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03/09/2024 | FRANCE | N°24/00718

France | France, Tribunal judiciaire de Créteil, Section des référés, 03 septembre 2024, 24/00718


MINUTE N° :
ORDONNANCE DU : 03 Septembre 2024
DOSSIER N° : N° RG 24/00718 - N° Portalis DB3T-W-B7I-VB52
CODE NAC : 30B - 0A
AFFAIRE : S.A.S. ALPHA CYGNI C/ S.A.S. GT AUTO ECOLE


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL

Section des Référés

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ


LE JUGE DES REFERES : Madame Elise POURON, Juge

LE GREFFIER : Madame Stéphanie GEULIN, Greffier


PARTIES :

DEMANDERESSE

S.A.S. ALPHA CYGNI, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 890 790 819, dont le siège social est sis 29 rue Vernet - 75008 PARIS

représentée par Me Jérôme BARBET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0465





DEFENDERESSE

S.A.S. GT AUTO ECOLE, immatriculée au...

MINUTE N° :
ORDONNANCE DU : 03 Septembre 2024
DOSSIER N° : N° RG 24/00718 - N° Portalis DB3T-W-B7I-VB52
CODE NAC : 30B - 0A
AFFAIRE : S.A.S. ALPHA CYGNI C/ S.A.S. GT AUTO ECOLE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL

Section des Référés

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

LE JUGE DES REFERES : Madame Elise POURON, Juge

LE GREFFIER : Madame Stéphanie GEULIN, Greffier

PARTIES :

DEMANDERESSE

S.A.S. ALPHA CYGNI, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 890 790 819, dont le siège social est sis 29 rue Vernet - 75008 PARIS

représentée par Me Jérôme BARBET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0465

DEFENDERESSE

S.A.S. GT AUTO ECOLE, immatriculée au RCS de CRETEIL sous le n° 847 885 100, dont le siège social est sis 18 rue du Docteur Charcot - 94260 FRESNES

non représentée

Débats tenus à l’audience du : 23 Juillet 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : 03 Septembre 2024
Ordonnance rendue par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2024

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 15 mars 2019, la société SCS SPINOZIMMAG a donné à bail commercial à la S.A.S. GT AUTO ECOLE des locaux situés ZAC CHARCOT ZOLA, 18 rue du Docteur Charcot à FRESNES (94260), moyennant un loyer annuel de 18 000,00 €, hors charges et hors taxes, payable trimestriellement, par avance.

La société SCS SPINOZIMMAG a fait l’objet d’une fusion-absorption avec la S.A.S. PIERRES INVESTISSEMENT FORME.

Par acte du 5 décembre 2022 la S.A.S. ALPHA CYGNI a acquis en pleine propriété le bien susvisé auprès de la S.A.S. PIERRES INVESTISSEMENT.

Des loyers sont demeurés impayés.

La S.A.S. ALPHA CYGNI a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire par acte d’huissier du 6 février 2024 à la S.A.S. GT AUTO ECOLE pour une somme de 12 661,47 € au titre de l’arriéré locatif au 29 janvier 2024.

C’est dans ces conditions que par acte d’huissier du 7 mai 2024, la S.A.S. ALPHA CYGNI a fait assigner la S.A.S. GT AUTO ECOLE devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de :
- constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 6 mars 2024,
- ordonner l'expulsion de la S.A.S. GT AUTO ECOLE et celle de tous occupants de son chef des lieux loués avec le concours de la force publique et d’un serrurier si besoin est, sous astreinte de 300,00 € par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir jusqu’à parfait délaissement,
- ordonner l’enlèvement des meubles et facultés mobilière se trouvant dans les lieux en un lieu approprié, aux frais, risque et périls de la S.A.S. GT AUTO ECOLE qui disposera d’un délai d’un mois pour les retirer à compter de la sommation qui sera délivrée par huissier chargé de l’exécution,
- condamner la S.A.S. GT AUTO ECOLE à payer à la S.A.S. ALPHA CYGNI :
* la somme de 25 277,58 € au titre de l'arriéré locatif arrêté au 6 mars 2024,
* la somme de 183,40 euros TTC correspondant au coût du commandement de payer,
* les pénalités contractuelles de retard calculées au taux d’intérêt légal connu à la date d’exigibilité majoré de 5 %, sans pouvoir être inférieur à 5 % par an, et d’autre part, une majoration de 20 % des sommes dues,
* la somme de 40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement prévue par les articles L. 441-10 et D. 441-5 du code du commerce ;
* la somme de 45 774,72 euros au titre de l’indemnité due au bailleur en réparation du préjudice subi, correspondant à neuf mois de loyers au jour de résiliation du bail le 6 mars 2024, laquelle sera indexée au de son paiement, conformément à l’article 14.3 du bail,
* la somme trimestrielle du 10 172,16 euros HT/HC, soumise à indexation dans les mêmes conditions que le loyer et augmenté des charges, taxes et accessoires, le tout majoré de la TVA au taux en vigueur à titre d’indemnité d’occupation, calculée prorata temporis à compter du jour de la résiliation le 6 mars 2024, et jusqu’à l’entière libération des locaux, la restitution des clefs et leur remise en état si des réparations s’avéraient nécessaire ;
Dire que cette indemnité d’occupation sera assortie des pénalités de retard contractuellement prévues par l’article 14.1 du bail en cas de retard de paiement ;
- ordonner que le dépôt de garantie demeurera acquis au bailleur ;
- condamner la S.A.S. GT AUTO ECOLE au paiement d'une somme de 5 000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par acte du 17 juillet 2024, la S.A.S. ALPHA CYGNI fait signifier par commissaire de justice selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, des conclusions à la S.A.S. GT AUTO ECOLE, aux termes desquelles elle maintient l’ensemble de ses demandes mais se désiste de ses demandes d’expulsion et d’enlèvement des meubles, l’état des lieux de sortie et la restitution des clés des locaux ayant eu lieu le 6 juin 2024.

Il convient de se référer à l’acte introductif d’instance et aux écritures de la S.A.S. ALPHA CYGNI pour un plus ample exposé des moyens qui y sont contenus.

À l’audience du 23 juillet 2024, la S.A.S. ALPHA CYGNI, par l'intermédiaire de son conseil, a maintenu les prétentions de ses conclusions et les moyens qui y sont contenus.

Bien que régulièrement assignée par acte remis à étude, la S.A.S. GT AUTO ECOLE n'a pas constitué avocat.

La procédure a été dénoncée aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce.

À l’issue des débats, il a été indiqué à la partie représentée que l’affaire était mise en délibéré et que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 3 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande relative à l’acquisition de la clause résolutoire et les demandes qui en découlent :

L’article 834 du code de procédure civile dispose que dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

La juridiction des référés n'est toutefois pas tenue de caractériser l'urgence, au sens de l'article 834 du code de procédure civile, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d'un bail.

L’article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Le bailleur, au titre d'un bail commercial, demandant la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire comprise dans le bail doit rapporter la preuve de sa créance.

Le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d’une clause contenue à l’acte à cet effet, à condition que :

1. le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit manifestement fautif,

2. le bailleur soit, de toute évidence, en situation d'invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause,

3. la clause résolutoire soit dénuée d'ambiguïté et ne nécessite pas interprétation ; en effet, la clause résolutoire d'un bail doit s'interpréter strictement.

En l’espèce, la soumission du bail au statut des baux commerciaux ne donne lieu à aucune discussion.

Il n’existe aucune contestation sérieuse sur la régularité du commandement du 6 février 2024 en ce qu'il correspond exactement au détail des montants réclamés préalablement au preneur par le bailleur. En annexe du commandement, figure en effet le détail complet des loyers et charges dus et le décompte des versements effectués. Le commandement précise qu'à défaut de paiement dans le délai d'un mois, le bailleur entend expressément se prévaloir de la clause résolutoire incluse dans le bail ; la reproduction de la clause résolutoire et de l'article L. 145-17 alinéa 1 du code de commerce y figurent. Le commandement contenait ainsi toutes les précisions permettant au locataire de connaître la nature, les causes et le montant des sommes réclamées, de procéder au règlement des sommes dues ou de motiver la critique du décompte.

En faisant délivrer ce commandement, la S.A.S. ALPHA CYGNI n’a fait qu’exercer ses droits légitimes de bailleur face à un locataire ne respectant pas les clauses du bail alors que celles-ci avaient été acceptées en toute connaissance de cause.

Ce commandement détaille le montant de la créance, à savoir 12 661,47 €.

Les causes de ce commandement n’ont pas été acquittées dans le mois de sa délivrance.

Dès lors, la clause résolutoire est acquise et le bail se trouve résilié de plein droit avec toutes conséquences de droit à compter du 7 mars 2024.

L’article 835, alinéa 2 du code de procédure dispose que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, une provision peut être accordée au créancier.

Il est rappelé qu’à compter de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire le preneur n'est plus débiteur de loyers mais d'une indemnité d'occupation.

L’indemnité d’occupation due par la S.A.S. GT AUTO ECOLE depuis l’acquisition de la clause résolutoire et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, sera fixée à titre provisionnel au montant du loyer contractuel, outre les charges, taxes et accessoires.

Il n’y a pas lieu à majoration de la somme par des pénalités de retard, car cette somme excéderait le revenu locatif dont le bailleur se trouve privé du fait de la résiliation du bail et serait susceptible de s'analyser en une clause pénale que le juge du fond peut réduire si elle est manifestement excessive au regard de la situation financière du locataire. Elle relève donc de l'appréciation de ce juge et ne peut donc être accueillie devant le juge des référés, juge de l'évidence, qu'à concurrence du montant du loyer courant, charges en sus, auquel le bailleur peut prétendre en cas de maintien dans les lieux après résiliation du bail.

Par ailleurs, il n’y a pas lieu à indexation de la somme, le juge des référés n’ayant pas le pouvoir d’arbitrer le montant de cette indemnité sauf par référence au loyer contractuel dont le montant est seul exclusif de toute contestation.

S’agissant du paiement, par provision, de l’arriéré locatif, il convient de rappeler qu’une demande en paiement de provision au titre d'une créance non sérieusement contestable relève du pouvoir du juge des référés sans condition de l'existence d'une urgence, aux termes de l’article 835 du code de procédure civile. Le montant de la provision allouée en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée

Aux termes de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l’espèce, au vu du décompte produit par la S.A.S. ALPHA CYGNI, l'obligation de la S.A.S. GT AUTO ECOLE au titre des loyers, charges, taxes, accessoires et indemnités d’occupation au 28 mars 2024 n'est pas sérieusement contestable à hauteur de 21 641,65 € [déduction faite des intérêts de retard facturés le 8 janvier 2024 et dont le monteur se heurte à une contestation sérieuse], somme au paiement de laquelle il convient de condamner la S.A.S. GT AUTO ECOLE avec intérêts au taux légal.

Sur les pénalités contractuelles de retard, indemnité pour le préjudice subi et dépôt de garantie :

D’une part, la clause pénale de l’article 14.1 du bail dont il est demandé de faire application, est susceptible comme telle d’être modérée par le juge du fond, en application des dispositions de l’article 1231-5 du code civil, de sorte qu’il n’y a pas lieu à référé sur ce point.

D’autre part, l’indemnité de réparation du préjudice subi par le bailleur demandée conformément à l’article 14.3 du bail, est susceptible d’être qualifiée de clause pénale et ne peut être accordée, car elle exigerait un examen au fond, ce qui excède la compétence du juge des référés, de sorte qu’il n’y a pas lieu à référé sur ce point.

Enfin, la clause du bail relative au dépôt de garantie s’analyse comme une clause pénale comme telle susceptible d’être modérée par le juge du fond, en application des dispositions de l’article 1231-5 du code civil. Par suite, il n’y a pas lieu à référé sur ce point.

Sur la demande relative à la pénalité de 40 euros :

La demanderesse sollicite la mise en œuvre des dispositions des articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce et la condamnation de la S.A.S. GT AUTO ECOLE à lui payer la somme de 40 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

Il convient de relever que les dispositions des articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce s’appliquent aux activités de production, de distribution ou de services faisant l’objet de facturation périodiques.

Il ne ressort pas de la compétence du juge des référés de se prononcer sur l’application de ces dispositions au paiement avec retard de loyers dans le cadre d’un bail commercial.

Il convient en conséquence de dire n’y avoir lieu à référé sur cette demande.

Sur les demandes accessoires :

L’article 491, alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens. L’article 696 dudit code précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La S.A.S. GT AUTO ECOLE, qui succombe, doit supporter la charge des dépens, conformément aux dispositions susvisées, comprenant notamment le coût du commandement de payer à hauteur de 181,40 euros, conformément au montant mentionné à l’acte.

Aucun élément tiré de l’équité ou de la situation économique de la S.A.S. GT AUTO ECOLE ne permet d’écarter la demande de la S.A.S. ALPHA CYGNI formée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Celle-ci sera cependant évaluée à la somme de 1 000,00 € en l’absence d’éléments de calcul plus explicites versés aux débats.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

CONSTATONS l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 7 mars 2024,

FIXONS à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par la S.A.S. GT AUTO ECOLE, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires et CONDAMNONS la S.A.S. GT AUTO ECOLE à la payer,

CONDAMNONS par provision la S.A.S. GT AUTO ECOLE à payer à la S.A.S. ALPHA CYGNI la somme de 21 641,65 € au titre du solde des loyers, charges, accessoires et indemnités d’occupation arriérés au 28 mars 2024, avec intérêts au taux légal,

DISONS n’y avoir lieu à référé sur les demandes formées au titre des pénalités contractuelles de retard, de l’indemnité de réparation du préjudice, du dépôt de garantie et de l’indemnité au titre des articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce,

CONDAMNONS la S.A.S. GT AUTO ECOLE aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement à hauteur de 181,40 euros,

CONDAMNONS la S.A.S. GT AUTO ECOLE à payer à la S.A.S. ALPHA CYGNI la somme de 1 000,00 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETONS toute autre demande plus ample ou contraire,

RAPPELONS que l'ordonnance de référé rendue en matière de clause résolutoire insérée dans le bail commercial a autorité de chose jugée provisoire et est exécutoire à titre provisoire.

FAIT AU PALAIS DE JUSTICE DE CRÉTEIL, le 3 septembre 2024.

LA GREFFIÈRE, LE JUGE DES RÉFÉRÉS


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Créteil
Formation : Section des référés
Numéro d'arrêt : 24/00718
Date de la décision : 03/09/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée en référé (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-03;24.00718 ?
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