COUR D'APPEL
DE VERSAILLES
Code nac : 14G
N° 274
N° RG 23/04560 - N° Portalis DBV3-V-B7H-V6YM
Du 09 JUILLET 2023
ORDONNANCE
LE NEUF JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS
A notre audience publique,
Nous, Luc SALEN, Président à la cour d'appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président afin de statuer dans les termes de l'article L 743-21 et suivants du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Jeannette BELROSE, Greffier, avons rendu l'ordonnance suivante :
ENTRE :
Monsieur [J] [Z]
né le 29 Septembre 1989 à [Localité 4]
de nationalité Lybienne
CRA [Localité 3]
Comparant, assisté de Me Maud TROALEN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 309, commis d'office, et par monsieur [V] [X], interprête en langue arabe, assermenté
DEMANDEUR
ET :
Monsieur le préfet du Val de Marne
représenté par Me Hedi RAHMOUNI, avocat au barreau de PARIS
DEFENDRESSE
Et comme partie jointe le ministère public absent
Vu les articles L. 741-1 et suivants, L.743-4 et suivants, et R. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'obligation de quitter le territoire français du 29 juin 2023 et notifiée par le préfet du Val d'Oise le 5 juillet 2023 à M. [J] [Z] ;
Vu la décision de placement en rétention administrative dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire prise le 5 juillet 2023 et notifiée par l'autorité administrative à l'intéressé le même jour à 10h26 ;
Vu la requête de monsieur [J] [Z] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative du 6 juillet 2023 ;
Vu la requête du préfet du Val d'Oise tendant à la prolongation de la rétention administrative de M. [J] [Z] pour une durée de vingt-huit jours en date du 7 juillet 2023 ;
Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Versailles du 8 juillet 2023 qui a déclaré la requête en prolongation de la rétention administrative recevable, déclaré la procédure diligentée à l'encontre de M. [J] [Z] régulière, et prolongé la rétention de M. [J] [Z] pour une durée de vingt-huit jours à compter du 7 juillet 2023 à 10h26 ;
Le 8 juillet à 12h33, M. [J] [Z] a relevé appel de cette ordonnance prononcée en sa présence, décision qui lui a été notifiée le même jour ;
Il sollicite, dans sa déclaration d'appel, l'annulation de l'ordonnance, à titre subsidiaire la réformation de l'ordonnance et la fin de la rétention. A cette fin, s'agissant de la prolongation de la rétention, il soulève l'absence de la copie du registre de rétention dans la requête de la préfecture, l'illégalité du recours à la visioconférence et l'atteinte à la publicité des débats dans un local non habilité ainsi que l'absence de diligences effectuées par l'administration lors de la prolongation de la rétention. S'agissant de la décision de placement en rétention, il soulève l'absence de motivation en fait et en droit, la mesure d'éloignement ne pouvant aboutir dans le délai légal d'une part, l'autorité préfectorale n'ayant pas pris en compte son état de vulnérabilité d'autre part.
Les parties ont été convoquées en vue de l'audience du 9 juillet 2023 à 10 heures.
A l'audience, le conseil de M. [J] [Z] a soutenu le moyen contenu dans la requête tenant à l'absence de diligences effectuées par l'administration lors de la prolongation de la rétention. Il a par ailleurs soutenu le moyen tenant au fait que l'administration ne pourra pas mettre en 'uvre la mesure d'éloignement dans une perspective raisonnable ou à brefs délais et a sollicité le placement de monsieur [Z] sous assignation à résidence compte tenu de l'existence d'une adresse. Il a renoncé aux autres moyens indiqués dans la requête.
Le conseil de la préfecture s'est opposé aux moyens soulevés et a demandé la confirmation de la décision entreprise, en faisant valoir qu'il s'agit d'une première requête en prolongation de la rétention, que les diligences de l'administration à l'égard du consulat libyen ont été menées et que l'identité de monsieur [J] [Z] ne repose que sur ses déclarations, l'intéressé étant démuni de passeport et ne pouvant justifier d'une adresse vérifiée.
Monsieur [Z] a indiqué qu'il est fatigué, malade et qu'il vient de sortir de l'hôpital.
SUR CE
Sur la recevabilité de l'appel
En vertu de l'article R 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel dans les 24 heures de son prononcé, ce délai courant à compter de sa notification à l'étranger lorsque celui-ci n'assiste pas à l'audience.
L'article R 743-11 du même code prévoit que le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.
En l'espèce, l'appel, a été interjeté dans les délais légaux et il est motivé.
Il doit être déclaré recevable.
SUR LE FOND
Sur le moyen tiré de l'insuffisance des diligences effectuées par l'administration et le défaut de mise en 'uvre de la mesure d'éloignement à brefs délais
Aux termes de l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être placé en rétention que le temps nécessaire à son départ et l'administration doit exercer toutes diligences à cet effet.
Il résulte des pièces du dossier que l'intéressé est sans emploi, ne présente pas de passeport en cours de validité et s'est soustrait à deux reprises en 2019 et 2022 à une obligation de quitter le territoire français ; que par ailleurs, monsieur [Z] ne justifie pas d'une résidence effective même s'il indique opportunément à l'audience disposer d'une adresse à [Localité 2], lieu où résiderait sa fiancée ; qu'il convient de constater en effet que l'intéressé a déclaré être sans domicile fixe lors de la levée d'écrou de l'établissement pénitentiaire de [Localité 1] le 5 juillet 2023. Dans ces conditions, il ne remplit donc pas les conditions préalables à une assignation à résidence. Il importe en conséquence de permettre à l'autorité administrative d'effectuer toutes démarches utiles auprès des autorités consulaires compétentes de façon à mettre en 'uvre la décision de reconduite à la frontière qui a été prise.
En l'occurrence, l'autorité préfectorale du Val d'Oise a, dès le 5 juillet 2023, effectué une demande de délivrance d'un laisser-passer au nom de l'intéressé se déclarant de nationalité libyenne aux autorités consulaires libyennes.
L'autorité administrative justifie ainsi des diligences nécessaires à la première prolongation de la rétention de monsieur [Z] dans l'attente de la délivrance du laisser-passer au nom de l'intéressé par le consulat libyen, monsieur [Z] se revendiquant de nationalité libyenne sans en justifier en l'état des investigations de la préfecture du Val de Marne.
Il convient en outre de rappeler que le Préfet n'a aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires et qu'il ne peut pas lui être reproché l'absence de réponse des autorités consulaires lors de ses saisines antérieures pour la délivrance d'un laisser-passer.
Le renouvellement de cette demande permet précisément de s'assurer de la mise en 'uvre de la mesure d'éloignement dans des délais rapprochés.
Les moyens seront rejetés.
Sur la compatibilité de la rétention administrative avec l'état de santé de monsieur [Z]
Par ailleurs, monsieur [Z] a fait état de son état de santé ; si les documents médicaux versés aux débats attestent que monsieur [J] [Z] a été hospitalisé pour une pleuropneumopathie infectieuse du 25 février 2021 au 15 mars 2021 et a fait l'objet de plusieurs passages aux services des urgences pour des échographies abdominales, aucun certificat médical ou document n'est versé aux débats pour attester que monsieur [Z] est toujours suivi médicalement ni n'établit que son état de santé est incompatible avec la rétention ou que celle-ci pourrait porter une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Il peut également être rappelé que les personnes retenues ne sont pas privées de soins.
Le moyen sera rejeté.
Sur la demande d'assignation à résidence
Comme cela a été précédemment exposé, monsieur [Z] ne présente pas de passeport en cours de validité et s'est soustrait à deux reprises en 2019 et 2022 à une obligation de quitter le territoire français ; par ailleurs, monsieur [Z] ne justifie pas d'une résidence effective et il ne remplit donc pas les conditions préalables à une assignation à résidence.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare le recours recevable en la forme,
Rejette les moyens soulevés,
Confirme l'ordonnance entreprise.
Fait à VERSAILLES le 9 juin 2023 à 11h55
Et ont signé la présente ordonnance, Luc SALEN, Président et Jeannette BELROSE, Greffier
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Pour information:
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.