Vu, enregistrée à son secrétariat le 30 novembre 2022, l'expédition du jugement du 29 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, saisi par Mme D... B... et autres d'une demande tendant à ce que la commune de Mont-Louis (Pyrénées-Orientales) soit condamnée à les indemniser des préjudices ayant résulté de la reprise de la concession funéraire dont la famille B... était titulaire dans le cimetière communal, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 32 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu l'ordonnance du 12 novembre 2020 par laquelle le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Perpignan a déclaré ce tribunal incompétent pour connaître de ce litige ;
Vu, enregistré à son secrétariat le 10 mars 2023, le mémoire présenté par la commune de Mont-Louis, qui conclut à la compétence de la juridiction administrative par le motif qu'en l'absence, en l'espèce, de destruction de la sépulture, les décisions contestées n'ont pas eu pour effet l'extinction d'un droit de propriété ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à Mme B... et autres et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. C... A..., membre du Tribunal,
- les observations de la SARL Didier Pinet pour la commune de Mont-Louis,
- les conclusions de M. Paul Chaumont, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... et autres, titulaires depuis 1954 d'une concession perpétuelle dans le cimetière de Mont-Louis (Pyrénées-Orientales), ayant découvert en 2017 qu'à la suite d'une délibération du 9 juillet 2013 du conseil municipal en autorisant la reprise, cette concession avait été attribuée à une autre famille par un arrêté du maire du 20 août 2014 et qu'une personne qui leur était étrangère y avait été inhumée, ont assigné la commune devant le tribunal judiciaire de Perpignan afin qu'elle soit condamnée à leur verser des dommages et intérêts. Par une ordonnance du 12 novembre 2020, le juge de la mise en état de ce tribunal a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ce litige. Mme B... et autres ont alors demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune à leur verser une indemnité. Par un jugement du 29 novembre 2022, le tribunal administratif a renvoyé au Tribunal, sur le fondement de l'article 32 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence.
2. Sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l'État ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative. Cette compétence, qui découle du principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires posé par l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et par le décret du 16 fructidor an III, ne vaut toutefois que sous réserve des matières dévolues à l'autorité judiciaire par des règles ou principes de valeur constitutionnelle. Dans le cas d'une décision administrative portant atteinte à la propriété privée, le juge administratif, compétent pour statuer sur le recours en annulation d'une telle décision et, le cas échéant, pour adresser des injonctions à l'administration, l'est également pour connaître de conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette décision administrative, hormis le cas où elle aurait pour effet l'extinction du droit de propriété.
3. Mme B... et autres tiraient de la concession funéraire accordée à titre perpétuel à M. E... B... en 1954 un droit réel immobilier qui s'est trouvé éteint par la reprise de cette concession et le transfert dans l'ossuaire communal des restes des personnes qui y étaient inhumées, suivie de la réattribution de l'emplacement en cause en vue de l'inhumation d'une personne étrangère à la famille B.... La juridiction judiciaire est seule compétente pour connaître de la demande des intéressés tendant à la condamnation de la commune à réparer les conséquences de cette dépossession dont ils soutiennent qu'elle est irrégulière. Il appartiendra, le cas échéant, au juge judiciaire de saisir le juge administratif d'une question préjudicielle relative à la légalité des décisions des autorités communales.
D E C I D E :
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Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître de la demande formée par Mme B... et autres.
Article 2 : L'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Perpignan du 12 novembre 2020 est déclarée nulle et non avenue. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Montpellier est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 29 novembre 2022.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme D... B..., première dénommée pour l'ensemble des requérants, à la commune de Mont-Louis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.