TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON
Chambre 3 cab 03 D
N° RG 22/01058 - N° Portalis DB2H-W-B7G-WO5R
Notifiée le :
Expédition à :
Maître Cédric VIAL de la SELARL BCV AVOCATS - 892
Maître Olivier COSTA de la SELARL VALORIA SOCIÉTÉ D’AVOCATS - 88
ORDONNANCE
Le 02 Septembre 2024
ENTRE :
DEMANDEUR
Monsieur [Z] [M] [B],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Olivier COSTA de la SELARL VALORIA SOCIÉTÉ D’AVOCATS, avocats au barreau de LYON
ET :
DEFENDERESSE
S.A.R.L. AVENIR ENERGIE,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Cédric VIAL de la SELARL BCV AVOCATS, avocats au barreau de LYON
Vu l’assignation délivrée le 10 janvier 2020 par laquelle Monsieur [Z] [M] [B] demande à la société AVENIR ENERGIE la reprise de désordres survenus à l’occasion de travaux d’installation de pompe à chaleur, de mise en place de centrale solaire photovoltaïque et de construction de terrasse pour sa maison de [Localité 3] ;
Vu les conclusions d’incident notifiées les 22 septembre 2023 et 22 mars 2024, par lesquelles Monsieur [B] sollicite le rejet des demandes de la société AVENIR ENERGIE, la dépose sans délai de la pompe à chaleur et la condamnation à la somme de 1000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions d’incident notifiées le 21 novembre 2023, par lesquelles la société AVENIR ENERGIE sollicite le rejet des demandes de Monsieur [B] et sa condamnation à la somme de 2000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Les parties ayant fait valoir leurs observations orales à l’audience du 24 juin 2024 ;
Vu l’article 789 du code de procédure civile ;
Monsieur [B] fait valoir qu’aux termes de l’expertise amiable contradictoire réalisée le 20 mai 2020 par le cabinet Agex mandaté par sa compagnie d’assurances, la société AVENIR ENERGIE est responsable des fuites constatées sur le système de réfrigération qui avait fait l’objet d’une réception avec réserves le 28 août 2019, ce qu’elle a reconnu devant l’expert. Il souligne que Monsieur [G], expert judiciaire désigné par le juge des référés sur sa demande, a déposé un rapport le 14 février 2023, où il impute des défauts de pose à la société AVENIR PROTECTION après avoir fait notamment le constat de fuites. Il se réfère enfin à un second rapport du cabinet Agex en date du 10 août 2023, lequel précise que les fuites sont constituées de liquide frigorigène et qu’il y a urgence à déposer le matériel en raison de leur caractère nocif pour la santé humaine que confirment les informations qu’il a recueillies sur un site gouvernemental.
Monsieur [B] remet en cause un autre avis technique, émis le 16 mai 2022 par Monsieur [I], sapiteur de l’expert judiciaire, selon lequel les prétendues fuites seraient en réalité une mauvaise évacuation d’eau de condensation provenant d’un défaut d’entretien. Il critique la brièveté des conclusions du sapiteur, qui par ailleurs font fi des défauts de pose autrement constatées par l’expert judiciaire lors d’une réunion de septembre 2021 et ne sont pas affirmatives.
La société AVENIR ENERGIE s’appuie sur une réception sans réserve qu’elle situe le 16 juillet 2019, avant le signalement de deux difficultés qu’elle s’était engagée à corriger. Elle considère que l’expert judiciaire, sur la foi du rapport de Monsieur [I], a imputé les dommages aux ouvrages, et notamment l’existence de condensat au niveau de certaines unités intérieures, à un défaut d’entretien de la part de Monsieur [B] et que le rapport non-contradictoire de la société Agex en date du 10 août 2023 ne repose pas sur une analyse des fuites. Elle fait la distinction avec les fuites de réfrigérant qui mettent l’appareil en sécurité et nécessitent simplement selon l’expert un remplacement des liaisons, ce produit étant du gaz R32 sans lien avec les écoulements constatés et au demeurant sans toxicité.
La société AVENIR ENERGIE juge l’inaction manifestée par Monsieur [B] depuis le 10 août 2023 comme étant la preuve que les fuites ne sont pas structurelles mais liées à un usage estival en mode climatisation et qu’elles ne se sont pas renouvelées.
Le premier rapport du 26 mai 2020 fait état d’une fuite du système de réfrigération sur le mur de la chambre « [C] » et celui du 10 août 2023, d’une fuite dans la chambre « [N] » et d’une fuite dans la chambre « [O] » ne pouvant être que du liquide frigorigène (mur et sol). Il ne peut cependant pas être tiré de conclusions définitives de ce rapport, contesté par la société AVENIR ENERGIE et non soumis à l’appréciation d’un expert impartial.
L’expert judiciaire a déposé son rapport en l’état le 23 novembre 2022, sans pré-rapport ni recueil des dires récapitulatifs des parties en raison de l’absence de versement par Monsieur [B] d’un complément de consignation. Ayant constaté des traces de fuites sur le mur et le sol du bureau, de la chambre « [H] » et de la chambre « [N] » (3 unités intérieures), il distingue un désordre de non-fonctionnement de 4 unités intérieures en raison de fuites de fluide frigorigène, deux dans le salon, une dans l’entrée et une dans la cuisine, d’un autre désordre de fuites de condensats causant des dégradations sur les murs et sols, ce dernier étant le seul auquel peuvent être rattachées les traces de fuite constatées dans le bureau et deux chambres (page 32).
Plus loin, le même rapport invoque deux fuites de fluide frigorigène R32 sur les liaisons rallongées au contraire des règles de l’art, pour expliquer la panne de 4 unités intérieures raccordées à un même groupe extérieur (pages 33 et 34, 40, 44), mais aussi des dommages à l’existant sous la forme de taches sur les peintures et les parquets à l’endroit de « certaines » unités intérieures, imputées à une mauvaise évacuation des condensats en raison d’un défaut d’entretien (page 40) ou des défauts de pose (pages 34, 44). Ni les conclusions de l’expert, ni le rapport de Monsieur [I] ne citent un dommage aux existants au chapitre « diagnostic sur la pompe à chaleur à l’arrêt ». Cela confirme le fait que les fuites dont les traces sont observables ne sont pas du liquide frigorigène.
L’information générale recueillie par le demandeur sur les liquides frigorigènes ne suffit pas à démontrer la toxicité du fluide R32 que la documentation réunie par la défenderesse tend à démentir. La cessation des fuites sera aisément obtenue au moyen du remplacement des liaisons fuyardes, ainsi que le préconise l’expert judiciaire. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu à la dépose de la pompe à chaleur et que la demande de mesure provisoire déposée en ce sens sera rejetée.
Monsieur [B] estime que ses frais d’avocats doivent être supportés par la société AVENIR PROTECTION qui est responsable des fuites et qu’en tout cas il n’a pas à supporter ceux de cette société, étant légitime à craindre pour sa santé et celle de ses enfants.
La société AVENIR PROTECTION fait valoir le manque de sérieux de l’incident pour réclamer le paiement de ses frais d’avocat.
Si Monsieur [B] succombe à l’incident, cela résulte en partie d’un rapport d’expertise dépourvu de précisions suffisantes en raison du non-versement d’un complément de consignation qui est certes de son fait, mais qui ne relève pas pour autant d’une faute établie de sa part. Il s’ensuit que chaque partie supportera ses frais d’avocat et que les demandes d’indemnisation en ce sens seront rejetées.
Les dépens seront réservés pour être jugés en même temps que le fond.
PAR CES MOTIFS,
Nous, juge de la mise en état, par ordonnance contradictoire, rendue publiquement et en dernier ressort :
REJETONS la demande de dépose de la pompe à chaleur et les autres demandes,
RESERVONS les dépens,
RENVOYONS à l’affaire à l’audience de mise en état du 27 Janvier 2025 pour nouvelles conclusions au fond de Monsieur [B].
RAPPELONS que les conclusions et messages notifiés par RPVA devront l’être au plus tard le 22 Janvier 2025 à minuit, à peine de rejet ;
En foi de quoi le Juge de la mise en état et le Greffier ont signé la présente décision.
LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT
Patricia BRUNON Marc-Emmanuel GOUNOT