Vu la lettre par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant le conseil général de Meurthe-et-Moselle à la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy ;
Vu les déclinatoires, présentés le 3 février 1997 par le préfet de Meurthe-et-Moselle, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par les motifs que le litige né du refus du département de Meurthe-et-Moselle de prendre en charge la totalité des frais d'hébergement et de soins liés au maintien de jeunes adultes handicapés dans l'établissement d'éducation spéciale où ils étaient placés antérieurement relève du contentieux de l'aide sociale et non de celui de la sécurité sociale ; que les décisions de maintien dans un établissement d'éducation spéciale sont prises en application de l'article 6-I bis de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 tel qu'il a été modifié par l'article 22 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 ; que ces dispositions législatives entrent dans le champ d'application de la législation de l'aide sociale ; que les litiges relatifs à la répartition des charges consécutives à ces décisions de maintien dans un établissement d'éducation spéciale n'entrent pas dans la catégorie des différends qui, en application de l'article L. 142-1 du Code de la sécurité sociale, relèvent du contentieux de la sécurité sociale, mais concernent des recours formés contre des décisions des autorités administratives ou tendant à mettre en jeu la responsabilité des collectivités publiques à raison de telles décisions qui, en application de l'article L. 142-3.3o du Code de la sécurité sociale, ne relèvent pas du contentieux de la sécurité sociale ; que des litiges comparables relatifs à la répartition des charges ont donné lieu à des jugements des tribunaux de l'ordre administratif, qui se sont reconnus compétents, ainsi qu'à des jugements des tribunaux de l'ordre judiciaire et à un arrêt de la Cour de Cassation, qui se sont également reconnus compétents ;
Vu le jugement du 12 novembre 1997 par lequel le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nancy a rejeté le déclinatoire de compétence et s'est déclaré compétent pour connaître du litige opposant le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle à la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy ;
Vu l'arrêté du 11 décembre 1997 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a élevé le conflit ;
Vu le mémoire présenté par le ministre de l'Emploi et de la Solidarité, tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit par les motifs que les litiges en cause ne concernent pas le bien-fondé ou la régularité des décisions de maintien provisoire d'adultes handicapés dans des établissements spécialisés pour enfants ou adolescents qui relèvent du contentieux technique de la sécurité sociale mais se rapportent à l'imputabilité des dépenses induites par ces décisions au budget d'aide sociale d'une collectivité publique ; que, par suite, de tels litiges financiers ne peuvent relever que de la compétence de la juridiction administrative ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des Conflits a été notifiée au président du conseil général de Meurthe-et-Moselle et au directeur de la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy, qui n'ont pas produit de mémoires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 modifiée ;
Vu le Code de la sécurité sociale ;
Considérant qu'aux termes du I bis inséré dans l'article 6 de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des handicapés, par l'article 22 de la loi du 13 janvier 1989 : " Lorsqu'une personne handicapée placée dans un établissement d'éducation spéciale ne peut être immédiatement admise dans un établissement pour adulte désigné par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel, conformément au cinquième alinéa (3o du paragraphe I de l'article L. 323-11 du Code du travail, ce placement peut être prolongé au-delà de l'âge de vingt ans ou, si l'âge limite pour lequel l'établissement est agréé est supérieur, au-delà de cet âge dans l'attente de l'intervention d'une solution adaptée, par une décision conjointe de la commission départementale de l'éducation spéciale et de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel. Cette décision s'impose à l'organisme ou à la collectivité compétente pour prendre en charge les frais d'hébergement et de soins dans l'établissement pour adulte désigné par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel, conformément au cinquième alinéa (3° du paragraphe I de l'article L. 323-11 précité... " ;
Considérant que par deux décisions en date du 6 juillet 1994 et du 21 février 1995, la caisse primaire d'assurance maladie de Nancy a réclamé au département de Meurthe-et-Moselle le versement des sommes correspondant aux frais de prise en charge du séjour de jeunes adultes handicapés maintenus dans des établissements d'éducation spéciale en application de l'article 22 de la loi du 13 janvier 1989 précité ; que le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle a contesté ces décisions devant la commission de recours amiable, puis devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nancy ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle ayant décliné la compétence de ce tribunal, a, par un arrêté en date du 11 décembre 1997, élevé le conflit ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle ne conteste en réalité que l'obligation qui est faite au département de prendre en charge les frais correspondants aux soins dispensés aux adultes handicapés maintenus dans des établissements d'éducation spéciale et qui sont inclus dans les frais de séjour, sans remettre en cause l'obligation faite au département de prendre en charge, au titre de l'aide sociale, les frais d'hébergement des intéressés également inclus dans les frais de séjour ; que, dans ces conditions, les litiges ne portent que sur l'imputabilité au département des frais résultant des soins prodigués aux adultes concernés et sur le montant de ces frais ;
Considérant que les litiges relatifs à la détermination de la personne morale devant assurer la prise en charge des frais de soins, qui doivent être distingués des frais d'hébergement, ainsi qu'à la fixation du montant de ces frais constituent des différends relatifs à " l'application des législations et réglementations de sécurité sociale ", qui, en vertu de l'article L. 142-1 du Code de la sécurité sociale, relève du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'il appartient, en conséquence, aux juridictions compétentes de l'ordre judiciaire de juger quelle personne morale doit, en application de l'article 22 précité de la loi du 13 janvier 1989, prendre en charge, en l'espèce, les frais de soins inclus dans les frais de séjour ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le conflit a été élevé sur ces litiges ;
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 11 décembre 1997 par le préfet de Meurthe-et-Moselle est annulé.