Conflit sur renvoi du tribunal administratif de Marseille
Consorts X... c/ Commune de Rambaud
M. Edmond Honorat Rapporteur
M. Didier Boccon-Gibod Commissaire du gouvernement
Séance du 18 février 2013 Lecture du 18 mars 2013
LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu l'expédition du jugement en date du 30 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence relative à la demande formée par M. Michel X... et M. Lionel X... et tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commune de Rambaud (Hautes-Alpes) a refusé de rétablir à leur profit l'écoulement du trop-plein d'eau provenant de la fontaine communale et à ce qu'il soit enjoint à la commune de rétablir cet écoulement à son débit antérieur ;
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 29 avril 2009 déclarant irrecevable l'appel des consorts X... contre le jugement du 8 janvier 2008 par lequel le tribunal d'instance de Gap s'est déclaré incompétent pour connaître du litige ;
Vu le mémoire présenté pour la commune de Rambaud, qui conclut à ce que les juridictions de l'ordre administratif soient déclarées compétentes pour connaître du litige et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge des consorts X... au titre de l'article 75- I de la loi du 10 juillet 1991, par les motifs que les eaux captées par une commune pour alimenter une fontaine publique appartiennent, comme cette fontaine, au domaine public communal, de même que les eaux superflues et surabondantes qui en résultent ; qu'il en va de même du caniveau public qui assure l'écoulement de ces eaux jusqu'à la propriété des consorts X... ; que, si les conclusions des consorts X... devaient être regardées comme tendant au déplacement de la fontaine publique ou à ce que des travaux publics soient engagés en vue du raccordement de leur propriété à cette fontaine, de telles conclusions relèveraient également de la compétence des juridictions de l'ordre administratif ;
Vu le mémoire présenté pour les consorts X..., qui concluent à ce que les juridictions de l'ordre judiciaire soient déclarées compétentes pour connaître du litige et à ce que soit mise à la charge de la commune de Rambaud la somme de 3 000 euros au titre de l'article 75- I de la loi du 10 juillet 1991, par les motifs que les eaux superflues et surabondantes s'écoulant de la fontaine communale ainsi que le caniveau conduisant ces eaux à leur propriété relèvent du domaine privé de la commune ; qu'en effet, ces eaux ne sont pas destinées à la consommation publique et s'écoulent jusqu'à leur propriété par un branchement particulier ne comportant aucun aménagement spécial pour les besoins du service public ni a fortiori indispensable à ce service ; que ces eaux et ce caniveau ne constituent pas davantage les accessoires du domaine public ; qu'enfin, leurs conclusions ne tendent pas au déplacement ou à la transformation de la fontaine communale ;
Vu les pièces du dossier desquelles il résulte que la saisine a été communiquée au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, qui n'a pas produit d'observations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edmond Honorat, membre du Tribunal,- les conclusions de M. Didier Boccon-Gibod, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les consorts X... demandent qu'il soit ordonné à la commune de Rambaud (Hautes-Alpes) de rétablir l'écoulement vers leur propriété des eaux surabondantes provenant de la fontaine publique de la commune et issues d'une source captée par cette dernière ; que les eaux de source ainsi captées par la commune et destinées à l'alimentation d'une fontaine publique, de même que les eaux surabondantes s'écoulant de cette fontaine, appartiennent au domaine public de la commune ; qu'il en va également ainsi de la fontaine municipale et du caniveau situé le long de la voie publique, destiné à assurer l'écoulement du trop-plein de cette fontaine, qui constitue un accessoire de la voie publique ; qu'ainsi, le litige qui oppose les consorts X..., lesquels ne disposaient que d'une autorisation précaire et révocable relativement à l'usage de ces eaux, à la commune de Rambaud relève de la compétence des juridictions de l'ordre administratif ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des consorts X... et de la commune de Rambaud tendant à l'application des dispositions de l'article 75- I de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
Article 1er : La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître du litige qui oppose les consorts X... à la commune de Rambaud.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 30 mai 2012 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées, dans cette mesure, devant ce tribunal.
Article 3 : Les conclusions des consorts X... ainsi que celles de la commune de Rambaud tendant à l'application de l'article 75- I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.