COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
Chambre sociale 4-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 30 MAI 2024
N° RG 22/01299 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VEWZ
AFFAIRE :
[N] [U]
C/
SAS LABORATOIRES ALCON
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Mars 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
N° Chambre :
N° Section : E
N° RG : F14/03516
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Clément RAINGEARD de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT
Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [N] [U]
né le 11 Octobre 1983 à
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Clément RAINGEARD de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 88 - substitué par Me Sarah ALONSO avocat au barreau de VERSAILLES
APPELANT
****************
SAS LABORATOIRES ALCON
N° SIRET : 652 009 044
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0480 -
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile CRIQ, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Nathalie COURTOIS, Président,
Madame Véronique PITE, Conseiller,
Madame Odile CRIQ, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI
FAITS ET PROCÉDURE
M. [N] [U] a été engagé en qualité de responsable de la rémunération et des avantages sociaux ' responsable des ressources humaines, statut cadre, par la société Laboratoires Alcon, selon contrat à durée indéterminée à compter du 24 octobre 2012.
Le société Laboratoires Alcon a pour activité le commerce de produits pharmaceutiques, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective de l'industrie pharmaceutique.
En dernier lieu, à compter du 1er octobre 2013, M. [U] occupait les fonctions de responsable des relations sociales / rémunérations & avantages sociaux.
Convoqué le 7 août 2014 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 11 septembre suivant, auquel il ne s'est pas présenté, M. [U] a été licencié par courrier du 8 octobre 2014 énonçant une cause réelle et sérieuse (insuffisance professionnelle).
M. [U] a saisi, le 3 décembre 2014, le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins d'obtenir la requalification de son licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que la condamnation de la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi la société s'est opposée.
Par jugement rendu le 1er mars 2022, notifié le 24 mars 2022, le conseil a statué comme suit :
Juge le licenciement de M. [U] fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Déboute M. [U] de l'ensemble de ses demandes.
Déboute la société Laboratoires Alcon de sa demande reconventionnelle ;
Dit que les dépens seront à la charge de la partie qui succombe.
Le 20 avril 2022, M. [U] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
' Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 22 décembre 2022, M. [U] demande à la cour de :
Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
Jugé le licenciement de M. [U] fondé sur une cause réelle et sérieuse
Débouté M. [U] de l'ensemble de ses demandes ;
Statuant à nouveau
Dire recevable et bien-fondé M. [U] en ses conclusions ;
Fixer la moyenne mensuelle des salaires de M. [U] à la somme de 6.761,41 euros ;
Dire et juger le licenciement de M. [U] abusif ;
En conséquence,
Condamner la société Laboratoires Alcon à verser à M. [U] les sommes suivantes :
Dommages et intérêts pour licenciement abusif : 81.136,92 euros
Dommages et intérêts pour préjudice moral distinct : 40.000 euros
Article 700 du code de procédure civile : 40.000 euros
Condamner la société Laboratoires Alcon aux entiers dépens.
' Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 17 octobre 2022, la société Laboratoires Alcon demande à la cour de :
Recevoir la société Laboratoires Alcon en ses écritures et l'y déclarer bien fondée ;
Par conséquent :
A titre principal :
Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 1er mars 2022 ;
Débouter M. [U] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
En tout état de cause,
Condamner M. [U] à payer à la société Laboratoires Alcon, la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés pour ceux d'appel par la SELARL BDL
Avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par ordonnance rendue le 10 janvier 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 4 mars 2024.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
MOTIFS
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement est ainsi libellée :
« Monsieur,
Comme suite à notre entretien le 11 septembre dernier, nous vous informons par la présente que nous sommes au regret de procéder à votre licenciement pour le motif dont nous nous sommes entretenus lors dudit entretien.
Je me permets de vous rappeler que vous avez été engagé le 24 octobre 2012, en qualité de « Responsable de la Rémunération et des Avantages Sociaux - Responsable des Ressources Humaines », statut cadre, avant de devenir « Responsable des Relations Sociales / Rémunérations & Avantages Sociaux », suite à vos sollicitations auprès de mon prédécesseur, à compter du 1er Octobre 2013.
Il est à noter qu'outre votre formation initiale de base (Master 2 Professionnel Ressources Humaines), l'expérience professionnelle acquise précédemment à votre arrivée au sein de la société nous permettait d'attendre une réelle pertinence et efficacité dans le cadre des missions confiées.
Pourtant, force est de constater que vous avez trop souvent, et à répétition, fait preuve d'une grande légèreté dans l'exercice de vos missions, puisque nous n'avons pu que constater un réel manque d'organisation, d'anticipation / proactivité, de réactivité et même de suivi des dossiers dont vous aviez la charge.
Vous n'êtes pas sans savoir que les partenaires sociaux au sein des Laboratoires Alcon ont pointé du doigt votre manque de rigueur, exprimant à plusieurs reprises leurs exaspérations face à votre attitude et votre manière d'appréhender votre/vos rôle(s).
L'absence de retour de votre part suite aux questions qu'ils pouvaient être amenés à poser, et alors même que j'ai été amenée à vous reprendre sur le sujet à plusieurs reprises, quand j'en étais avisée, était et est toujours préjudiciable à l'entreprise.
La non anticipation de l'établissement des ordres du jour des réunions avec les instances ou de l'organisation de ces dernières alors même que les dates de réunion sont planifiées, ont entrainé à maintes reprises des plaintes des membres élus ou désignés, m'amenant à devoir présenter des excuses au nom de la Direction. Pourtant, je vous avais expressément demandé de fixer des dates de rendez-vous avec les Secrétaires des Instances Représentatives, pour éviter d'être « trop juste » voir hors délais dans l'envoi des convocations.
Cela n'a malheureusement pas empêché de devoir décaler une réunion de CHSCT cet été, puisque vous n'aviez pas respecté les délais requis d'établissement et d'envoi de l'ordre du jour. L'un des membres a d'ailleurs clairement exprimé son ras le bol de la situation, le changement de date, alors qu'il s'était organisé sur la base du calendrier fixé, impactant son activité professionnelle.
Vous n'êtes pas sans savoir qu'il m'avait fallu rattraper cette situation et convaincre le Secrétaire d'accepter de signer un ordre de jour de réunion pour une date initialement non prévue, et ce malgré le fort agacement qui avait été remonté.
Nous vous rappelons que certains élus avaient également été amenés à faire appel à la Direction du fait d'oublis et/ou d'erreurs dans leurs rémunérations, les augmentations de salaires qui leur avaient été actées ne reflétant pas les engagements qui avaient été pris par l'entreprise.
Au-delà de l'absence de contrôle des données transmises (et que vous aviez établies), ce qui est difficile à comprendre au regard de votre rôle de Responsable Rémunérations et Avantages Sociaux, c'est votre manque de réactivité à leurs demandes d'explications et de révisions des éléments qui a été pointée du doigt.
J'avais, je vous le rappelle, été obligée d'intervenir en réunion pour les rassurer et m'engager à ce que leur situation soit revue dans les meilleurs délais, des corrections ayant dû de fait être opérées.
J'ai été à même d'intervenir quand j'étais avisée de problèmes spécifiques, mais ne peux manquer de trouver des plus regrettables votre incapacité à respecter une demande pourtant simple : établir un compte rendu des réunions avec les partenaires sociaux, au cours desquelles vous représentiez la Direction, afin de m'informer des points « sensibles » nécessitant un retour potentiel vers les élus et éventuellement amener des actions.
Dans le même ordre d'idée, l'absence de compte rendu DP, alors même que je vous ai plusieurs fois rappelé cette obligation n'est pas acceptable. Si vous avez objecté lors de nos échanges à ce sujet, qu'il n'y avait jamais eu de points abordés, j'ai été amenée, dernièrement encore, à vous remémorer qu'au minimum, le point relatif à la période des congés payés avait été évoqué, et que pourtant aucun compte rendu n'avait été établi.
Pour autant, je vous ai sollicité le mois dernier pour l'établissement de chacun des comptes rendus, en y portant s'il y avait lieu la mention « pas de question », ainsi que la liste des participants afin de pouvoir disposer des documents obligatoires requis prouvant l'organisation desdites réunions Cette demande est restée, comme d'autres malheureusement non suivie d'effet.
Votre absence de préparation, de contrôle, d'attention, voire votre légèreté dans l'application de consignes pourtant claires ont amenés bon nombre de difficultés qu'il aura fallu traiter :
-Commission de Suivi du PSE : votre absence de préparation des dossiers a été remonté tant par le Cabinet de Reclassement que les partenaires sociaux.
Vous avez régulièrement négligé de faire / transmettre les comptes rendus, et d'informer, tant les collaborateurs impactés par le PSE que vos collègues de l'équipe RH des suites données aux dossiers étudiés en Commission.
- Organisation des Elections.
Il a fallu, en catastrophe, que je puisse convaincre les Organisations Syndicales d'accepter de signer un accord de prorogation des mandats, alors même que vous étiez parfaitement informé que ces derniers allaient tomber. Ce sujet sensible ne vous a pas empêché de négliger les formalités de dépôt de l'accord, qui ont été opérées très en retard puisque près de 2 mois après la signature des accords, et alors même que d'autres négociations étaient en cours.
Dans le cadre de l'accord de prorogation des mandats qui a été négocié en votre présence, il a été expressément convenu avec les partenaires sociaux d'une date en vue de la négociation du protocole électoral sur mi-juillet 2014. Il m'a fallu à plusieurs reprises vous relancer en juin sur le sujet, exigeant au final que vous fassiez partir les convocations aux Organisations Syndicales au plus tard le 16 juin pour ne pas avoir une nouvelle fois à être mis à défaut dans le cadre des engagements pris.
Malgré un point fait le 8 août 2014, et un recadrage formel quant aux attentes qui avaient déjà été formulées et à l'absence de retour sur les demandes, nous avons dû improviser, début septembre, en votre absence: les panneaux d'affichages à destination des OS, malgré la mention explicite de ce point lors de la réunion de négociation du protocole électoral, n'étaient pas accessibles ou disponibles, et aucune communication à destination des collaborateurs n'avait été préparée en vue de les informer des listes de candidature transmises par les OS.
Vous ne vous êtes pas non plus préoccupé de l'obligation, figurant pourtant dans le protocole électoral, de transmettre, le jour butoir de dépôt des listes, l'information des listes présentées à l'ensemble des OS. Vous le saviez, le dossier le plus sensible de cette année était directement en lien avec le projet de réallocation de ressources et donc le Plan Social.
En tant que Responsable des Relations Sociales, vous deviez être particulièrement attentif au sujet.
Pourtant nous n'avons pu que constater des manquements qu'il a fallu « rattraper »
Dépôt de l'Accord Majoritaire : tout avait été fait en vue d'avoir l'ensemble des signatures requises avant envoi à la DIRECTE des documents nécessaires à l'étude d'une demande d'homologation Les services concernés vous avaient contacté après réception, car des données étaient manquantes. Pourtant, j'ai personnellement dû traiter le dossier avec Mme [W], Inspectrice du Travail, qui n'avait toujours pas la possibilité de se prononcer sur le dossier puisque les éléments complémentaires réclamés ne leur étaient toujours pas arrivés après plusieurs jours. J'ai dû faire le nécessaire, le jour même de sa prise de contact, dès la prise de connaissance de l'absence de retour de votre part auprès de ses services, pour adresser les documents requis. J'ai également dû insister auprès d'elle pour pouvoir disposer rapidement de la décision de ses services, limitant au final à 15 jours le retard induit au niveau de l'homologation de notre PSE. Malgré divers engagements de votre part, aucune estimation des impacts financiers n'a été fournie et ce alors même que vous avez été relancé.
Vous n'avez pas suivi les dossiers liés au déploiement du PSE : Vous n'avez pas jugé utile de contrôler les dates d'envoi et de réception des courriers RAR adressés aux salariés, alors même que ces éléments se trouvaient être sensibles et déterminaient les suites des procédures à engager.
Vous avez négligé les étapes de communication des propositions obligatoires de reclassement et questionnaires de mobilité,
Les éléments indispensables à l'application des critères d'ordre n'étaient pas à jour fin mai, alors que vous étiez sensé vous être isolé, avec une de vos collaboratrices fin mars 2014 pour totalement finaliser ces points. Vous avez établi des courriers de notification de licenciement en portant des adresses erronées. Il a fallu que j'apporte des corrections en cherchant à respecter les plannings fixés.
Vous avez rédigé et adressé des courriers de notification comportant des durées de préavis erronés, et n'avez pas été à même, quand je vous en ai alerté, d'apporter un solutionnement pertinent et rapide. Il a fallu là encore que je vous dise quoi faire.
Les procédures de licenciement des salariés protégés ont nécessité systématiquement que l'on vous rappelle les obligations de l'employeur, alors même que vous disposiez du détail des procédures à respecter.
Dans le cadre du licenciement d'un salarié protégé (M. [A]) je vous avais sollicité face à l'absence de retour de l'Inspection du Travail, alors que le délai prévu pour formulation de l'autorisation de licenciement était dépassé. Malgré des relances multiples, j'ai été amenée à directement contacter l'Inspecteur du Travail, pour constater qu'il s'agissait d'un simple oubli de sa part.
De nombreux collaborateurs impactés par le PSE ont remonté vos absences de réponses aux questions qui vous étaient formulées, malgré des relances. Certains, quand ils ont eu la chance d'obtenir un retour de votre part, ont été confrontés à des réponses erronées pouvant fortement les impacter. D'autres se sont trouvés en grande difficulté quant à leurs projets de formation, du fait de votre absence de traitement de leurs dossiers, d'inscriptions et/ou de paiement des frais, et ce malgré la parfaite connaissance de vos obligations.
Je me dois également de mentionner que vous avez négligé de participer à des formations auxquelles vous vous étiez inscrit, votre absence n'ayant été communiquée ni aux organisateurs, ni à votre hiérarchie
Malgré les rappels à l'ordre, nous ne pouvons malheureusement que constater votre incapacité à exécuter de manière satisfaisante les tâches qui vous ont été confiées.
Votre compétence se trouve de fait mise en cause, au travers de votre manque d'efficacité, de votre manque de motivation, voire de votre inaptitude à exécuter de façon satisfaisante des missions qui correspondent pourtant à vos qualifications et à votre niveau d'emploi. [...] ».
Sur la notification verbale du licenciement :
Le salarié soutient que son licenciement a été annoncé lors d'une réunion avec l'équipe de ressources humaines le jeudi 9 octobre 2014 alors que le courrier qui datait du 8 octobre 2014 a été envoyé le 10 octobre suivant.
La société intimée conteste tout licenciement verbal. Elle oppose que M. [U] n'apporte aucun témoignage des personnes de l'équipe des ressources humaines présentes selon lui lors de la réunion du 9 octobre 2014, non plus qu'aucune preuve de la tenue d'une telle réunion.
La société observe que M. [U] ne démontre pas, comme il le prétend que la lettre de licenciement lui a été adressée le 10 octobre 2014.
La société fait valoir que M. [U] tente de détourner le sens des termes du courrier qu'elle adressait au salarié le 27 octobre 2014 en réponse à la lettre de contestation de ce dernier en indiquant qu'une décision avait été prise sans nullement lui en donner la teneur.
Le licenciement oral est caractérisé lorsque l'employeur manifeste au salarié la volonté non équivoque de mettre fin de façon irrévocable au contrat de travail sans respecter les exigences légales et jurisprudentielles de motivation de la rupture, l'employeur ne pouvant régulariser ce licenciement verbal par l'envoi postérieur d'une lettre de licenciement. La charge de la preuve du licenciement oral repose sur le salarié.
Au soutien de sa demande, le salarié produit aux débats une lettre que lui a adressée la société le 27 octobre 2014, répondant au courrier de M. [U] du 15 octobre 2014 en contestation de son licenciement, courrier aux termes duquel la société indiquait en ces termes : « Vous estimez ensuite être « scandalisé » par la prétendue notification orale de votre licenciement le jeudi 9 octobre en fin de journée. À vous lire, c'est pourtant bien par courrier du 8 octobre 2014 que votre licenciement vous a été notifié quand bien même l'avez-vous reçu le 11 octobre 2014 jour de votre anniversaire. Ce que vous estimez être une notification orale de votre licenciement assortie d'une interdiction de revenir les jours suivants n'était rien d'autre que la précaution que nous avons souhaité prendre de vous informer qu'une décision sans en préciser la nature, avait été prise vous concernant et qu'un courrier vous avait été adressé à cet effet. ».
Tel que relevé à juste titre par la société, M. [U] ne produit au soutien de son allégation aucun témoignage de l'équipe des ressources humaines ayant participé à la réunion du jeudi 9 octobre 2014 au cours de laquelle aurait été annoncé son licenciement.
Or, si la société a reconnu aux termes de son courrier du 27 octobre 2014 adressé au salarié l'avoir informé qu'une décision avait été prise le concernant sans en préciser la nature et qu'un courrier lui avait été adressé à cet effet, elle contestait toute notification orale du licenciement.
A défaut de précision apportée par la société aux termes de ce courrier quant à l'objet de la décision évoquée, force est de relever que la preuve n'est pas apportée par M. [U] de ce que la société lui aurait manifesté oralement la rupture de son contrat de travail avant la notification de la lettre de licenciement.
Ce moyen n'est pas établi.
Sur le bien-fondé du licenciement :
Rappelant avoir été promu au poste de « responsable des relations sociales / rémunération et avantages sociaux » à compter du 1er octobre 2013, et n'avoir jamais occupé un poste en lien avec les relations sociales auparavant, M. [U] soutient n'avoir jamais reçu aucune formation en interne ou en externe sur les thématiques des relations sociales, alors que celles-ci nécessitent des compétences en ressources humaines, mais aussi une maîtrise juridique du droit du travail.
M. [U] soutient avoir pris ses fonctions dans un contexte de surcharge de travail alors qu'un vaste plan de sauvegarde de l'emploi -PSE- était mis en place et concernait une soixantaine de salariés. M. [U] souligne un contexte particulièrement complexe et tendu.
M. [U] indique avoir dû assurer sur une courte période de six mois les missions suivantes alors qu'il avait un profil novice :
-L'organisation de l'ensemble des réunions des institutions représentatives du personnel,
-La fixation de la procédure relative au PSE avec les différentes étapes en distinguant les salariés protégés des autres et les négociations d'un accord majoritaire PSE,
- La négociation de l'accord PSE,
- La conclusion de l'accord PSE,
- L'homologation de cet accord majoritaire,
- La communication et volet juridique nécessaire au plan,
- La tenue des commissions de suivi différentes relatives à deux PSE successifs,
- La négociation et signature d'un accord de prorogation des mandats,
- La négociation d'un protocole d'accord préélectoral,
- L'organisation des élections professionnelles pour une population répartie dans toute la France,
- La finalisation d'un processus d'harmonisation des statuts,
- La négociation d'un accord d'intéressement,
- La mise en 'uvre du télétravail.
La société objecte que si M. [U] a été promu au poste de responsable relations sociales eu égard à ses résultats satisfaisants dans les fonctions occupées lors de son embauche, il n'a pas été en mesure de répondre aux attentes de l'entreprise dans le cadre de l'exercice de ses nouvelles fonctions.
En vertu de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Aux termes de l'article L. 1235-1 du même code, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi, l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
L'insuffisance professionnelle se caractérise par l'incapacité du salarié à exercer de façon satisfaisante ses fonctions, par manque de compétences. L'insuffisance professionnelle relève de l'appréciation de l'employeur, mais ce dernier doit néanmoins s'appuyer sur des faits objectifs et matériellement vérifiables. En outre, l'employeur ne peut licencier un salarié pour insuffisance professionnelle que s'il lui a donné les moyens d'exercer sa mission et laissé le temps de devenir opérationnel, et si les objectifs qu'il lui a fixés étaient réalisables.
Sur l'organisation des élections professionnelles 2014.
La société soutient que Mme [B], responsable hiérarchique du salarié, a dû remplacer ce dernier afin que la date limite soit respectée pour transmettre aux élus les listes électorales définitives et le justificatif de dépôt des listes.
Si la société justifie par la production d'un mail de Mme [B] daté du 3 septembre 2014 de l'intervention de celle-ci pour diffuser les listes électorales et le justificatif du dépôt de ces listes, tel que justement observé par le salarié, il résulte d'un mail du 12 août 2014 de la responsable que M. [U] a bien pris part à l'organisation des élections, tout comme Mme [Z], juriste, sans que ne soit établi par la société que M. [U] ait été exclusivement en charge de l'organisation des élections professionnelles.
Ce grief n'est pas établi.
Sur le dépôt de l'accord de prorogation des mandats.
La société reproche à M. [U] d'avoir négligé les formalités de dépôt de l'accord, lesquelles auraient été effectuées près de deux mois après sa signature.
La société produit aux débats (pièce n° 16 de la société intimée) un message de Mme [B] du 25 mars 2014 adressé aux représentants du personnel aux termes duquel elle énonce s'agissant du dossier des prorogations des mandats : « Je me permets de reprendre en direct ce dossier au vu du peu d'avancée vous ayant été communiqué à cette date. Je remercie d'ailleurs [V] qui m'a sollicitée dans le cadre d'une problématique spécifique non anticipée, et qui du coup m'a incitée à reprendre ce dossier directement. (') Il me paraît évident que nous devions revenir vers vous et regrette que vous disposiez des informations si tardivement. ».
Bien que M. [U] ne conteste pas avoir eu la charge de ce dossier, il dénie toute imputabilité du retard dans les formalités de dépôt de l'accord, en alléguant sans être utilement contredit par l'employeur sur ce point que l'accord a été signé pendant ses congés.
Par ailleurs, il ne résulte pas des pièces versées aux débats que le salarié a été informé lors de son retour de vacances de la signature de l'accord ou qu'il ait été saisi d'une demande de diligence par l'employeur pour qu'il soit procédé sans délai au dépôt de l'accord de prorogation des mandats.
Ce grief n'est pas établi.
Sur l'organisation des réunions avec les instances représentatives du personnel :
La société produit aux débats :
-le compte rendu de réunion du CHSCT du 23 juin 2014 (pièce n°1) duquel il résulte que la délégation dit déplorer les changements incessants de date de réunion du CHSCT, que la direction présente ses excuses en faisant part de son souhait que les dates initialement fixées soient dorénavant respectées et que la direction s'engage à ce que l'ordre du jour des réunions soit signé dans les deux semaines et demi avant la tenue de la réunion.
- le compte rendu de réunion du CHSCT du 24 mars 2014 (pièce n° 2) duquel il résulte que la réunion ordinaire du CHSCT suivant avait été fixée au 17 juin 2014.
-un courriel de Mme [G], secrétaire, adressé le 7 mai 2014 à M. [U] (pièce n° 3) indiquant n'avoir eu aucun retour sur la demande officielle d'un CHSCT extraordinaire formulée lors de la réunion du 3 avril. Mme [G] précisait en ces termes : « Lors de nos échanges sur le règlement intérieur, vous nous avez fait part que la direction doit organiser la réunion dans les meilleurs délais. Il me semble que les meilleurs délais ne sont pas respectés. Merci d'organiser cette réunion avant la fin du mois de mai. ».
Il ressort de ces pièces que les dates des réunions du CHSCT n'étaient pas respectées et ont donné lieu à plusieurs changements de la part de M. [U].
Le manquement est constitué.
Sur les oublis ou erreurs dans la rémunération de certains élus :
La société produit aux débats un courriel (pièce n°55) de Mme [B] adressé à M. [U] le 5 mai 2014 aux termes duquel la responsable hiérarchique du salarié interpelle ce dernier sur des modifications récurrentes et des problèmes de calcul portant sur des rattrapages de salaire et / ou des primes pour les élus (Mme [I], Mme [G], M [C] et M. [R]).
Les oublis et les erreurs reprochés sont implicitement confirmés par les termes du mail en réponse que M. [U] adressait à sa responsable le 5 mai 2014, ce dernier faisant état pour Mme [I] d'une modification du calcul de son augmentation, pour Mme [G] d'un rattrapage d'augmentation et pour M. [C] et M. [R] d'un rattrapage de prime.
C'est vainement que M. [U] conteste toute imputabilité de ces erreurs, alors qu'il était responsable rémunérations et avantages sociaux et qu'il n'en attribue l'origine à aucun élément extérieur.
Ce grief est constitué.
Sur l'absence de compte rendu DP :
La société justifie par la production aux débats (pièce n°9) d'un courriel du 23 septembre 2014 adressé au salarié par Mme [B], d'une demande réitérée en ces termes : « J'aimerais également avoir enfin les comptes rendus des réunions auxquelles je n'ai pas assisté dans leur totalité, cela éviterait d'avoir des affirmations contradictoires. ».
M. [U] qui allègue avoir eu en charge l'organisation de plus d'une soixantaine de réunions avec les instances représentatives du personnel, ne produit aux débats que trois comptes rendus des réunions du 25 juin 2014, et des 17 et 22 juillet 2014.
Alors que le salarié ne justifie pas avoir répondu à la demande de sa responsable hiérarchique d'aucune façon, il n'établit pas tel qu'allégué, que la demande de Mme [B] portait sur la transmission de comptes rendus de réunions auxquelles il n'avait pas personnellement assisté.
Ce grief est établi.
Sur la commission de suivi du PSE.
La société reproche au salarié sa négligence dans la préparation des dossiers étudiés dans le cadre de la commission de suivi du PSE, sa carence dans la transmission des comptes rendus, et dans l'information des collègues et des collaborateurs concernés par le PSE.
La société allègue et justifie que :
- qu'un licenciement a été notifié à un salarié, alors que son plan de départ volontaire avait été validé ( pièce n° 10).
- l'organisme de formation choisi par un salarié n'avait pas été payé, de sorte que ce dernier a failli voir sa convention de stage annulée, Mme [Z], juriste, s'engageant à reprendre ce dossier et à intervenir rapidement auprès de l'organisme de formation pour débloquer la situation (pièce n° 11).
- M. [U] n'a pas rédigé les comptes rendus des réunions des commissions de suivi des 29 juillet et 12 septembre 2014, (pièce n° 12).
La société produit aux débats un courriel de Mme [Z] adressé au salarié indiquant : « Je suis toujours en attente de ton retour sur ce sujet+ peux-tu me faire un retour sur le compte rendu de la CS du 29 juillet. Ça commence à urger (j'ai été relancée plusieurs fois par [M] et pour rappel [X] [H] nous a également fait remarquer l'absence du CR lors de la CS du 12/09. ».
- M. [U] n'a pas établi les récapitulatifs des points discutés lors des commissions de suivi.
La société produit aux débats une relance de Mme [B] adressée au salarié le 21 juillet 2014 dans les termes suivants : « Pour faire suite à la demande clairement formulée par les RH la semaine passée, outre mes propres demandes, pourrais-tu enfin me transmettre un récap de ce qui a été discuté lors de la /des dernières CS '» (pièce n° 13).
- M. [U] n'a pas traité le dossier formation d'un salarié. La société produit un courriel de Mme [B] adressé à M. [U] le 12 septembre 2014 lui demandant de faire un point sur le dossier formation de M. [F] en indiquant : « j'ai eu un message laissant entendre que son dossier n'a pas été traité alors que passé en CS en juillet, non ' ».
Alors que ces manquements sont matériellement établis, M. [U] en conteste toute imputabilité.
A cet égard, le salarié allègue que Mme [B] a confié la préparation des dossiers à Mme [Z], juriste et qu'il n'a pas été pleinement associé au traitement du dossier qui s'est déroulé concomitamment à l'engagement de la procédure de licenciement. M. [U] précise ne pas avoir été convié à la préparation organisée au mois de septembre et octobre 2014 et n'avoir pu établir de comptes rendus.
S'il résulte des différents éléments produits aux débats par la société que Mme [Z] est effectivement intervenue sur certaines questions et notamment sur le paiement de l'organisme de formation sans que le salarié ne justifie toutefois tel que soutenu, d'un rôle prépondérant tenu par cette dernière dans la préparation des dossiers, force est de relever que M. [U] ne justifie d'aucune réponse qu'il aurait apportée aux demandes pourtant réitérées de ses différents interlocuteurs, tel qu'il résulte notamment de la relance de Mme [B] adressée au salarié le 21 juillet 2014.
Le grief est établi.
Sur la négociation du protocole préélectoral.
La société qui reproche au salarié son manque de réactivité dans la convocation des organisations syndicales en vue de la négociation du protocole préélectoral produit aux débats les pièces suivantes :
- un courriel du 4 juin 2014 (pièce n° 17 de la société) adressé au salarié par Mme [B] en ces termes : « Au titre des élections sur Rueil, quand as-tu planifié : l'envoi aux organisations syndicales des invitations à venir négocier l'accord préélectoral ' La réunion de négociation du protocole (donc également la réunion de prépa au niveau RH ') ».
- un courriel de relance du 13 juin 2014 (pièce n° 17 de la société) adressé au salarié par Mme [B] dans les termes suivants : « J'apprécierais de voir le sujet avancer et de ne pas avoir à te relancer sur le sujet !.. L'accord de prorogation des mandats fixe bien la négociation du protocole électoral début juillet' Je te demande un retour écrit aujourd'hui même sur le sujet. ».
M. [U] allègue sans en justifier ne pas avoir été informé d'une modification de planning.
La société souligne à juste titre une réponse tardive du salarié à Mme [B] le 04 juillet 2014, soit un mois plus tard en ces termes : « Pourrait-on se voir la semaine prochaine pour caler le protocole préélectoral et ainsi préparer la réunion de négo ' » (Pièce n° 18 de la société intimée).
Ce grief est constitué.
Sur le suivi du PSE.
La société fait plusieurs reproches à M. [U] au titre du suivi du PSE.
La société justifie (pièce n° 28) par la production aux débats d'un courriel de la Direccte du 19 mars 2014 adressé à M. [U] que la demande de validation d'un accord collectif majoritaire était incomplète, sans que l'objection du salarié tenant au fait que seules des pièces supplémentaires auraient été réclamées ne soit objectivée.
La société établit (pièce n° 38) l'intervention du 17 juillet 2014 de Mme [B] s'agissant de la gestion du licenciement d'un salarié protégé M. [A] en raison de l'inaction de M. [U] malgré une demande préalable de sa responsable en date du 8 juillet 2014 sur ce sujet, sans que ne soit objectivée par le salarié, contrairement à ce qu'il soutient au regard de sa pièce n°19, une relance de sa hiérarchie quant au choix stratégique à effectuer pour le cas de M. [A].
Ce reproche est donc établi.
Il est justifié par la société du non-paiement de l'organisme de formation d'un salarié (pièce n° 2) de la convention de formation non envoyée au [5] ( [5]) (pièce n°4), de l'absence de traitement de dossiers de formation (pièces n°41 à 44) et de l'absence de réponse à des questions posées par des salariés dans le cadre de réunions sur le PSE (pièce n° 45) alors que le salarié admet avoir été en charge a posteriori de l'intégralité de 21 dossiers, mais sans pour autant préciser de date exacte.
Ce grief est constitué.
Si la société établit (pièces n° 31 à 37) que les courriers de licenciement comportaient des durées de préavis erronées, M. [U] qui allègue que seule Mme [Z], juriste, avait été chargée de la rédaction de ces courriers n'est pas contredit par la société.
Le reproche n'est pas constitué.
Bien que la société justifie d'une relance adressée à M. [U] sur la communication des postes vacants (pièce n° 30), il résulte d'un courriel du salarié adressé à sa responsable le 13 juin 2014, un flou quant à la répartition des tâches et des rôles de l'équipe des ressources humaines sur ce sujet et une demande de clarification de M. [U] inaboutie.
La matérialité du grief est incertaine, le doute profitant au salarié, ce manquement ne sera pas retenu comme établi.
La société ne justifie pas de l'absence de suivi par M. [U] des envois et réceptions des courriers AR adressés aux salariés. Sans être utilement contredit par la société sur ce point, le salarié produit aux débats un tableau de suivi (pièce n° 15).
Il n'est pas justifié non plus par la société, l'absence de mise à jour des critères d'ordre de licenciement par M. [U].
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que le grief porté à l'encontre du salarié est partiellement établi.
Aucun élément ne vient objectiver les allégations du salarié sur sa mise à l'écart de certains dossiers ou missions par Mme [B], pas plus qu'une attitude vexatoire de cette dernière à son encontre au regard des courriels envoyés par celle-ci à M. [U] lui adressant des directives sur certains dossiers ou des relances, expressions seulement du pouvoir de direction de l'employeur au salarié.
Le salarié reproche à la société de s'être engagée à lui octroyer des formations en relations sociales sans lui en dispenser aucune sur cette thématique, tant en interne ou en externe.
Or, M. [U] n'allègue, ni a fortiori ne justifie, n'avoir sollicité aucune formation en relations sociales, alors qu'il résulte de son profil LinkedIn qu'il bénéficiait antérieurement à son arrivée dans la société, d'une expérience professionnelle antérieure en ayant été directeur des relations sociales et responsable rémunérations/ relations sociales notamment au sein de la société Général Mills-Yoplait et qu'il avait comme formation initiale un Master 2 Professionnel en ressources humaines et gestion.
Vainement le salarié allègue-t-il une surcharge de travail dont il ne justifie aucune alerte auprès de l'employeur, qui ne saurait être caractérisée par le refus d'une demi-journée de RTT par sa responsabilité hiérarchique ou par le refus d'une demande de congés que le salarié n'établit pas.
Certes, le salarié justifie sous sa pièce n°19 avoir sollicité de sa responsable l'organisation avec elle de points réguliers ou encore la fixation d'un rendez-vous, sans pour autant qu'il ne s'en déduise tel que soutenu, une communication quasi-exclusivement écrite avec Mme [B] imputable à cette dernière.
Alors que M. [U] occupait les fonctions de responsable des relations sociales/ rémunérations et avantages sociaux, la multiplicité des erreurs, carences et manque de réactivité établis objectivent une insuffisante maîtrise par le salarié de ses responsabilités.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement de M. [U] était fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes financières subséquentes.
Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct :
À l'appui de sa demande indemnitaire de ce chef, M. [U] soutient avoir été licencié dans les conditions particulièrement vexatoires en faisant valoir avoir été convoqué un entretien préalable le 11 août 2014 pour un entretien qui ne s'est tenu que le 11 septembre suivant, soit un mois après la notification de son licenciement, le jour de son anniversaire et avoir été contraint de récupérer ses fichiers personnels se trouvant sur son ordinateur, dans le bureau de la directrice des ressources humaines et en sa présence.
Tout salarié licencié dans des conditions vexatoires ou brutales peut prétendre à des dommages intérêts en réparation du préjudice distinct de celui résultant de la perte de l'emploi. Il en est ainsi alors même que le licenciement lui-même serait fondé, dès lors que le salarié justifie d'une faute et d'un préjudice spécifique résultant de cette faute.
Mais, tel que relevé à bon droit par l'employeur, celui-ci n'est tenu qu'au respect d'un délai de cinq jours entre la convocation à un entretien préalable et la tenue de celui-ci.
L'annonce verbale du licenciement par la société n'est pas établie.
Il ne peut être déduit de la réception par le salarié de la lettre de licenciement le jour même de son anniversaire son absence de caractère fortuit.
Par ailleurs à défaut pour le salarié de rapporter la preuve de conditions brutales vexatoires dans lesquelles il a dû remettre son matériel informatique et quitter l'entreprise, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 1er mars 2022 en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne M. [N] [U] aux dépens d'appel, dont distraction, au profit de Maître Yann Espluga, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie COURTOIS, Président et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,