LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 octobre 2023
Rejet
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 967 F-D
Pourvois n°
V 22-18.046
W 22-18.047
X 22-18.048
Y 22-18.049
Z 22-18.050
A 22-18.051
B 22-18.052
C 22-18.053
D 22-18.054
E 22-18.055
F 22-18.056
H 22-18.057
G 22-18.058
J 22-18.059
K 22-18.060 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023
La société Hôpital privé [19], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 16], a formé les pourvois n° V 22-18.046, W 22-18.047, X 22-18.048, Y 22-18.049, Z 22-18.050, A 22-18.051, B 22-18.052, C 22-18.053, D 22-18.054, E 22-18.055, F 22-18.056, H 22-18.057, G 22-18.058, J 22-18.059 et K 22-18.060 contre quinze arrêts rendus le 16 mars 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section A) dans les litiges l'opposant respectivement :
1°/ à Mme [V] [T], domiciliée [Adresse 12],
2°/ Mme [A] [I], domiciliée [Adresse 13],
3°/ à Mme [S] [Z], domiciliée [Adresse 6],
4°/ à Mme [SJ] [C], épouse [Y], domiciliée [Adresse 17],
5°/ à Mme [B] [LK], domiciliée [Adresse 18],
6°/ à Mme [CH] [E], domiciliée [Adresse 4],
7°/ à Mme [PS] [M], domiciliée [Adresse 1],
8°/ à Mme [D] [N], domiciliée [Adresse 7],
9°/ à Mme [GO] [R], domiciliée [Adresse 14],
10°/ à Mme [J] [O], domiciliée [Adresse 11],
11°/ à Mme [K] [W], domiciliée [Adresse 2],
12°/ à Mme [L] [P], domiciliée [Adresse 8],
13°/ à Mme [H] [KW], domiciliée [Adresse 10],
14°/ à Mme [X] [G], domiciliée [Adresse 3],
15°/ à Mme [F] [U], domiciliée [Adresse 5],
16°/ à Pôle emploi, direction régionale Nouvelle-Aquitaine, dont le siège est [Adresse 15],
17°/ à Pôle emploi, direction régionale Occitanie, dont le siège est [Adresse 9],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de ses pourvois, le moyen commun de cassation.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Hôpital privé [19], de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mme [T] et des quatorze autres salariées, après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° V 22-18.046 à K 22-18.060 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 16 mars 2022), Mme [T] et quatorze autres salariées ont été engagées en qualité de sage-femme, d'auxiliaire puéricultrice ou d'aide-soignante affectées au service maternité de la société Hôpital privé [19] (l'hôpital).
3. L'hôpital a notifié le 31 mars 2016 à l'agence régionale de santé la cessation d'activité de trois médecins obstétriciens et la cessation d'activité du service maternité à compter du 6 mai 2016 et a informé les salariées le 25 avril 2016 de l'arrêt de l'activité obstétrique en les dispensant d'activité. Un plan de sauvegarde de l'emploi a été validé par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de la Gironde le 23 juin 2016.
4. Par lettres du 12 juillet 2016, l'employeur a notifié aux salariées leur licenciement pour motif économique. Leur contrat de travail a été rompu a l'issue du congé de reclassement qui leur avait été proposé.
5. Contestant leur licenciement, les salariées ont saisi la juridiction prud'homale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. L'employeur fait grief aux arrêts de dire que le licenciement des salariées est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner en conséquence à leur payer certaines sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage éventuellement versées aux salariées suite à leur licenciement dans la limite de six mois d'indemnités, alors « que la fermeture, au sein d'un établissement de soins, d'un service de maternité qui constitue une entité autonome en raison de la spécificité de son activité, des autorisations et de la réglementation sanitaire auxquelles il est soumis et de la non permutabilité de son personnel avec celui des autres services de soins, rendue nécessaire par l'absence de médecins obstétriciens en nombre suffisant pour en assurer le fonctionnement, caractérise la cessation d'activité d'une entreprise au sens de l'article L. 1233-3 du code du travail justifiant le licenciement pour motif économique du personnel affecté à la maternité ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la maternité de l'hôpital Privé [19] fonctionnait en dernier lieu avec cinq médecins obstétriciens et qu'à la fin de l'année 2015, quatre d'entre eux avaient mis fin à leur contrat les liant à l'hôpital Privé [19], leur départ rendant impossible le fonctionnement de la maternité ; qu'en jugeant que la cessation d'activité de la maternité ne constituait pas en elle-même une cause économique de licenciement aux motifs qu'elle ne constituait qu'un service de l'hôpital Privé [19] nonobstant son caractère autonome et qu'il n'était pas justifié de difficultés économiques ou de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail. »
Réponse de la Cour
8. Selon l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à la cessation d'activité de l'entreprise. Seule une cessation complète de l'activité de l'employeur peut constituer en elle-même une cause économique de licenciement, quand elle n'est pas due à une faute de ce dernier. Une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques, de mutation technologique ou de réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.
9. La cour d'appel, qui a retenu que l'employeur ne justifiait pas d'une cessation complète de son activité puisque seul l'un de ses services, celui de la maternité, avait été interrompu pour être ensuite remplacé par un service de chirurgie esthétique, peu important le caractère autonome de ce service au regard des autres services de soins de l'établissement, et constaté qu'il ne justifiait ni même n'alléguait l'existence de difficultés économiques ou la nécessité de réorganiser l'entreprise pour en préserver la compétitivité, a pu en déduire que le licenciement des salariées était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Hôpital privé [19] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hôpital privé [19] et la condamne à payer à Mmes [T], [I], [Z], [C], [LK], [E], [M], [N], [R], [O], [W], [P], [KW], [G] et [U] la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois.