COUR DE CASSATION DU GABON ARRET N° 05/2004-2005/
PREMIERE CHAMBRE PENALE
AUDIENCE PUBLIQUE DU 25/05/2005
PRESIDENT: Michel NZOUKOU SACKE.
POURVOI N° 02/2003-2004.
REPUBLIQUE GABONAISE
AU NOM DU PEUPLE GABONAIS
La Cour de Cassation, Première Chambre Pénale, siégeant en la salle ordinaire de ses audiences sise au Palais de justice de Libreville, a rendu le vingt cinq mai deux mille cinq, l'arrêt suivant:
Statuant sur le pourvoi interjeté par Z B Ac, le 15 décembre 2003, par la Cour d'Appel de Port-Gentil, qui l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement assorti d'un mandat d'arrêt décerné à l'audience, et à payer à la partie civile 150.000 francs à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et vexatoire.
Vu les mémoires produits en demande et en défense;
Ensemble les articles 174 et 244 du Code de procédure pénale, 446 et suivants du code d'instruction criminelle;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le rapport de Monsieur NZOUKOU SACKE Michel, Président de Chambre, les observations de maître MOUBEYI-BOUALE, conseil de A Y B Ac, de Maître BHONGO MAVOUNGOU, pour DOUPAMBY-MATOKA et les conclusions de Madame AH Aa, Procureur Général Adjoint;
Sur la recevabilité contestée du pourvoi:
Attendu que bien que le présent pourvoi ait été interjeté dans les formes et délai prescrits par la loi, le défendeur conclut tout de même à son irrecevabilité, motif pris de ce que le prévenu MASSAVALA-MABOUMBA, condamné à 3 mois d'emprisonnement, t assorti d'un mandat d'arrêt décerné à l'audience, ne peut se prévaloir de son recours en cassation que si ledit mandat est exécuté et que le prévenu se trouve en état de détention lors du jugement de son pourvoi devant la haute Cour;
Mais attendu que MASSAVALA-MABOUMBA, a été condamné seulement à 3 mois d'emprisonnement; que la déchéance du Code d'instruction Criminelle en son article 421, ne lui est pas applicable, sa condamnation à une peine privative de liberté étant inférieure à six mois comme le prescrit le texte précité;
Attendu surabondamment qu'il est versé au dossier une fiche d'écroue du registre des condamnés et une fiche détenu au nom de MASSAVALA-MABOUMBA Frédéric, établies en exécution du mandat d'arrêt décerné contre lui par la Cour d'Appel de Port-Gentil; que les exigences du Code d'instruction Criminelle ayant été satisfaites, le pourvoi du prévenu doit être déclaré recevable;
Sur l'unique moyen tiré de la violation de la loi, notamment les articles 123, 192, 193 et suivants du code de procédure pénale;
Attendu qu'il est reproché à MASSAVALA-MABOUMBA Frédéric, d'avoir courant 2001, dans le département de TSAMBA-MAGOTSI, proféré des propos de nature à porter atteinte à l'honneur et à la considération de DOUPAMBY-MATOKA Marcel; qu'en effet, il aurait déclaré notamment à Prince BOUKOUMBA-TSAGOULELA qui venait d'être victime de menaces de mort «qu'il n'avait qu'à chercher les auteurs de ses malheurs dans sa famille et dans le propre camp politique; ,qu'il détient les informations selon lesquelles Ab X est le tueur de joseph C et les commanditaires de ce crime sont dans le propre camp politique de ce dernier , le PDG; que AG qui avait munitueusement programmé cet assassinat, se voyant acculé, s'est vu obligé de corrompre les magistrats du Tribunal de Mouilla,moyennant le versement d'une somme de 24.000.000 francs», que convaincu de ce que toutes ces allégations, même tenues sous forme dubitative, portent indéniablement atteinte à l'honneur et à la considération de DOUPAMBY-MATOKA, et constituerait, si MASSAVALA-MABOUMBA ne rapportait pas la preuve de leur véracité, le délit de diffamation prévu et puni par les articles 283 et 284 du code pénal, le premier cité a poursuivi de ce chef le second qui, par arrêt partiellement confirmatif de la Cour d'Appel de Port-Gentil en date du 12 décembre 2003, a été condamné à la peine de 3 mois d'emprisonnement assorti d'un mandat d'arrêt décerné à l'audience et à payer la somme de 150.000 francs, à titre de dommages intérêts à la partie civile;
Attendu qu'il est d'abord reproché à la Cour d'Appel d'avoir qualifié sa décision de réputé contradictoire, aux motifs que, après relevé appel du jugement du tribunal correctionnel de Mouilla, le prévenu n'a fait aucune diligence pour le soutenir, surtout qu'il n'a pas daigné se présenter, devant la Cour et ne s'est même pas fait représenté par son conseil qui a pourtant sollicité et obtenu plusieurs renvois;
Alors que, pour mériter une telle qualification, les articles 192 A et 193 A du code de procédure pénale, exigent d'une part que, «toutes citations délivrées à la requête du Ministère public soient diligentées par un huissier de justice» et d'autre part, que « l'huissier de justice porteur de la citation en remette l'original à la personne citée et fasse accuser réception de cette remise par une mention spéciale portée sur la copie», toutes formalités qui n'ont pas été observées en l'espèce par le Ministère public;
Attendu tout d'abord qu'en matière pénale, seules les dispositions du code de procédure pénale sont applicables à l'exécution des dispositions du code de procédure civile; qu'il s'ensuit que tous les moyens qui sont fondés sur des dispositions étrangères en matière pénale sont d'ores et déjà déclarées irrecevables;
Attendu, en ce qui concerne le moyen tiré de la nature de l'arrêt attaqué qu'aux termes de l'article 153 du code de procédure pénale qu'une décision est dite réputée contradictoire à l'égard d'une partie lorsque «ou encore» si elle adresse par elle même ou par son conseil, un mémoire de défense»; Attendu que ces deux hypothèses supposent que la partie concernée a été régulièrement citée comme prévu aux articles 192 et 193 du code de procédure pénale et qu'elle eu connaissance de cette citation;
Attendu, au contraire, que dans le cas d'espèce, l'arrêt attaqué du 12 décembre 2003 se contente d'affirmer que «MASSAVALA MABOUMBA, devant la Cour d'Appel, a été incapable de venir rapporter la preuve des allégations proférées le 18 août 2001 à Fougamou.» sans pour autant indiquer de quelle manière le prévenu a été cité et s'il a eu effectivement connaissance de cette citation; que même s'il est incontestable, au vu de l'abondante correspondance émanant de son conseil, que le prévenu était parfaitement au courant des différents renvois sollicités et obtenu par ledit conseil, il ne résulte pas de pièces du dossier, la preuve qu'une citation lui a été régulièrement délivrée à un moment ou à un autre par un huissier de justice comme l'exigent les dispositions des textes visés au moyen; que cette omission d'une formalité essentielle et préalable à tout jugement, rend la décision attaquée entachée d'une grave irrégularité; d'où il suit que le moyen est fondé et la cassation encourue;
PAR CES MOTIFS:
Et sans qu'il y ait lieu de statuer les autres moyens invoqués;
Casse et annule l'arrêt rendu entre les parties le 12 décembre 2003 par la Cour d'Appel de Port-Gentil;
Remet en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état où elles se trouvaient avant ledit arrêt;
Et, pour être fait droit à nouveau, les renvoies devant la Cour d'Appel de Libreville;
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de Cassation, Première Chambre Pénale, siégeant en son audience publique du vingt cinq MAI DEUX MILLE CINQ, où étaient présents:
Messieurs: - Michel NZOUKOU SACKE, Président;
§ Jean-Guy NDONG ENGONE et Louis-Marie NGUI ESSONO, Conseillers;
§ Aa AH, Procureur Général Adjoint, tenant le siège du Ministère public;
§ Assisté de Maître Bernard OKANDJI-AFOUNDJE, Greffier;
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé après lecture faite par Monsieur le Président qui l'a rendu et par le Greffier. /-