COUR D'APPEL
DE VERSAILLES
Chambre civile 1-7
Code nac : 14H
N°
N° RG 24/05808 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WXP4
Du 31 AOUT 2024
ORDONNANCE
LE TRENTE ET UN AOUT DEUX MILLE VINGT QUATRE
A notre audience publique,
Nous, Raphaël TRARIEUX, Président à la cour d'appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président afin de statuer dans les termes de l'article L 743-21 et suivants du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Mélanie RIBEIRO, Greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :
ENTRE :
Monsieur [Y] [O]
né le 29 Septembre 1988 à [Localité 5], TUNISIE
de nationalité Tunisienne
Actuellement retenu au CRA de [Localité 6]
comparant par visioconférence, assisté de Me Jean-philippe GILBERT-GIRARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 454, commis d'office
et de Madame [U] [L], interprète en langue arabe, prêtant serment à l'audience
DEMANDEUR
ET :
LE PRÉFET DU VAL D'OISE
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Roxane GRIZON de la SELARL ACTIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
DEFENDERESSE
Et comme partie jointe le ministère public absent
M. [O] fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 18 avril 2024, prise par le préfet de l'Oise, qui lui sera notifiée le jour même, et a été placé en rétention administrative le 25 août 2024 par le préfet du Val d'Oise. Saisi par ce dernier le 29 août 2024 aux fins de prolongation de cette mesure, et également par M. [O] le 25 août en contestation de sa rétention administrative, le juge des libertés et de la détention de Versailles a selon ordonnance datée du 30 août 2024 :
rejeté le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure ;
rejeté la requête en contestation de la décision de placement en rétention administrative ;
déclaré la requête en prolongation de la préfecture du Val d'Oise recevable ;
ordonné la prolongation de la rétention administrative de M. [O] pour une durée maximale de 26 jours à compter du 29 août 2024.
Par déclaration du même jour, M. [O] a relevé appel de cette ordonnance.
A l'appui de son recours, il fait valoir :
que la décision dont s'agit n'est pas motivée au sens de l'article L 741-6 du CESEDA ;
qu'il dispose d'une adresse stable, chez M. [V], à [Localité 7] ;
qu'il est employé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ;
qu'une assignation à résidence est possible nonobstant la circonstance qu'il ne dispose pas d'un passeport ;
que selon les dispositions de l'article L 741-3 du CESEDA, son maintien en rétention administrative ne peut être ordonné que pour un temps strictement nécessaire ;
que de plus, l'administration ne justifie pas de diligences pour organiser son éloignement.
A l'audience, M. [O] fait valoir que se pose la question de la présence d'un interprète tant lors de son placement en garde à vue que lorsqu'il a été placé en rétention administrative ; il ajoute que la délégation de signature du préfet aurait dû se trouver au dossier.
M. [O] demande à la Cour d'annuler la décision dont appel, ou de l'infirmer, et de juger qu'il n'y a pas lieu à prolongation de sa rétention administrative.
Le préfet du Val d'Oise conclut à la confirmation de la décision, faisant valoir :
que par application de l'article R 743-11 du CESEDA seuls les moyens évoqués dans la déclaration d'appel sont recevables ;
que les contestations de l'appelant au sujet de la procédure ne le sont donc pas ;
qu'en outre l'intéressé comprend la langue française ;
que des démarches ont été accomplies le jour de son placement en rétention administrative, le 25 août 2024, pour organiser son départ du territoire français, alors que l'intéressé a refusé de contacter le consulat dont il dépend ;
que l'appelant a successivement donné plusieurs adresses, dont celle de sa compagne alors que celle-ci a déclaré ne plus vouloir vivre avec lui.
SUR CE
Par application de l'article R 743-11 alinéa 1er du CESEDA, à peine d'irrecevabilité, la déclaration d'appel est motivée.
Aucun texte n'interdit à l'appelant de développer à la barre de nouveaux moyens, dès lors que le principe du contradictoire est respecté.
Lors d'une instance devant le juge des libertés et de la détention relative à la rétention administrative, la personne concernée n'est pas recevable à émettre des contestations sur la régularité de son placement en garde à vue. Et s'agissant du placement en rétention administrative, s'il est exact que lors de la mise en place et de la notification de cette mesure M. [O] n'a pas été assisté d'un interprète, le premier juge a justement relevé qu'il maniait suffisamment la langue française pour comprendre ladite mesure ; en outre il a été assisté d'un interprète tant devant les débats de première instance que d'appel. Et s'agissant de la question de la délégation de signature du préfet du Val d'Oise, qui se pose vu que la décision de placement en rétention administrative du 25 août 2024 a été signée par Mme [S], secrétaire générale, elle a été prévue dans l'arrêté préfectoral n° 23-054 du 20 septembre 2023. La procédure est donc régulière.
En vertu de l'article L 742-1 du CESEDA :
Le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative.
L'article L 742-3 du même code dispose que si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours à compter de l'expiration du délai de quatre jours mentionné à l'article L 741-1.
Au cas d'espèce, M. [O] invoque des garanties de représentation vu qu'il est pourvu d'emploi stable (un contrat de travail à durée indéterminée en date du 10 juin 2024 étant produit) et qu'il réside chez un tiers dont il a communiqué l'adresse et qui a rédigé une attestation d'hébergement (à [Localité 7]) le 25 août 2024. Mais la Cour relève que le bulletin de paie du mois de juillet 2024 mentionne une autre adresse (à [Localité 4]) alors que lors de son placement en garde à vue, le 25 août 2024, l'intéressé avait déclaré une adresse à [Localité 2], qui est celle de sa compagne, laquelle a du reste déclaré qu'elle souhaitait qu'il prenne ses affaires et la quitte. Il demeure donc une incertitude quant à l'adresse réelle de M. [O]. En outre, le fait qu'il soit dépourvu de passeport ou de document de voyage constitue un obstacle dirimant à son assignation à résidence.
Par ailleurs, malgré les diligences en cours, le départ de M. [O] n'a pas pu être organisé, étant rappelé que le préfet du Val d'Oise a le 25 août 2024, soit le jour du placement en rétention administrative de l'appelant, demandé au consulat général de Tunisie de délivrer à l'intéressé un laissez-passer ou défaut de lui remettre une attestation explicitant pour quelles raisons il ne serait pas possible d'accueillir sa demande. Le préfet n'est nullement responsable du défaut de réponse à ce courrier.
Il échet en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME l'ordonnance en date du 20 août 2024 ;
Laisse les dépens à la charge de l'Etat.
Fait à Versailles, le 31 aôut 2024 à
Et ont signé la présente ordonnance, Raphaël TRARIEUX, Président et Mélanie RIBEIRO, Greffière
La Greffière, Le Président,
Mélanie RIBEIRO Raphaël TRARIEUX
Reçu copie de la présente décision et notification de ce qu'elle est susceptible de pourvoi en cassation dans un délai de 2 mois selon les modalités laissée ci-dessous.
l'intéressé, l'interprète, l'avocat
POUR INFORMATION : le délai de pourvoi en cassation est de DEUX MOIS à compter de la présente notification.
Article R 743-20 du CESEDA :
' L'ordonnance du premier président de la cour d'appel ou de son délégué n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui l'a placé en rétention et au ministère public. '.
Articles 973 à 976 du code de procédure civile :
Le pourvoi en cassation est formé par déclaration au greffe de la Cour de Cassation, qui est signée par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
La déclaration est remise au secrétariat-greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de défendeurs, plus deux ;