa demande tendant à voir déclarer son engagement de caution disproportionné à ses revenus et biens
Prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA Caixa Geral de Depositos pour la période du 31 mars 2019 au 30 avril 2019, ainsi que des pénalités et intérêts de retards échus entre le 28 février 2019 et le 30 avril 2019
Condamné M [X] [H] à verser à la SA Caixa Geral de Depositos la somme de 44.213,55 euros, au titre de son engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter du 07 juin 2019
Rejeté la demande de délais de paiement présentée par M [X] [H]
Condamné M [X] [H] aux entiers dépens
Condamné M [X] [H] à payer à la SA Caixa Geral de Depositos la somme de 1.200 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile
Rappelé que le présent jugement bénéficie de l'exécution provisoire de droit
Débouté les parties du surplus de leurs demandes.
M [X] [H] a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 21 janvier 2022.
Dans ses dernières conclusions transmises le 15 avril 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M [X] [H], appelant, demande à la cour de :
Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Versailles le 9 décembre 2021
Y faisant droit
Dire et juger que la Caixa a exigé de la part de M [X] [H] un acte de cautionnement disproportionné par rapport à ses revenus et biens
En conséquence,
Débouter la Caixa de sa demande en paiement de la somme de 46 555,04 euros en principal
Dire et juger que l'aval donné par M [X] [H] concernant le billet à ordre était entaché de nullité en raison de son irrégularité et de l'absence de consentement libre et éclairé de M [X] [H]
En conséquence,
Débouter la Caixa de sa demande de condamnation au paiement de 100 000 euros au titre du billet à ordre souscrit le 17 décembre 2018 par la société ERA-SIB
Débouter la Banque de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions
A titre subsidiaire,
Dire et juger que la demanderesse a fait preuve d'une légèreté blâmable dans l'acceptation du cautionnement de M [X] [H] et a manqué à son devoir de conseil engageant à son encontre sa responsabilité civile
Dire et juger, en conséquence, que la Caixa ne pourra se prévaloir de l'engagement souscrit par M [H]
Débouter la Caixa de sa demande en paiement des sommes de 100 000 euros et 46 555,04 euros en principal
Condamner la Caixa à payer à M [X] [H], en conséquence, des dommages et intérêts d'un montant égal aux sommes dues au titre des garanties litigieuses à savoir 100 000 euros et 46.555,04 euros en principal
Débouter la banque de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions
Très subsidiairement,
Dire et juger qu'à défaut de rapporter la preuve du respect de son obligation au titre de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, la demanderesse sera déchue du droit aux intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information, mais également aux accessoires, frais et pénalités éventuels, et les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement bancaire, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette
Dire et juger qu'à défaut de rapporter la preuve du respect de son obligation au titre de l'article L. 333-1 du code de la consommation, la demanderesse sera déchue du droit aux intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information, mais également aux accessoires, frais et pénalités éventuels, et les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement bancaire, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette
Débouter la Caixa de toutes ses demandes au titre des intérêts, accessoires, frais et pénalités
Infiniment subsidiairement,
Accorder un moratoire de 24 mois à M [X] [H] en raison de sa situation personnelle à raison de 23 mensualités de 100 euros et une une 24 ° pour le solde
En tout état de cause :
Condamner la Caixa au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Benoît Monin, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions transmises le 8 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA Caixa Geral de Depositos, intimée, demande à la cour de :
Confirmer dans toutes ces dispositions le jugement rendu le 09 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Versailles sauf en ce qu'il a déchu la Caixa Geral de Depositos de son droit aux intérêts pour la période du 31 mars 2019 au 30 avril 2019, ainsi que des pénalités et intérêts de retards échus entre le 28 février 2019 et le 30 avril 2019
En conséquence, statuant à nouveau,
Condamner M [X] [H] à payer à la Caixa Geral de Depositos les sommes de :
46.555,04 euros au titre de son engagement de caution pris le 12 décembre 2017 outre intérêts au taux conventionnel de 6 % l'an à compter du 17 mai 2019, date de la mise en demeure, jusqu'à parfait paiement
100.000 euros au titre du billet à ordre souscrit le 17 décembre 2018 à échéance du 17 mars 2019 outre intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2019 date de l'échéance du billet, jusqu'à parfait paiement
Condamner M [X] [H] à payer à la Caixa Geral de Depositos la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Le condamner aux entiers dépens.
L'affaire a été clôturée le 7 février 2023, fixée à l'audience du 22 mars 2023 et mise en délibéré au 4 mai 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
À titre liminaire, il sera relevé que le jugement entrepris n'est pas contesté en ce qu'il a retenu que l'admission de la créance de la SA Caixa à la procédure collective de la SAS ERA SIB par ordonnance du juge commissaire du 3 juillet 2020 pour la somme de 146.501,49 euros était opposable à M [X] [H] en sa qualité de garant.
Sur la demande en paiement de la SA CAIXA à l'encontre de M [X] [H] en sa qualité de caution
Le tribunal a retenu qu'il résultait de la fiche de renseignement complétée par la caution lors de la souscription de la garantie l'absence de disproportion manifeste de cet engagement à ses biens et revenus.
En application de l'article L 314-18 devenu l'article L 332-1 du code de la consommation, dans sa version applicable, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Il sera rappelé que par acte du 12 décembre 2017, M [X] [H] s'est engagé en qualité de caution de tous engagements de la SA ERA SIB au profit de la SA Caixa dans la limite de la somme de 65.000 euros.
M [X] [H] fait valoir à nouveau devant la cour la disproportion manifeste de son engagement pour soutenir que la banque ne peut s'en prévaloir.
Il appartient à la caution qui prétend que son engagement est disproportionné d'en rapporter la preuve.
Pour en justifier au soutien de son appel, la caution fait valoir qu'à la date de son engagement de caution, outre les éléments relatifs à son patrimoine portés à la connaissance de la banque par la fiche de renseignements, doivent être pris en compte également les éléments suivants :
il était débiteur d'un contrat de leasing,
il faisait l'objet d'une saisie des rémunérations,
il s'était engagé en qualité de caution auprès de a Banque Populaire ( le 1er mars 2016) à hauteur de la somme de 70.000 euros, de la Société Générale (le 30 mars 2016) à hauteur de la somme de 200.000 euros, de la BNP Paribas à hauteur de la somme de 200.000 euros et de la Caisse d'Epargne (le 27 avril 2016) à hauteur de la somme de 39.000 euros.
Il sera relevé que M [X] [H] ne verse aux débats aucune pièce pour justifier des différents engagements susvisés à la date de son cautionnement.
Il convient de constater, comme relevé par le premier juge que la caution a rempli une fiche de renseignements, désormais versée aux débats en cause d'appel y compris par la caution elle même en pièce n°17.
Il convient de relever que cette fiche est en date du 12 décembre 2017, date du cautionnement, et obligeait M [X] [H] à mentionner l'intégralité de ses biens et revenus ainsi que de ses charges y compris l'existence d'éventuels engagements antérieurs en qualité de caution, une rubrique spécifique étant mentionnée à cette fin sur la fiche, et ce de façon à permettre à la banque d'apprécier si l'engagement de caution de M [X] [H] de 65.000 euros était à cette date adapté à sa situation financière.
Il convient de préciser que cette fiche de renseignements signée par M [X] [H] mentionne au début 'afin de permettre à la SACAIXA d'appréhender ma situation et ainsi apprécier la valeur de mon cautionnement, je certifie que mon patrimoine et mes engagements se présentent à ce jour comme suit; et à la fin 'Je reconnais savoir qu'en cas de non respect de ces dispositions ou inexactitude des renseignements figurant dans la présente déclaration, la SA CAIXA pourra rendre immédiatement exigible sa créance et mettre en jeu mon cautionnement.'
Il en résulte que M [X] [H] s'est expressément engagé à déclarer avec exactitude l'intégralité de ses biens, revenus, charges et engagements à la banque.
Il ne peut dès lors désormais se prévaloir de l'omission de ces différents engagements en qualité de caution ou d'emprunteur à cette date et dont il n'est pas justifié ni même prétendu que la banque en aurait par ailleurs eu connaissance.
Il ajoute que le montant du billet à ordre de 100.000 euros souscrit par la SA ERA SIB et remis à la SA CAIXA en date du 9 décembre 2017, soit avant son engagement de caution litigieux et pour lequel il s'est porté avaliste en sa qualité de représentant de la SAERA SIB, était nécessairement connu par la partie intimée à laquelle il a été remis, bien que non mentionné sur la fiche de renseignements et doit donc être pris en compte pour apprécier la disproportion alléguée.
Il convient de préciser que ce billet à ordre n'est pas celui dont le paiement est sollicité à l'occasion de la présente procédure à hauteur de 100.000 euros par la SA CAIXA à l'encontre de M [X] [H] en sa qualité d'avaliste, étant en date du 17 décembre 2018, soit postérieur au cautionnement litigieux et ne pouvait dès lors être pris en compte pour l'appréciation de la disproportion manifeste de la garantie souscrite par l'appelant le 12 décembre 2017.
Ceci étant rappelé, il convient de relever que pour justifier de ce billet à ordre, l'appelant verse aux débats les pièces n° 9 et 10 : un bordereau de décompte de 100.000 euros au nom de la SA ERA SIB et un courrier de la SA CAIXA adressé à cette dernière du 18 septembre 2018 l'informant avoir porté ce jour au débit du compte de la société la somme de 100.000 euros suite à la remise du billet à ordre du15 juin 2018 n° 0471713.
Force est de constater que ces seuls éléments ne peuvent suffire à établir l'existence d'un engagement de M [X] [H] en qualité d'avaliste de 100.000 euros au profit de la SA CAIXA à une date antérieure au cautionnement contesté du 12 décembre 2017, alors que l'appelant verse aux débats en pièce n° 17 le billet à ordre remis le 17 décembre 2018 à la banque et signé par lui.
En l'absence d'anomalies apparentes résultant de la fiche de renseignements datée du même jour que la garantie, la banque n'avait pas l'obligation de s'assurer, contrairement aux prétentions de l'appelant qu'aucune omission n'entachait la réalité de la situation financière rapportée ou de vérifier l'intégralité des informations communiquées et faute d'un quelconque élément de passif connu par la banque non mentionné sur cette fiche concernant la situation patrimoniale de la caution à cette date, cette dernière se devait d' apprécier l'adaptation de l'engagement de caution de l'appelant au vu des seuls éléments mentionnés sur cette fiche remplie par ce dernier.
La fiche de renseignements mentionne que les charges annuelles de M [X] [H] sont de 22.000 euros et 10.000 euros. Elle précise que ses revenus annuels sont de 100.000 euros. Il sera constaté que ces revenus ne peuvent être qualifiés de revenus escomptés de l'investissement réalisé par la société cautionnée, de telle sorte qu'ils doivent être pris en compte pour apprécier la situation patrimoniale de la caution, ce qui permet d'en déduire que son engagement de caution à hauteur de la somme de 65.000 euros n'était pas manifestement disproportionné à ses biens et revenus susvisés à la date de cet engagement.
La banque peut par conséquent se prévaloir de cette garantie.
Le jugement contesté sera confirmé en ce qu'il a débouté M [X] [H] de sa demande tendant à voir déclarer son engagement de caution disproportionné à ses revenus et biens.
Sur le billet à ordre souscrit par la SA CAIXA
Pour condamner M [X] [H] en sa qualité d'avaliste au paiement de la somme de 100.000 euros, au titre du billet à ordre, le tribunal a retenu qu'il avait à titre personnel signé cet effet en cette qualité.
Au soutien de son appel, M [X] [H] soutient comme devant le tribunal qu'il n'a pas avalisé le billet à ordre litigieux à titre personnel, ne l'ayant signé qu'en sa qualité de représentant légal de la SA ERA SIB, le souscripteur, puisque sur chacune de ses signatures a été apposé le tampon de la société.
Les parties s'accordent quant au fait que le billet à ordre litigieux du 17 décembre 2018 a été signé deux fois par M [X] [H] et que sur chacune de ces signatures a été apposé le tampon de la société y compris pour celle mentionnée dans la partie de l'effet relative à l'avaliste.
Il peut être rappelé que l'aval constitue une garantie personnelle de paiement du titre, donnée en la forme cambiaire, par un donneur d'aval ou avaliste qui garantit que l'effet de commerce sera payé, en tout ou partie, à l'échéance (art. L.511-21, alinéa 1er , de code de commerce).
Lorsque l'aval du dirigeant d'une société est exigé pour garantir un effet de commerce, ce dernier est amené à le signer deux fois, en qualité de représentant légal du tireur et à titre personnel comme avaliste.
La Cour de cassation a jugé à plusieurs reprises qu'une même personne et en la même qualité ne peut être à la fois souscripteur de billet à ordre et donneur d'aval.
En présence de deux signatures identiques, il doit être donné un sens à chacune d'elles.
Il sera précisé que chacune de ces signatures comme préalablement rappelé est complétée par le tampon de la société. M [X] [H] est poursuivi en paiement par la banque en sa qualité d'avaliste. Par sa double signature de l'effet il l'a nécessairement accepté en sa qualité de représentant légal de la société puis avalisé en son nom personnel, et le tampon de la société ajouté à la signature pour l'avaliste ne peut s'interpréter comme signifiant que l'aval aurait été donné par le dirigeant de la société au nom de celle-ci et non pas en son nom personnel dès lors que l'opération qui consisterait pour un souscripteur à avaliser son propre engagement ne présenterait aucun intérêt et serait dépourvu de sens.
Il sera ajouté qu'au soutien de la disproportion de son engagement de caution, l'appelant fait valoir qu'il a signé un billet à ordre en qualité d'avaliste, souscrit par la SA ERA SIB, démontrant ainsi qu'il en connaissait le mécanisme.
Il doit être considéré que par sa double signature du billet à ordre M [X] [H] l'a nécessairement accepté en sa qualité de représentant légal de la SA ERA SIB puis avalisé en son nom personnel.
Pour contester à nouveau sa condamnation au titre du billet à ordre M [X] [H] soutient que cette garantie est nulle, son consentement faisant défaut.
Il fait valoir qu'il n'a jamais eu l'intention de souscrire un billet à ordre, à titre personnel et que l'état de dépendance économique de la société l'a obligé à souscrire une telle garantie.
L'article 1143 du code civil énonce que la violence est une cause de nullité qu'elle ait été exercée par une partie ou par un tiers et qu'il y a également violence lorsqu'une partie abusant de l'état de dépendance dans lequel se trouve son co contractant à son égard, obtient de lui un engagement qu'il n'aurait pas souscrit en l'absence d'une telle contrainte et en tire un avantage excessif.
La seule affirmation de M [X] [H] selon laquelle il n'a jamais eu l'intention d'avaliser le billet à ordre du 17 décembre 2018 ne peut suffire à démontrer que son consentement aurait été vicié alors qu'il en est le signataire et comme préalablement expliqué, la SA ERA SIB ne peut être avaliste, et qu'il affirme par ailleurs qu'il s'était déjà engagé comme avaliste pour un précédent billet à ordre en date du 9 décembre 2017 comme déjà rappelé et avait nécessairement à cette occasion eu connaissance de ce mécanisme en qualité de dirigeant de la société depuis au moins l'année 2000, date de l'immatriculation de la SA ERA SIB.
Il sera ajouté que, les difficultés économiques de la SA ERA SIB à la date du billet à ordre le 17 décembre 2018 prétendues par l'appelant ne sont justifiées par ce dernier par aucun élément et ne peuvent résulter du seul jugement de liquidation judiciaire en date du 1er avril 2019 de cette dernière.
Force est dès lors de constater qu'en l'absence de difficultés économiques de la société établies par M [X] [H], il ne justifie pas des violences alléguée consécutive à cette contrainte économique.
Le jugement contesté sera également confirmé en ce qu'il condamne M [X] [H] à payer à la SA CAIXA la somme de 100.000 euros au titre du billet à ordre.
Sur le devoir de conseil et la légèreté blâmable de la banque
Pour rejeter ce manquement, le tribunal a retenu qu'il n'était pas établi.
M [X] [H] fait à nouveau valoir en cause d'appel, qu'en acceptant le cautionnement litigieux la SA CAIXA a manqué à son devoir de conseil et de mise en garde à son égard, permettant de retenir sa responsabilité et de lui allouer des dommages et intérêts à hauteur de la somme demandée à son encontre en qualité de caution.
Il sera relevé qu'il chiffre sa demande de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 46.555,04 euros, demandée à l'encontre de M [X] [H] en sa qualité de caution mais aussi celle de 100.000 euros demandée à son encontre en sa qualité d'avaliste du billet à ordre.
En raison du principe de non immixtion dans les affaires de son client , il sera rappelé que la banque n'est tenue d'aucun devoir de conseil sauf contrat spécifique conclu avec son client, ce que l'appelant ne justifie pas et ne prétend même pas.
En revanche, la SA CAIXA est tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard de M [X] [H] en sa qualité de caution s'il est justifié par ce dernier qu'il est non avertie et que son engagement n'est pas adapté à ses capacités financières personnelles ou qu'il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt garanti, lequel résulte de l'inadaptation de celui-ci aux capacités financières de l'emprunteur débiteur principal.
Or, force est de constater que l'appelant ne démontre pas que son engagement résultant du cautionnement du 12 décembre 2017 n'était pas adapté à ses capacités financières personnelles. La fiche de renseignements établie à cette même date démontre le contraire comme préalablement expliqué.
Il ne démontre pas davantage que le prêt garanti était inadapté aux capacité financières de l'emprunteur, sa liquidation en date du 1er avril 2019 en l'absence de tout autre élément ne pouvant suffire à en justifier.
Il s'en déduit que quelque soit le caractère avertie ou pas de la caution, la banque n'avait aucune obligation de mise en garde à l'égard de M [X] [H].
Le jugement contesté sera également confirmé en ce qu'il rejette cette demande.
Sur la déchéance du droit aux intérêts
Le tribunal a retenu la déchéance du droit aux intérêts de la banque du 31 mars 2019 au 30 avril 2019 en l'absence d'information de la SA CAIXA adressée à la caution au plus trad le 31 mars 2019.
La banque, fait valoir au soutien de son appel incident qu'aucun défaut d'information ne peut lui être reproché et verse aux débats en pièce n°13 les différentes lettres d'information adressées à la caution.
Il sera rappelé que l'article L 313-22 du code monétaire et financier énonce que les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.
Il convient de constater que la banque verse aux débats les différentes lettres d'information adressées à M [X] [H] en sa qualité de caution de la SA ERA SIB suite à sa garantie du 12 décembre 2017, du 31 décembre 2018, du 31 décembre 2019, du 31 décembre 2020 et du 31 décembre 2021 ainsi que le justificatif de l'envoi par lettre recommandée de chacun de ces courriers.
Il s'en déduit que la banque justifie avoir respecté l'obligation d'information à sa charge en application des dispositions susvisées.
Il sera également rappelé que, l'article art. L. 333-1 du code de la consommation, sans préjudice des dispositions particulières, toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement et l'article L. 343-5 prévoit que lorsque le créancier ne se conforme pas à l'obligation définie à l'article L. 333-1, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.
La banque verse aux débats en pièce n° 9 une lettre recommandée en date du 17 mai 2019 qui est lettre d'information adressée à la caution l'informant de la liquidation judiciaire de la société cautionnée par jugement du 1er avril 2019, constituant la date du premier incident de paiement de cette dernière et en pièce n° 10 une lettre recommandée du 13 juin 2019 adressée à la caution la mettant en demeure de régler la somme de 146.501,49 en sa qualité de garant.
La banque a par conséquent également justifié avoir satisfait à cette seconde obligation d'information.
Le jugement contesté ayant prononcé la déchéance du droit aux intérêts entre le 31 mars 2019 et le 30 avril 2019 ainsi que des pénalités et intérêts de retards échus entre le 28 février 2019 et le 30 avril 2019 sera infirmé et la demande prononcé de la déchéance du droit aux intérêts et pénalités de retard de l'appelant rejetée en totalité.
Il sera fait droit à la demande en paiement de la banque à hauteur des sommes de :
46.555,04 euros en sa qualité de caution, outre intérêts au taux de 6% à compter du 17 mai 2019, date de la mise en demeure
100.000 euros au titre du billet à ordre outre intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2019, date de l'échéance du billet à ordre
Sur la demande de délais de paiement de M [X] [H]
Le tribunal a rejeté la demande de délais de M [X] [H] au motif qu'il n'a versé aux débats aucun élément relatif à sa situation financière.
Il résulte de l'article 1343-5 du code civil que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
En cause d'appel, M [X] [H] ne justifie pas davantage de sa situation financière. Il se contente de faire état de difficultés économiques alors que la partie adverse est un établissement financier, mais ne verse aux débats aucune pièce en ce sens.
Force est de constater que ce dernier ne justifie pas de sa capacité à apurer sa dette dans le délais de deux ans que la cour peut lui allouer en application des dispositions susvisées.
Comme relevé par le tribunal, sa dette est ancienne et il ne justifie d'aucun paiement à ce titre.
Sa demande de délais sera par conséquent rejetée par voie de confirmation.
Aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement contesté en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :
Prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA Caixa Geral de Depositos pour la période du 31 mars 2019 au 30 avril 2019, ainsi que des pénalités et intérêts de retards échus entre le 28 février 2019 et le 30 avril 2019,
Condamné M [X] [H] à verser à la SA Caixa Geral de Depositos la somme de 44.213,55 euros, au titre de son engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter du 07 juin 2019
Statuant à nouveau,
Rejette la demande de prononcé de la déchéance du droit aux intérêts de la SA Caixa Geral de Depositos,
Condamne M [X] [H] à verser à la SA Caixa Geral de Depositos la somme de 46 555, 04 euros, au titre de son engagement de caution, outre intérêts au taux légal à compter 17 mai 2019,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M [X] [H] aux entiers dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,