Vu, 1° sous le n° 3789, la lettre, enregistrée à son secrétariat le 15 juin 2010, par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. A et Mlle B au lycée David d'Angers devant le conseil de prud'hommes d'Angers ;
Vu les déclinatoires, présentés le 17 mars 2010 par le préfet de Maine-et-Loire, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par le motif que la demande de requalification du contrat liant les intéressés à leur employeur revient à contester la légalité de la convention de droit public qui fixe le cadre de ce contrat ;
Vu le jugement du 29 avril 2010 par lequel le conseil de prud'hommes d'Angers a rejeté les déclinatoires de compétence ;
Vu l'arrêté du 12 mai 2010 par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu, 2° sous le n° 3790, la lettre, enregistrée à son secrétariat le 15 juin 2010, par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Mlle C au lycée David d'Angers devant le conseil de prud'hommes d'Angers ;
Vu le déclinatoire présenté le 17 mars 2010 par le préfet de Maine-et-Loire, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par le même motif que sous le n° 3789 ;
Vu le jugement du 29 avril 2010 par lequel le conseil de prud'hommes d'Angers a rejeté le déclinatoire de compétence ;
Vu l'arrêté du 12 mai 2010 par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu, 3° sous le n° 3791, la lettre, enregistrée à son secrétariat le 15 juin 2010, par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Mme D, Mme E et autres au lycée David d'Angers devant le conseil de prud'hommes d'Angers ;
Vu les déclinatoires présentés le 17 mars 2010 par le préfet de Maine-et-Loire, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par le même motif que sous le n° 3789 ;
Vu le jugement du 29 avril 2010 par lequel le conseil de prud'hommes d'Angers a rejeté les déclinatoires de compétence ;
Vu l'arrêté du 12 mai 2010 par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu, sous les n°s susvisés, enregistré le 28 mai 2010 au parquet du tribunal de grande instance d'Angers, le mémoire présenté par M. A et autres, tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit par les motifs que leurs contrats sont de droit privé et qu'ils ne contestent pas la légalité des conventions ;
Vu, enregistré le 22 juillet 2010, le mémoire présenté par le ministre de l'éducation nationale qui conclut à la compétence de la juridiction administrative par le motif que l'action des requérants revient à contester la légalité de la convention de droit public qui fixe le cadre de leurs contrats ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 ;
Vu le code du travail ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jacques Arrighi de Casanova, membre du Tribunal,
- les conclusions de M. Didier Boccon-Gibod, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les arrêtés de conflit visés ci-dessus, pris dans des procédures opposant plusieurs agents au lycée David d'Angers qui les employait, soulèvent la même question de compétence ; qu'il y a lieu de les joindre et de statuer par une seule décision ;
Considérant que M. A, Mlle B et Mlle C ont saisi le conseil de prud'hommes d'Angers de demandes tendant à ce que les contrats qu'ils avaient conclus avec cet établissement public, sous le régime du contrat d'avenir alors prévu par l'article L. 322-4- 10 du code du travail, soient requalifiés en contrats à durée indéterminée, pour l'appréciation de l'indemnisation à laquelle ils estiment avoir droit en raison de carence de l'employeur dans leur formation ; que Mme D et vingt-deux autres agents, dont les contrats conclus sous le même régime avaient pris fin, ont saisi cette juridiction des mêmes demandes, assorties de conclusions tendant à l'indemnisation de ce qu'ils analysaient comme un licenciement ; qu'enfin Mme E, qui était pour sa part employée par ce même lycée sous le régime du contrat d'accompagnement dans l'emploi , alors prévu par l'article L. 322-4-7 du code du travail, a présenté les mêmes demandes que ces derniers ;
Considérant que, selon les dispositions, alors en vigueur, des articles L. 322-4-7 et L. 322-4-12 du code du travail, les contrats d'accompagnement dans l'emploi et les contrats d'avenir sont des contrats de travail de droit privé ; qu'en conséquence, les litiges nés à propos de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance de ces contrats relèvent en principe de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;
Considérant toutefois que, d'une part, dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la convention passée, notamment, entre l'Etat et l'employeur, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; que, d'autre part, le juge administratif est également seul compétent pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci n'entre en réalité pas dans le champ des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés visés par les dispositions du code du travail fixant le régime de ces contrats, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire ;
Considérant que les demandes de M. A et autres, qui ne mettent pas en cause la légalité des conventions de droit public ayant servi de cadre à la passation de leurs contrats de travail, tendent seulement à obtenir l'indemnisation des conséquences de la requalification et, pour certains d'entre eux, de la rupture des contrats qui les liaient au lycée David d'Angers ; que ces litiges relèvent en conséquence de la compétence du juge judiciaire ; que c'est, par suite, à tort que le conflit a été élevé ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêtés de conflit pris le 12 mai 2010 par le préfet de Maine-et-Loire sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé d'en assurer l'exécution.