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04/09/2024 | FRANCE | N°21/01039

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 04 septembre 2024, 21/01039


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 2]


JUGEMENT N°24/03327 du 04 Septembre 2024

Numéro de recours: N° RG 21/01039 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YVI4

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Madame [F] [W]
née le 01 Mars 1948 à [Localité 4] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Julie ANDREU, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Florent TIZOT, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
S.A. [13] venant aux droits de la so

ciété [14]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Me Ghislaine JOB-RICOUART, avocat au barreau de MARSEILLE


Appelée en la cause...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/03327 du 04 Septembre 2024

Numéro de recours: N° RG 21/01039 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YVI4

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Madame [F] [W]
née le 01 Mars 1948 à [Localité 4] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Julie ANDREU, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Florent TIZOT, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
S.A. [13] venant aux droits de la société [14]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Me Ghislaine JOB-RICOUART, avocat au barreau de MARSEILLE

Appelée en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Localité 3]
dispensée de comparaître

Organisme FIVA
[Adresse 19]
[Adresse 19]
[Localité 7]
représentée par Me Alain TUILLIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Christian MULLER, avocat au barreau de MARSEILLE

DÉBATS : À l'audience publique du 05 Juin 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : MEO Hélène, Première Vice-Présidente

Assesseurs : LEVY Philippe
TRAN VAN Hung

L’agent du greffe lors des débats : KALIMA Rasmia
L’agent du greffe lors du délibéré : MULLERI Cindy

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 04 Septembre 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [G] [W] a travaillé au sein de la société [14] aux droits de laquelle vient la société [13] en qualité de soudeur du 16 janvier 1978 au 12 juillet 1996.

Un certificat médical initial établi le 4 juillet 2019 a diagnostiqué un cancer bronchique primitif et a accompagné la déclaration de maladie professionnelle effectuée par Monsieur [G] [W] le 22 juillet 2019, lequel est décédé le 19 octobre 2019.

Le 22 octobre 2019, la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie (CPCAM) des Bouches-du-Rhône a reconnu que la maladie dont souffrait Monsieur [G] [W] était en relation avec son activité professionnelle au titre du tableau n° 30 bis, et a retenu un taux d'incapacité permanente de 100 % à la date de consolidation.

Selon notification du 3 février 2020, son décès a également été pris en charge par la CPCAM des Bouches-du-Rhône sur le même fondement, l'organisme ayant alloué une rente d'ayant droit à Madame [F] veuve [W] le 9 mars 2020.
Les ayants droit de Monsieur [G] [W] se sont rapprochés du FIVA et ont accepté l'offre d'indemnisation qui leur a été faite le 23 octobre 2020.

Madame [F] veuve [W] a par ailleurs saisi la CPCAM des Bouches-du-Rhône d'une demande de conciliation dans le cadre de la procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur par courrier du 9 juillet 2020 qui n'a pas abouti.

C'est dans ce contexte que, par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 8 avril 2021, Madame [F] veuve [W] a saisi ce tribunal pour voir reconnaître que la maladie professionnelle dont souffrait Monsieur [G] [W], et dont il est décédé, est imputable à la faute inexcusable de son employeur.

Le FIVA est intervenu volontairement à la procédure suivant courrier recommandé enregistré le 7 mai 2021 afin d'exercer son action subrogatoire.

Les parties ont été convoquées à une audience dématérialisée de mise en état le 17 janvier 2024, date à laquelle un calendrier de procédure a été établi, avant clôture de la procédure avec effet différé au 22 mai 2024 et fixation à l'audience de plaidoirie du 5 juin 2024.

Reprenant oralement ses dernières conclusions, le conseil de Madame [F] [W], agissant en son nom personnel et en qualité d'ayant droit de son époux décédé, sollicite du tribunal, au bénéfice de l'exécution provisoire, de :
dire et juger que la maladie professionnelle dont était atteint Monsieur [G] [W], et dont il est décédé, est la conséquence de la faute inexcusable de son employeur, la société [12] venant aux droits de la société [14] : En conséquence :
fixer au maximum légal la majoration de la rente servie à Madame [F] [W] ;lui allouer l'indemnisation forfaitaire ;dire que la caisse fera l'avance des sommes allouées ;condamner la partie succombant à lui verser une indemnité de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de son recours, en réponse à la remise en cause du caractère professionnel de la maladie par l'employeur, Madame [F] [W] fait valoir que ce dernier, auquel il revient de démontrer pour détruire la présomption d'imputabilité que le travail du salarié n'a joué aucun rôle dans le développement de la maladie, n'apporte aucun élément contraire, se contentant d'affirmer que le poste de soudeur ne fait pas partie de la liste limitative des travaux du tableau 30 bis.
Madame [F] [W] précise par ailleurs que son époux était conduit à intervenir sur des sites extérieurs telles que les sociétés pétrochimiques à [Localité 16] et [Localité 15] et que l'employeur ne démontre pas l'absence d'une exposition à l'amiante de son salarié.
S'agissant de la faute inexcusable de l'employeur, Madame [F] [W] estime qu'elle est caractérisée dès lors que l'employeur, compte-tenu de son domaine d'activité, devait nécessairement avoir conscience du danger occasionné par l'exposition à l'amiante dont le risque pour la santé était connu depuis le début du siècle dernier, et qu'il n'a pas mis en œuvre les mesures nécessaires pour préserver ses salariés des risques liés à cette inhalation.

La société [13], représentée par son avocat qui réitère ses conclusions récapitulatives n°2, demande au tribunal de :
prononcer le rabat de l'ordonnance de clôture et déclarer recevables les présentes conclusions ;juger que les conditions du tableau n° 30 bis ne sont pas remplies de sorte que la maladie puis le décès de Monsieur [G] [W] n'ont pas une origine professionnelle ;juger qu'elle n'a commis aucune faute inexcusable ;débouter Madame [F] [W] et le FIVA de toutes leurs demandes À titre infiniment subsidiaire :
ramener à de plus justes proportions l'indemnisation des préjudices comme suggéré dans le dispositif de ses écritures ;condamner Madame [F] [W] à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses écritures, l'employeur, s'agissant de l'origine professionnelle de la maladie puis du décès, expose que son salarié n'effectuait pas des travaux visés limitativement dans le tableau n° 30 bis, que le poste de Monsieur [G] [W], soudeur, consistait à préparer les pièces à souder en les dégraissant et les décapant puis à les assembler par fusion en les portant à haute température, et conteste la sincérité des attestations produites par la demanderesse dont elle demandent qu'elles soient écartées des débats.
Il ajoute que Madame [F] [W] ne démontre pas que son époux a été exposé de façon habituelle à l'inhalation de poussières d'amiante compte tenu de la nature de l'activité de la société sans participation au processus de fabrication ou de transformation d'amiante.
S'agissant de la conscience du danger, l'employeur fait observer que celle-ci ne peut être appréciée comme celle d'un professionnel de l'amiante et que les travaux d'usinage et de découpe de matériaux contenant de l'amiante, d'entretien et de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante n'ont figuré au tableau n° 30 bis qu'à compter du 22 mai 1996 alors que Monsieur [G] [W] a quitté son emploi le 21 juillet 1996.

Reprenant ses conclusions récapitulatives, le FIVA, par l'intermédiaire de son conseil, demande au tribunal de :
déclarer recevable l'action de Madame [F] [W] dans le seul but de faire reconnaître l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur de son époux ;déclarer recevable sa demande en qualité de subrogée dans les droits de la veuve de Monsieur [G] [W] ;juger que la maladie professionnelle dont était atteint Monsieur [G] [W] est la conséquence de la faute inexcusable de la société [13] ;accorder l'indemnité forfaitaire visée à l'article L. 452-3 alinéa 1er du code de la sécurité sociale et juger que cette indemnité sera versée par la CPCAM des Bouches-du-Rhône à la succession de Monsieur [G] [W] ;fixer à son maximum la majoration de rente service au conjoint survivant et dire qu'elle lui sera directement versée par l'organisme social ;fixer l'indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [G] [W] à la somme totale de 62.000 € se décomposant comme suit :souffrances morales : 36.400 € ;souffrances physiques : 11.800 € ;préjudice d'agrément : 11.800 € ;préjudice esthétique : 2.000 € ;fixer l'indemnisation des préjudices moraux de ses ayants droit à la somme totale de 102.300 € se décomposant ainsi :[F] [W] (veuve) : 32.600 € ;[M] et [Y] [W], enfants au foyer : 15.200 € chacun ;[H], [N] et [X] [W], enfants : 8.700 € chacun ;[L] [W], [U], [Z] et [C] [B], petits-enfants : 3.300 € chacun ;dire que la caisse devra lui verser la somme de 164.300 € en sa qualité de créancier subrogé ;condamner l'employeur à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;condamner la partie succombant aux dépens.
La CPCAM des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître, a communiqué des conclusions aux termes desquelles elle s'en rapporte à l'appréciation du tribunal quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur en sollicitant que le tribunal juge qu'elle pourra exercer son action récursoire à l'encontre de l'employeur, mais s'oppose à la demande de majoration de rente formée par Madame [F] [W].

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rabat de l'ordonnance de clôture

Il convient de rappeler que l'article R. 142-10-5-I du code de la sécurité sociale prévoit que le président de la formation de jugement, pour l'instruction de l'affaire, exerce les missions et dispose de pouvoirs reconnus au juge de la mise en état par les articles 780 à 801 du code de procédure civile ce qui exclut les dispositions relatives au rabat de l'ordonnance de clôture prévues aux articles 802 et 803 du même code, incompatibles avec le principe de l'oralité des débats posé par l'article R. 142-10-4 du code de la sécurité sociale.

Par conséquent, le tribunal, pour admettre ou refuser des conclusions communiquées après la date prévue pour la fin des échanges, doit vérifier si le principe du contradictoire a été respecté en application des articles 15 et 16 du code de procédure civile.

En l'espèce, aucune partie ne s'est opposée à ce que les écritures de l'employeur et de la caisse, communiquées après la clôture, soient admises aux débats. Il s'en déduit que le principe du contradictoire a été respecté de sorte que l'intégralité des conclusions et pièces produites dans le cadre de cette procédure sera admise aux débats.

Sur l'intervention du FIVA dans le cadre de son action subrogatoire

En application de l'article 53-VI 1er et 2ème alinéas de la loi 2000-1257 du 23 décembre 2000, qui a créé le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), " Le Fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge des dites personnes.
Le fonds intervient devant les juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale, notamment dans les actions en faute inexcusable [...] ".

L'article 36 du décret d'application 2001-963 du 23 octobre 2001 dispose par ailleurs que " dès l'acceptation de l'offre par le demandeur, le fonds exerce l'action subrogatoire prévue au VI de l'article 53 de la loi du 23 décembre 2000".

L'article 53-IV 3ème alinéa de la loi du 23 décembre 2000 prévoit que l'acception de l'offre d'indemnisation du FIVA " vaut désistement des actions juridictionnelles en indemnisation en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle future en réparation du même préjudice ".

Toutefois, il résulte de l'article 53 IV alinéa 2 et 3 de la loi que la victime ou ses ayants droit en cas de décès, qui ont accepté l'offre d'indemnisation des victimes de l'amiante, sont recevables, mais dans le seul but de faire reconnaître l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, à se maintenir dans l'action en recherche de faute inexcusable qu'ils ont préalablement engagée et qui est reprise par le FIVA. Elles peuvent également engager elles-mêmes une telle procédure en cas d'inaction du FIVA.

En l'espèce, le FIVA qui a indemnisé les ayants droit de Monsieur [G] [W] est donc recevable en son intervention volontaire en vue de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et de fixation des majorations et indemnisations prévues par le code de sécurité sociale.

Sur le caractère professionnel de la maladie et du décès

Il ressort des articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale que pour engager la responsabilité de l'employeur, la faute inexcusable doit être la cause nécessaire de la maladie professionnelle dont est atteint le salarié ou de l'accident dont il a été la victime.

En raison du principe de l'indépendance des rapports entre la victime, la caisse et l'employeur, ce dernier reste fondé, nonobstant la reconnaissance faite par la caisse qui concerne les rapports caisse-salarié, à contester le caractère professionnel de l'accident ou de la pathologie dont a été victime son salarié en défense à l'action en reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur engagée par ce dernier à son égard.

Pour bénéficier de la présomption d'imputabilité posée à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la maladie déclarée doit répondre aux conditions édictées par un tableau des maladies professionnelles, soit en l'espèce le tableau n° 30 bis.

En l'espèce, l'employeur conteste uniquement l'exposition au risque de Monsieur [G] [R] selon les conditions prévues au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles et rappelle qu'il occupait le poste de soudeur, lequel consistait à préparer les pièces à souder, en les dégraissant et les décapant puis à assembler les différentes pièces de métal par fusion en les portant à très haute température.

Madame [F] [W] soutient pour sa part que l'activité de son époux consistait, pour le compte de la société [14], à intervenir au sein d'établissements externes, notamment de sociétés pétrochimiques ou sidérurgiques ([8], [17] et [18] par exemple) pour effectuer des raccordements des tuyauteries par soudage par arc électrique, meulage, montage en intervenant principalement sur les fours et chaudières. Elle précise que dans le cadre de ses missions, son époux était chargé de manipuler de l'amiante tressé sous forme de matelas destinés à protéger du feu qu'il devait percer pour fabriquer un abri et insérer un fil de fer aux fins de les relier. Elle ajoute que lors des travaux effectués sur les tuyauteries et afin de dégager la zone de soudage, il devait ensuite retirer les calorifuges en place, composés d'amiante et meuler les surfaces, libérant ainsi dans l'atmosphère de nombreuses poussières d'amiante. Elle déclare ensuite que son époux intervenait également sur les fours où il était amené à manipuler de l'amiante sous forme de tresses et de joints de raccordement de bride et qu'il était également amené à travailler à côté d'autres corps de métier réalisant également des opérations de calorifugeage et de flocage d'amiante, dans des endroits confinés.

Madame [F] [R] en déduit que son époux effectuait des travaux visés au tableau n° 30 bis et notamment :
des travaux de retrait d'amiante ;des travaux de pose et dépose de matériaux isolants à base d'amiante ;des travaux d'usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l'amiante ;des travaux d'entretien ou de maintenance sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante.
Le tableau n° 30 bis des maladies professionnelles vise les cancers broncho-pulmonaires provoqués par l'inhalation de poussières d'amiante, et mentionne dans la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies :
les travaux directement associés à la production des matériaux contenant de l'amiante ;les travaux nécessitant l'utilisation d'amiante en vrac ;les travaux d'isolation utilisant des matériaux contenant de l'amiante ;les travaux de retrait d'amiante ;les travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d'amiante ;les travaux de construction et de réparation navale ;les travaux d'usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l'amiante ;la fabrication de matériels de friction contenant de l'amiante ;les travaux d'entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante.La liste énumérée par le tableau n° 30 bis se réfère dès lors non pas à des postes mais à la nature des travaux effectués.

Concernant l'exposition à l'amiante, la jurisprudence de la Cour de cassation a évolué. Après avoir pu admettre que seules la fabrication et l'utilisation de l'amiante comme matière première étaient susceptibles d'engager la faute inexcusable de l'employeur, il est acquis aujourd'hui que l'exposition au risque peut résulter de l'utilisation de matériels fabriqués avec de l'amiante ou de la simple inhalation de poussières dans les locaux de l'entreprise.
Par ailleurs, la Cour de cassation a posé le principe que l'exposition doit être habituelle et non pas permanente et continue.

Il résulte des conclusions des parties et des pièces versées au dossier que Monsieur [G] [W] a travaillé au sein de la société [14] en qualité de soudeur du 16 janvier 1978 au 12 juillet 1996.

Plus précisément, au regard de l'historique de la société fournie par l'employeur, il a travaillé de 1978 à 1989 pour la société [10] d'abord dénommée " Constructions Industrielles et Tuyauteries " puis " Coordination et Innovations Technique, puis de 1990 à 1996 pour la société [11] qui constituait une des deux filiales de la société [10] lesquelles ont fusionné en 1996.

La veuve de Monsieur [G] [W] a versé aux débats plusieurs attestations d'anciens collègues, permettant de conforter les déclarations effectuées par son époux dans le cadre de l'enquête diligentée par la CPCAM des Bouches-du-Rhône et de préciser les conditions dans lesquelles il travaillait.

Ainsi, Monsieur [D] [J], après avoir précisé avoir été salarié de la société [14] ex-[10] du 2 juillet 1980 jusqu'au 30 décembre 2005, a attesté avoir travaillé en qualité de chef d'équipe, avec Monsieur [G] [W] sur les sites industriels et pétrochimiques ainsi qu'en raffinerie et a décrit les conditions de travail de ce dernier comme suit : " M. [W] cloisonnait les bâches avec des couches de protection anti-feu. Dans ces matelas, il y avait de l'amiante parce que c'était efficace contre les risques d'incendie. Alors, il manipulait les matelas pour pouvoir travailler. C'était comme ça qu'il délimitait sa zone de travail. Après il soudait sur les installations fermées par les matelas d'amiante. […]Après les soudures, M. [W] devait nettoyer et débarrasser sa zone de travail. Il devait secouer les matelas d'amiante, il les pliait, les rangeait. Evidemment, la zone de travail était réduite. [G] [W] intervenait comme soudeur dans des endroits confinés, beaucoup sur les fours. A la fin, il mettait en ligne les installations avec des joints en amiante. Il fallait souder, avec l'arc, meuler, souder à l'arc électrique. Dans les fours et sur les installations industrielles, sur des tuyauteries pétrochimiques, des tuyauteries de vapeur, sur des chaudières, les joints devaient être réparés, et les tuyauteries contenaient de l'amiante. Surtout aussi les tuyauteries calorifugées qu'on devait manipuler. On enlevait le calorifuge pour accéder aux lignes et réparer par soudure puis meuler. On devait garder les tuyauteries en température alors on posait des bandelettes pour entourer les soudures finies. Dans ces bandelettes, il y avait de l'amiante. […] ".

Contrairement à ce qu'invoque l'employeur, il résulte bien de ce témoignage que Monsieur [G] [W] effectuait des travaux d'entretien et de maintenance sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante, expressément visés par le tableau n° 30 bis et pas seulement des travaux de soudure dans un environnement seulement poussiéreux.

Ensuite, Monsieur [P] [A], beau-frère de Monsieur [G] [W], qui justifie avoir été employé par la société [10] à compter du 1er janvier 1962 en qualité de soudeur, atteste avoir travaillé avec Monsieur [G] [W] dans la société [10] de janvier 1978 jusqu'en juillet 1996 " entourés de bâches de protection composées d'amiante […] dans des fours dont le revêtement était composé d'amiante ". Il ajoute qu'ils avaient également manipulé des plateaux en amiante des colonnes de distillation et été conduits, quand la charge de travail n'était pas suffisante pour les soudeurs, " à remplacer les joints des tuyaux en amiante qu'il fallait parfois poncer ". Il ajoute en dernier lieu qu'ils ont été en contact avec la laine des calorifuges composée d'amiante.

Il résulte dès lors également de ce témoignage que Monsieur [G] [W] a bien effectué a minima des travaux d'entretien ou de maintenance sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante.

L'employeur estime qu'il n'est pas démontré que Messieurs [W] et [A] ont travaillé ensemble sur les mêmes sites et donc réalisé les mêmes travaux puisque Monsieur [P] [A], sur la période janvier 1978-juillet 1996, était embauché par la société [11] qui était à l'époque une société différente de [10] alors que le relevé de carrière de Monsieur [G] [W] démontre qu'il a travaillé pour le compte de [10] jusqu'en 1967 avant d'être embauché la société [11] à compter de janvier 1978.

Or, il ne résulte d'aucune pièce du dossier que Monsieur [G] [W] était salarié de la société [11] à compter de 1978 au regard des certificats de travail produits par la demanderesse. Cet argument sera par conséquent écarté étant précisé que le fait que Monsieur [P] [A] soit le beau-frère de Monsieur [G] [W] ne suffit pas à priver son témoignage de véracité alors qu'il est conforté par d'autres éléments notamment l'attestation de Monsieur [D] [J].

Madame [F] [W] produit deux autres témoignages, celui de Monsieur [O] [K] qui a travaillé au sein de la société [14] de septembre 1997 à mars 2007 en qualité de soudeur, et celui de Monsieur [I] [S] accompagné du certificat de travail établi par la société [14] qui certifie l'avoir employé en qualité de monteur du 25 juin 1979 au 31 mai 2005.

L'employeur sollicite que ces témoignages soient écartés des débats estimant que la calligraphie est indiscutablement féminine et par ailleurs extrêmement proche voire identique à celle figurant sur le questionnaire de l'enquête de la CPCAM des Bouches-du-Rhône. Il ajoute que les signatures figurant in fine des attestations ne correspondent pas à celles apposées sur les cartes d'identité des intéressés.
L'examen sommaire effectué par le tribunal, qui n'est pas expert en écriture, n'a pas permis de révéler, contrairement à ce qu'allègue l'employeur, des similitudes de calligraphie évidentes entre les documents.
Par contre, il est indéniable que les signatures apposées sur les cartes nationales d'identité de Messieurs [K] et [S] et sur leurs attestations sont manifestement différentes de sorte qu'il est légitime de mettre en doute l'identité de la personne ayant effectué ces témoignages qui ne seront dès lors pas retenus par le tribunal.

Pour autant, il résulte suffisamment des attestations de Messieurs [J] et [A], confortant les déclarations que Monsieur [G] [W] a effectuées dans le cadre de l'enquête effectuée par la CPCAM des Bouches-du-Rhône, que les conditions du tableau n° 30 bis sont réunies de sorte que par application des dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la maladie dont a été affecté Monsieur [G] [W] et dont il est décédé est présumée d'origine professionnelle ce qui dispense la demanderesse de prouver l'existence du lien de causalité entre la pathologie et l'exercice de l'activité professionnelle de son époux.

Si cette présomption n'est pas irréfragable, il appartient toutefois à l'employeur d'établir que l'affection litigieuse a une cause totalement étrangère au travail.
Cette preuve n'étant pas rapportée en l'espèce, le moyen tiré de l'absence de caractère professionnel de la maladie et partant d'exposition au risque sera écarté.

Sur la faute inexcusable

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat ; le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de la maladie du salarié. Il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.

Il incombe enfin au demandeur de rapporter la preuve que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures pour l'en préserver.

Il résulte des développements qui précèdent que l'exposition au risque d'inhalation de poussières d'amiante de manière habituelle est établie.

Sur la conscience du danger

Si le cancer broncho-pulmonaire provoqué par l'inhalation des poussières d'amiante n'a été inscrit au tableau des maladies professionnelles qu'en 1996 comme le rappelle justement l'employeur, il n'en demeure pas moins que les risques sanitaires que représentaient les poussières d'amiante sont connus depuis avant le début du XXème siècle puisque des premières prescriptions de sécurité prévenant l'inhalation des poussières par évacuation des poussières et renouvellement de l'air des ateliers ont été prises par la loi du 12 juin 1893 et le décret des 10 et 11 mars 1894.
Par ailleurs, l'ordonnance du 3 août 1945 a créé le tableau n° 25 des maladies professionnelles à propos de la fibrose pulmonaire consécutive à l'inhalation des poussières d'amiante, puis le décret du 31 août 1950 a créé le tableau n° 30 propre à l'asbestose, pathologie également consécutive à l'inhalation des mêmes poussières d'amiante.

En outre, le décret du 17 août 1977 relatif aux mesures particulières d'hygiène applicables dans les établissements où le personnel est exposé à l'action des poussières d'amiante est intervenu pour préciser la réglementation sur les poussières en général.

Toutes ces règlementations sont bien antérieures à l'embauche de Monsieur [G] [W] et donc au début de son exposition aux poussières d'amiante, les premières datant de 30 ans avant celle-ci.

Enfin, le lien entre l'inhalation des poussières d'amiante et le cancer broncho-pulmonaire ressort de publications scientifiques datant également d'une vingtaine d'années avant le début de l'exposition professionnelle de Monsieur [G] [W] comme le rapport sur " Les substances chimiques, agent des cancers professionnels " demandé par la société de médecine et d'hygiène au travail et mettant en accusation l'amiante qui date de 1954 outre encore la publication des résultats de la première enquête épidémiologique à partir du personnel d'une usine de textile d'amiante en Grande-Bretagne en 1955.

La société [14] venant aux droits de la société [10] n'a certes jamais fabriqué de matériaux contenant de l'amiante, ni utilisé de l'amiante dans son processus de fabrication et ne figure à ce titre sur aucune des listes des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, mais elle était toutefois spécialisée dans la maintenance de tuyauteries et travaillait pour des sociétés pétrochimiques, métallurgiques et pétrolières du pourtour de l'Etang de Berre dont il ne peut être contesté qu'elles utilisaient l'amiante pour ses propriétés isolantes et d'étanchéité en matière d'isolation thermique pour les équipements industriels et disposaient de matériels contenant de l'amiante sur lesquels ses employés étaient amenés à travailler, notamment pour des opérations de maintenance et d'entretien.
Cette société, en ce qu'elle s'occupait de la maintenance industrielle des principales entreprises de l'Etang de Berre et en raison de sa compétence technique, était suffisamment importante pour avoir accès à l'information sur les risques de l'inhalation de poussières d'amiante au moment où elle a fait travailler Monsieur [G] [W].

Il s'ensuit que la société [14] avait, ou à tout le moins, aurait dû avoir conscience du danger auquel elle exposait son salarié.

Sur les mesures prises pour éviter la réalisation du risque

L'employeur ne justifie pas des mesures prises pour préserver les salariés des risques liés à l'inhalation de poussières d'amiante puisqu'il n'évoque pas ce sujet dans ses écritures.

Au contraire, il ressort de la lecture de l'attestation de Monsieur [D] [J] ayant travaillé avec Monsieur [G] [W] pendant 16 ans que ce dernier a vécu toutes ces années dans une atmosphère saturée de poussières et fibres d'amiante qu'il a inhalées sans aucune protection. En effet, Monsieur [D] [J] précise " on portait des lunettes teintées. On n'avait pas de cagoules ventilées. Sur les sites où on intervenait, il n'y avait pas de système d'évacuation des fumées. […] Monsieur [W] a respiré chaque jour de travail des fumées d'amiante parce que les espaces étaient réduits, fermés et les fumées des soudures étaient pas évacuées. Il n'y avait pas d'aération. […] nous ne savions pas à l'époque que c'était autant dangereux. On ne connaissant pas les pratiques de santé pour l'exposition à l'amiante. On n'avait aucune procédure pour préserver notre santé ".

Ainsi, il est établi que l'employeur n'a pas pris les mesures nécessaires pour préserver son salarié des risques de l'amiante.

Il ressort de ces développements que la société [13] venant aux droits de la société [14] a commis une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale à l'origine de la maladie de Monsieur [G] [W] dont il est décédé.

Sur les conséquences de la faute inexcusable

Sur la majoration des indemnités

Selon l'article 53-VI 4ème alinéa de la loi du 2 décembre 2000, " La reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, à l'occasion de l'action à laquelle le fonds est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime ou à ses ayants droit en application de la législation de la sécurité sociale. L'indemnisation à la charge du fonds est alors révisée en conséquence".

Aux termes de l'article L 452-2 alinéa 1er du code de sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de l'employeur, " La victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues en vertu du présent livre ".

Sur l'indemnité forfaitaire

Il résulte de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale que si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

Le FIVA n'a rien versé au titre de l'incapacité fonctionnelle.

Le taux d'incapacité permanente de Monsieur [G] [W] ayant été fixé à 100 % par la caisse avant son décès, ses ayants droit sont donc en droit de recevoir de la CPCAM des Bouches-du-Rhône l'indemnité forfaitaire ci-dessus prévue.

Sur la majoration de la rente servie à Madame [F] [W]

Il sera relevé que contrairement à ce qui est soutenu par l'employeur et la CPCAM des Bouches-du-Rhône, Madame [F] [W] sollicite la majoration de la rente qui lui est servie en sa qualité d'ayant droit et non de celle de son époux.

L'article L. 452-2 alinéa 1er du code de la sécurité sociale prévoit qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, la victime ou ses ayants droit bénéficient d'une majoration de leur rente. Les deux types de majorations sont affectés d'un maximum mais ne répondent pas aux mêmes règles.

Le cas de la victime directe est prévu à l'alinéa 3 de l'article L. 452-2 du même code : " Lorsqu'une rente a été attribuée à la victime, le montant de la majoration est fixé de telle sorte que la rente majorée allouée à la victime ne puisse excéder, soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité, soit le montant de ce salaire dans le cas d'incapacité totale ". Il faut procéder par voie d'exemples.

Par contre, le cas des ayants droit est régi à l'alinéa 4 de l'article L. 452-2 du même code : " En cas d'accident suivi de mort, le montant de la majoration est fixé sans que le total des rentes et des majorations servies à l'ensemble des ayants droit puisse dépasser le montant du salaire annuel... ".

Le taux de la rente est de 60 %, ce qui donne avec le salaire annuel retenu à hauteur de 24.760 €, un montant annuel de 14.856 €. Le montant maximum étant de 24.760 €, il y a donc place pour la majoration à hauteur de 9.904 €.

La demande de Madame [F] [W] est dès lors bien-fondée.

Sur l'indemnisation des préjudices personnels subis par Monsieur [G] [W]

Conformément à l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire.

En vertu des dispositions de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément, du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, ainsi que de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du dit code.

En vertu de l'article 53-VI 1er et 2ème alinéas de la loi du 23 décembre 2000, le FIVA est subrogé dans les droits des ayants droit de Monsieur [G] [W] à concurrence des sommes versées au titre de l'indemnisation de leurs préjudices.

Monsieur [G] [W] est décédé le 19 octobre 2019 des suites d'un cancer broncho-pulmonaire diagnostiqué le 4 juillet 2019 de stade IV avec métastases cérébrales multiples alors qu'il était âgé de 79 ans.

Compte-tenu de l'évolution extrêmement rapide de la maladie puisqu'il en est décédé 3 mois et demi après le diagnostic, de sa conscience de la gravité de son affection et de son caractère irréversible outre de l'angoisse suscitée, les souffrances morales de Monsieur [G] [W] peuvent être qualifiées d'importantes et justifier une indemnisation à hauteur de 36.400 €.

Monsieur [G] [W] a par ailleurs subi une biopsie des éperons ainsi qu'une cure de chimiothérapie qui a cependant dû être interrompue au regard de l'altération rapide et majeure de son état général constatée dès le 19 septembre 2019. Il a par ailleurs présenté une toux chronique avec expectorations, une dyspnée d'effort, une anorexie de grade 2 et des douleurs pariétales mal soulagées de sorte que les souffrances physiques peuvent être qualifiées de moyennes sur l'échelle de cotation médico-légale et justifier une indemnisation à hauteur de 11.800 €.

Compte-tenu des suites des traitements par chimiothérapie (perte de poids notamment), la réparation du préjudice esthétique sera fixée à 2.000 €.

S'agissant du préjudice d'agrément, il convient de rappeler que ce poste de préjudice répare l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs qu'elle pratiquait antérieurement au dommage.

LE FIVA expose qu'en raison du taux d'incapacité fixé à 100 %, Monsieur [G] [W] se trouvait par définition privé de toute activité de loisirs.

Force est cependant de constater que n'est produit aucun justificatif de nature à établir qu'il pratiquait effectivement une activité spécifique de loisir ou sportive.

La demande d'indemnisation formée de ce chef sera par conséquent rejetée.

Sur l'indemnisation des préjudices personnels subis par les ayants droits de Monsieur [G] [W]

En vertu de l'article L. 452-3 alinéa 2 du code de sécurité sociale, en cas d'accident suivi de mort, les ayants droit de la victime mentionnés aux articles L. 434-7 et suivants ainsi que les ascendants et descendants qui n'ont pas droit à une rente en vertu desdits articles, peuvent demander à l'employeur réparation du préjudice moral devant la juridiction précitée.

Monsieur [G] [W] était marié depuis 56 ans à Madame [F] [W] et avait 5 enfants et 4 petits-enfants.

Il s'agit indéniablement de parents proches qui ont nécessairement subi un préjudice d'affection du fait du décès de Monsieur [G] [W], étant précisé que celui-ci est d'autant plus important qu'il existait une communauté de vie avec la victime.

Il convient sur ces points de faire droit aux demandes du FIVA selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision, dans la mesure où les montants sollicités sont justifiés par les différents degrés de parenté et de proximité avec la victime, et de dire que ces sommes lui seront versées par la CPCAM des Bouches-du-Rhône en sa qualité de créancier subrogé.

Sur l'action récursoire de la CPCAM des Bouches-du-Rhône

En application des dispositions de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale qui dispose que la réparation des préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur, la CPCAM des Bouches-du-Rhône, dans le cadre de son action récursoire, sera habilitée à récupérer auprès de l'employeur les sommes dont elle sera tenue de faire l'avance au titre de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Sur les demandes accessoires

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société [13] à verser une indemnité de 3.000 € à Madame [F] [W] et de 1.500 € au FIVA.

Compte-tenu des circonstances de l'espèce et de l'ancienneté de la procédure, le tribunal ordonne l'exécution provisoire du présent jugement à l'exclusion des dispositions portant sur la majoration de la rente et l'indemnité forfaitaire au titre desquelles l'exécution provisoire ne sera pas ordonnée.

Succombant, l'employeur gardera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

Le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort :

DIT que la maladie professionnelle dont était atteint Monsieur [G] [W], et dont il est décédé, est la conséquence de la faute inexcusable de son employeur, la SA [13] ;

ALLOUE à Madame [F] [W] es qualité d'ayant droit de Monsieur [G] [W] l'indemnité forfaitaire ;

DIT que cette indemnité sera versée directement par la CPCAM des Bouches-du-Rhône à la succession de Monsieur [G] [W] ;

DIT que Madame [F] [W] pourra bénéficier de la majoration de sa rente servie en sa qualité d'ayant droit sans pouvoir dépasser le montant annuel du salaire de son époux retenu par la CPCAM des Bouches-du-Rhône soit 24.760€;

DIT que cette indemnité lui sera versée directement par la CPCAM des Bouches-du-Rhône ;

FIXE l'indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [G] [W] à la somme totale de 50.200 € comme suit :
souffrances morales : 36.400 € ;souffrances physiques : 11.800 € ;préjudice esthétique : 2.000 € ;
FIXE l'indemnisation des préjudices moraux de ses ayants droit à la somme totale de 102.300 € se décomposant ainsi :
[F] [W] (veuve) : 32.600 € ;[M] et [Y] [W], enfants vivant au foyer : 15.200 € chacun ;[H], [N] et [X] [W], enfants : 8.700 € chacun ;[L] [W], [U], [Z] et [C] [B], petits-enfants : 3.300€ chacun ;
DIT que la CPCAM des Bouches du Rhône devra verser ces sommes au FIVA en sa qualité de créancier subrogé soit un total de 152.500 € ;

DIT que la CPCAM des Bouches-du-Rhône pourra recouvrer le montant des indemnisations et majoration accordées à l'encontre de la SA [13] et condamne cette dernière à ce titre ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE la SA [13] à verser à Madame [F] [W] et au FIVA respectivement les sommes de 3.000 € et 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile :

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision à l'exclusion des dispositions portant sur la majoration de la rente et l'indemnité forfaitaire ;

CONDAMNE la SA [13] aux dépens ;

DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le délai d'un mois à compter de la réception de sa notification.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 21/01039
Date de la décision : 04/09/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-04;21.01039 ?
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