ARRET N° 02/
Du 20/03/2006
CHAMBRE: CIVILE, PENALE, COMMERCIALE ET SOCIALE
AFFAIRE
Y A B
C
Y Z Ad
OBJET: CESSATION DE TROUBLE ET DEGUERPISSEMENT
DECISION
VOIR LE DISPOSITIF
REPUBLIQUE DE GUINEE
Travail - Justice - Solidarité
--------
Au nom du Peuple Guinéen
------------
Audience du 20 Mars 2006
---------
La COUR SUPREME de la REPUBLIQUE de GUINEE, séant à Conakry, Chambre Civile, Pénale, Commerciale et Sociale, statuant en matière civile en son audience publique et ordinaire du Vingt Mars Deux Mil Six à laquelle siégeaient:
Madame Joséphine LAMOU, Conseiller à la Cour Suprême, PRESIDENTE;
Monsieur Kanfory KALTAMBA, Conseiller à la Cour Suprême, CONSEILLER RAPPORTEUR;
Monsieur Sakoba Kourala KEITA: Conseiller à la Cour Suprême, CONSEILLER;
En présence de Monsieur Aa Ab X, Premier Avocat Général, substituant Monsieur le Procureur Général, empêché;
Avec l'assistance de Maître Andrée CAMARA, Greffière à ladite Cour;
A rendu l'arrêt dont la teneur suit dans la cause;
ENTRE
- Monsieur Y A B, Commerçant , domicilié au quartier Kaporo-Rails, Commune de Ratoma, Conakry, ayant pour conseil Maître Yamoussa BANGOURA, Avocat à la Cour;
D'UNE PART
ET
- Monsieur Y Z Ad, Comptable à la retraite demeurant à Coyah SP de Manéah District de Sanoyah, ayant pour conseil Maître Salifou BEAVOGUI, Avocat à la Cour;
D'AUTRE PART
La Justice de Paix de Dubréka a, par Jugement n°022/Greffe du 06 Novembre 2003, disposé comme suit:
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
Reçoit Monsieur Y A B en son assignation du 11 Août 2003;
L'y dit bien fondé;
Constate l'absence totale de toute promesse de vente liant les parties: Y A B et Y Z Ad;
EN CONSEQUENCE
Déclare Monsieur Y A B propriétaire légitime de la parcelle litigieuse sise au District Kénendé, Ae Ac, d'une superficie de 250 m2 dans la Préfecture de Dubréka en vertu de l'attestation de donation du 13/12/1999;
Ecarte purement et simplement les conclusions relatives à l'évaluation des travaux réalisés par Y A B, dressés devant le quartier de Tobolon et versées au dossier de la procédure par Y Z Ad;
Déboute Y Z Ad de toutes prétentions mal fondées et le renvoie à mieux se pourvoir;
Condamne Y Z Ad, le défendeur, au paiement de la somme de 2.000.000 FG à titre de Dommages intérêts en faveur de Y A B pour toutes causes de préjudices confondus.
Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision nonobstant toutes voies de recours;
Le condamne enfin aux entiers frais et dépens;
Le tout en application des articles 533, 534, 535 et 1098 du Code Civil, de l'article 39 al3 du Code Foncier et Domanial, des articles 125, 574, 741 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative;
Monsieur Y Z Ad ayant pour conseil Maître Salifou BEAVOGUI, Avocat à la Cour, a fait appel au Jugement n°022 du 06 Novembre 2003 de la Justice de Paix de Dubréka;
La Cour d'Appel de Conakry, saisie de la cause, a rendu l'arrêt n°105 du 16/03/04 dont le dispositif est ainsi libellé:
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort;
En la Forme: Reçoit l'appel;
Au Fond: Confirme le Jugement entrepris sauf en ce qui concerne les dommages intérêts;
Evalue ces dommages intérêts à un Million de Francs Guinéens et condamne l'appelant à payer ce montant à l'intimé et aux dépens;
Monsieur Y Z Ad représenté par son conseil Maître Salifou BEAVOGUI, Avocat à la Cour, s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n°105 du 16/03/04 de la Cour d'Appel de Conakry;
Advenue cette date, la Cour Suprême après en avoir délibéré conformément à la loi, a statué en ces termes;
LA COUR
VU la Loi L.91/008/CTRN du 23/12/91;
VU les pièces du dossier;
VU l'arrêt 215 du 6 Juillet 2004 de la Cour d'Appel de Conakry;
VU le pourvoi formé contre ledit arrêt;
Ouï Monsieur KALTAMBA Kanfory, Conseiller Rapporteur en son rapport;
Ouï les conseils des parties en leurs moyens;
Ouï le Ministère Public en ses observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant sur le pourvoi formé par Y A B contre l'arrêt 215 du 6 Juillet 2004 de la Cour d'Appel de Conakry qui reçoit en la forme la requête civile de Y Z Ad au Fond, Rétracte l'arrêt querellé - constate que suivant procès verbal en date du 6 Juillet 2003, les parties avaient transigé et que Monsieur Z Ad s'était engagé à payer à Monsieur A B la valeur des investissements consentis par ce dernier;
Condamne en conséquence Monsieur Z Ad à payer ce montant.
Le condamne en outre aux dépens»
En la Forme:
Considérant que la requête de Monsieur A B indique les noms, prénoms et domicile des parties; Qu'elle contient un exposé sommaire des faits et moyens ainsi que les conclusions; Qu'elle est accompagnée de l'expédition de l'arrêt attaquée; Qu'il y a autant de copies de celle-ci qu'il y a de parties en cause; (article 56 de la loi sur la Cour Suprême);
Considérant que le demandeur au pourvoi s'est acquitté de la caution de 30.000 FG suivant quittance de la B.C.R.G en date du 14 Juillet 2004;
Considérant que la requête en cassation en date du 22 Juillet 2004, accompagnée de l'expédition de la décision juridictionnelle attaquée, a été signifiée à la partie adverse par acte extrajudiciaire en date du 22 Juillet 2004, conformément à l'article 63 de la loi Organique sur la Cour Suprême; Que l'acte de signification contient élection de domicile chez L'avocat et indique la mention de l'article 64 de la même loi Organique;
Considérant enfin qu'au soutien de sa requête, le demandeur a produit son mémoire ampliatif le 3/9/04 conformément aux articles 63, 64 et 66 de la loi sur la Cour Suprême; Qu'il échet dès lors, de conclure que cette requête est recevable en la forme.
AU FOND
SUR L'UNIQUE MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE LA LOI
Sur la Première Branche, pris de la violation de l'article 659 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative
Considérant que par cette branche du moyen, il est porté grief à l'arrêt querellé d'avoir violé les dispositions de l'article 659 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative, motifs pris de ce que les causes de la rétractation invoquées par Y Z Ad ne sont pas des causes d'ouverture de la requête civile; que cette pièce qualifiée de décisive trouvée, à savoir les conclusions du 16 Juillet 2003 relatives à l'évaluation des travaux réalisés, ne saurait être une cause d'ouverture d'une requête civile dès lors qu'elles n'avaient pas été retenues par le fait d'un tiers; Qu'étant en possession du requérant Y Z Ad, la dite pièce avait fait l'objet de communication entre les parties devant le premier juge;
Considérant que l'article 659 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative dispose: «La requête civile n'est recevable que pour l'une des causes suivantes;
1°) S'il se révèle après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue;
2°) Si depuis le Jugement, des pièces décisives avaient été retenues par le fait d'un tiers;
3°) S'il a été jugé sur des pièces reconnues fausses ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement;
4°) S'il a été jugé sur des attestations, témoignages ou serment judiciairement déclarés faux depuis le jugement;
Dans tous les cas, le recours n'est recevable que si son auteur n'a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée»
Mais considérant qu'en l'espèce, les causes de rétractations qu'allègue Y Z Ad ne peuvent donner droit à l'ouverture d'une requête civile;
Qu'en effet, la pièce qualifiée de décisive par la Cour d'Appel, à savoir les conclusions relatives à l'évaluation des travaux réalisés par Y A en date du 16 Juillet 2003, ne saurait être un motif pour l'ouverture d'une telle voie, dès lors qu'elle n'avait pas été retenue par le fait d'un tiers au sens de l'article visé dans la branche du moyen, Que ladite pièce était entre les mains et en possession de Monsieur Y Z et avait même fait l'objet de communication au premier juge en vue de s'en prévaloir; Qu'à cette occasion, la justice de paix avait répondu en ces termes dans son jugement n°022 du 06 Novembre 2003;
«Attendu.qu'il est évident que les conclusions relatives à l'évaluation des travaux effectués par Y A B par la commission instituée à cet effet le 16 Juillet 2003, ne sont qu'une expropriation pure et simple organisée par le quartier de Tobolon sans titre ni droit; Qu'il sied d'écarter tout bonnement cette pièce de la présente procédure»;
Considérant qu'en somme, il est plausible de constater que ni le jugement 22 du 6/11/03, ni l'arrêt du 16/3/04 attaqué en requête civile n'ont été rendus en fraude des droits de Y Z Ad; Qu'il échet dès lors, d'accueillir la branche du moyen comme bien fondée.
Sur la Deuxième Branche, tirée de la violation de l'article 666 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative
Considérant que la deuxième Branche du moyen reproche à l'arrêt déféré, la violation de l'article 666 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative; Que la Cour d'Appel de Conakry est passée outre les dispositions d'ordre public pour rendre un seul arrêt sur l'admission de la requête et sur le fond du litige;
Considérant que l'article 666 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative dispose «En matière de requête civile des décisions distinctes doivent être rendues sur l'admission de la requête et sur le fond du litige, à moins que les parties n'aient déjà conclu au fond.»
Considérant qu'il est établi dans l'arrêt déféré que le demandeur au pourvoi n'avait conclu que sur l'irrecevabilité de la requête;
Mais considérant que la Cour d'Appel quant à elle, a rendu un arrêt unique et sur la recevabilité et sur le fond du litige; Quand agissant comme elle l'a fait, elle viole les dispositions de l'article 666 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative, d'où la branche du moyen est fondée et mérite d'être accueillie.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement en matière civile;
En la forme: Reçoit le pourvoi
Au fond: Casse et annule l'arrêt déféré;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Conakry autrement composée;
Ordonne la restitution de la caution de 30.000 FG au demandeur.
Dit que le présent arrêt sera publié au bulletin de la Cour Suprême;
Ordonne sa transcription dans les registres à ce destinés.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la cour Suprême les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le président, le Conseiller Rapporteur et la Greffière