ARRET N°30/
Du 29/5/2006
CHAMBRE: CIVILE, PENALE, COMMERCIALE ET SOCIALE
AFFAIRE
Aa AG A
CONTRE
AH Ak Ae Y ET Z X
OBJET: HOMOLOGATION VENTE D'IMMEUBLE
REPUBLIQUE DE GUINEE
Travail - Justice - Solidarité
--------
Au nom du Peuple Guinéen
------------
Audience du 29 MAI 2006
---------
La COUR SUPREME de la REPUBLIQUE de GUINEE, séant à Conakry, Chambre Civile, Pénale, Commerciale et Sociale, statuant en matière civile en son audience publique et ordinaire du Vingt Neuf Mai Deux Mil six à laquelle siégeaient:
Monsieur Kanfory KALTAMBA, Conseiller à la Cour Suprême, PRESIDENT;
Monsieur Kollet SOUMAH, Conseiller à la Cour Suprême, CONSEILLER RAPPORTEUR;
Madame Joséphine LAMOU, Conseiller à la Cour Suprême, CONSEILLER;
En présence de Monsieur Alpha Amar BALDE, avocat Général, substituant Monsieur le Procureur Général empêché;
Avec l'assistance de Maître Andrée CAMARA Greffière à ladite Cour;
A rendu l'arrêt dont la teneur suit dans la cause;
ENTRE
Monsieur Aa AG A, Agent Commercial, domicilié au quartier Gare, Commune Urbaine de Kankan, représentant Monsieur Ah A, ayant pour conseil Maître Antoine Damas SAGNO, Avocat à la Cour;
D'UNE PART
ET
1 - Madame AH Ak Ae Y Ac Ag demeurant au quartier Dabondy-Rail, Commune de Ratoma, Conakry, ayant pour conseil Salifou BEAVOGUI, Avocat à la Cour;
2°) Monsieur Ad Z X, Opérateur Economique domicilié au quartier Taouyah, Commune de Ratoma, Conakry, ayant pour conseil Maître Maurice Lamey KAMANO, Avocat à la Cour;
D'AUTRE PART
Le Tribunal de Première Instance de Conakry II, a par Jugement n°194 du 08/08/2002, stitpulé comme suit:
«Statuant publiquement, contradictoirement en matière Correctionnelle et en premier ressort;
Déclare Ad Z X, convaincu et coupable d'escroquerie et d'Emission de chèque sans provision;
Lui faisant application des dispositions des articles 430, 437 du Code Pénal et 463 du Code de Procédure Pénale, le condamne à 2 ans de prison avec Sursis et à 2.000.000 GNF d'amende;
SUR LES INTERETS CIVILS
Reçoit Madame Ai Ak Ae Y, représentée par Monsieur Aj Al C en sa constitution de partie civile, y faisant droit;
Condamne Ad Z X à payer les sommes de 120.000.000 GNF à titre principal, 18.750.000 GNF représentant les intérêts conventionnels et 15.000.000 GNF à titre de dommages intérêts;
Ordonne la saisie au profit de Madame AH Ai Ak Ab Y de la villa (duplexe) bâtie sur la Parcelle n°1 du lot 19, objet de l'arrêté n°7443/MAT/86 du 12 Mars 1986 appartenant à Monsieur Ad Z X par lui déposé en garantie de paiement de la créance et des Dommages-Intérêts auxquels il est condamne à l'étude de Maître Ami Mouké YANSANE Notaire à Conakry et ensuite versé au dossier de la présente Procédure;
Ordonne en outre l'exécution provisoire nonobstant tous recours:
Déboute la partie civile du surplus de ses prétentions. Frais et dépens à la charge du condamné;
Par Exploit en date du 17 Janvier 2003 des Maîtres Af Y et Af Am B, Huissiers de justice, Madame AH Ak Ae et Monsieur Aa AG A, sollicitent l'Homologation de la vente d'Immeuble devant le Tribunal de Première instance de Conakry II;
Le Tribunal de Première Instance de Conakry II, statuant sur le mérite de cet Exploit, a par Jugement n°105 du 28-03-03, décidé ce qui suit:
«Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
En la Forme: Reçoit les requérants en leur action:
Au Fond: Les y dit bien fondés.
Constate le Jugement correctionnel n°194 en date du 8 Août 2002 rendu par le Tribunal de Céans;
Constate l'acte de vente authentique de l'Immeuble par devant Maître Jean Alfred MATHOS, Notaire à la Résidence de Conakry en date du 26 Décembre 2002;
Homologue ledit acte authentique de vente et renvoie l'acquéreur dans la jouissance paisible de ses droits de propriété sur le fondement de l'article 533 du Code Civil.
Ordonne au Bureau de la conservation de la propriété et des droits fonciers de Conakry le transfert du titre de propriété au nom du sieur Aa AG A, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ah A;
Fait défense formelle au Sieur Ad Z X et toute autre personne de troubler à la jouissance paisible du nouveau propriétaire des lieux;
Ordonne l'exécution provisoire nonobstant tout recours;
Monsieur Z X représenté par son conseil Maître Maurice Lamey KAMANO, Avocat à la Cour, a fait appel du Jugement n°105 du 28 Mars 2003 du Tribunal de Première Instance de Conakry II;
La Cour d'Appel de Conakry, saisie de la cause, a rendu l'arrêt n°006 du 4/1/05 dont le dispositif suit:
«Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile, en dernier ressort et sur appel;
En la forme Reçoit l'appel de Madame AH Ak Ae Y intervenu dans les formes et délais légaux;
Au Fond: Infirme le Jugement querellé en toutes ses dispositions;
STATUANT A NOUVEAU
Prononce l'annulation de la vente du bâtiment duplex de Monsieur Ad Z X bâti sur la parcelle n°01 du lot 19 du plan cadastral de Rogbané (Conakry 2) d'une contenance de 726.515 m2 à Monsieur Aa AG A agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ah A.
Dit qu'il s'agit de la vente passée par acte Notarié de Maître Alfred MATHOS, Notaire le vingt six décembre 2002;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir;
Frais et dépens à la charge de Aa AG A;
Maître Antoine Damas SAGNO, Avocat à la Cour, conseil de Monsieur Aa AG A, s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n°006 du 4/01/2005 de la Cour d'Appel de Conakry.
L'affaire fut inscrite à l'audience de la Cour Suprême le 15-05-2006;
Puis, l'affaire est mise en délibéré au 29-05-2006;
Advenue cette date, la Cour Suprême après en avoir délibéré conformément à la loi a statué ces termes:
LA COUR
Vu La Loi Organique n°91/008/91 portant Attributions, Organisation et Fonctionnement de la Cour Suprême;
VU l'arrêt n°006 rendu le 4 Janvier 2005 par la Cour d'Appel de Conakry;
VU le pourvoi formé contre ledit arrêt;
Ouï Monsieur Kollet SOUMAH, Conseiller Rapporteur en son rapport;
Ouï les conseils des parties en leurs moyens;
Ouï Monsieur Elhadj Alpha Amar BALDE, Premier Avocat Général en ses observations;
Vu les pièces du dossier;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant sur le pourvoi formé par Maîtres Antoine Damas SAGNO et Amadou KOUROUMA, Avocats associés et conseils de Monsieur Aa AG A, agent Commercial contre l'arrêt n°006 du 4 Janvier 2005 de la Cour d'Appel de Conakry qui: «En la Forme, reçoit l'appel de Madame AH Ak Ae Y;
Au Fond, infirme le Jugement querellé en toutes ses dispositions:
Statuant à nouveau: Prononce l'annulation de la vente du bâtiment duplex de Monsieur Ad Z X sur la parcelle n°1 du lot 19 du plan cadastral de Rogbané (Conakry) d'une contenance de 726,515 mètres carrés à Monsieur Aa AG A agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ah A;
Dit qu'il s'agit de la vente passée par acte notarié de Maître Alfred MATHOS, Notaire, le 26 Décembre 2002;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir;
Met les frais et dépens à la charge de Monsieur Aa AG A»;
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI
Considérant que l'arrêt n°006 a été rendu le 14 Janvier 2005 par la Cour d'Appel de Conakry;
Que le pourvoi a été formé par requête en cassation datée du 17 Janvier 2005, enregistrée le même jour au Greffe de la Cour Suprême sous le numéro 39;
Que cette requête en cassation, outre l'adresse complète des parties contient un exposé sommaire des faits et des moyens, Qu'il est joint à ladite requête autant de copies de celle-ci qu'il y a de parties en cause;
Considérant que la même requête, accompagnée de l'expédition de l'arrêt attaqué, a été signifiée par voie d'Huissier aux parties défenderesses, le 17 Janvier 2005 avec mention de l'article 64 conformément aux dispositions de l'article 63 de la loi organique sur la Cour Suprême;
Que le demandeur a payé la caution de 30.000 FG suivant reçu bancaire n°B110260 du 6 Janvier 2005 de la B.C.R.G;
Qu'à l'appui de son recours, le conseil du demandeur a produit un mémoire ampliatif contenant des moyens de cassation, le 10 Mars 2005, conformément aux dispositions de l'article 66 de la loi sus-visée.
Qu'il convient de déclarer le pourvoi recevable en la forme parce que introduit dans les conditions prescrites par la loi.
AU FOND
MOYEN DE CASSATION TIRE DE LA VIOLATION DE LA LOI
Sur la Première Branche tirée de la Violation de l'Article 518 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative
Considérant que cette branche du moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'appel de Madame AH Ae Y recevable aux motifs que celle-ci aurait relevé appel dans les conditions définies par la loi contre la décision qui avait constaté et homologué la vente de la villa duplex de Monsieur Ad Z X.
Mais considérant qu'il ressort des qualités de l'arrêt attaqué et les écritures du conseil de Madame AH Ak Ae Y, prises en cause d'appel, que celle-ci a été appelée à la Cour et qu'elle a conclu en cette qualité;
Que la Cour a par ailleurs reconnu ce fait en affirmant que seul Monsieur Ad Z X a fait appel contre le Jugement d'homologation;
Considérant que cette affirmation était suffisante pour que le Juge d'appel dise que Madame AH Ae Y avait acquiescé la première décision et l'en débouter sur le fondement de l'article visé au moyen qui dispose: «l'acquiescement à la demande d'une partie emporte reconnaissance des biens fondés des prétentions de l'adversaire et renonciation à l'action»;
Considérant que le Juge d'appel en décidant autrement alors que dans la présente cause, rien au dossier ne justifie la qualité d'appelante de Madame AH Ae Y, donne ouverture à cassation et annulation de l'arrêt attaqué;
Sur la Deuxième Branche tirée de la Violation de l'article 808 du Code Civil
Considérant que par ce moyen, il est reproché à l'arrêt attaqué de s'être contenté d'affirmer que la vente passée entre Madame AH Ae Y représentée par Aj Al C et Monsieur Aa AG A n'était pas revêtue des formes prescrites par la loi .
Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier que la vente dont s'agit a été conclue par devant Maître Alfred MATHOS, notaire qui a dressé un acte authentique;
Qu'aux termes des dispositions de l'article 839 du Code Civil, le contrat de vente est un contrat synallagmatique qui peut être fait par acte authentique ou par acte sous seing privé.»
Considérant que l'article 808 du Code Civil dispose: «Un acte authentique fait foi entre les parties contractantes et leurs héritiers ou ayant causes jusqu'à inscription éventuelle de faux. Les énonciations qu'il contient doivent donc être tenues pour vraies, tant que le contraire n'a pas été démontré au cours de la procédure de l'inscription de faux»;
Considérant que Madame AH Ak Ae Y, supposée même appelante, ne pouvait mettre en cause cette vente que par la procédure d'inscription de faux;
Or, considérant que le Juge d'appel en prononçant l'annulation de la vente faite par un acte authentique et en s'abstenant de vérifier si la procédure d'inscription de faux a été introduite, a violé les articles visés au moyen;
D'où le moyen est fondé et doit être accueilli.
Sur la Troisième Branche tiré de la Violation des dispositions combinées des articles 1007, 1009 et 1010 du Code Civil
Considérant que par cette branche du moyen, il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir affirmé sans le démontrer que le mandat spécial donné par Madame AH Ak Y à Monsieur Aj Al C ne le permettait pas d'agir en son nom.
Considérant que l'article 1007 du Code Civil dispose:
«Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne à une autre personne, le mandataire, pouvoir d'accomplir en son nom un ou plusieurs actes juridique. L'écrit qui constate ce pouvoir s'appelle «Procuration»;
Qu'aux termes des dispositions de l'article 1010 du Code Civil « le mandataire, particulièrement lorsqu'il lui a été donné un mandat spécial, ne peut rien faire au-delà de ce qui est porté dans la procuration».
Considérant qu'il est constant que depuis le 25 Janvier 2002, Madame AH Ak Ae Y a donné mandat spécial à Monsieur Aj Al C à agir en son nom;
Considérant que, c'est en vertu de cette procuration spéciale passée par devant notaire, que Monsieur Aj Al C a obtenu la condamnation de Monsieur Z X associé dans les affaires commerciales avec AH Ak Ae Y;
Considérant qu'il est également constant que c'est en vertu des mêmes pouvoirs que Monsieur Aj Al C a remis la somme de 120.000.000 FG à Monsieur Z X;
Considérant que, de ce qui précède, le mandat établi entre Madame née Ak Ae Y et Monsieur Aj Al C, est opposable à la défenderesse au pourvoi;
D'où le moyen est fondé et mérite d'être accueilli.
Sur la quatrième branche tirée de la violation de l'article 629 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 629 du Code de Procédure Civile Economique et Administrative, «les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance de la révélation d'un fait»;
Considérant qu'il est suffisamment démontré dans l'acte introductif d'instance du 17 Janvier 2004, que Madame Ak Ae Y a sollicité l'homologation de la vente dudit immeuble;
Que devant le juge d'appel, en sa qualité d'intimée, elle a formulé de nouvelles prétentions;
Que le Juge d'appel en recevant ces nouvelles prétentions bien qu'ayant acquiescé le premier jugement, a violé l'article visé au moyen;
Qu'il échet dès lors, de retenir cette branche comme étant fondée.
MOYEN DE CASSATION TIRE DE LA FAUSSE APPLICATION DE LA LOI
Considérant que par ce moyen, il est reproché au juge d'appel d'avoir invoqué dans les motifs de l'arrêt, des dispositions inopposables à An Aa AG A .
Qu'il est constant que Monsieur Aa AG A n'est ni créancier de Monsieur Ad Z, ni créancier que Madame AH Ak Ae Y qui détenait un titre de créance contre Monsieur Ad Z X, son partenaire.
Considérant que, suivant les actes versés au dossier, Monsieur Aa AG A est un acquéreur de bonne foi.
D'où le moyen est fondé.
SUR LE MOYEN PRIS DU DEFAUT DE BASE LEGALE
Considérant
que le manque de base légale s'entend non seulement de la mauvaise qualification des faits par les juges, du défaut de texte de loi qui sert de support à une décision, mais aussi de la mauvaise application dudit texte de loi, s'il existe.
Qu'en l'espèce, la Cour d'appel de Conakry a visé des textes qui sont non seulement inopposables à Monsieur Aa AG A mais aussi et surtout à la présente cause.
Qu'il échet dès lors d'accueillir ce moyen parce que fondé.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement en matière civile et sur pourvoi;
En la Forme, Reçoit le pourvoi;
Au Fond, Casse et annule l'arrêt n°006 du 4 janvier 2005 rendu par la Cour d'Appel de Conakry;
Renvoie la cause et les parties devant la même Cour autrement composée;
Ordonne la restitution au demandeur de la caution de 30.000 FG objet du reçu bancaire n°B110260 du 6 Janvier 2005 de la B.C.R.G.
Met les frais et dépens à la charge des défendeurs.
Dit que le présent arrêt sera publié au bulletin de la Cour Suprême.
Ordonne sa transcription dans les registres à ce destinés.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le PRESIDENT, le CONSEILLER RAPPORTEUR et la GREFFIERE
LE RECEVEUR
Signé: ILLISIBLE
SUIVENT LES SIGNATURES
Signé: ILLISIBLE
Enregistré sous les références suivantes
Folio n° 07 Bd n°0713
Montant: 5000 FG
Lettre Cinq Mille
Conakry, le 14/7/06
LE RECEVEUR
Signé: ILLISIBLE
POUR EXPEDITION CERTIFIEE CONFORME
Conakry, le 14 Juillet 2006
LA GREFFIERE EN CHEF/PI
Maître Andrée CAMARA