Vu, enregistrée au secrétariat le 8 août 2006, l'expédition de l'arrêt du 4 août 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, saisie d'une requête de la société EURL Croisières lorraines " la Bergamote " tendant à l'annulation du jugement du 11 mai 2004 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Voies navigables de France à lui verser une somme de 55 711,78 euros en réparation du préjudice subi par son navire à la suite d'une collision avec un véhicule immergé dans le canal de la Marne au Rhin, le 12 septembre 2001 et une somme de 2000 euros, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de la compétence ;
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 19 mai 2003 par lequel la cour a décliné la compétence des juridictions judiciaires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;
Vu la loi n° 90-1168 du 29 décembre 1990 portant loi de finances pour 1991, notamment son article 124 ;
Vu la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 ;
Vu le décret n° 60-1441 du 26 décembre 1960 ;
Vu le décret n ° 91-797 du 20 août 1991 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Marie Delarue, membre du Tribunal,
- les observations de Me Balat, avocat de Voies navigables de France
- les conclusions de M. André Gariazzo, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'EURL Croisières lorraines " la Bergamote ", exploitant un bateau-restaurant sur le canal de la Marne au Rhin, a recherché devant le juge judiciaire la responsabilité de Voies navigables de France à raison du préjudice subi du fait des dommages consécutifs à la collision survenue le 12 septembre 2001 entre son navire et un véhicule immergé dans le canal ; que le tribunal de grande instance de Nancy, puis, sur contredit, la cour d'appel de Nancy, ont successivement décliné la compétence des juridictions judiciaires ; que le tribunal administratif, saisi à son tour, a rejeté au fond les prétentions de l'entreprise ; que la cour administrative d'appel a renvoyé, sur le fondement de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849, au Tribunal le soin de décider sur la compétence ;
Considérant que lorsqu'un établissement public tient de la loi la qualité d'établissement public industriel et commercial, les litiges nés de ses activités relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, à l'exception de ceux relatifs à celles de ses activités qui, telles la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique ;
Considérant que, selon l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991, l'établissement public Voies navigables de France constitue un établissement public industriel et commercial ;
Considérant que l'exploitation et l'entretien des voies navigables et de leurs dépendances, confiés à Voies navigables de France par l'article 124 de la loi de finances pour 1990, ne ressortissent pas, en eux-mêmes, de prérogatives de puissance publique ; que l'EURL Croisières lorraines " la Bergamote " étant un usager du service de la navigation, il appartient aux tribunaux de l'ordre judiciaire de connaître du litige qui l'oppose à Voies navigables de France à raison des dommages survenus au navire sur le canal de la Marne au Rhin ;
DECIDE :
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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant l'entreprise EURL Croisières lorraines " la Bergamote " à Voies navigables de France.
Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel de Nancy en date du 19 mai 2003 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant cette cour.
Article 3 : Les procédures suivies devant le tribunal administratif de Nancy et la cour administrative d'appel de Nancy sont déclarées nulles et non avenues, à l'exception de l'arrêt rendu par cette cour le 4 août 2006.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au Garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.
Délibéré dans la séance du 31 mars 2008 où siégeaient : M. Philippe Martin, Vice-Président du Tribunal des conflits, président ; M. Jean-Marie Delarue, M. Serge Daël, M. Jean-Louis Gallet, Mme Dominique Guirimand, M. Pierre Bailly, M. Franck Terrier, membres du Tribunal, Mme Marie-Helène Mitjavile, membre suppléant.
Lu en séance publique le 5 mai 2008