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10/10/2019 | FRANCE | N°18/014521

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 10 octobre 2019, 18/014521


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 10/10/2019
la SCP BERTRAND-RADISSON BROSSAS
Me Laurent LECCIA
ARRÊT du : 10 OCTOBRE 2019

No : 325 - 19
No RG 18/01452
No Portalis DBVN-V-B7C-FWIC

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance de Tours en date du 20 Avril 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222931341924

SA BNP PARIBAS
[...]

Ayant pour avocat Jean-Marc RADISSON, membre de la SCP BERTRAND-RADISSON-BROSSAS, avoca

t au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No:1265218709215552

Monsieur G... V...
[...]

...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 10/10/2019
la SCP BERTRAND-RADISSON BROSSAS
Me Laurent LECCIA
ARRÊT du : 10 OCTOBRE 2019

No : 325 - 19
No RG 18/01452
No Portalis DBVN-V-B7C-FWIC

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance de Tours en date du 20 Avril 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222931341924

SA BNP PARIBAS
[...]

Ayant pour avocat Jean-Marc RADISSON, membre de la SCP BERTRAND-RADISSON-BROSSAS, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No:1265218709215552

Monsieur G... V...
[...]

Ayant pour avocat Me Laurent LECCIA, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 01 Juin 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 20 juin 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 27 JUIN 2019, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Elisabeth PIERRAT, Greffier lors des débats,
Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier lors du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 10 OCTOBRE 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société BNP PARIBAS a consenti à Monsieur G... V... :
- le 20 février 2010, un prêt personnel d'un montant de 36.543 euros remboursable en 108 mensualités au taux nominal de 8,450%,
- le 22 septembre 2010, un prêt personnel d'un montant de 23.000 euros remboursable en 108 mensualités au taux nominal de 6,720%,
- le 1er mars 2011, un prêt personnel d'un montant de 10.000 euros remboursable en 108 mensualités au taux nominal de 7,190%,
- le 17 août 2011, un prêt personnel d'un montant de 60.375 euros remboursable en 108 mensualités au taux nominal de 8,20%.

Plusieurs échéances étant demeurées impayées, la banque a prononcé la déchéance des termes de chacun des prêts le 23 mars 2016 et a, le 17 mai 2017, assigné Monsieur V... en paiement devant le tribunal d'instance de Tours.

Par jugement en date du 20 avril 2018, le tribunal a prononcé la déchéance du prêteur de son droit à percevoir les intérêts conventionnels et a condamné Monsieur G... V... à payer à la BNP :
- 4.059,49 euros au titre du prêt consenti le 22 septembre 2010
- 1.737.91 euros au titre du prêt consenti le 1er mars 2011
- 10.224,11 euros au titre du prêt consenti le 17 août 2011,
rejeté les autres demandes de la banque, notamment en ce qui concerne le prêt de février 2010 pour lequel il a retenu que la banque avait reçu plus qu'il ne lui était dû, dit que les sommes devant être versées ne porteront pas intérêts au taux légal et condamné Monsieur V... aux dépens.

La BNP a relevé appel de cette décision par déclaration en date du premier juin 2018.
Elle en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de condamner l'intimé à lui verser :
- 3.386,34 euros avec intérêts de 8.45% à compter du 28 mars 2017 sur 2.872.16 euros au titre du solde du prêt du 20 février 2010,
-13.128.58 euros avec intérêts de 8.45% à compter du 28 mars 2017 sur 11.337.59 euros au titre du prêt du 22 septembre 2010,
- 6.318.80 euros avec intérêts au taux contractuel de 7.19% à compter du 28 mars 2017 sur 5.427.91 euros au titre du prêt du 1er mars 2011,
-10.224,11 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2016.
- 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens, dont distraction au profit de la SCP BERTRAND RADISSON et BROSSAS.

Elle fait valoir que ses conclusions sont recevables et qu'aucune sanction n'est encourue en cas de non respect de l'obligation de présenter un exposé des faits et de la procédure et d'énoncer les chefs du jugement critiqués ou de présenter de manière distincte les moyens nouveaux.

Elle soutient que le tribunal a à tort retenu que les offres de prêts omettaient de faire mention du coût de l'assurance dans la mesure où il ressortait de ses offres préalables que le montant des échéances mensuelles pendant la période de remboursement est mentionné en première page de l'offre, sans assurance et avec assurance, ce qui permettait à l'emprunteur, en conformité avec les dispositions de l'article L.311-11 du code de la consommation, de connaître le coût de l'assurance pour chaque échéance.

Elle fait valoir que la Cour de cassation a également jugé que la déchéance du droit à percevoir les intérêts au taux contractuel n'empêchait pas les intérêts de courir au taux légal à compter de la mise en demeure ; qu'en application du principe d'interprétation stricte des textes édictant des sanctions civiles, la déchéance du droit aux intérêts ne s'étend pas à celle des frais ; que les dispositions de l'ancien article L.311-9 du code de la consommation issues de la loi du premier juillet 2010, en vigueur à compter du 1er mai 2011, ne sont susceptibles de s'appliquer qu'au prêt consenti le 17 août 2011 et que les dispositions de l'ancien article 1153 devenu article 1231-6 du code civil s'opposent à la déchéance totale de la banque de tous types d'intérêts.

Elle précise avoir adressé à Monsieur V..., avant de procéder à la déchéance du terme, un courrier recommandé avec avis de réception en date du 15 janvier 2016 qui est demeuré sans réponse.

Elle prétend que c'est sans fondement que Monsieur V... affirme qu'elle a trop perçu des sommes et qu'à supposer même que tel soit le cas, les sommes trop reçues devraient être restituées à l'assureur de l'emprunteur. Et elle affirme ne pas avoir été saisie, par l'intimé, d'une demande de mise en jeu de son assurance, le courriel dont se prévaut Monsieur V... étant uniquement une demande de délais, soulignant que ce n'est que trois ans plus tard que Monsieur V... a saisi son assureur d'une déclaration de sinistre.

Monsieur V... forme appel incident en demandant à la cour de débouter l'appelante de toutes ses demandes et de la condamner à lui verser 17.601,43 euros au titre des sommes trop perçues, 20.000 euros de dommages et intérêts en réparation de ses manquements résultant de la non déclaration de sa situation de chômage à l'assureur, du prononcé de la déchéance du terme de deux prêts sans mise en demeure préalable, et de lui allouer 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il se prévaut tout d'abord de l'irrégularité des conclusions de l'appelante et conclut qu'il "appartiendra au conseiller de la mise en état" d'en connaître mais ne reprend pas ce moyen et la demande tendant à l'irrecevabilité dans le dispositif de ses écritures.Il demande par ailleurs à la cour d'approuver le premier juge qui a retenu que le prêteur a adressé des offres préalables ne mentionnant pas, pour chaque échéance, le coût de l'assurance, et soutient que la déchéance du droit du prêteur à percevoir les intérêts conventionnels est incontestable.

Il fait ensuite valoir que le tribunal a, à raison, pour permettre l'efficacité de la sanction ainsi prononcée, dit que les sommes dues ne porteront pas intérêts au taux légal.

Il précise enfin qu'il a souscrit pour chacun des prêts, hormis le second, une assurance comprenant une garantie perte d'emploi ; que la compagnie CARDIF a versé le 25 avril 2018 sur son compte les sommes suivantes :
-3.142,32 euros au titre du prêt de 36.543 euros,
-3.312.72 euros titre du prêt de 10.000 euros
-20.753.52 euros au titre du prêt de 60.375 euros

et ce au titre de la période du 4 décembre 2015 au 3 décembre 2017 durant laquelle il s'est trouvé sans emploi et il demande à l'appelante, qui a viré partie de ces paiements sur un autre compte, de justifier de l'imputation de ces sommes.

Il expose les calculs le conduisant à réclamer versement d'un trop perçu par la BNP et fait valoir que, s'il n'a pu honorer normalement les échéances des prêts, c'est en raison d'un manquement de l'établissement bancaire qui n'a pas fait les démarches nécessaires auprès de l'assureur des prêts.

Il soutient enfin que la banque a commis un second manquement en exigeant le paiement intégral de sa créance sans lui adresser préalablement une mise en demeure.

Il affirme avoir subi, du fait de ces manquements, un préjudice tant financier que moral puisqu'il a été inscrit au FICP, que son compte bancaire a été clôturé, ce qui a entraîné la perte de ses moyens de paiement, l'impossibilité d'avoir accès à ce compte, l'obligation de se rendre à l'agence afin d'obtenir des retraits d'espèces et l'impossibilité de faire des virements à distance, et soutient qu'il n'a pu renégocier les emprunts malgré la baisse importante des taux intervenue, et ce en sus des tracas et angoisses causés par cette situation.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que l'intimé, qui n'a pas saisi le conseiller de la mise en état de son moyen tiré de l'irrégularité des conclusions de l'appelante, n'est pas recevable à présenter un tel moyen devant la cour, étant d'ailleurs observé qu'il ne reprend pas la demande tendant à voir déclarer irrecevables ces conclusions dans le dispositif de ses écritures sur lequel la cour doit exclusivement statuer ;

Attendu par ailleurs qu'il n'est pas contesté par l'emprunteur que la banque n'encourt pas la forclusion ;

- Sur la déchéance du droit de la banque à percevoir les intérêts contractuels :

Attendu, en ce qui concerne le prêt du 22 septembre 2010, que ce dernier, d'un montant de 23.000 euros, a été consenti avant l'entrée en vigueur de la loi du premier juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation et alors que n'étaient pas soumis au code de la consommation les crédits d'un montant supérieur à 21.500 euros ;

Que cependant l'offre du 22 septembre 2010 mentionne expressément que les parties entendent se soumettre volontairement aux dispositions des articles L.311-21 et suivants du code de la consommation et que c'est en conséquence à raison que le tribunal a retenu que ces dispositions lui étaient applicables ;

Attendu, en ce qui concerne tous les prêts, qu'aux termes de l'article L.311-33 du code de la consommation en sa rédaction applicable au litige "Le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû" ;

Que l'article L.311-11 du même code, également dans sa rédaction applicable au litige, indique que "Pour les opérations à durée déterminée, l'offre préalable précise en outre pour chaque échéance le coût de l'assurance et les perceptions forfaitaires éventuellement demandées ainsi que l'échelonnement des remboursements ou, en cas d'impossibilité, le moyen de les déterminer" ;

Attendu qu'il ne s'évince pas de ces textes l'obligation pour l'établissement de crédit d'indiquer séparément le montant de l'échéance et le coût de l'assurance et ce d'autant moins que les modèles d'offres préalables type annexés à l'article R 311-6 du code de la consommation, qui comportent, selon ce texte, les mentions que les offres doivent contenir en fonction de l'opération de crédit proposée, ne prévoient pas de faire figurer séparément pour chaque échéance le coût de l'assurance puisque l'offre type est ainsi rédigée : "Montant par échéance : - sans assurance :... € - avec assurance : ....€" ;

Et attendu que l'examen des offres de crédit souscrites par Monsieur V... révèle qu'elles sont strictement conformes au modèle type no 2 de l'annexe à l'article R 311-6 du code de la consommation ;

Qu'il s'ensuit que les offres de crédit mentionnant conformément au modèle type le montant de l'échéance avec assurance et le montant sans assurance, la sanction de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels concernant les prêts n'est pas encourue pour défaut d'indication du montant de l'assurance et la décision déférée sera infirmée sur ce point ;

Attendu, en ce qui concerne le quatrième prêt d'un montant de 60.375 euros consenti à Monsieur V... le 17 août 2011, que les dispositions de l'article L.311-9 du code de la consommation issues de la loi du premier juillet 2010 lui sont applicables ;

Qu'ainsi que l'a relevé le tribunal, ces dispositions imposent au prêteur de consulter le FICP avant d'octroyer le crédit sollicité ;

Qu'en l'espèce, la BNP ne produit pas plus devant la cour que devant le premier juge la preuve d'une consultation du FICP préalable à l'octroi du crédit ;

Qu'en application de l'article L 311-48 du code de la consommation en sa version applicable au litige, le prêteur qui n'a pas respecté cette obligation de consultation est déchu de son droit à réclamer les intérêts conventionnels en totalité ou dans la proportion fixée par le juge ;

Que le manquement relevé justifie en l'espèce la déchéance totale du droit de la BNP à percevoir les intérêts contractuels ;

Mais attendu que le premier juge ne peut être approuvé lorsqu'il retient qu'afin d'assurer l'effectivité de la sanction de déchéance prononcée, il convient de dire que la somme due en principal au titre de ce prêt ne portera pas intérêts au taux légal ;

Qu'en effet le prêt a été consenti au taux conventionnel de 8,20% tandis que le taux d'intérêt légal est inférieur à 1% et que, même majoré de cinq points si l'intégralité de la somme due n'est pas réglée après un délai de deux mois, le taux effectivement appliqué sera inférieur à 6%, ce qui suffit à assurer l'effectivité de la sanction de déchéance ;

Que le jugement attaqué sera donc également infirmé en ce qu'il a dit que les sommes dues au titre du quatrième prêt, puisque les taux contractuels sont applicables aux trois autres, ne porteront pas intérêts au taux légal ;

- Sur les sommes dues :

Attendu que les créances de la BNP sont ainsi ventilées après déduction des sommes versées par la CARDIF :

- prêt du 10 février 2010 ([...]) :
capital restant dû : 2.872,16 euros
intérêts arrêtés au 27 mars 2017 : 277,33 euros
indemnité 8% : 236,85 euros
soit 3386,34 euros,

- prêt du 22 septembre 2010 ( [...])
capital restant dû : 11.337,59 euros
intérêts arrêtés au 27 mars 2017 : 870,62 euros
indemnité 8% : 920,37 euros
soit 13.128,58 euros,

- prêt du premier mars 2011
capital restant dû : 5.427,91 euros
intérêts arrêtés au 27 mars 2017 : 434,23 euros
indemnité 8% : 456,66 euros
soit 6.318,80 euros,

Que les indemnités contractuelles de 8% qui ont le caractère de clauses pénales apparaissent manifestement excessives au regard des taux d'intérêts, de l'absence de préjudice spécifique allégué par la banque et des situations respectives des parties ;

Que Monsieur V... sera donc condamné à verser les sommes de :
- 3.099,50 euros au titre du prêt du 10 février 2010 ([...]) avec intérêts au taux de 8,45% sur 2.872,16 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 28 mars 2017,

- 12.208,22 euros au titre du prêt du 22 septembre 2010 ( [...]) avec intérêts au taux de 6,72% sur 11.337,59 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 28 mars 2017,

- 5.862,15 euros au titre du prêt du premier mars 2011 (603667-25) avec intérêts au taux de % sur 5.427,91 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 28 mars 2017 ;

Qu'en ce qui concerne le prêt du 17 août 2011 (603772-01), la somme de 10.224,11 euros retenue par le tribunal comme restant due par Monsieur V... n'est pas contestée et il convient uniquement d'assortir cette condamnation d'intérêts au taux légal ;

- Sur les manquements reprochés à la banque:

Attendu que le sens du présent arrêt, qui ne déchoit pas la banque de tous les intérêts conventionnels, rend sans objet l'appel incident de Monsieur V... tendant à la condamnation de l'appelante à lui restituer des sommes qu'elle aurait trop perçues, étant au surplus relevé que c'est à raison que la BNP fait observer que ce n'aurait pas été Monsieur V... qui aurait été créancier de sommes trop versées mais son assureur qui les a payées pour son compte ;

Que c'est donc sans pertinence que l'intimé se plaint de ce que ces sommes n'ont pas été versées sur son propre compte puisque, soit elles doivent être imputées sur les impayés des prêts, soit elles doivent être restituées à son assureur, mais elles ne peuvent en aucun cas lui être remises ;

Que la banque n'a en conséquence commis aucune faute en versant les fonds reçus de la CARDIF sur un compte d'attente jusqu'à ce que cette cour statue sur ce qui est réellement dû par l'emprunteur et que c'est sans aucun fondement que l'intimé la "somme" de justifier de l'emploi de ces fonds sur lesquels il n'a aucun droit ;

Attendu que l'intimé fait par ailleurs valoir que la BNP a commis une faute en ne tenant pas compte de la déclaration de perte d'emploi qu'il lui a faite le 6 octobre 2015 ;

Mais attendu que Madame V... a adressé le 6 octobre 2015 un unique courriel à la BNP en ces termes : "Ce petit mail pour vous dire que nous ne pourrons remettre que jeudi matin le montant nécessaire pour les prêts du compte G... et Mathilde. Mr V... a eu un retard sur ses indemnités de chômage, compte tenu que c'est le premier mois de paiement et que la somme est importante, une saisie manuelle doit être effectuée par pôle emploi donc retard (pas prévu par pôle emploi) j'aimerais que vous nous aidiez ce petit contretemps (sic) pour nous éviter les frais et surtout faites-nous confiance!!! Je suis en mission au Château Amboise. Je vous tel. vers 11 heures. Merci de votre compréhension." ;

Et attendu que le contrat d'assurance précisait que "Pour toute demande de prise en charge (souligné par la cour), il suffit à l'assuré de prévenir son agence qui transmettra sa déclaration à l'assureur. Ce dernier lui indiquera la liste des pièces justificatives à fournir";

Qu'il ne saurait être sérieusement soutenu par Monsieur V... que le courriel, d'ailleurs adressé par son épouse qui n'est pas l'assuré, prévenait la BNP d'une demande de prise en charge ;

Qu'il pourrait tout au plus être prétendu qu'un lecteur très attentif du courriel aurait compris que Monsieur V... se trouvait en situation de chômage depuis un mois mais aucunement qu'il sollicitait une prise en charge des échéances des prêts par son assurance ;

Que Monsieur V... ne justifie pas qu'ainsi qu'il l'affirme la copie de sa lettre de licenciement avait été remise à son conseiller pour savoir si les garanties de l'assurance pouvaient être mise en jeu, le courriel entièrement reproduit ci-dessus conduisant au contraire à retenir qu'aucune pièce n'y était jointe ;

Que l'absence de toute demande de prise en charge est en outre confirmée par le fait que Monsieur V... a attendu le 8 mars 2018 (et non le mois de janvier 2018 comme il le prétend) pour solliciter effectivement une prise en charge par son assureur alors qu'il n'aurait pas attendu sans réagir pendant plus de deux ans s'il avait pensé que les échéances du prêt devaient être payées par la CARDIF ;

Que l'intimé ne peut reprocher à sa banque de n'avoir pas demandé à sa place une prise en charge qu'il n'a jamais sollicitée avant le mois de mars 2018 et qu'il ne peut être entendu lorsqu'il affirme que c'est du fait de la BNP qu'il s'est trouvé "dans une situation financière désastreuse" et a été inscrit au FICP alors que sa propre inertie est à l'origine de son préjudice ;

Attendu que Monsieur V... fait enfin valoir qu'il n'a jamais reçu la moindre mise en demeure préalable à la déchéance des termes des prêts litigieux ;

Que l'appelante qui prétend avoir adressé une mise en demeure préalable n'en justifie qu'en ce qui concerne le solde du compte courant débiteur et que, si l'on peut déduire de ce courrier que l'intégralité des prêts prélevés sur ce compte deviendra en conséquence immédiatement exigible, il ne saurait être considéré qu'une mise en demeure préalable a été adressée ;

Que cependant, et contrairement à ce que conclut Monsieur V..., l'absence d'une telle mise en demeure ne saurait entraîner paiement de dommages et intérêts mais uniquement conduire à retenir que la déchéance du terme pourrait ne pas être intervenue ;

Que Monsieur V..., qui n'a pas saisi le tribunal d'une telle prétention ne demande pas plus à la cour de constater que la déchéance du terme n'est pas intervenue, étant relevé que la recevabilité d'une telle demande formée pour la première fois en cause d'appel aurait pu être discutée ;

Qu'il résulte des courriels que l'intimé communique lui-même que ses difficultés financières ne lui permettaient plus de rembourser les échéances courantes, ce qui suffit pour démontrer qu'une mise en demeure préalable n'aurait pas empêché la déchéance du terme d'intervenir puisque, ne pouvant payer les échéances courantes, Monsieur V... aurait encore moins pu s'acquitter de toutes les échéances restant dues pour les quatre prêts litigieux ;

Que l'intimé ne justifie donc d'aucun préjudice résultant de l'absence de mise en demeure préalable et que sa demande en paiement de dommages et intérêts sera rejetée ;

Attendu que Monsieur V..., succombant en ses prétentions, devra supporter les dépens de la procédure d'appel sans qu'il y ait lieu cependant de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'établissement prêteur ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise hormis en ce qu'elle a condamné Monsieur W... V... à verser à la société BNP PARIBAS la somme de 10.224,11 euros au titre du prêt du 17 août 2011 et a condamné Monsieur V... à supporter les dépens,

STATUANT À NOUVEAU sur ses autres chefs,

CONDAMNE Monsieur G... V... à payer à la société BNP PARIBAS:

- 3.099,50 euros au titre du prêt du 10 février 2010 ([...]) avec intérêts au taux de 8,45% sur 2.872,16 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 28 mars 2017,

- 12.208,22 euros au titre du prêt du 22 septembre 2010 ( [...]) avec intérêts au taux de 6,72% sur 11.337,59 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 28 mars 2017,

- 5.862,15 euros au titre du prêt du premier mars 2011 (603667-25) avec intérêts au taux de % sur 5.427,91 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 28 mars 2017,

DIT que la somme de 10.224,11 euros due au titre du prêt du 17 août 2011 (603772-01), sera assortie d'intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2017,

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE Monsieur W... V... de sa demande en paiement de dommages et intérêts,

DÉBOUTE la société BNP PARIBAS de sa demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur W... V... aux dépens d'appel,

ACCORDE à la SCP BERTRAND RADISSON BROSSAS, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/014521
Date de la décision : 10/10/2019
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2019-10-10;18.014521 ?
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