Vu, enregistrée à son secrétariat le 12 mars 2024, l'expédition de l'arrêt du 6 mars 2024 par lequel la Cour de cassation (chambre sociale), saisie du pourvoi formé par la commune de Toulouse contre M. B... A... et tendant à l'annulation de l'arrêt du 14 janvier 2022 de la cour d'appel de Toulouse, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu, enregistré le 13 mai 2024, le mémoire présenté par le cabinet Buk Lament-Robillot pour M. A..., tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente, par les motifs que le service public du crématorium présente un caractère industriel et commercial ;
Vu, enregistré le 17 mai 2024, le mémoire présenté par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, qui fait valoir que le service public du crématorium, compte tenu de ses modalités d'organisation et de fonctionnement, devrait être regardé comme présentant un caractère industriel et commercial ;
Vu, enregistré le 31 mai 2024, le mémoire présenté par la SCP Foussard-Froger pour la commune de Toulouse, tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente, par les motifs que le service public du crématorium, dont la gestion appartient exclusivement aux communes et établissements de coopération intercommunale, présente un caractère administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu le décret n°2015-233 du 27 février 2015 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jacques-Henri Stahl, membre du Tribunal,
- les observations du cabinet Buk Lament-Robillot pour M. A...,
- les observations de la SCP Foussard-Froger pour la commune de Toulouse,
- les conclusions de M. Paul Chaumont, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat à durée indéterminée conclu à compter du 1er mars 2008, prenant la suite d'un précédent contrat à durée déterminée, M. A... a été recruté par la commune de Toulouse en qualité d'assistant funéraire à la régie des pompes funèbres de la commune pour être affecté au crématorium de Cornebarrieu géré par la commune. Il a saisi le conseil des prud'hommes de Toulouse, le 23 mai 2018, aux fins de résiliation de son contrat de travail. En cours d'instance, par arrêté du 3 juillet 2018, il a été admis à faire valoir ses droits à la retraite et radié des cadres. M. A... a alors demandé au conseil des prud'hommes la requalification de cette mise à la retraite en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement de diverses indemnités. Par jugement du 11 mai 2021, le conseil des prud'hommes de Toulouse a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ce litige. Par arrêt du 14 janvier 2022, la cour d'appel de Toulouse a toutefois infirmé ce jugement et renvoyé les parties devant le conseil des prud'hommes. Saisie d'un pourvoi en cassation par la commune de Toulouse contre cet arrêt, la Cour de cassation, par arrêt du 6 mars 2024, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence.
2. En vertu de l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, la mission de service public du service extérieur des pompes funèbres " peut être assurée par les communes, directement ou par voie de gestion déléguée. Les communes ou leurs délégataires ne bénéficient d'aucun droit d'exclusivité pour l'exercice de cette mission. Elle peut être également assurée par toute autre entreprise ou association bénéficiaire de l'habilitation prévue à l'article L. 2223-23 ". Selon l'article L. 2223-23 du même code, les " régies, les entreprises ou les associations et chacun de leurs établissements qui, habituellement, sous leur marque ou non, fournissent aux familles des prestations énumérées à l'article L. 2223-19 ou définissent cette fourniture ou assurent l'organisation des funérailles doivent être habilités à cet effet selon des modalités et une durée prévues par décret en Conseil d'Etat ".
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2223-40 du même code : " Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale sont seuls compétents pour créer et gérer les crématoriums et les sites cinéraires. Les crématoriums et les sites cinéraires qui leur sont contigus peuvent être gérés directement ou par voie de gestion déléguée. Les sites cinéraires inclus dans le périmètre d'un cimetière ou qui ne sont pas contigus à un crématorium doivent être gérés directement. " En vertu de l'article L. 2223-41 du même code, les " régies, entreprises ou associations gestionnaires d'un crématorium conformément à l'article L. 2223-40 sont soumises à l'habilitation prévue à l'article L. 2223-23 ".
4. Compte tenu de son objet, de l'origine de ses ressources, constituées principalement du prix acquitté par les usagers en paiement des prestations, et de ses modalités de fonctionnement, marquées par la pluralité des intervenants publics ou privés, le service extérieur des pompes funèbres assuré par la régie des pompes funèbres de la commune de Toulouse présente le caractère d'un service public industriel et commercial. Il en va de même pour la gestion, par la régie des pompes funèbres, du crématorium de Cornebarrieu où était affecté M. A..., sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'article L. 2223-40 réserve aux communes la compétence pour créer et gérer les crématoriums.
5. Il s'ensuit que M. A..., employé comme agent au sein de ce crématorium, était lié à la commune de Toulouse par un contrat de droit privé. Par suite, le litige l'opposant à la commune relève de la compétence de la juridiction judiciaire.
D E C I D E :
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Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à commune de Toulouse, à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au ministre de la transformation et de la fonction publiques.