COUR SUPREME
ARRET N°57 /
Du 11/7/2016
CHAMBRE : CIVILE, PENALE,
COMMERCIALE ET SOCIALE
AFFAIRE
MONSIEUR AI AG ET AUTRES
CONTRE
LES HERITIERS DE FEU C
B,REPRESENTES PAR Y Ad AH B
OBJET : REVENDICATION
FONCIERE
DECISION
VOIR LE DISPOSITIF REPUBLIQUE DE GUINEE
Travail — Justice — Solidarité
Au nom du Peuple Guinéen
Audience du 11 Juillet 2016
La COUR SUPREME de la REPUBLIQUE de GUINEE, séant à Conakry, Chambre Civile, Pénale, Commerciale et Sociale, statuant en matière civile en son audience publique et ordinaire du Onze Juillet Deux Mil Seize a laquelle siégeaient :
Monsieur Kollet SOUMAH, Conseiller à la Cour
Suprême, PRESIDENT ;
Monsieur Elhadj Sakoba Kourala KEITA, Conseiller à la Cour Suprême, CONSEILLER RAPPORTEUR ;
Monsieur Kanfory KALTAMBA, Conseiller à la
Cour Suprême, CONSEILLER ;
En présence de Monsieur Ab A, Premier Avocat Général substituant Madame le Procureur Général empêchée ;
Avec l’assistance de Maître GOEPOGUI Akoï,
Greffier à ladite Cour ;
A rendu l’arrêt dont la teneur suit dans la cause :
ENTRE
La Communauté Villageoise de Friguiady, représentée par AI AG et autres, demeurant à Aa, demandeur au pourvoi, ayant pour Conseil Maître BARRY Thierno Amadou Avocat à la Cour ;
D’UNE PART ET
Les héritiers de feu C B, représentés par Y Ad AH B, Menuisier, demeurant au quartier Tombo, Commune de Kaloum, Conakry, défendeurs au pourvoi, ayant pour Conseil Maître Mohamed SYLLA, Avocat à la Cour ;
D’AUTRE PART
La Justice de Paix de Coyah, a, par Jugement
n°70 du 21 Octobre 2010 disposé ainsi qu’il
suit :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort ;
Après en avoir délibéré conformément à la Loi ;
En la Forme : Reçoit les héritiers de C
B en leur action ;
Au Fond : Les déclare propriétaires du domaine
de Somakhouré par prescription acquisitive et
les renvoie dans la jouissance paisible de leur
propriété ;
Les déboute de leur demande de paiement de
dommages-intérêts ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Le tout en application des articles 778, 779, 782 du code civil, 741 du code de Procédure Civile,
Economique et Administrative » ;
Monsieur Ae Z, représentant les Sieurs AI AG et autres, ont relevé appel de ce Jugement le 22 Octobre 2010 au Greffe de la Justice de Paix de Coyah ;
La Cour d’Appel de Conakry, par son arrêt n°60 du 31 Janvier 2012, dispose comme suit ;
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
En la Forme : Reçoit l’appel de AI
AG et autres ;
Au Fond : Le dit non fondé ;
Confirme le Jugement n°70 en date du 21 Octobre 2010 rendu par la Justice de Paix de coyah ;
Met les dépens à la charge des appelants ;
Maître Thierno Amadou BARRY, Avocat conseil de la Communauté Villageoise de Friguiady, représentée par Messieurs AI AG, Af X et autres s’est pourvu en cassation contre l’arrêt sus-énoncé le 25 Juillet 2012 à la Cour suprême ;
L’affaire fut inscrite à l’audience de la Cour
Suprême le 04 Avril 2016 ;
Le Conseiller Rapporteur a donné lecture de son
rapport ;
Les parties en leurs moyens, fins et conclusions ;
Le Ministère Public a été entendu en ses
observations ;
Puis l’affaire est renvoyée au 18 Avril 2016,
ensuite après évocation le 18 avril 2016, elle a
été mise en délibéré le 27 Juin 2016 lequel
délibéré a été prorogé au 11 Juillet 2016 pour
arrêt être rendu ce jour ;
Advenue cette date, la Cour Suprême, après en
avoir délibéré conformément à la loi, a statué en
ces termes :
LA COUR
Vu les pièces du dossier de la procédure suivie dans l’affaire de revendication foncière opposant Mr. AI AG et autres
Communauté villageoise de Friguiady aux héritiers de feu C B, représentés par Y Ad AH B ;
Vu l’arrêt n°60 en date du 31 Janvier 2012 rendu par la Cour d’appel de Conakry ;
Vu le pourvoi formé contre ledit arrêt par Maître BARRY Thierno Amadou, avocat à la Cour;
EN LA FORME :
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI:
Considérant que dans son mémoire en défense reçu le 17 Septembre 2012 et enregistré au greffe de la Cour suprême sous le n°950/G, Me Mohamed SYLLA, avocat à la cour et conseil des défendeurs, a soulevé la violation de l’article 56 de la loi organique sur la Cour suprême ;
Qu’après avoir rappelé les conditions de recevabilité de la requête en cassation, contenues dans ce texte, à savoir : « indiquer les noms, prénoms et domiciles des parties ; contenir un exposé sommaire des faits et moyens ainsi que les conclusions ; être accompagnée de l’expédition de la décision juridictionnelle ou de la décision administrative attaquée ou d'une pièce justifiant du dépôt de la réclamation ; être joint à la requête autant de copies de celle-ci qu’il y a de parties en cause, Me Mohamed SYLLA déclare que la communauté villageoise, dans sa requête en cassation, n’a pas indiqué son domicile et n’a pas joint, à cette requête, autant de copies de celle-ci qu’il y a de parties en cause ;
Qu’en l’espèce, il y a trois parties dont AI AG, appelant ; les héritiers de feu C B, intimés et la
intervenant volontaire ; qu’en conséquence le dossier devrait comporter trois copies de la requête au lieu de deux seulement ;
Mais considérant que la requête de Mr. AI AG et autres, représentant de la jeunesse de la communauté villageoise de Friguiady, reçue et enregistrée au greffe de la Cour suprême le 25/07/2012 sous le n°676/G, indique les noms, prénoms et domiciles des parties ;
Qu'elle contient un exposé sommaire des faits et moyens ainsi que les conclusions, et est accompagnée de l’expédition de l’arrêt attaquée ;
Qu'il est joint à ladite requête autant de copies de celle-ci qu’il y a de parties en cause, soit essentiellement deux parties à savoir AI AG et autres représentants de la jeunesse de la communauté villagecise de Friguiady et les héritiers de feu C B Que la requête accompagnée de l’expédition de l’arrêt déféré a été signifiée le 09/07/2012 à la partie adverse, conformément aux dispositions des articles 63 et 64 de la loi organique sur la Cour Suprême ;
Que l'exploit de signification de cette requête faite par Maître Morlaye Soumaré SOUMAORO, huissier de justice, en date du 09 Juillet 2012, contient l’élection de domicile chez Maître Thierno Amadou BARRY, Avocat à la Cour, et conseil des demandeurs au pourvoi, ce conformément aux prescriptions de l’article 63 de loi organique numéro L.0./91/08/CTRN du 23 Décembre 1991 ;
Que les demandeurs au pourvoi ont acquitté la caution de 30.000 FG, suivant quittance n°C270545 en date du 20/06/2012 de la BCRG ;
Que le mémoire ampliatif contenant les moyens du pourvoi a été produit le 25 Juillet 2012 et enregistré sous le n°678 au greffe de
aux dispositions de l’article 66 de la loi organique sur la Cour suprême ;
Considérant, dès lors, que ce pourvoi est régulier et recevable en la forme ;
AU FOND :
1°/- Sur le moyen tiré de la violation des
articles 58 et 60 du CPCEA :
Considérant que, par ce moyen, les demandeurs au pourvoi reprochent aux juges du fond de n'avoir pas mené les investigations nécessaires qui prouvent la qualité de propriétaires, par succession, des héritiers B, sur le domaine litigieux ;
Que pourtant, l’huissier de justice, par un rapport versé au dossier et portant consultation des autorités administratives et judiciaires sur le règlement d’un conflit domanial en date du 25 octobre 2010, a suffisamment expliqué les faits de la procédure;
Que, par exemple, pour obtenir tous les documents relatifs à ce litige, il a été demandé au juge d’ordonner à Monsieur Ad Ac AG, le chargé des domaines du
documents et pour être auditionné pour plus de clarté, mais en vain car le juge n’a pas accédé à cette requête ;
Que pour ce motif l’arrêt encourt cassation, conclut le moyen ;
Considérant que les héritiers de feu C B, dans leur mémoire en défense du 17 Septembre 2012,n’ont pas répliqué à ce moyen ;
Considérant que les articles 58 et 60 du CPCEA disposent respectivement comme suit :
- Article 58:
« La procédure gracieuse est celle par laquelle, en l'absence de tout litige, le juge est saisi d'une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l'affaire ou de la qualité du requérant, qu'elle soit soumise à son contrôle ; Le juge intervient pour autoriser la mesure qui lui est demandée, pour constater ou homologuer certains actes importants » ;
Article 60 :
« Le juge procède à toutes les investigations utiles ;
Il peut entendre, sans formalité, les personnes susceptibles de l'éclairer, et spécialement celles dont les intérêts risquent d'être affectés par la décision » ;
Considérant qu’en l’espèce, des violences ont toujours été enregistrées entre les villages voisins des deux parties à propos de la parcelle litigieuse ;
Que pour trancher un tel conflit, le juge, malgré le caractère facultatif d’auditionner les personnes susceptibles de l’éclairer, devrait toutefois, pour éviter d’envenimer les susceptibilités, procéder, comme stipulé à l’alinéa 1 de l’article 60 susvisé, à toutes les investigations utiles sollicitées par l’une ou l’autre partie ;
Que pour avoir agi autrement, la cour a violé les dispositions de l’article 60 du CPCEA susmentionné et son arrêt, de ces chefs, encourt cassation et annulation ;
2°/- Sur le moyen tiré de la violation des articles 14 et 107 du CPCEA :
Considérant que ce moyen fait grief à l’arrêt querellé d’avoir passé outre les demandes des demandeurs au pourvoi, relatives d’une part, au rabat du délibéré à la suite de la récusation du juge de la première chambre civile de la cour d’appel au profit de la deuxième chambre, pour répliquer au procès-verbal de transport judiciaire du 23 Septembre 2011, et d’autre part, à cette réouverture des débats résultant du changement de formation survenu pour pourvoir entendre le géomètre qui a pratiqué le lotissement et prendre connaissance de tous les documents administratifs ignorés des parties ;
Que la 2ème chambre civile, elle aussi, a passé outre cette demande ;
Considérant que les héritiers de feu C B, n’ont pas répliqué également à ce moyen ;
Considérant que les articles 14 et 107 du CPCEA disposent comme suit :
- Article 14 :
«Le juge doit examiner tous les chefs de demande qui lui sont soumis. Il est tenu de statuer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui lui est demandé » ;
- Article 107 :
« Le président peut ordonner la réouverture
des débats. Il doit le faire chaque fois que les
parties n'ont pas été à même de s'expliquer
contradictoirement sur les éclaircissements
de droit ou de fait qui leur avaient été
demandés ;
En cas de changement survenu dans la
composition de la juridiction, les débats sont
repris de plein droit » ;
Considérant qu’en l’espèce les demandeurs au pourvoi ont effectivement obtenu la récusation du juge de la première chambre civile de la
cour d’appel de Conakry au profit de celui de
la deuxième chambre ;
Que ce changement de formation implique obligatoirement la réouverture des débats pour que les parties soient, à même, de s’expliquer contradictoirement sur tous les éclaircissements de droit et de fait en vertu de l’article 107 alinéa 2 susmentionné ;
Qu’ayant agi autrement, la cour a violé les
dispositions des articles cités au moyen et son arrêt, de ces chefs, encourt cassation et
annulation ;
3°/- Sur le moyen tiré de la violation des
articles 248, 249 al.2, 250 et 310 du
CPCEA pris ensemble :
Considérant que ce moyen reproche à la Cour d’appel de n’avoir pas accédé à sa demande
d’ordonner à l’agent du service de l’habitat la
délivrance de tous les actes détenus par lui
relatifs à ce dossier ;
Que seule la délivrance desdites pièces par ce
tiers au procès, pouvait éclairer toutes les
parties et même le juge ;
Qu'’ayant passé outre cette demande, la cour
viole les dispositions des articles
susmentionnés et son arrêt, de ces chefs,
encourt cassation, conclut le moyen ;
Considérant que les défendeurs n’ont pas répliqué à cet autre moyen et se sont contentés aux conditions de forme du pourvoi qu’ils ont soulevé ;
Considérant que les articles 248, 249 al.2, 250 du CPCEA disposent respectivement comme
suit :
- Article 248 :
«Si dans le cours d'une instance, une partie entend faire état d'un acte authentique ou sous seing privé auquel elle n'a pas été partie ou d'une pièce détenue par un tiers, elle peut demander au juge saisi de l'affaire d'ordonner la délivrance d'une expédition ou la production de l'acte ou de la pièce ;
La demande doit permettre d'identifier les actes et pièces » ;
- Article 249:
« La demande est faite sans forme ;
Le juge, s'il estime cette demande fondée, ordonne la délivrance ou la production de l'acte ou de la pièce, en original, en copie ou en extrait selon le cas, dans les conditions et sous les garanties qu'il fixe, au besoin à peine d'astreinte » ;
- Article 250 :
«La décision du juge est exécutoire à titre provisoire, sur minute s'il y a lieu » ;
- Article 310:
« Quiconque en est légalement requis est tenu de déposer. Les personnes qui justifient d'un motif légitime peuvent être dispensées de déposer. Peuvent s'y refuser les parents ou alliés en ligne directe de l'une des parties, ou son conjoint, même divorcé ;
Les agents diplomatiques ne sont pas obligés de donner leur témoignage » ;
Considérant qu’en l’espèce, la zone litigieuse a fait l’objet de deux lotissements contradictoires, le second ayant annulé le premier et dont les motifs de cette annulation sont totalement ignorés par les parties y compris la partie qui a intérêt avec le second lotissement ;
Que cette zone est devenue, aujourd’hui, une zone tumultueuse empreinte d’insécurité et de violences permanentes entre les jeunes des deux villages en conflit ;
Qu’il était, alors Jloisible pour le juge, conformément aux dispositions des articles cités au moyen, d’ordonner la délivrance desdites pièces, à la demande d’une partie qui fait état de ces actes, en l’occurrence les demandeurs au pourvoi ;
Que pour avoir passé outre cette demande,
l’arrêt attaqué mérite cassation de ces chefs ;
4°/- Sur le moyen tiré de la violation de l’article 23 all, 2 et 3 du CPCEA :
Considérant que ce moyen fait grief à l’arrêt querellé de n’avoir pas respecté le principe du contradictoire qui s’impose aux parties et au juge lui-même ;
Que les deux procès-verbaux de transport judiciaire n’ont pas été débattus contradictoirement, comme l’exige la loi, et,
demandeurs au pourvoi ;
Que les déclarations de Mr. Ae Z, un des témoins des demandeurs au pourvoi, ont été dévoyées pour des motifs inavoués ;
Que malgré tout, le juge a passé outre cette demande et a mis l’affaire en délibéré ;
Que devant la Cour d’appel, c’est le même scénario que les demandeurs au pourvoi ont connu ;
Qu’en conséquence l’arrêt encourt cassation, conclut le moyen ;
Considérant que Me Mohamed SYLLA n’a pas répliqué à ce moyen ;
Considérant que l’article 23 all, 2 et 3 du CPCEA dispose ainsi qu’il suit :
- Article 23 al.1,2et 3:
« Le juge doit en toutes circonstances, veiller
au respect du principe de la contradiction qui s'impose aux parties et à lui-même ;
Il ne peut retenir dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties, que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ;
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir, au
préalable invité les parties à présenter leurs
observations »;
Considérant que l’examen des pièces versées au dossier corrobore les critiques formulées ;
Qu'il échet, dès lors, d’accueillir le moyen
comme étant bien fondé ;
5°/- Sur la violation des articles 39 et 3 du
CFD :
Considérant que ce moyen reproche à la cour
d’appel de Conakry d’avoir déclaré la famille
B propriétaire des lieux litigieux alors
que cette propriété n’est pas constatée sur le
plan foncier, ni de la collectivité de Manéah, ni sur celui de Friguiady ;
Que, mieux, sa propriété ne fait l’objet
d’aucune mention sur le livre foncier de la
conservation foncière de la Préfecture de
Coyah ;
Que l’occupation du domaine litigieux a,
toujours été émaillée d’incidents graves allant souvent jusqu’à l’affrontement entre la
Communauté de Friguiady et la famille
B de Manéah ;
Que la Cour d’appel, en se comportant comme elle l’a fait, a violé la loi et son arrêt encourt
cassation, de ces chefs ;
Considérant que les héritiers de feu C
B n’ont pas répliqué au moyen ;
Que les articles 3 et 39 du CFD disposent
comme suit :
- Article 3:
« La propriété est constatée par l'inscription de l'immeuble sur le plan foncier tenu, pour chaque collectivité territoriale, au niveau de la commune urbaine ou de la communauté rurale de développement ;
Le propriétaire requiert en outre l'immatriculation de l'immeuble sur le livre foncier tenu par le service de la conservation foncière ;
Il est procédé dans les communes urbaines et dans les communautés rurales de développement à l'immatriculation de tous les droits fonciers » ;
- Article 39 :
« Sont propriétaires au sens du présent code:
1°) les personnes physiques ou morales titulaires d'un titre foncier,
2°) les occupants, personnes physiques ou morales, titulaires de livret foncier, permis d'habiter ou autorisation d'occuper,
3°) les occupants, personnes physiques ou morales, justifiant d'une occupation paisible, personnelle, continue et de bonne foi d'un immeuble et à titre de propriétaire. S'il y a lieu, la preuve de la bonne foi est apportée par tous moyens, et notamment par le paiement des taxes foncières afférentes au dit immeuble, par la mise en valeur de l'immeuble conformément aux usages locaux ou par une enquête publique et contradictoire ;
Ces dispositions ne s'appliquent pas aux dépendances du domaine public non déclassées » ;
Considérant que le domaine litigieux est situé sur le territoire géopolitique de Friguiady ( Préfecture de Coyah) et non sur celui de Manéah dans la même préfecture;
Que l’inscription sur le plan foncier, ni de la collectivité de Manéah, ni de celle de Friguiady et encore moins à la conservation foncière de la Préfecture de Coyah n’est constatée sur un titre de propriété quelconque ;
Que ni les héritiers de feu C B, ni la communauté villageoise ne prouvent leur propriété par un titre légalement établi ;
occupation paisible, personnelle, continue et de bonne foi et à titre de propriétaire ;
Que les enquêtes publiques menées par les autorités du service de l’habitat n’ont pas été portés à la connaissance des parties par le manque de témoignage desdites autorités qui craignent de se prononcer en faveur d’une partie ;
Que la Cour, en déclarant les héritiers propriétaire des lieux, sans se conformer aux règles domaniales prescrites, a violé les textes cités au moyen ;
D’où la cassation et l’annulation de l’arrêt attaqué ;
6°/- Sur la violation combinée des articles 13 du CPCEA ; 778, 779, 780 et 782 du Code civil :
Considérant que ce moyen reproche à la Cour d’appel d’avoir statué ultra petita en ne se conformant pas à l’assignation du O2 Avril 2009 dans laquelle les héritiers de feu C B n’ont point sollicité la propriété, par suite de la prescription acquisitive, mais au contraire, par la succession ;
Que cependant l’objet du litige ne peut être modifié par des demandes incidentes que si celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien de connexité suffisant ;
Que les articles 778, 779, 782 déterminent
la possession mais ne peuvent se fonder sur
la prescription acquisitive sans l’existence
des conditions éditées par l’article 780 ;
Considérant que les articles …susvisés disposent comme suit :
- Article 13 du CPCEA :
« L'objet du litige est la chose ou le résultat que l'on cherche à obtenir par une décision de justice. Il est déterminé par les prétentions respectives des parties qui sont expressément énoncées par l’exploit introductif et par les conclusions en défense ;
L’objet du litige ne peut être modifié que par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien de connexité suffisant » ;
- Article 778 du code civil :
« En vertu de ce qui précède on distingue 13 deux sortes de prescriptions; - la prescription acquisitive, ou usucapion, qui est un moyen d’acquérir par possession, durant un certain temps, la propriété d’un immeuble ou un droit réel immobilier comme, par exemple, un usufruit ou une servitude;
- la prescription extinctive qui consiste en la disparition, au bout d’un certain temps, d’un droit que son titulaire a omis ou négligé d’exercet » :
- Article 779 :
« Comme il a été dit dans l’article précédent, la prescription acquisitive s’acquiert au moyen de la possession. La possession est la détention ou la jouissance d’une chose ou d’un droit qu’une personne tient ou exerce par elle-même, ou par une autre personne qui la tient ou l’exerce en son nom » ;
- Article 780 :
« Pour pouvoir valablement prescrire, il est
interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ;
En principe, le temps de l’usucapion commence à courir le lendemain du jour de l’entrée en possession »;
-_ Article 781 :
« Les actes de pure faculté, c'est-à-dire ceux que la loi, la coutume ou un statut local donne la faculté de faire ou de ne pas faire ou d’en faire usage ou non, et les actes de simple tolérance, c’est-à-dire ceux de jouissance partielle que le propriétaire d’un fonds permet à ses voisins de faire, ne peuvent fonder ni possession, ni prescription acquisitive ;
Il en est de même pour les actes de violence, la possession utile ne commençant que lorsque la violence a cessé » ;
- Article 782 :
« Pour compléter une prescription on peut joindre à sa propre possession celle de celui dont on tient un droit, qu’on ait succédé à ce dernier à tire universel ou particulier, à tire lucratif ou à titre onéreux » ;
Considérant que de l’examen des pièces de la procédure, notamment de l’assignation du 02 Avril 2009, les héritiers de feu C B ont sollicité du tribunal de « dire et juger que les héritiers de C B représentés par Y Ad AH B sont propriétaires, par succession, du domaine de Somakhouré » ;
Que le juge d’appel, en déclarant les défendeurs au pourvoi, propriétaires des lieux par la prescription, a jugé ultra petita et son arrêt encourt cassation de ce chef ;
Considérant, par ailleurs, que les juges du fond ont fondé leurs décisions sur les articles 778, 779, 782 du code civil susmentionnés sans chercher à savoir si les conditions exigées par l’article 780 étaient remplies ;
Que le temps pour prescrire est de trente ans ;
Qu’or, il n’apparait, nulle part, la date d’où court cette possession dans le temps ;
Que la possession des héritiers B, comme dit plus haut, est émaillé d’incidents violents et d’affrontements violents avec les villages de Aa et de Somakhouré depuis 2003 ;
Considérant que l’arrêté n°006/P/2010 du 16 Février 2010 de Mr. le Préfet de Coyah, suite à la demande d’intervention de la jeunesse de Friguiady, adressée à cette autorité, remet en cause le caractère public de la possession de la famille B ;
Considérant qu’aucune des parties n’a produit un titre de propriété, la possession des héritiers B se voit amputée de la qualité essentielle soutenant la possession ;
Qu’il échet, dès lors, d’accueillir le moyen parce que bien fondé ;
7°/- Sur le moyen tiré de la violation de l’article 781 al.2 du Code civil :
Considérant que ce moyen reproche aux juges du fond d’avoir occulté les dispositions de l’article cité au moyen ;
Que le domaine litigieux est l’objet 15 d’incessantes violences entre les communautés de Friguiady, ensemble, avec Kolakhouré contre les héritiers de feu C B ;
Que les juges ont ignoré cette réalité en
fondant leurs décisions sur des faits qui ne
tiennent pas ;
Qu’en conséquence, ces décisions méritent cassation et annulation ;
Considérant que l’article 781 du Code civil
dispose :
« Les actes de pure faculté, c'est-à-dire ceux que la loi, la coutume ou un statut local donne la faculté de faire ou de ne pas faire ou d’en faire usage ou non, et les actes de simple tolérance, c’est-à-dire ceux de jouissance partielle que le propriétaire d’un fonds permet à ses voisins de faire, ne peuvent fonder ni possession, ni prescription acquisitive.
Il en est de même pour les actes de violence, la possession utile ne commençant que lorsque la violence a cessé » ;
Considérant qu’en l’espèce les autorités administratives locales et préfectorales ont été, à maintes fois, alertées pour règlement du présent conflit sans y parvenir ;
Que des incidents violents ont été enregistrés au niveau des populations concernées ;
Que les juges du fond auraient dû faire usage de cette disposition pertinente du code civil ;
Que l’ayant ignoré, l’arrêt attaqué encourt cassation et annulation de ces chefs ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et sur pourvoi ;
En la forme : Reçoit le pourvoi ;
Au fond : Casse et annule l’arrêt attaqué ;
Renvoie la cause et les parties devant la même cour autrement composée ;
Ordonne la restitution de la caution du pourvoi aux demandeurs du pourvoi ;
Met les frais et dépens à la charge des défendeurs ;
Dit que le présent arrêt sera publié au bulletin de la Cour Suprême ;
Ordonne sa transcription dans les registres à ce destinés.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la
Cour Suprême, les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le PRESIDENT, le CONSEILLER
RAPPORTEUR ET LE GREFFIER.